Déclaration de M. Jacques Godfrain, ministre délégué à la coopération, sur la coopération entre la France et le Mozambique, la coopération interrégionale et la démocratisation du Mozambique, Paris le 12 novembre 1996.

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Circonstance : Déjeuner offert par M. Godfrain en l'honneur du Président de la République du Mozambique, M. Joaquim Alberto Chissano, en visite à Paris le 12 novembre 1996

Texte intégral

Monsieur le Président, Messieurs les ministres, Mesdames et Messieurs,

C’est avec beaucoup de plaisir que nous vous accueillons ce soit, Monsieur le Président, au Palais des Affaires étrangères. Je me suis rendu très récemment à Maputo et j’ai pu, à cette occasion, faire plus ample connaissance avec les responsables politiques et économiques de votre pays. Certains d’entre eux sont présents aujourd’hui à vos côtés et je suis particulièrement heureux de pouvoir également les accueillir à mon tour en France.

Ma visite au Mozambique au mois de septembre dernier m’a permis de mesurer les progrès réalisés par votre pays en très peu d’années, progrès qui font du Mozambique un exemple remarquablement réussi de processus de paix après 16 ans de guerre civile et de réconciliation nationale.

Nous savons combien cela fut long et difficile. Mais, vous avez donné la preuve qu’à force de volonté et de conviction, la paix peut être au rendez-vous. Ainsi, votre expérience constitue aujourd’hui un espoir pour les autres États ou régions du monde où subsistent des crises graves.

Votre pays, Monsieur le président, a été fortement soutenu dans son parcours vers la paix par l’ensemble de la communauté internationale. La France, qui avait formé de grands espoirs pour l’avènement de la paix et de la démocratie, a également pris sa part de ce processus.

Aussi ai-je été particulièrement heureux, lors de mon récent séjour à Maputo, de constater le chemin parcouru et combien la vie politique et économique de votre pays a désormais pris un cours radicalement nouveau.

Nous ne pouvons en premier lieu que nous réjouir des étapes réalisées dans la mise en place des institutions démocratiques. Des élections municipales doivent avoir lieu l’année prochaine pour parachever ce processus.

Nous espérons qu’elles renouvelleront, sur le terrain, l’exemple de réconciliation nationale que vous avez montré jusqu’à présent.

La vie parlementaire est également très active et se déroule dans un climat serein et constructif, comme vient tout récemment de le montrer la discussion sur le projet d’amendement de la Constitution.

Nous avons, le mois dernier, accueilli en France une délégation multipartite de députés mozambicains et, au cours des entretiens que nous avons eus à cette occasion, nous avons pu mesurer l’attachement de vos élus à l’approfondissement de la vie démocratique et notamment au renforcement du fonctionnement du Parlement, en s’inspirant des expériences étrangères et, en particulier, du système parlementaire français.

La réconciliation nationale, entre les forces politiques de votre pays, mais aussi entre tous les Mozambicains, était la condition sine qua non du retour de la paix au Mozambique. Son succès ne doit toutefois pas faire oublier la deuxième tâche, non moins grande, à laquelle votre gouvernement s’est courageusement attelé depuis, à savoir le redressement économique du pays et sa reconstruction. Les obstacles à franchir sont nombreux. Je pense à l’immensité du pays et aux contraintes que cela vous impose, ainsi qu’aux multiples séquelles humaines et matérielles de la guerre. Le retard à rattraper est grand. Mais, je sais que vous avez les capacités et l’enthousiasme pour relever les défis auxquels vous êtes confrontés.

Nous avons, à cet égard, été heureux de constater, comme les autres pays bailleurs de fonds, les efforts que vous avez faits dans ce domaine et les progrès déjà réalisés, en particulier, la stabilisation des grands indicateurs macro-économiques. Cela a permis la conclusion, il y a quelques mois, d’un nouvel accord avec le FMI.

Nous ne pouvons que rendre hommage, Monsieur le Président, aux mesures courageuses prises par votre gouvernement dans le but de réussir ce programme d’ajustement et l’encourager à poursuivre cette action de rigueur économique. Nous savons combien cela est difficile, mais, je tiens à souligner que la communauté internationale et la France sont à vos côtés pour y parvenir.

Nous sommes convaincus que la reconstruction et le développement du Mozambique se feront également dans le cadre de l’intégration régionale au sein de la communauté de développement de l’Afrique australe.

