Déclarations de M. Jean-Claude Gaudin, ministre de l'aménagement du territoire de la ville et de l'intégration, et Eric Raout, ministre délégué à la ville et à l'intégration, sur la convention signée entre l'État et la Mutualité Française pour l'accès aux soins des populations des quartiers en difficulté, Paris le 8 janvier 1997.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Jean-Claude Gaudin - Ministre de l'aménagement du territoire de la ville et de l'intégration ;
  • Eric Raoult - Ministre délégué à la ville et à l'intégration

Circonstance : Signature d'une convention entre l'Etat et la Mutualité Française portant sur un programme expérimental d'accès aux soins pour les personnes en difficulté des quartiers sensibles, Paris 8 janvier 1997

Texte intégral

Jean-Claude Gaudin

Monsieur le Président,
Mes chers collègues,

Je tiens tout d’abord à vous remercier de participer à cette sympathique manifestation en ce début d'année habituellement réservée aux vœux. Je profite d'ailleurs de l’occasion pour vous souhaiter à tous une excellente année 1997. Mais, vous Je voyez bien, il n'y a pas, même en ce début d'année, de pause dans la mise en œuvre du Pacte de Relance pour la Ville, qui est le dispositif le plus complet et le plus important jamais conçu dans le cadre de la politique de la ville.

Pratiquement tous les textes législatifs et réglementaires qui devaient être adoptés pour le rendre effectif, sont aujourd'hui publiés, le tout, en moins d'un an, ce qui constitue une gageure.

Cet effort considérable témoigne de la volonté du gouvernement de lutter énergiquement contre la fracture territoriale et sociale, et de mettre en œuvre dans les plus brefs délais l'un des principaux engagements du Président de la République.

Mais la politique de la ville ne se conduit pas uniquement par des lois et des décrets. Si les textes doivent être là pour fixer les objectifs, indiquer les chemins pour y parvenir et les moyens qu'il faut mobiliser, ils ne suffisent pas en eux-mêmes pour développer les synergies et fédérer les volontés.

Ce sont des actes tels que la signature de la convention avec la mutualité qui démontrent bien que les volontés existent et que les partenaires de la politique de la ville savent s'engager et se mobiliser.

La convention que nous signons aujourd'hui définit les conditions d'un partenariat dont l'objet est d'apporter des solutions aux problèmes de santé des populations des quartiers en difficulté. On pense souvent aux problèmes de mobilité et de revenu de ces populations qui les empêchent d'accéder aux soins dans de bonnes conditions.

Mais il ne faut pas non plus oublier d'autres causes comme les habitudes alimentaires parfois déséquilibrées des familles et un certain nombre de problèmes de santé délaissés, en particulier les yeux et les dents.

La mutualité qui connaît bien ces difficultés et qui a montré son savoir faire, a accepté de prendre en compte les territoires prioritaires d'intervention de la politique de la ville et a décidé de s'engager, en lien étroit avec les autres partenaires concernés, à trouver des réponses aux difficultés des populations.

La méthode employée mérite d'être rappelée parce qu'elle démontre ce souci permanent de la politique de la ville de rester proche du terrain et d'être empirique dans les actions entreprises : 13 départements ont été choisis à titre expérimental.

Dans chacun des sites tout montage de projet a été précédé d'un recensement de l'existant et d'une analyse des difficultés. Puis après une consultation de tous les acteurs concernés, un travail important a été initié et des solutions proposées; ici un référent santé, là un point d'accueil santé, ailleurs un cabinet dentaire.

L'ensemble de ces expériences alimentera les travaux d'un comité d'orientation national qui sera composé des différents partenaires bien sûr, mais aussi d'experts tels que les professeurs GENTILINI et PISSARO... Sa mission consistera à la fois à valider les projets locaux et à réfléchir aux suites à donner.

En cette période rigoureuse où les populations démunies souffrent le plus, le moment me paraît opportun de rappeler que les questions de santé peuvent constituer pour certaines populations un handicap très difficilement surmontable en matière d'insert ion sociale mais aussi professionnelle. C'est la raison pour laquelle le Pacte de Relance n'a pas voulu négliger cet aspect, et comprend un volet important relatif à l'hygiène sociale et à l'éducation à la santé.

