Article de M. Jacques Godfrain, ministre délégué à la coopération, dans "Jeune Afrique économie" du 17 mars 1997, sur la politique d'aide au développement de l'Afrique pour endiguer l'immigration clandestine, intitulé "De quoi parle-t-on ?".

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Média : Jeune Afrique

Texte intégral

« L'immigration mérite mille fois mieux que des slogans ou des manifestations. Elle est beaucoup plus qu'un mouvement de population, un voyage ou un séjour. Elle est tout sauf une simple statistique hasardeuse. L'immigration en France, sous quelque forme que ce soit, est une espérance pour beaucoup. Espérance d'un revenu, pour ceux qui quittent leur sol natal, d'un mandat pour ceux qui restent au pays, d'un mieux-être pour la famille, le village, les centaines d'ayant-droits qui ont placé leurs espoirs dans ce billet d'avion pour Paris et dans les promesses du "passeur".

« Cette espérance doit être prise en compte dans le débat politique. Mais il faut se garder d'un esprit d'ouverture systématique ou d'un repliement sur soi excessif, en cherchant le juste milieu par la mise en place d'une immigration contrôlée et raisonnée. Sur les banderoles qui précédaient les manifestations, il ne manquait qu'un slogan, le seul qui aurait dû s'y trouver : "Non au sous-développement !" Qui, dans ce débat actuel, s'est soucié de la véritable raison des mouvements migratoires ? Sans doute le tohu-bohu et l'idéologie devaient-ils l'emporter sur les réalités des peuples africains. Qui s'est posé la question de savoir pourquoi vouloir quitter sa patrie ?

« Ce que la France et l'Afrique engagent ensemble en matière de coopération est la véritable réponse à ce lancinant problème. Lorsque nos coopérants, nos experts, nos techniciens, nos opérateurs privés se lancent dans des programmes agricoles, des formations, des créations de centre de production villageois, leur rôle vis-à-vis de l'immigration est considérable. Chaque franc investi au cœur de l'Afrique correspond à un besoin, et se traduit par un désir moindre de partir, contribuant ainsi au tarissement des filières clandestines. »

La France est en première ligne au large des côtes africaines. Les guerres, les désordres ou les « ruptures » de ce grand continent auront fatalement, bientôt, des répercussions sur notre propre sol européen. Le seul et véritable combat qui vaille est celui qui est engagé contre le sous-développement.