Interview de M. Daniel Cohn-Bendit, tête de liste des Verts aux élections européennes de 1999, dans "La Provence" du 2 juin 1999, sur le déroulement de la campagne électorale et son refus de se faire "enfermer dans un débat franco-français", ses relations avec Dominique Voynet et le score à atteindre pour les élections européennes.

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La Provence : Vous semblez plus serein qu'il y a deux mois. Ce « retour » en France était-il finalement plus difficile que prévu ?

Daniel Cohn-Bendit : « J'ai eu des moments difficiles, des périodes de doute. Il m'a fallu faire l'unité autour de moi. J'ai envie de faire de la politique européenne. Je n'ai pas d'arrière-pensées. Il m'a fallu le faire comprendre. Si j'ai le désir de siéger à Strasbourg, je ne recherche pas, pour après, un autre poste. Mon ambition s'arrête à l'Europe et j'en suis fier. »

L.P. : Vous critiquez beaucoup l'absence de convictions européennes des autres têtes de liste. Pensez-vous vraiment être le seul à avoir un discours cohérent sur l'Europe ?

D. C.-B. : « Non seulement je le pense mais je le revendique. Et le débat de dimanche dernier entre François Hollande et Nicolas Sarkozy a été, de ce point de vue-là, très éclairant. Je ne sais toujours pas ce que pensent l'un et l'autre de la construction européenne, ni même s'ils ont des idées sur la question. Je ne me laisserai pas, pour ma part, enfermer dans un débat franco-français. »

L.P. : Les attaques que vous avez proférées à l'encontre de Robert Hue s'inscrivaient pourtant bien dans ce type de débat et d'affrontement de personnes…

D. C.-B. : « C'était une erreur que je regrette. Cette polémique sur le "libéral libertaire" que j'étais censé être, n'avait aucun sens, mais c'était de ma faute. »

L.P. : Vous êtes en campagne depuis presque huit mois. N'est-ce pas un peu long ?

D. C.-B. : « Pas du tout. Il m'a fallu trouver mes marques, apprendre à travailler en équipe. J'avais besoin de tout ce temps. »

L.P. : Dominique Voynet aussi, semble-t-il ?

D. C.-B. : « C'est vrai. Au début, elle se méfiait. Elle avait peur que je veuille faire un hold-up sur les Verts. Que je lui tonde la laine sur le dos. Je crois qu'aujourd'hui elle a compris. Qu'elle a confiance en moi. Qu'elle respecte mes convictions et nos différences. Du coup, elle s'est détendue. »

L.P. : Quel est le score idéal que vous aimeriez atteindre ?

D. C.-B. : « À 7 %, ce serait bien. À 8 % ou 9 %, je serais content. Mais je me bats pour franchir la barre des 10 %. À Chaque réunion publique que nous faisons, il y a entre 500 et 1 000 personnes qui comprennent que l'Europe c'est mon truc. Que je ne fais pas de vent et qu'il y a une réelle cohérence dans mes propos. Dire aujourd'hui que l'Europe de demain doit être sociale, démocratique et écologique est une évidence que plus en plus de monde partage. »

L.P. : Êtes-vous optimiste sur l'issue de la guerre au Kosovo ?

D. C.-B. : « Je crois sincèrement qu'on a une chance d'arriver à une solution politico-diplomatique et j'attends beaucoup du voyage, aujourd'hui, à Belgrade, du président finlandais. Il faut parvenir à retour des Kosovars dans leur pays, encadrés par une force d'interposition. Tout le monde y a intérêt, les Russes comme les Américains. »