La famille est le lieu naturel de l'éducation et de l'insertion sociale. Nous devons l'aider à jouer pleinement son rôle. Il nous appartient de nous mobiliser avec tous les partenaires, les collectivités locales, bien sûr mais aussi les Caisses d'allocations familiales, les établissements publics, et même les entreprises.

Je me félicite qu'aujourd'hui la mutualité par la signature de cette convention, formalise son entrée dans cette grande famille de la politique de la ville, qui couvre tous les volets de la lutte contre l'exclusion et nous savons que les difficultés à accéder à certains soins ne sont pas les formes d'exclusion les moins cruelles. Mesdames et Messieurs, Il se dit parfois que la politique de la ville est un laboratoire des politiques publiques. Eh bien je pense que nous faisons plus que le démontrer aujourd'hui.

A toutes et à tous, très bonne année

 

Éric RAOULT

Convention relative au programme expérimental d'accès aux soins pour les personnes en difficulté des quartiers sensibles

La politique de la ville, et plus largement une véritable politique sociale, ne peut se limiter à agir sur le cadre de vie ou les institutions, elle doit aussi avoir pour objectif d'améliorer la vie quotidienne des personnes.

Parmi les éléments qui constituent cette vie quotidienne, la prise en charge des questions de santé est un facteur important. Toutes les observations montrent en effet que les personnes en difficulté sociale négligent leur santé.

Les grands principes du programme

Le programme expérimental d'accès aux soins pour les personnes en difficulté des quartiers sensibles, a été lancé, en relation avec la Mutualité Française, pour aider des personnes qui n'ont plus accès au système de soin à reprendre en main personnellement leur santé.

La population-cible est, sans exclusive, celle dont les ressources dépassent de peu le seuil de l'aide sociale, mais qui pourtant ne peuvent plus, pour des raisons pécuniaires mais également d'isolement, s'intéresser à leur santé.

L'objectif est donc bien de recréer, à travers la santé, du « lien social », préalable indispensable à toute insertion sociale.

En outre, la prise en charge de la mutualisation des dépenses de soins assure aux intéressés une sécurité et une pérennité dans leur démarche de soins.

Enfin, ce programme s'appuie sur toutes les ressources disponibles sur le terrain (médecins libéraux, établissements de soins, associations...) et cherche à mobiliser leurs efforts au bénéfice de cette population. C'est le principe de la « mise en réseau » qui prévaut plutôt que la volonté de créer de nouvelles structures.

Des projets montés localement

Manifestement, cette ambition est bien comprise sur le terrain si j'en juge par l'avancée des projets locaux qui, en quelques mois, ont fédéré les énergies de nombre d'élus, de professionnels ou d’administrations, au sein des comités de pilotage.

Les projets qui émergent sont nécessairement très différents les uns des autres mais ils s'articulent souvent autour d'un « référent santé », cheville ouvrière du dispositif, qui est investi d'une double mission :
    - assurer le lien entre les populations concernées et les dispositifs de soins appropriés ;
    - accompagner la mutualisation des personnes.

Pour ma part, je souhaite que le plus souvent possible, ces référents santé soient recrutés sur des emplois-ville, car nous ferons ainsi d'« une pierre deux coups » : donner un emploi à un jeune et améliorer la santé de personnes précarisées.

Le rôle essentiel de la Mutualité Française

Aujourd'hui, la signature de cette convention avec la Mutualité Française montre que cette grande institution qui dispose d'un vaste réseau en France, est disponible pour des actions novatrices sur le plan social. Elle s'associe avec des partenaires très différents, au premier rang desquels l'Etat, pour faire avancer la cause de la santé.

Je la remercie pour cet engagement.

Je souhaite que nous tirions ensemble tous les enseignements de ce programme et que tous les Français puissent bénéficier sans réserve de notre système de santé dont chacun reconnaît la qualité et l'universalité. Je ne doute pas que cette convention soit un pas dans cette direction.