Je tiens, à cet égard, à vous renouveler mes félicitations pour votre accession à la vice-présidence de la SADC. Le Mozambique, du fait notamment de sa position géographique originale et de son rôle historique à l’égard des principaux leaders de la région, a un rôle important à jouer dans le processus d’intégration régionale. Les étapes que vous avez déjà franchies sur cette voie et qui ont été consacrées lors du dernier sommet de sommet des chefs d’État de la SADC, à Maseru en août, nous ont fortement impressionnés.

La SADC constitue désormais un exemple prometteur d’intégration régionale sur le continent africain, à l’heure où la mondialisation est une donnée incontournable et où le risque est grand que certaines régions soient laissées en dehors de ce mouvement.

Les progrès réalisés par les pays d’Afrique australe sur la voie de leur intégration régionale, du rapprochement de leurs économies et de la construction d’un marché homogène, de la conduite de politiques économiques concertées représentent un gage de succès pour leur développement. Ils contribuent également à renforcer la confiance que nous avons tous dans votre région.

Cette confiance est bien sûr celle des bailleurs de fonds. Mais, je pense aussi aux particuliers et aux entreprises. En effet, les firmes françaises se montrent de plus en plus intéressées par l’Afrique australe en général, et le Mozambique en particulier. Preuve en a été la présence à mes côtés, lors de ma visite à Maputo, de nombreux chefs d’entreprises, et ce soir, la forte participation des milieux économiques français à ce dîner. La France souhaite, par ce biais aussi, participer à la reconstruction de votre pays. Plusieurs entreprises françaises, dont le savoir-faire est mondialement reconnu, sont actuellement mobilisées sur de grands projets d’infrastructures où nous espérons qu’elles remporteront quelques succès.

Si nous avons confiance en votre développement, c’est aussi parce que vous disposez de ressources importantes et surtout, d’une position géographique stratégique, débouché incontournable de l’Afrique australe vers l’océan Indien. C’est un atout considérable pour votre pays.

Vous savez combien le développement de l’océan Indien nous tient à cœur. C’est pourquoi nous suivons, avec la plus grande attention, l’évolution du projet de regroupement des États riverains de l’océan Indien, appelé l’« Indian ocean RIM Association », auquel vous avez récemment adhéré.

Notre coopération avec le Mozambique est très importante et ce, depuis un certain nombre d’années déjà. En effet, la France a décidé, en 1988, de placer le Mozambique au sein du groupe de pays pour lesquels nous consentons, à titre bilatéral, un important effort financier.

Depuis lors, notre coopération bilatérale s’est maintenue à un niveau important, de 200 à 250 millions de francs par an. Elle s’est progressivement diversifiée, s’appliquant aux secteurs économiques de l’énergie ou des transports, à des domaines régaliens comme la police mais aussi à la culture, avec l’ouverture récente d’un grand centre culturel français à Maputo. La présence à mes côtés, ce soir, de M. Xavier Emmanuelli, secrétaire d’État à l’Action humanitaire d’urgence, témoigne de l’importance que nous attachons dans notre coopération, au facteur humain, et en particulier, aux questions socio-humanitaires résultant de la présence de très nombreuses mines sur tout le territoire. La France est prête, dans ce domaine, à faire les efforts qui s’imposent.

Je tiens à vous dire combien je suis personnellement, en tant que ministre délégué chargé de la coopération, satisfait de la qualité et de l’importance des projets de notre coopération bilatérale dans votre pays. Celle-ci concerne également ce que nous appelons désormais la coopération régionale de proximité, c’est-à-dire, en ce qui vous concerne, l’action du département de La Réunion en faveur du développement des pays de cette zone.

Les acteurs publics et privés de La Réunion sont très intéressés à construire avec votre pays, qui a une importante façade sur l’océan Indien, des relations suivies et plus denses dans différents domaines culturels, techniques et économiques.

Soyez certain, Monsieur le Président, que la France poursuivra ses efforts de coopération avec le Mozambique et qu’elle restera, avec sa fidélité coutumière, à vos côtés pendant cette période cruciale et historique pour votre pays.

Permettez-moi de vous dire à nouveau, combien je suis heureux de vous accueillir ce soir au Palais des Affaires étrangères et de lever mon verre au Mozambique et à l’amitié entre nos deux peuples.