Texte intégral
Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs,
Au moment d’ouvrir les travaux de cette table ronde consacrée à la formation du conducteur, je voudrais préciser notre démarche, nos intentions et le sens de notre action.
Je suis très attaché au principe sur lequel nous avons fondé depuis un an et demi la politique de sécurité routière : l’appel à la responsabilité individuelle des usagers de la route.
Il s’agit d’abord de convaincre pour faire respecter les règles de sécurité ; il s’agit ensuite de mieux appliquer les dispositifs existants, plutôt que de céder à la facilité en élargissant un arsenal réglementaire déjà bien fourni et en imposant des contraintes supplémentaires.
Cette politique de prévention s’appuie sur plusieurs leviers : l’information, le contrôle et, bien entendu, la formation.
L’éducation des enfants à la sécurité routière et la formation des conducteurs permettent d’agir en profondeur et sur le long terme. J’ai conscience qu’il s’agit d’une action difficile dont les fruits sont longs à recueillir et dont les résultats sont difficilement mesurables. Je n’ignore pas non plus que dans ce domaine, les chercheurs ont aujourd’hui davantage d’incertitudes que de preuves, plus d’interrogations que de réponses. J’ai cependant la conviction qu’on ne fait jamais inutilement appel à l’esprit et à l’énergie des individus.
Si nous voulons, en matière de sécurité routière, obtenir des progrès plus durables et plus significatifs – et chacun sait dans ce domaine combien les progrès sont fragiles et toujours insuffisants –, nous devons engager une amélioration constante de nos formations, avec pour objectif, en commençant dès le plus jeune âge, de former des citoyens capables de comprendre les impératifs de sécurité et de rester en toutes circonstances vigilants sur la route. Cela n’est pas une pétition de principe. Nous savons tous en effet quelle peut être la portée de la petite phrase d’un enfant en voiture qui rappelle à ses parents de ne pas aller trop vite ou de boucler leur ceinture. C’est avec de tels exemples en tête que nous pouvons travailler à un processus continu de sensibilisation et de formation, depuis le plus jeune âge, jusqu’au perfectionnement des conducteurs expérimentés.
Dans cet esprit, le Conseil des ministres du 26 juin dernier a décidé de mettre en place une table ronde chargée d’élaborer un ensemble cohérent de propositions concernant la formation des usagers de la route et la formation des conducteurs. Il ne s’agit pas de bouleverser la préparation au permis de conduire, mais de travailler à des améliorations concrètes et à des objectifs simples.
Un million de personnes passent chaque année le permis de conduire. C’est un examen de masse qui concerne tout une classe d’âge. On ne peut pas d’un coup de baguette magique en changer les modalités, mais on doit chercher à les améliorer.
On peut faire mieux pour sensibiliser les enfants et les jeunes : l’apprentissage de la sécurité routière, c’est l’école de la vie en société. Beaucoup de parents et d’enseignants s’impliquent déjà, je souhaite que vous nous fassiez des propositions pour aller plus loin.
L’apprentissage anticipé de la conduite pourrait sans doute être rendu plus attractif et plus commode : moins de 15 % des jeunes utilisant cette formule pour passer leur permis, ce n’est pas satisfaisant, il faut identifier les freins actuels et les incitations possibles.
On peut trouver des idées pour amorcer la mise en place de formations post-permis. Des expériences existent. Il faut chercher comment les développer et comment, par exemple, inciter les conducteurs impliqués dans un accident à les suivre.
De nouvelles technologies se développent, des partenariats se nouent sur le terrain, au sein des instances professionnelles des réflexions s’engagent sur la qualité des formations, des entreprises se mobilisent sur la prévention du risque routier, vous ne manquerez pas de sources de propositions et d’idées pour nourrir et actualiser vos réflexions. Je vous invite à les confronter aux expériences des autres pays.
J’ai confié la présidence de cette table ronde à M. Jean Verre, président honoraire d’Esso France, et ce choix mérite quelques commentaires.
Esso France et son président se sont en effet illustrés depuis dix ans par la mise en œuvre d’une politique globale de sécurité qui intègre de manière exemplaire le risque routier. Si cette préoccupation fait depuis longtemps partie de la culture de l’entreprise, Jean Verre n’y est pas pour rien et son mérite est au moins triple : d’abord, il a toujours considéré comme relevant de sa propre responsabilité la conception et la mise en œuvre d’une telle démarche ; ensuite, il a conduit cette action avec ténacité, continuité et méthode en dégageant les moyens nécessaires ; enfin, il a obtenu des résultats tout à fait remarquables depuis 1988 auprès des salariés du groupe Esso.
Voilà un bel exemple de cohérence entre les intentions et les actes, et de mariage réussi entre une grande ambition et les exigences du réalisme ; vous comprendrez aisément que Jean Verre réunit les qualités essentielles qui laissent augurer du succès vos travaux : motivation, compétence, autorité, sens des réalités concrètes.
En tant que représentant de ce qu’il est convenu d’appeler la « société civile », nul doute qu’il saura apporter des points de vue nouveaux et j’irai jusqu’à dire une fraîcheur d’expression, qui devrait être salutaire dans un domaine encore trop réservé aux spécialistes alors qu’il intéresse chacun d’entre nous.
Continuité, cohérence, progressivité, mais aussi simplicité, commodité et réalisme : voilà les axes auxquels la table ronde devra se référer pour formuler les propositions que M. Verre m’adressera.
Je voudrais rappeler trois points qui concernent son fonctionnement.
Je souhaite tout d’abord que la concertation soit large et approfondie entre les acteurs : usagers, administrations, organisations professionnelles et syndicales, assureurs et organismes financiers, associations, experts. Elle doit se nourrir des actions de partenariat déjà menées et elle doit conduire à les développer.
En deuxième lieu, j’invite les groupes de travail à se confronter aux réalités du terrain, à rencontrer les partenaires locaux de la sécurité routière, d’autant que certaines de vos préconisations exigeront sans doute d’être expérimentées sur quelques sites avant une évaluation et une éventuelle généralisation.
Enfin, nous souhaitons recueillir vos propositions pour le 30 avril. Ce n’est pas un délai trop long si l’on considère le nombre d’acteurs concernés, la diversité des actions possibles et la nécessité d’en évaluer les conditions de réalisation.
J’estime à sa juste valeur l’effort qui vous est ainsi demandé mais j’ai la certitude que vous ne ménagerez ni votre temps ni votre énergie pour que des progrès significatifs soient accomplis en matière de formation des usagers de la route et de formation des conducteurs.
Voilà, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, ce dont je souhaitais vous faire part dès le démarrage de ces travaux. Je vous remercie d’avoir répondu à mon appel et je vous remercie pour le travail que vous allez accomplir.