Déclaration de M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement des transports et du logement, sur la portion de l'A 86 entre Bobigny et Drancy, et sur la politique routière en Ile-de-France, Bobigny le 10 janvier 1998.

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Circonstance : Inauguration de la section Bobigny - Drancy de l'A 86, à Bobigny le 10 janvier 1998

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Monsieur le président du conseil régional,
Monsieur le président du conseil général,
Mesdames et Messieurs les élus,
Monsieur le préfet,
Mesdames et Messieurs,


Merci Monsieur Birsinger pour les mots chaleureux et pour l’accueil que vous m’avez réservé en votre qualité de de député de la circonscription de Bobigny­Drancy. En votre qualité de maire aussi puisque, comme Gil Conte, maire de Drancy, vous présidez aussi aux destinées de la gestion communale balbynienne de la ville chef-lieu du département de la Seine-Saint-Denis.

Avant de parler plus précisément de l’A86, des équipements routiers et de transports, permettez-moi de faire une petite parenthèse.

Lorsque je suis appelé à procéder à une inauguration d’un équipement important, qui a nécessité des années de travaux et d’efforts, j’ai toujours un petit peu de scrupules. Je me dis en effet, après tout, j’inaugure quelque chose qui a été voulu par mes prédécesseurs puisque je ne suis ministre de l’équipement, des transports, et du logement que depuis sept mois. Aujourd’hui, j’ai moins de scrupules car figurez-vous que lorsqu’avec ma famille nous sommes arrivés en région parisienne – ici – une des premières manifestations à laquelle j’ai participé fut pour la réalisation de l’A86 et pour le métro !

Je me félicite donc d’autant plus de cet aboutissement qui a vu, après bien des aléas, des vicissitudes, des luttes, se concrétiser une réelle convergence d’efforts et de moyens des différents partenaires État, région, département, villes avec les citoyens, les associations, les élus.

Cette nouvelle infrastructure d’une longueur de près de cinq kilomètres permet le bouclage de l’A86 en Seine-Saint-Denis. C’est concrètement 58 km de voie rapide continue sans feu rouge entre Nanterre et Versailles en passant par l’Est de la capitale qui sont ainsi ouverts à la circulation automobile.

Cette rocade, dont le bouclage total est prévu dans l’Ouest à l’horizon 2003, ne doit pas faire croire que l’A86 concerne essentiellement les trafics de transit contournant l’Île-de-France.

Elle sert principalement aux déplacements de banlieue à banlieue qui sont ceux qui connaissent désormais la plus forte croissance. Elle déleste ainsi la voirie locale d’une partie importante de son trafic. Ceci est particulièrement vrai pour la RN 186 qui pourra désormais être rendu aux échanges locaux et aux transports en commun.

Cette autoroute est sans conteste un outil essentiel de développement économique de la région Île­-de-France, elle a de plus parfaitement pris en compte les contraintes d’environnement, plus particulièrement sensibles dans les secteurs urbanisés.

Mais si vous le permettez, faisons un peu d’histoire.

Dans les années 60, les premières études conduisent à un tracé aérien en parallèle à la RN 186 à travers Bobigny, Drancy et La Courneuve. Ce projet est, une première fois, déclaré d’utilité publique en 1970. Il suscite de très fortes oppositions de la part des riverains et des élus locaux qui réclament une autoroute en tranchée. À l’expiration de la déclaration d’utilité publique en 1975, de nouvelles études sont engagées. Elles aboutissent en 1978 à de nouvelles variantes de tracé le long de la rue Diderot et de l’usine Norton à Drancy, c’est-à-dire le tracé actuel, et à l’enfouissement de l’autoroute à Bobigny avec des couvertures légères partielles.

Les riverains et les élus constatent des avancées importantes, mais exigent néanmoins une autoroute totalement couverte.

Néanmoins, deux déclarations d’utilité publique sont prises en 1979 et en 1980.

Les comités de riverains refusent énergiquement ces dispositions et obtiennent un gel du projet et des études entre 1984 et 1989.

La DDE remet l’ouvrage sur le métier en 1989 et de nouvelles études sont soumises à la concertation en 1991 qui entraînent des discussions souvent animées avec la population, les comités de riverains, les élus locaux, dont je faisais partie.

