Article de M. Jean-François Mancel, secrétaire général du RPR, dans "Libération" du 14 novembre 1996, sur les propositions économiques et sociales du PS, intitulé "Le PS, entre archaïsme et poudre aux yeux".

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Circonstance : Adoption le 9 novembre 1996 par le Conseil national du PS du projet économique soumis aux militants

Média : Emission Forum RMC Libération - Libération

Texte intégral

La lecture des propositions économiques et sociales du PS, adoptées samedi dernier pas son conseil national, jettent un éclairage cruel sur l’état du Parti socialiste et sur sa capacité de réflexion.

Le constat est en effet clair : au terme de dix-huit mois d’un silence gêné et après une double défaite électorale sans appel une double défaite électorale sans appel, en 1993 et en 1995, les socialistes n’ont su ni corriger leurs défauts ni résister aux tentations qui s’offraient à eux.

Pis : ballottés entre a tentation de l’archaïsme et celle de la démagogie, le PS a finalement, réussi l’exploit de cumuler les deux, d’ajouter Charybde à Scylla.

Les exemples ne manquent pas. Au rayon des archaïsmes, le PS n’a pas hésité à exhumer tous les trésors qui dormaient, relégués dans les cartons de 1981 : retour aux nationalisations, réduction autoritaire du temps de travail sans diminution du salaire, embauche immédiate de 350 000 fonctionnaires supplémentaires… Rien ne manque à l’appel de cette politique dont les Françaises ont déjà amplement et amèrement pu juger le mérite : près de deux millions de chômeurs supplémentaires en dix ans, un déficit budgétaire multiplié par dix, un endettement multiplié par deux…

Certains commentateurs se sont interrogés, à la lecture de ce catalogue digne du musée des horreurs, pour savoir si le PS n’oubliait pas les contraintes de la réalité et ne se replongeait pas dans la vieille passion d’un État omniprésent. La réponse, aux deux questions, est clairement oui.

Le PS n’a pas réaffirmé samedi son ancrage à gauche mais son ancrage, surtout, dans le passé, et aux antipodes de la réalité.

Car, dans leur régression sectaire, les socialistes ne se sont pas contentés d’exhumer les recettes de 1981. Ils en ont aussi ranimé l’optimisme béat, ce « tout est possible », qui n’est qu’une autre formulation du célèbre « demain, on rase gratis ».

Il suffit, là encore, pour mesurer les dégâts, de se reporter au texte. La morale en est simple : demain, avec le PS, les dépenses de l’État vont augmenter et les impôts des Français baisser, le chômage va être réduit et les salaires seront considérablement augmentés, etc.

La logique est toujours la même, infaillible tant que l’on ne pose pas trois petites questions gênantes :
    – quid du financement de toutes ces promesses ;
    – quid les moyens utilisés pour stimuler la croissance ;
    – quid de la possibilité pour l’État d’imposer, par exemple, aux entreprises l’embauche de 350 000 jeunes ?

Sur ces trois points, le document du PS est absolument muet, reléguant l’ambitieuse promesse de Lionel Jospin – « ne promettre que ce que l’on peut tenir… » – au rang d’aimable plaisanterie ou de franche hypocrisie.

La vérité, il est vrai, est moins clinquante. Le catalogue de promesses du PS ne rompt pas avec son silence, il en est la continuation sous une autre forme.

Il devenait insoutenable pour le PS d’afficher, par son mutisme, son incapacité à proposer la moindre solution alternative. Il s’est donc rabattu, en désespoir de cause, sur ce dont il disposait : les ruines de son passé et l’artifice de la poudre aux yeux.

Ce stratagème donne suffisamment la mesure du fiasco de la méthode Jospin sans qu’il soit besoin de s’étendre, de surcroît, sur les divisions et les querelles intestines dont le PS est la proie et dont il n’a pu cacher l’ampleur.

Faute d’être devenus efficaces, les socialistes au pouvoir avaient, au terme de longues années, semblé apprendre le réalisme. Cet acquis visiblement volatilisé, les voici revenus au point de départ.