Déclaration de M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche, sur la réforme de la PAC, notamment sur les négociations lors du Conseil agricole du 31 mars, Paris le 18 mars 1998.

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La Commission européenne vient de présenter à Bruxelles ses propositions d’aménagement de la PAC. C’est évidemment aux États-membres de l’Union qu’il reviendra de décider de l’avenir de la politique agricole européenne, au terme des négociations qui s’ouvriront lors du Conseil agricole du 31 mars. J’y ferai part de la position officielle de la France.

Ce qui est connu à l’heure où je m’exprime m’inspire les commentaires suivants.

Je ne conteste pas la nécessité d’une réforme de la PAC. Bien au contraire. Cependant, ce qui nous est présenté aujourd’hui n’est pas une réforme, mais un simple « aménagement » des règles en vigueur depuis 1992, consistant à accentuer la baisse des prix garantis et à augmenter les compensations versées aux agriculteurs, dans des conditions qui ne permettront pas de préserver les revenus.

Ces propositions reposent sur une erreur d’analyse et d’orientation. L’avenir de l’agriculture européenne ne réside pas dans la production de matières premières à bas prix, mais dans sa capacité à produire et à commercialiser en Europe et dans le monde des produits à haute valeur ajoutée.

Quant à la pérennité de la PAC, elle ne serait pas assurée par les dispositions qui sont envisagées.

Je proposerai donc à mes collègues de l’Union d’aborder cette négociation avec à la fois plus d’ambition et plus de pragmatisme.

Plus d’ambition en engageant une véritable réforme, faute de quoi les compensations partielles proposées aujourd’hui pourraient demain s’avérer être un marché de dupes dans les négociations internationales à venir.

La pérennité de la PAC ne sera assurée que si elle intègre l’ensemble des fonctions de l’agriculture, économiques, sociales et environnementales. Les aides publiques ne doivent donc pas être liées en totalité à la production.

Le modèle agricole européen, que les quinze se sont engagés à défendre, réside en particulier dans la diversité des agricultures qui le composent. Cette diversité ne pourra être prise en compte que si les États-membres disposent effectivement des moyens de répartir une fraction des aides communautaires en fonction des réalités qui leurs sont propres. La Commission fait un pas timide en ce sens, mais les modalités qu’elle propose sont trop complexes pour être effectivement mises en œuvre.

Enfin, il faut aussi faire preuve d’un plus grand pragmatisme. Il ne saurait y avoir de solution unique à des problèmes fondamentalement différents.

La baisse généralisée et systématique des prix n’est pas la réponse à toutes les questions posées. Les chefs d’États et de gouvernements des quinze en ont d’ailleurs convenu en décembre dernier à Luxembourg. Ils n’ont pas été entendus.

Tout cela me conduit à exprimer un profond désaccord avec ces propositions. Je m’en entretiendrai dans les tous prochains jours avec les organisations professionnelles agricoles et avec mes collègues de l’Union européenne.