Ceux-ci insistent notamment pour qu’en aucun point le bruit de l’autoroute ne soit supérieur à 60 dBA.

De multiples simulations sur maquette sont entreprises pour aboutir à des protections phoniques supplémentaires en 1992.

En 1992-1993, la DDE étudie de nouvelles variantes de protections acoustiques et de solutions techniques.

Finalement, le ministre de l’époque décide le 19 mai 1993 de retenir la couverture totale à Bobigny et la couverture du passage au-dessus des voies ferrées à Drancy.

Entre les premières études et 1993, il s’est passé à peu près vingt ans pour arriver à ce projet. Vous le voyez, l’intervention citoyenne des habitants a été déterminante pour la définition du projet. Leur aspiration à préserver une qualité de vie était évidemment légitime. Je partage totalement l’attente des populations à mieux vivre dans la ville et toute la politique des transports que je souhaite promouvoir en milieu urbain tend vers cette direction. Dans leur lutte, les habitants ont pu compter sur les élus de ce département en particulier mes amis Georges Valbon et Maurice Nilès qui furent maires de Bobigny et Drancy ; Georges Valbon ayant également été président du conseil général.

Une fois ce projet de bouclage arrêté, il convenait d’engager rapidement les travaux.

Le premier coup de pioche a été donné en juillet 1993.

Après quatre ans et demi de travaux menés à un rythme très soutenu, l’A86, maintenant bien insérée dans son environnement, sera livrée à la circulation automobile dès demain.

Pour arriver à ce résultat il a fallu dépenser trois milliards cent millions de francs, ce qui représente un coût au kilomètre de 660 millions de francs.

Il s’agit là, incontestablement, d’une dépense considérable (l’équivalent d’une centaine de kilomètres d’autoroute à 2 x 2 voies, en rase campagne), mais ce montant est justifié par les multiples précautions prises en matière d’insertion urbaine et de protections de l’environnement.

La section Bobigny-Drancy est en effet couverte sur les deux tiers de sa longueur.

Au-delà de ces chiffres, il faut saluer la qualité remarquable des ouvrages et notamment du viaduc de Drancy qui a reçu en 1997 le Ruban d’or au palmarès des paysages routiers.

Il reste beaucoup de travaux à réaliser sur l’A86 dans le secteur.

Permettez-moi de les citer rapidement.

Travaux d’élargissement du tronc commun A3-A86 à Bondy et Noisy-le-Sec qui viennent de démarrer et qui doivent permettre, avec l’installation de protections phoniques, de diminuer très sensiblement le bruit de l’autoroute ; travaux d’élargissement de 2 x 2 voies à 2 x 3 voies entre l’A15 et le Stade de France ; doublement du viaduc de franchissement du canal Saint-Denis dont les travaux seront engagés dès cet été. Par ailleurs, vous connaissez l’intérêt que je porte à la sécurité routière. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les travaux de remise à niveau de l’éclairage de l’A3 démarreront dans les jours prochains.

L’ensemble de ces travaux, dont le coût s’élève à près de 500 millions de francs permettra, j’en suis sûr, d’améliorer encore la fluidité de la circulation dans tout le secteur et évitera l’afflux du trafic de transit sur la voie locale.

Ces investissements contribuent à combler un retard en matière d’infrastructure routière qui a longtemps pénalisé le département de Seine-Saint-Denis. Des réalisations seront faites également dans le domaine des transports collectifs, en partenariat avec la région et les collectivités locales. Je pense en particulier à la tangentielle Nord, aux projets de tramway que je souhaite promouvoir en coopération avec le conseil général que préside mon ami Robert Clément.

Par-delà la réalisation de cette autoroute, il me paraît important de souligner que l’État et les collectivités locales éprouvent des difficultés croissantes pour financer les investissements d’infrastructures de transport nécessaires afin de faire face à l’augmentation de la demande dans les grandes agglomérations.

Cela est particulièrement vrai en Île-de-France où l’on prévoit un accroissement de tous les déplacements banlieue-banlieue de 76 % d’ici horizon 2015.

La priorité que je donne au développement des efforts en faveur des réseaux de transport en commun ne suffira pas cependant pour répondre à cette forte progression de la demande.

Dans ce contexte, la réalisation de nouveaux projets routiers en Île-de-France constitue une nécessité.

