Interview de M. Alain Lamassoure, ministre délégué au budget et porte-parole du gouvernement, dans "sud-Ouest" le 3 janvier 1997, sur les conditions de participation à la monnaie unique et sur l'accord de Dublin sur le pacte de stabilité et de croissance entre pays de la future zone "euro".

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Média : Presse régionale - Sud Ouest

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Sud-Ouest : 1997 servira de test pour la désignation des participants à l’euro. Au vu des résultats de 1996, à quelles conditions la France respectera-t-elle ses engagements ?

Alain Lamassoure : Compte tenu du budget qui vient d’être voté pour 1997 et de la bonne exécution du budget de 1996, la France devrait remplir toutes les conditions pour participer à la monnaie européenne au 1er janvier 1999. Nous remplissions déjà quatre conditions sur cinq ; un taux d’inflation très bas, un franc stable, des taux d’intérêt peu élevés et un endettement relativement faible. La dernière condition, qui est le déficit de l’État, devrait être satisfaite, puisque ce déficit est passé de 6% du produit intérieur brut, fin 1994, à 4% fin 1996, et qu’il ne dépassera pas 3% à la fin de cette année.

Sud-Ouest : Malgré un nouveau dérapage des comptes sociaux en 1996 ?

Alain Lamassoure : Oui, tout cela a bien été pris en compte.

Sud-Ouest : Si la croissance devait être inférieure aux prévisions du gouvernement, la France aurait-elle encore une chance d’être au rendez-vous ?

Alain Lamassoure : Notre prévision de croissance pour cette année est considérée comme relativement pessimiste par des organismes internationaux tels que l’OCDE ou le Fonds monétaire international qui prévoient un taux de croissance plus proche de 2,5% que de 2,3% sur la base desquels nous avons bâti le budget de 1997.

Si par hasard la croissance devait être inférieure, nous ferions des économies supplémentaires. Après tout, l’exemple de 1996 a montré qu’en dépit d’une croissance inférieure à ce qui était prévu, nous étions capables de maîtriser le déficit.

Sud-Ouest : Après les économies faites l’an passé, est-il encore possible de réduire les dépenses sans affecter la croissance ?

Alain Lamassoure : Des économies sont toujours possibles. Tant notre expérience que celle de nos partenaires ont démontré que lorsque des pays connaissent un déficit élevé, ce sont les économies budgétaires et la réduction de ce déficit qui contribuent à redonner confiance et donc à relancer la croissance.

Sud-Ouest : Le sommet européen de Dublin a donné la version définitive du pacte de stabilité et de croissance qui liera les pays de l’euro. Étant donné cette contrainte budgétaire permanente, quelle sera encore la marge de manœuvre de la France ?

Alain Lamassoure : L’accord de Dublin est tout à fait raisonnable. En réalité, ne seront soumis à des sanctions que les pays dont le déficit dépassera 3% du PIB en l’absence de récession économique. Or, c’est une situation tout à fait exceptionnelle, que la France n’a connue qu’une fois depuis 1958. Il est clair qu’avec ou sans engagement européen, aucun pays ne peut se permettre d’enregistrer des déficits aussi élevés, sauf à courir le risque d’aller à la faillite.

En fusionnant nos monnaies, nous fusionnons également nos créances et nos dettes vis-à-vis du reste du monde. L’intérêt de la France, pays désormais bien géré, est de n’avoir pas à payer pour la mauvaise gestion éventuelle d’un autre État ayant adopté l’euro.