Déclaration de M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement des transports et du logement, sur le développement de la Seine-Saint-Denis, Bobigny, le 27 avril 1998.

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Circonstance : Assemblée générale du Comité d'Expansion de Seine-Saint-Denis, Bobigny le 27 avril 1998

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les Élus, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs,

Je suis particulièrement satisfait d'être parmi vous à l'occasion de l'Assemblée Générale du Comité d'Expansion de la Seine-Saint-Denis.

Cette Assemblée Générale représente, pour tous, une importance qui mérite d'être soulignée. Elle est le témoin du nécessaire partenariat entre la puissance publique, l'État et les Collectivités Locales et le secteur privé, dans un département trop longtemps et très durement touché par la désindustrialisation, les crises sociales et urbaines et qui dispose d'atouts humains, économiques, sociaux, culturels et géographiques qui ne demandent qu'à être mobilisés pour relever les défis de la civilisation en Seine-Saint-Denis.

Le gouvernement est déterminé à donner un nouvel élan à la politique contre l'exclusion, à celle de l'activité et de l'aménagement du territoire, autour de l'objectif majeur qu'est la mise en œuvre de la solidarité nationale pour gagner la bataille de l'emploi.

En effet, la crise qui frappe l'ensemble de la société française, la désindustrialisation de toute l'Ile-de-France, les choix nationaux précédents ont eu et ont des conséquences plus lourdes pour des territoires comme celui de la Seine Saint-Denis, notamment en matière de pauvreté, de chômage et d'activité, de formation, de déficit, d'offres de transports urbains. Les phénomènes d'exclusion qui en résultent doivent être l'objet de l'attention permanente des actions du gouvernement, afin de mettre en œuvre les solidarités nationales dont l'État est garant.

Tout le monde souligne la protestation actuelle des enseignants, des parents et des étudiants de la Seine-Saint-Denis - je ne crois pas être le plus mal placé pour apprécier le bienfondé des revendications dont ce mouvement est porteur.

Le gouvernement et mon collègue Claude ALLEGRE, Ministre de l'Éducation Nationale et de le Recherche, a commencé à répondre à cette interpellation, bien sûr en matière d'éducation, de postes à pourvoir, d'investissements à consentir sur la durée pour que, en effet, s'infléchisse le traitement profondément injuste dont ce département a été victime. Et, personnellement, je reconnais à Claude ALLEGRE le mérite d'avoir dit tout haut à ce propos ce que bien peu de ministres avaient osé reconnaître avant lui.

Cette question de la formation, de l'éducation, de la maternelle à l'université est déterminante et d'une manière plus générale, c'est en abordant aussi de front la question du chômage, du logement social, des transports, que le gouvernement souhaite construire, avec tous les partenaires, des réponses nouvelles : 35 heures, emplois jeunes, revalorisation du logement social et de l'APL, infrastructures...

Je vais peut-être vous surprendre.

Ne nous y trompons pas, des atouts formidables existent dans ce département, il n'est pas seulement un département sinistré mais aussi un département où les élus, les personnels des services publics, ceux des transports et de l'éducation nationale, les populations se mobilisent pour reconstruire l'espoir et un avenir à une jeunesse qui ne manque ni de volonté ni d'énergie.

Qu'on prenne garde donc aux raccourcis qui ne facilitent pas la convergence des efforts de tous les partenaires, ni la compréhension des actions entreprises, à poursuivre dans la durée, et dans le sens des premiers actes significatifs de la politique gouvernementale.

Il est clair, par exemple, que le développement économique et social occupe une place décisive dans la capacité à restructurer ces territoires. Durant ces dernières décennies, le mouvement de désindustrialisation a laissé des marques dures et douloureuses dans le paysage au point que la Seine-Saint-Denis est le département le plus frappé par le chômage en région parisienne. Cette période a été marquée par la résistance légitime et nécessaire que les populations avec leurs élus y ont opposé.

Cette résistance s'est faite à partir de la mobilisation de l'ensemble des populations concernées, elle a fait naître de nouvelles capacités de créativité et de nouveaux liens de citoyenneté qui ont été trop souvent ignorés ou sous-estimés y compris par ceux qui se penchent aujourd'hui sur la Seine-Saint-Denis, comme hier sur les Minguettes ou les quartiers nord de Marseille. Or, il ne faut pas que l'actualité passe et que les problèmes demeurent. Il faut donc, dans le respect de la parole des citoyens et des habitants, construire et reconstruire la ville, des villes où l'on puisse vivre heureux, construire et reconstruire des activités créatrices d'emplois et de valeur ajoutée.

S'attaquer à ce chantier est une tâche difficile, compte tenu des retards accumulés, mais indispensable.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement déposera cette année un projet de loi d'orientation pour l'aménagement du territoire qui aura comme principal objectif le développement harmonieux solidaire et durable du territoire national.

Dans ce cadre, la préoccupation du Gouvernement pour l'Ile-de-France, afin d'assurer les solidarités à l'intérieur de cette région, mais aussi celles de l'Ile-de-France avec le territoire national, est de mettre en œuvre les conditions d'un développement durable. C'est en partant des orientations du Schéma Directeur Régional, qu'il mettra en œuvre avec les collectivités territoriales un développement économe de l'espace, revitalisant la ville tout en redéveloppant la cohésion sociale.

Car le choix du gouvernement est celui d'une Ile-de-France solidaire et compétitive.

Il s'agit là de conditions à satisfaire pour que le développement économique - et les créations nécessaires d'emplois - soient durablement assurées, ce qui est la condition fondamentale d'une meilleure cohésion et d'une meilleure justice sociale.

