Texte intégral
Sud-Ouest : Pensez-vous qu’il y aura en France, la semaine prochaine, une ou plusieurs régions présidées pour la première fois par des élus communistes ?
Robert Hue : N’allons pas trop vite en besogne. Tout indique que de nombreuses régions peuvent être gagnées par la gauche plurielle. Mais le résultat dépend de notre activité à convaincre, jusqu’à samedi soir, un maximum d’électrices et d’électeurs. C’est cela qui m’occupe aujourd’hui.
Pour répondre plus à votre question, attendons la semaine prochaine… Je dirais simplement qu’il faudra le 20 mars, au moment d’élire les exécutifs régionaux, restituer au sein de ceux-ci la diversité qui aura permis de l’emporter. Cela vaut pour toutes les responsabilités et notamment les présidences.
S.-O. : Passé le temps des élections, le ciment de la majorité plurielle sera-t-il toujours aussi solide ? Ne risque-t-il pas de se craqueler sur la question européenne ?
R. H. : J’ai le sentiment au contraire qu’avec cette campagne la majorité se consolide. Surtout si nous avons un bon résultat. Ce qui n’empêche pas le débat. La majorité est solide justement parce que le « pluriel » est assumé par tous. Et parce qu’elle est à l’image de celles et ceux qui lui apportent leur confiance. Les électeurs ne nous demandent pas de gommer notre originalité. Au contraire, ils nous demandent d’être nous-mêmes, d’être unitaires et constructifs. Quant à l’Europe, les différences sont connues. Il y a beaucoup d’efforts à faire pour avancer dans les réorientations de l’Europe, de la finance vers le social, l’emploi, vers une Europe qui n’entrave pas le changement dans notre pays. Ce n’est pas facile, mais nous en avons la volonté. Débattre publiquement des choix à faire, c’est respecter les citoyens, c’est faire appel à leur intelligence. Et ça marche !
S.-O. : Estimez-vous prématuré le débat sur la répartition des fruits de la croissance ?
R. H. : Pas du tout. Ce débat est d’ailleurs déjà engagé, et il est bien qu’il en soit ainsi. Il doit porter, à mon sens, sur la répartition de la croissance et sur les moyens de la soutenir. Les deux choses ne sont d’ailleurs pas contradictoires mais complémentaires. Le début de reprise de la consommation a, parmi d’autres facteurs, permis une amorce de relance de la croissance. Eh bien, je pense qu’il faut persévérer dans cette voie et stimuler ce mouvement par l’augmentation des salaires, des retraites et de minima sociaux. Plus encore, je pense que la condition d’une croissance durable et saine passe par le relèvement sensible du pouvoir d’achat.
S.-O. : Europe, État, région, département, groupement de communes… N’y a-t-il pas un échelon de trop ?
R. H. : Le fait régional est à présent largement admis dans notre pays. Vous évoquez un « échelon » de trop. Les collectivités locales ne peuvent pas être assimilées à de simples échelons administratifs. Ce sont des assemblées élues, dotées de compétences précises. Supprimer certaines, d’entre elles, ce serait, à coup sûr affaiblir la démocratie sans aucune garantie de meilleure efficacité.
Je pense qu’il est plus pertinent de développer des coopérations beaucoup plus audacieuses entre collectivités. C’est une nécessité. Mais, j’y tiens beaucoup, ces coopérations doivent être respectueuses du principe d’autonomie. C’est essentiel pour permettre aux citoyens et aux élus d’exercer des pouvoirs réels. Sous prétexte de simplification et d’efficacité, ne mutilons pas ce qui constitue une originalité et une richesse de la démocratie de notre pays.