Articles de M. Bruno Mégret, délégué général du Front National, dans "Français d'abord" des 1er et 15 novembre 1996, sur l'immigration et sur la conception de l'écologie du FN, et de M. Bruno Gollnisch, secrétaire général, sur le résultat de l'élection législative partielle de Gardanne et sur le dernier rapport de la Cour des comptes notamment sur les dépenses et la dette de l'Etat.

Prononcé le 1er novembre 1996

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Média : Français d'abord

Texte intégral

Français d’abord - 2e quinzaine de novembre 1996 - Bruno Mégret

Le FN à la pointe du combat !

Alors que les partis Verts ont quasiment disparu de la scène politique, les problèmes écologiques, eux, ont gardé la même ampleur. C’est pourquoi le Front national se doit de réaffirmer sa conception de l’écologie.

Souvenez-vous, en 1992, les partis écologistes effectuaient leur percée aux élections régionales. Mais aujourd'hui, alors que nous préparons le scrutin qui renouvellera ces assemblées, les Verts ont pour ainsi dire disparu de la scène politique.

Cependant, le déclin des partis Verts ne signifie nullement que l'écologie véritable doive quitter l'espace politique. C'est en effet un paradoxe majeur de notre société : alors même que les Verts disparaissent du débat politique, notre société reste confrontée à des problèmes écologiques majeurs qu'il est illusoire d'occulter.

Le matérialisme en accusation

Ces problèmes ont émergé progressivement dans les décennies passées, à l'Ouest comme à l'Est, avec le développement du matérialisme libéral ou socialiste. Mais aujourd'hui, c'est la même logique qui perdure sous le nouvel ordre mondial.

Prenons l'exemple de l'agriculture ! Au nom de la politique agricole commune concoctée à Bruxelles, des départements entiers retournent en friche à la suite de la suppression de certaines cultures, tandis qu'ailleurs des méthodes surintensives d’exploitation épuisent les sols, polluent les eaux et aboutissent à des produits de qualité médiocre. Une telle politique, obsédée par le rendement productif, ne profite ni aux agriculteurs, ni à l'écologie. Car, ne l'oublions pas, le monde rural joue un rôle primordial dans l'entretien de la nature, l'aménagement du territoire et même dans l'équilibre psychique de la nation.

Mais ces dimensions sont bafouées par la logique de production à tout va, entraînée par une conception purement matérialiste des relations entre l'homme et la nature.

Désobéissance aux lois naturelles

Dès 1935, Alexis Carrel dénonçait dans « L'Homme cet inconnu », la conséquence de cette conception : la désobéissance aux règles fondamentales de la vie. « Réduire l'homme à son activité économique, avertissait le prix Nobel de médecine, équivaut à l'amputer d'une partie de lui-même. Le libéralisme et le marxisme violent donc, l'un et l'autre, les tendances fondamentales de la nature. » Ainsi, libéralisme et marxisme, successivement dominant dans nos sociétés, ont-ils brisé le lien qui unissait l'homme à la nature et ouvert la porte à toutes les dérives écologiques.

Le paradoxe, c'est que l'écologisme développé par les Verts ne constitue en aucun cas une réponse adaptée. Car les Verts aussi ignorent beaucoup de lois de la nature. En prônant le mondialisme et le cosmopolitisme, ils nient les instincts élémentaires de la nature humaine, mis en évidence par l'éthologie, la science des comportements : instincts de territorialité, d'agressivité, d'identité pour ne citer que les plus importants.

Pour une écologie enracinée

Si l'écologisme des Verts ne résout pas les problèmes écologiques posés à notre société par le matérialisme, c'est donc au Front national qu'il revient d'apporter les réponses. Notre conception de l'écologie repose sur trois idées force :
    - le rejet du matérialisme, parce que c'est là le plus sûr moyen de rompre avec la logique du profit à court terme qui justifie tous les pillages de notre patrimoine naturel ;
    - l'acceptation de l'homme et de la nature tels qu'ils sont, car l'écologie véritable consiste aussi à se conformer aux lois fondamentales de la vie contre lesquelles il est illusoire de se dresser ;
    - la mise au service de la nature du progrès humain, car il est vain de brimer l'homme dans sa soif de connaissance. Libérée des objectifs productivistes auxquels elle fut trop souvent cantonnée, la science permettra à l'homme de relever les défis écologiques du XXIe siècle.