Les quatre objectifs qu’il convient de poursuivre sont à mes yeux les suivants :
– éloigner le trafic automobile du centre et de la petite couronne en achevant l’A86, en poursuivant la réalisation de l’A104 dite la Francilienne et, d’une façon générale, favoriser tous les investissements de rocade. Cette priorité de rocade explique d’ailleurs pour l’essentiel les raisons qui m’ont amené à ne pas retenir le prolongement de l’A16 en Seine-Saint-Denis et, comme vous le savez, j’ai demandé l’arrêt des études et des procédures entre le BIP et l’A86 ;
– permettre la complémentarité entre les modes de transport. Je suis convaincu qu’en milieu urbain une priorité doit être donnée aux transports collectifs : pour solutionner les problèmes d’environnement, de circulation, de pollution… Mais loin de moi l’idée d’opposer la voiture aux transports collectifs. Les deux ont des avantages et aussi des coûts. Le confort, la souplesse d’utilisation sont des atouts indiscutables pour la voiture particulière qui sont évidemment autant d’éléments incontournables pour le choix modal ;
– relier l’Île-de-France autres régions dans un souci de continuité et de cohérence au réseau national tout en favorisant l’accès aux aéroports ;
– enfin, réhabiliter les autoroutes urbaines anciennes et procéder à la requalification des routes nationales qui accueilleront un système de transport en commun en site propre. De ce point de vue, je tiens à souligner que j’attache une importance particulière aux investissements de requalification urbaine et d’amélioration de l’environnement. Je proposerai que des crédits significatifs y soient consacrés dans le prochain contrat de plan État-région.

Pour réaliser ces objectifs, une solution doit être trouvée dans le cadre de la réflexion en cours du financement des routes et autoroutes.

Avec la présente réalisation, l’A86 a d’ores-et-déjà atteint l’objectif que s’étaient fixé ses concepteurs : permettre de relier de manière directe et rapide le chef-lieu de la Seine-Saint-Denis aux chefs-lieux des départements voisins, Créteil et Nanterre.

Je ne saurai conclure sans féliciter tous les acteurs de cette belle réalisation : ouvriers, techniciens, ingénieurs, architectes, toutes ces femmes et ces hommes des entreprises, bureaux d’études et administrations qui ont su mettre toute leur énergie et tout leur talent à réaliser un ouvrage de grande qualité répondant aux exigences de nos concitoyens.

Je voudrais également féliciter tous les élus, les associations et les populations qui ont œuvré avec détermination pour améliorer le projet, et qui ont ensuite subi les inconvénients liés à ce grand chantier. Ils pourront dès demain bénéficier d’une amélioration sensible de leur cadre de vie et de leurs conditions de déplacement.

Il s’agit du résultat de vingt années d’efforts collectifs, et dont tous les acteurs quels qu’ils soient, peuvent être fiers. Mais, comme je l’ai rappelé, cette réalisation en appelle d’autres car les aspirations de ce département, auquel vous connaissez mon attachement, sont tout à fait légitimes. Bien sûr, pour la Seine-Saint-Denis, avec le grand stade, la coupe du monde de football sera un grand événement et contribuera à son rayonnement. Mais c’est bien là aussi la confirmation que, pour l’avenir, il faudra compter sur le département de la Seine-Saint-Denis.

Permettez-moi en terminant mon propos de vous souhaiter à chacune et à chacun d’entre vous mes meilleurs vœux.

L’actualité sociale que nous venons de vive concernant le drame du chômage met au premier plan l’objectif du gouvernement qui est celui de la lutte pour l’emploi.

Ces situations de détresse que connaissent des centaines de milliers de familles, des millions qui le subissent ou le craignent est insupportable.

« Face à l’angoisse qui s’exprime, il nous faut tout à la fois, disait hier le Premier ministre, trouver des réponses immédiates, c’est le sens des aides d’urgences et de la création du “fond d’urgence sociale” affecté d’un milliard de francs et savoir ouvrir les chemins de l’espoir. »

Cela doit passer par la poursuite des efforts de justice sociale, par la création de centaines de milliers d’emplois-jeunes, par la réduction de la durée du travail à 35 heures, par la croissance de la consommation et des investissements.

On le voit concrètement ici : la réalisation de cette portion d’autoroute a nécessité des milliers d’emplois. Alors, pour les réalisations futures, pour vous tous,

Bonne année !