Je parlais des atouts. Je veux y insister :

Selon une étude réalisée lors de l'élaboration du schéma directeur, il apparaissait que l'Ile-de-France a sept points forts significatifs, je les cite : le niveau élevé de qualification de la main d'œuvre, la qualité des transports en commun, ses équipements touristiques et culturels, ses activités de loisirs, l'équipement hôtelier et la capacité d'accueillir les congrès et les salons internationaux, la pression fiscale encore modérée sur les personnes physiques, le nombre d'écoles et d'institutions internationales et le niveau de la recherche.

Pour favoriser l'économie francilienne, la puissance publique fait beaucoup, même s'il reste encore des choses à faire, et elle les fera, mais pour répondre aux enjeux sociaux et économiques du troisième millénaire, il est indispensable que les entreprises prennent part elles aussi aux investissements nécessaires.

Le Schéma Directeur Régional de la Région d'Île-de-France, a confirmé le polycentrisme, comme mode de développement de l'Ile-de-France. C'est un choix légitime, le seul qui permette un développement qui soit en même temps solidaire et efficace.

Je veux vous parler franchement : il ne s'agit pas à mes yeux de remettre en cause...

Mais, il existe le risque que seule la loi du marché dicte ses modes de développement, ce qui aurait des résultats contraires à ceux souhaités en accentuant les contradictions et les contrastes de la Région.

C'est pour cela que respectueux des principes de la décentralisation et conscient de la nécessité d'additionner les moyens de chacun, le Gouvernement développe une politique de partenariat riche avec les collectivités locales, formalisé dès aujourd'hui par des contrats de développement urbain. Cette contractualisation sera accentuée au XIIème Plan et sera mise en œuvre de manière globale et transversale à l'ensemble des politiques.

Une politique de développement polycentrique, alliant développement local et social, aménagement du territoire, activité, formation et environnement, est obligatoirement partenariale. Mais elle est aussi volontariste.

Elle implique que l'État affirme ses priorités en Ile-de-France, en concentrant majoritairement ses interventions sur les secteurs à fort enjeu du Schéma Directeur : les pôles à forte potentialité de développement.

C'est ce qui sera fait en Ile-de-France et en Seine-Saint-Denis.

Déjà en 1997, l'État a contractualisé avec les communes de Saint-Denis et d’Aubervilliers pour redévelopper la Plaine-Saint-Denis. J'ai poursuivi cet engagement en confiant au Préfet de Seine-Saint-Denis une mission.

Au mois de mai aura lieu la signature par l'État, le Conseil Général de Seine Saint-Denis, les communes de Tremblay-en-France et de Villepinte, la Chambre de Commerce et d'Industrie de Paris et Aéroports de Paris d'un protocole d'accord qui entérinera une première phase d'extension de 27 000 m2 du Parc des Expositions de Paris-Nord Villepinte, ainsi que le lancement de la première phase d'une Zone d'Activités Internationales destinée à accueillir des entreprises multinationales.

Je souhaite qu'une étude soit lancée prochainement entre l'État et le Conseil Général de Seine-Saint-Denis, pour voir dans quelles conditions le développement de l'arc économique, que l'on appelle Plaine de France, situé entre la Plaine-Saint-Denis et Tremblay-en-France, pourrait voir le démarrage d'une concrétisation dès le XIIème Plan.

Ce Xllème Plan ne verra pas inscrire que cette réalisation pour la Seine Saint-Denis. Sans anticiper sur les négociations qui vont avoir lieu prochainement avec le Conseil Régional d'Ile-de-France, je considère que plusieurs projets bénéficient de sérieux atouts pour le XIIème Plan. Il s'agit en particulier :

- du prolongement de la ligne 12 du métro à Aubervilliers,
- de la mise en service de la tangentielle Nord qui ira jusqu'à Noisy-le-Sec,
- du prolongement du tramway Saint-Denis-Bobigny au Sud jusqu'à Val-de Fontenay,
- du tramway Epinay-Villetaneuse Eole-Evangile.
- la ligne des coquetiers reliant Aulnay et Bondy.

Dans le domaine routier, des efforts seront également réalisés et une attention particulière sera portée aux aspects environnementaux telle la requalification urbaine et les isolations phoniques.

Comme vous le voyez, le Gouvernement s'est engagé et continuera à s'engager de manière encore plus massive dans le département de Seine-Saint-Denis. Bien sûr, pour atteindre ces objectifs nous savons pouvoir compter sur l'action du Conseil Général et de ses élus.

Mais cet engagement, je vous voudrais vous le retourner, en vous demandant de vous engager vous aussi de manière dynamique dans la démarche que le Gouvernement a lancé, que le Parlement a voté, sur la réduction du temps de travail, de manière à ce que le chômage, qui est au centre des préoccupations de la population de ce département diminue. Pour cela, connaissant la personnalité du Président CRESSENT, je suis persuadé que le Comité d'Expansion Economique de Seine-Saint-Denis s'impliquera avec dynamisme. Il faut donner à la Seine-Saint-Denis toute la place qu'elle doit avoir dans l'économie francilienne dans les choix de développement et d'implantation des entreprises.

En conclusion, je souhaite une nouvelle fois insister sur le fait que les projets francilien et séquano-dyonisien qui sont intimement liés doivent reposer sur une approche globale, articulée et cohérente des thèmes de l'environnement, de l'amélioration du cadre de vie, de la culture, des équipements publics, de la valorisation des patrimoines, de l'habitat, du développement économique, des déplacements et des transports.

Profitons donc de la dynamique, de l'élan et du rayonnement que va donner à ce département, cher à mon cœur, la coupe du monde de football pour réussir ensemble le projet ambitieux que nous avons à l'esprit.

Je vous remercie mesdames et messieurs de votre attention.