Fort de cette conception équilibrée et réaliste, le Front national s'affirme à la pointe du combat écologiste. Tout comme l'écologie véritable, le FN s'attache en effet au réel plutôt que de s'en remettre aux utopies. Il prend le vivant dans sa globalité sans oublier ni les hommes, ni les peuples, ni les cultures. Mais surtout, il est le seul mouvement politique à considérer que la France fait partie de notre environnement et qu'elle est même, en tant que patrie, la composante principale de cet environnement sans lequel notre peuple disparaitrait. C'est pourquoi, par son patriotisme, le Front national s'affirme comme le seul mouvement authentiquement écologiste de France.

 

Français d’abord - 1er au 15 novembre 1996 - Bruno Mégret

Raz-de-marée annoncé !

Alors que les lois Pasqua ont démontré leur totale inefficacité en matière de lutte contre l’immigration, les experts démographes du Tiers monde prévoient pour les années à venir un doublement des migrations vers l’Europe.

Qui peut encore nier que la France soit livrée à une immigration incontrôlée en provenance des pays du Tiers monde ? Officiellement, l'immigration est stoppée depuis 1974. Mais depuis, elle s'est tellement accentuée que même nos villes ont changé de visage. Certains ont voulu croire que le laxisme avait pris fin avec la promulgation des lois Pasqua. Mais l'affaire des immigrés de St-Bernard et St-Ambroise a levé le voile sur la supercherie. Le prétendu arsenal mis en place par l'ancien ministre de l'Intérieur ne permet même pas de venir à bout d'une poignée de clandestins avérés. Après plusieurs semaines de mobilisation, seuls huit d'entre eux ont regagné leur pays !

Dans ces conditions, qui peut croire au mythe de l'immigration zéro ? Pas le ministre de l'Intérieur en tout cas. Selon un rapport confidentiel rédigé par ses services, 90 000 cartes de séjour ont été délivrées en 1995 (1), soit quand même l'équivalent de la population d'une ville comme Nancy.

Libre circulation

Plus grave, les pays et les populations du Tiers monde n'y croient pas non plus. Réunis par la Conférence méditerranéenne sur la population, les migrations et le développement, les plus grands démographes des pays d'Afrique du Nord nous promettent ainsi un véritable raz-de-marée humain. « Dans les années qui viennent, le volume des migrations du sud vers le nord de la Méditerranée va doubler » estime Ali Kouaci, chercheur à Tunis (2). « La crise va s'accroître et créer un potentiel plus élevé qui va aller frapper à la porte de l'Europe », ajoute Nader Pergany, directeur du centre de recherche et de formation « Almishakt » du Caire (3). Autant de prédictions qui claquent comme des avertissements, mais que la classe politique refuse d'entendre.

Alors qu'il est établi que la suppression des frontières et la libre circulation des marchandises induit l'immigration, l'Union européenne a conclu avec douze pays de la rive sud de la Méditerranée un accord de partenariat qui doit déboucher sur une zone de libre-échange en 2001. Non seulement ce « marché commun méditerranéen » soumettra les entreprises françaises à une concurrence déloyale de la part de pays à bas salaires, mais surtout elle aggravera l'immigration.

Politique suicidaire

Au regard de ces perspectives, la politique mondialiste menée par le gouvernement tient du suicide ou de l'assassinat. En effet, le déséquilibre démographique et économique entre l'Europe et l'Afrique est tel qu'il se traduira par une véritable « inondation » (4), estime Nader Fergany. Et c'est le moment choisi par le gouvernement pour supprimer toutes les digues ! À l'appui de cette politique absurde, les technocrates européens remettent au goût du jour le mythe éculé du manque de main-d'œuvre dont souffrirait l'Europe. Ils invoquent notamment une étude des Nations unies selon laquelle l'Union européenne devrait connaître une rapide décrue de sa force de travail que l'afflux d'immigrés serait appelé à compenser... (5). Les millions de chômeurs français et européens apprécieront !

FN : le recours

Face au danger que constitue cette nouvelle vague d'immigration promise et même souhaitée par l'établissement, le Front national apparaît comme l'ultime rempart des Français. Le Front national est en effet le seul mouvement politique à avoir dénoncé régulièrement la poursuite de l'immigration, et ce depuis 1973. Il s'est toujours opposé au libre-échangisme et à la suppression des frontières qui la favorisent. Il est aussi le seul à demander l'application de la préférence nationale qui découragerait les candidats à l'immigration, Mais surtout, le FN est le seul à prôner une politique résolument favorable à la famille qui permettrait à la France de sortir de l'hiver démographique. Plus que jamais le Front national s'affirme comme le seul mouvement dont le programme réponde aux enjeux politiques d'aujourd'hui. Plus que jamais, il incarne le seul recours des Français menacés par l'immigration et le mondialisme.

