Editorial de Mme Dominique Voynet, porte-parole des Verts, dans "Vert Contact" du 18 janvier 1997 sur ses rêves pour la société et le développement des idées écologiques, intitulé "Bonne année".

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Média : Vert contact

Texte intégral

J’ai fait un rêve. Réveillonnant chez Jean-Paul Jeunet à Arbois, Jacques Chirac découvrait qu’il existe autre chose que la tête de veau dans la vie. Mea culpa en direct à la télé. Élections générales dégageant une (courte) majorité écolo-progressiste (1).

Avant même que les derniers détails de la loi-cadre sur les 32 heures soient rendus publics, Annick Coupé, Michel Deschamps, Nicole Notat et Louis Viannet (2) annonçaient une mobilisation générale contre le chômage. Sans perdre de temps, le Gouvernement annonçait une grande opération de régularisation des résidents étrangers. Soulagés, Ababakar (3), Madjiguène, Doro et les autres prenaient le TGV pour le Jura, histoire de faire un peu de ski de fond.

L’abandon du projet de canal à grand gabarit, très attendu en Franche-Comté, était fêté dans la vallée du Doubs par les pêcheurs comme par les amoureux qui lézardent sur ses berges en été.

Plus sérieusement, le ministre de l’énergie arrêtait Superphénix et lançait un vaste plan d’économies d’énergie, histoire de se passer au plus vite du nucléaire. Les « zélus » (4), d’abord vexés de l’abandon de nombreux tronçons autoroutiers, redécouvraient le charme du vélo ; ils s’enthousiasmaient pour le tramway et le TGV pendulaire, et écoutaient, fascinés, leurs homologues suisses et allemands leur expliquer qu’on pouvait très bien se passer de camions pour le transport longue distance des marchandises.

À Bruxelles, le ministre de l’agriculture expliquait la nouvelle politique d’installation des jeunes agriculteurs – une priorité nationale ! – et plaidait pour la vérité des prix. Histoire d’encourager le bon, le sain, le bio. Au grand plaisir des vaches suisses, trop longtemps privées de l’herbe grasse des alpages helvétiques par des industriels désireux de fourguer au moindre prix leur farine de moutons tremblants.

Je me suis réveillée à la fin du discours de Chirac. Rien n’avait changé. Ah si, on venait de retrouver un SDF au pied d’un distributeur bancaire. Un de plus. Mort de froid en ce dernier jour de l’année.

 

(1) Aucun des grands médias ne s’était (illisible) sur le score (illisible) du FN, que venait de passer sous la barre des 1 %.
(2) Marc Blondel était absent pour cause de voyage de noces.
(3) « Dans la peau d’un sans-papier », (illisible), Édition du Seuil.
(4) Bernard Pons avait jeté l’éponge ; (reste du texte trop illisible)