Texte intégral
Les attentes des Français sont claires. Ce sont les mêmes qui, il y a deux ans, ont fait échec à la droite et conduit les forces de gauche et de progrès au Gouvernement : une majorité de l’opinion constate que la priorité est toujours à la finance et réclame que ce soit le tour du social. Le caractère intact de ces attentes conduit à se dire que les deux années passées ne les ont pas pleinement satisfaites.
Cela appelle d’autant plus de réflexion qu’au meeting européen des partis socialistes à Paris on a entendu clamer haut et fort qu’ils voulaient l’Europe sociale et qu’ils avaient le pouvoir. Le rapprochement de ces deux proclamations sonne étrangement : on peut se demander ce qu’il manque à cette situation où dominent les partis socialistes pour passer des paroles aux actes. Il manque le poids de celles et ceux qui sont au coeur du mouvement social : syndicalistes, associations civiques et citoyennes, communistes… C’est de ce poids, aujourd’hui encore insuffisant, que dépend la priorité d’aller enfin à l’emploi, à la formation, à la lutte contre les inégalités et à la défense de la protection sociale. La droite en a conscience et veut profiter de ces élections pour permettre au libéralisme de marquer encore davantage de son empreinte le cours des événements. Cette pression ne vient pas que du RPR ou de l’UDF. L’hebdomadaire L’Événement présentait la semaine dernière un gouvernement fiction de Lionel Jospin, allant de Cohn-Bendit à l’idéologue Alain Minc, sans communiste ; gouvernement qualifié de « social-libéral ». C’est une telle composition à l’allemande qui, perdant le « social » en route, a contraint Oskar Lafontaine, jugé trop à gauche, à démissionner. En écho, on flatte la liste d’Arlette Laguiller qui tire la demande de radicalité hors du champ institutionnel, et la classe politique, comme on dit parfois, n’est guère dérangée. À l’opposé de ce repli, la liste conduite par Robert Hue, constituée d’un large éventail de ce mouvement social, annonce clairement sa volonté de le voir ne pas rester privé d’une expression politique et électorale. C’est peut-être cette voix qui manquait hier soir à la rencontre Hollande-Sarkozy pour dépasser les déclarations d’intention et permette de débattre de mesures plus profondes à prendre. La posture charnière du Parti communiste entre ce mouvement social et la majorité fait que les résultats de la liste Bouge l’Europe ! auront des effets directs sur le comportement du Parti socialiste et du Gouvernement. Pris ainsi, le scrutin du 13 juin peut contribuer à changer le cours des choses.