(1) « Le Monde » du 24 octobre 96.
(2) (3) (4) « Le Figaro » des 19 et 20 octobre 96.

 

Français d’abord - 1er au 15 novembre 1996 - Bruno Gollnisch

Idiots utiles et compagnons de route

Les complices des communistes

L’élection de M. Meï, maire communiste de Gardanne, n’est qu’une péripétie qui pourrait passer inaperçue. Quand on a eu Tapie pour député… À y regarder de plus près, on peut cependant s’interroger.

Que la droite parlementaire préfère un communiste à un candidat du Front national, c'est à elle de s’en expliquer auprès de ses électeurs. Mais s'il ne s'agissait pour elle que de choisir entre « la peste et le choléra », selon l'expression consacrée, comment comprendre que M. Péricard, président du groupe parlementaire gaulliste à l'Assemblée, ait fait acclamer le nouvel élu par une partie des députés de la majorité ?

On comprend que le Parti socialiste récupère les voix communistes, en vertu d'une discipline « républicaine » qui donne une piètre idée de la République. Mais la majorité ? Elle aussi préfère que les électeurs communistes le restent, car elle sait que ses discours fuyants et sa politique indécise sont incapables de lui rallier les électeurs des partis de gauche. Qu'ils restent donc à gauche, se dit-elle, plutôt que d'aller au Front national, concurrent sérieux celui-là !

M. Gaudin a donc appelé les électeurs « attachés aux valeurs de la république et de la démocratie » à « faire le bon choix » et à voter pour le candidat communiste. Pour se faire une idée des valeurs de la démocratie et de la République telles que M. Gaudin les conçoit, examinons quelques-uns des méfaits anciens ou récents (ce sont les mêmes qui se répètent) du Parti communiste.

Les méfaits du PC

Par calcul électoral, la majorité livre les électeurs au quadrillage et à la mise en coupe réglée des élus communistes. Quant à l'inculpation de MM. Hue et Marchais, elle a laissé le monde politique et la presse de marbre (les journalistes étaient sans doute occupés à défendre leur abattement fiscal). Alors qu'il est de notoriété publique que le Parti communiste français a été financé par l'Union soviétique (à tel point que les Russes lui réclament le remboursement de ces subsides !), jamais le ministère public n'a eu l'idée de faire franchir à un juge d'instruction les portes du fastueux siège de la place du Colonel- Fabien.

On regarde à deux fois avant de mettre son nez dans les affaires du PC ou de la CGT. Le 14 septembre dernier, des membres du service d'ordre de la fête de l'Humanité ont embarqué dans une camionnette, dépouillé de leurs vêtements et passé à tabac des visiteurs coupables d'avoir allumé un feu de camp. À Gardanne, cinq colleurs d'affiches du Front national, tombés dans un traquenard tendu par quinze nervis de M. Meï (« un type bien », selon le député gaulliste M. Muselier), se sont retrouvés à l'hôpital. Au cours de la manifestation des retraités, il y a quinze jours, deux vieilles dames de soixante-quinze ans ont été frappées par des voyous de la CGT, du Scalp et de Ras l'front ; mieux, la police, qui avait filmé la scène, dut remettre la cassette au service d'« ordre » de la CGT ! Sur tout cela, silence télé.

La violence ne fait pas peur aux révolutionnaires. Pendant la guerre, quatre militants trotskistes qui venaient de s'évader du Puy-en-Velay en compagnie de communistes furent liquidés par ces derniers. Les affaires de ce genre sont monnaie courante dans l'histoire de tous les partis communistes, chez qui la purge est un remède aussi courant et plus efficace que du temps du docteur Diafoirus. On sait qu'en Espagne, les Brigades internationales aux ordres de Moscou mettaient autant de zèle à massacrer trotskistes ou anarchistes qu'à combattre le général Franco. Or M. Chirac vient de prendre l'ahurissante initiative de remettre la croix du combattant à ces fanatiques !

