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RTL : F. Bayrou réaffirmait ce matin, sur RTL, son opposition au port du foulard à l’école. Évoquant la décision du Conseil d’État, il disait que c’était une opinion et non pas une jurisprudence. Et le ministre de l’éducation nationale envisageait un décret, voire un projet de loi ?
L. Poniatowski : Je fais partie de ceux qui ont demandé qu’il y ait un projet de loi qui, très clairement, interdise le port du voile dans l’école. Nous sommes dans une situation totalement bloquée. Le Conseil d’État, de temps en temps, dit : « oui au port du voile » ; à d’autres moments, dit : « non. » Récemment, un tribunal administratif – il s’agit de celui de Grenoble – a dit : « non au port du voile, dans une école d’Albertville », alors que le proviseur de l’établissement avait tout simplement suivi le règlement donné par Monsieur Bayrou. Donc, on est dans un vague complet. Je pense qu’il faut qu’il y ait une loi très claire.
RTL : Vous, vous dites plutôt une loi, mais certains disent : avec un projet de loi, une proposition de loi, il y a le risque d’une division de la France et d’une bataille, ce qui attiserait les passions sur l’islam.
L. Poniatowski : Il vaut mieux qu’il y ait débat au Parlement, une fois pour toutes, et que la règle soit claire, plutôt que débats dans plein de lieux différents français, comme on l’a vu, à Albertville, récemment : on voit des manifestations devant l’établissement. C’est beaucoup plus grave. Il vaut mieux un débat parlementaire.
RTL : Autre aspect de l’actualité : l’ISF. Le Sénat vote une diminution de l’impôt sur la fortune, le bureau du RPR n’y est pas très favorable. À l’UDF, qu’en dit-on ?
L. Poniatowski : Nous sommes partagés. Personnellement, je n’y suis pas tellement favorable. Disons que, psychologiquement, ce n’était pas le moment de remettre ce dossier-là sur le tapis. Par contre, sur le principe, je suis, moi, favorable à la baisse du taux des impôts, qu’il s’agisse de l’ISF, l’impôt sur le revenu, la taxe professionnelle, ou les charges sociales. J’aimerais bien qu’il y ait un débat beaucoup plus important. Je considère que nous sommes en train de mourir sous le poids de ces charges et impôts variées, y compris les taxes locales. Ouvrons un débat autrement plus large que simplement l’ISF.
RTL : L. Poniatowski, le président Chirac doit-il parler ?
L. Poniatowski : Oui, je crois. Je crois qu’il faut qu’il parle. Vous rappeliez, tout à l’heure, qu’A. Juppé avait annoncé qu’il resterait jusqu’en 98 pour mener ce combat. Ce n’est, bien sûr, pas à moi de décider…
RTL : On va y revenir : c’est la petite phrase à La Croix : « je mènerai le combat des législatives de 98. Je le mènerai pour le gagner, et puis je partirai. »
L. Poniatowski : Il y a, incontestablement, en ce moment, un problème de manque de confiance. Il n’y a qu’à voir les chiffres des sondages. Je crois que le président de la République – bien sûr, ce n’est pas à moi d’exiger qu’il parle, il fait ce qu’il veut – mais s’il veut regagner la confiance, surtout dans une période où on mène des réformes, je dirais courageuses, et donc, forcément impopulaires, en même temps, on a besoin de cette confiance, sinon, nos réformes ne réussiront pas, et pour ramener la confiance, je pense qu’il serait bon que le président de la République s’adresse aux Français. Je ne suis pas sûr que cela suffise.
RTL : Et les trois boutons évoqués par F. Léotard, le président de l’UDF : dissolution, référendum ou remaniement. Ils en sont où ?
L. Poniatowski : Ce n’est pas à moi de décider, là non plus, si c’est vraiment la marge de manœuvre du président de la République, à lui de trancher, et de décider.
RTL : La majorité, à nouveau remuée : débat relancé sur la monnaie et la construction européenne, avec les déclarations de V. Giscard d’Estaing envisageant le décrochage du franc et du mark ?
L. Poniatowski : Ah ! Ah ! Il a touché, il a évoqué un sujet tabou. Eh bien ! il a eu raison. Il a eu raison, parce que, je suis persuadé qu’une partie de nos maux – bien sûr, pas tous, il ne faut pas tomber dans la caricature – est probablement le fait que nous collions à ce point au mark, qu’il y ait une surévaluation du franc et du mark en même temps ; ça nous coûte cher. Mais on n’a pas tout dit. On a repris simplement la petite phrase provocatrice de Giscard. Il a quand même dit, dans sa déclaration, qu’il souhaitait rester à l’intérieur du système monétaire européen, qui donne une marge de manœuvre de plus ou moins 15 % ; c’est très large. Ça permet de faire des choses et à ça permet, peut-être, de faire redémarrer la croissance. Je suis ravi qu’il y ait au moins quelqu’un qui ait osé évoquer le sujet. En plus, quand c’est un ancien président de la République, ça se remarque, bien sûr ! Je souhaite que, maintenant, on aborde le sujet concrètement : est-ce que nous devons être totalement à la charge ou à la traîne du mark ; est-ce que nous devons avoir une marge, est-ce que nous pouvons avoir une marge de manœuvre, une marge de liberté ? Je le pense et j’aimerais qu’on en tienne compte.