Les connivences fâcheuses

Sans doute M. Chirac se souvient-il de son passé communiste ainsi que de celui d'André Malraux. Nombre de nos dirigeants sont d'anciens communistes ou gauchistes – dans leur jeunesse, disent-ils, la larme à l'œil. Et n'est-ce pas dans sa jeunesse que M. Hernu (par ailleurs franc-maçon) est devenu espion au profit de la Roumanie – qui n'allait pas tarder à devenir celle de Ceaucescu ? Combien sont-ils dans ce cas ? On nous affirme que M. Hernu a cessé de servir en 1963. Comme par hasard, c'est l'année même où il prit de grandes responsabilités à la SFIO ! L'Allemagne et l'Angleterre ont reconnu avoir eu des taupes soviétiques jusque dans les tout premiers cercles du pouvoir (Kim Philby ou Walter Guillaume). La France serait-elle par miracle épargnée ? Ou la volonté de découvrir les traîtres serait-elle inexistante ? Car cette affaire est connue depuis quatre ans.

Il est vrai que l'idéologie collectiviste est un bouillon dans lequel les gaullistes ont plus d'une fois trempé les lèvres (sans compter ceux qui sont tombés dedans quand ils étaient petits). Rappelons que le fameux statut de la fonction publique, qui abrite sous son aile douillette les petits fonctionnaires mais aussi les grands (dont font partie MM. Chirac, Juppé, Séguin et Toubon, Fabius et Jospin), a été instauré à la Libération par Maurice Thorez, fraîchement revenu d'Union soviétique après sa désertion de 1940 et ministre du général de Gaulle ? On répond que le général De Gaulle a fait entrer les communistes au gouvernement en échange du désarmement des FTP. Argument qui en dit long sur les méthodes communistes ! Mais en 1968 ? Comment expliquer qu'il ait laissé Edgar Faure appliquer quasi à la lettre le plan des communistes Langevin et Wallon à l'Éducation nationale ?

Si les hommes politiques des partis sans idéaux se font complices du communisme, forme accomplie du socialisme, c'est parce qu'ils n'ont pas de véritables valeurs capables de le combattre non seulement en tant que force politique, mais comme idéologie qui pervertit l'âme des hommes et brise le destin des nations.

 

Français d’abord - 2e quinzaine de novembre 1996 - Bruno Gollnisch

Dilapidation et gabegie de l’État

Rendez l’argent !

Qui serait assez ignoble pour envoyer les huissiers chez un ami qui lui doit mille francs, alors qu'il lui en doit dix mille ? En déclarant qu'il renonçait à faire subir des contrôles fiscaux aux entreprises dont il est débiteur, l'État vient de reconnaître avoir commis une telle vilenie.

L’État avoue donc être un horrible grippe-sous. Mais au moins les héritiers de la mère Mac-Miche ou d'Harpagon avaient-ils la perspective de recueillir le magot à la mort de l'avare. Grippe-sous, l'État se révèle panier percé. Il ressemble au Père Goriot qui, en sacrifiant sa fortune pour ses filles, entraîne leur perte. La littérature n’est pas seule à fournir de tels exemples, on en trouve en grand nombre, et d'aussi pittoresques, dans le rapport de la Cour des comptes.

Un rapport affolant

Celui-ci, qui n'est qu'un florilège, compte tout de même 418 pages qu'il serait hasardeux de résumer. Promenons-nous cependant dans la table des matières. Ses deux parties, « l'État » et « les collectivités territoriales », comptent 23 titres en tout, au menu desquels figurent de vieilles connaissances : le ministère de la Coopération, qui fut celui de M. Nucci ; la SNCF, qui représente à elle seule deux titres sur trois de la rubrique « entreprises publiques » ; la chambre de commerce et d'industrie du Var, qui a eu parmi ses fournisseurs indélicats la Sametovar, société d'économie mixte que présidait M. Arreckx ; sans oublier la célèbre piste d'atterrissage en Terre Adélie, qui n'a jamais servi qu'aux pingouins (110 millions). Le ministère de la culture, quant à lui, avec moins de 1 % du budget de l'État, représente 3 de ces 23 titres ! Tous les domaines dans lesquels l'État intervient, c'est-à-dire presque tous les domaines de la vie, y figurent : ventes d'armes, commissariat de l'armée, insertion des jeunes et formation professionnelle. École des hautes études en sciences sociales, centrale nucléaire Superphénix (60 milliards), abattoirs, port de Sète (400 millions), traitement des déchets, édition, théâtre, festivals de musique, immobilier, sociétés d'économie mixte, hôpitaux. Sans compter les rapports des chambres régionales des comptes, comme celle d'Île-de France, qui critique la gestion des Hauts-de-Seine de MM. Pasqua, Balkany et Schuller.

SNCF : 200 milliards de dettes

Le désastreux système Socrate, qui a 12 coûté 2,1 milliards à la SNCF (plus du double du devis), a fait baisser de 10 % le nombre de voyageurs. Mais qu'importe ! Ayant dépensé plus d'argent, l'État pourra prétendre avoir « fait plus » pour les transports en commun. La construction du TGV Nord a coûté fort cher en raison d'ententes entre les fournisseurs, mais il a attiré moitié moins de voyageurs que prévu : de même, le trafic transmanche prévu pour 1997 a été ramené à 6,2 millions de voyageurs contre 18,2 prévus à l'origine... Résultat : la SNCF cumule 200 milliards de francs de dettes.

Mauvais gestionnaire, soit ! L'État gaspille, mais de surcroît, par compensation si l'on ose dire, il est mauvais payeur. Le 31 décembre 1995, il devait 2,4 milliards à France Télécom ; ceux à qui l'on a coupé le téléphone apprécieront. Mais que dire des petites et moyennes entreprises qui attendent des mois qu’on leur paie des factures ? Alors que le délai légal est de quarante-cinq jours, le délai moyen de paiement par l'État est de cent vingt jours. L'un des entrepreneurs de la Grande Bibliothèque a attendu un an le paiement de dix millions, et il lui en manque encore deux.

État : garant du droit ?

Détenteur de la puissance publique, garant du droit, l'État ne devrait-il pas montrer l'exemple ? Or il abuse constamment des législations qu'il sécrète à flot continu. Ainsi, emploie-t-il un grand nombre de contrats emploi-solidarité. Il y en a cent mille dans les hôpitaux. Un hebdomadaire a découvert en Picardie des titulaires de CES employés... à la gestion des CES. Ils sont plusieurs dizaines à Bordeaux pour l'administration de la justice. Dix mille en tout, employés illégalement par l'État sans la moindre contrepartie de formation prévue par la loi. Rappelons que dans le même temps, l'État lance une offensive contre le travail clandestin. Et Matignon rembourse le plus discrètement possible les salaires perçus d'Air France par M. Tibéri fils lorsqu'il était au Cabinet de M. Balladur. C'est une pratique courante, dit-on. Nous voilà rassurés.

Si épais qu'il soit, le rapport principal de la Cour des comptes ne suffit pas. Celle-ci en a publié un autre consacré aux « interventions des collectivités territoriales en faveur des entreprises ». Ces dépenses ont crû de plus de 11 % l'an de 1988 à 1993, et s'élevaient à 15 milliards en 1993. Or, comme dans bien des domaines, plus l'État dépense, plus ça va mal. Parce qu'une dépense supplémentaire est la seule réforme qu'il ose faire. Or les subventions n'entraînent aucune obligation légale ou contractuelle. En Seine-Maritime, une entreprise a revendu en toute légalité un bâtiment payé à 40 % par des subventions, qu'elle a ensuite loué. À Tarascon, une entreprise de matériel de télévision a empoché 3 millions de la ville avant de disparaître dans la nature. À Saint-Dizier, une entreprise qui menaçait de déménager obtint 19 millions de la ville ; mais une fois rachetée, elle déménagea.

Rendre l’argent

Les élus risquent donc de se faire rouler... Comme tout le monde. Mais ils outrepassent souvent leurs compétences ou bousculent les règles, au nom d'une lutte pour l'emploi dont on connaît l'efficacité. De fait, ces aides se révèlent inutiles ou nuisibles et en tout cas dispendieuses : elles peuvent avoir « un impact nul, voire des effets néfastes », écrit le rapport. En bon socialiste (mais la droite parlementaire tirerait la même conclusion, n'en doutons pas), M. Joxe, président de la Cour des comptes, en conclut qu'il faut une « réforme d'envergure » et une « réglementation nouvelle ». Une réglementation ! On en manque en effet. Pour rendre légales ces pratiques nuisibles et dispendieuses ? Ou pour forcer les responsables à rendre l'argent ? Je vous laisse deviner.