Texte intégral
B. Schönberg : Les images que l’on vient de voir ne sont pas qu’une simple réunion estivale, elles ont forcément un sens. Comment doit-on décoder cette photo de famille un peu particulière ?
Édouard Balladur : Oh : Décoder, c’est beaucoup dire ! C’était une réunion amicale, comme on l’a dit avant moi, et c’était une réunion qui avait également pour objet de débattre des problèmes de notre pays et de ceux auxquels il va être confronté à la rentrée. Notre pays, vous le savez, n’est pas dans une bonne situation et, psychologiquement, il connait une sorte de crise de confiance.
B. Schönberg : Quelle est la démarche de l’association que vous avez créé qui s’appelle « Pour la réforme » ? Dont-on y voir l’embryon d’un parti politique ? Une sorte d’arme de combat pour la préparation des législatives ?
Édouard Balladur : Certainement pas l’embryon d’un parti politique. C’est une association – comme il en existe d’autres, d’ailleurs, dans la majorité – qui a pour objet de réunir des hommes et femmes qui se sentent proches par leurs convictions fondamentales et qui veulent étudier un certain nombre de problèmes. La France traverse une situation très difficile. On n’a pas de trop des réflexions, des imaginations et des propositions de chacun.
B. Schönberg : Cette association est-elle ouverte à tous, sans clivage.
Édouard Balladur : Tout à fait.
B. Schönberg : Ou est-ce qu’il n’y a que vos fidèles ?
Édouard Balladur : Elle est ouverte à tous. Et d’ailleurs, j’avais organisé un colloque auquel ont pris part des hommes et des femmes venus de tous les horizons de la majorité. Mais je voudrai dire quelque chose, Madame Schönberg, si vous le me permettez : j’approuve pleinement les objectifs de la politique du Gouvernement ; retrouver la croissance économique et le progrès, faire reculer le chômage, entrer dans l’Europe. Je crois que les moyens doivent être infléchis pour être plus ambitieux et plus dynamiques. Il nous fait davantage de baisse des dépenses ; il nous faut davantage de baisse d’impôts ; il faut que nos entreprises soient alimentées par une monnaie plus abondante et meilleur marché. Le risque d’aujourd’hui, ce n’est pas l’inflation ni la hausse des prix, mais le contraire, et chacun doit en prendre conscience. Il nous faut aussi, à une époque où les problèmes de la justice et des rapports entre la justice et la politique sont sans cesse à l’ordre du jour, il nous faut enfin trouver un système qui mette les Français à l’abri de ces secousses perpétuelles que créent les rapports entre la justice et la politique. Bref, nous ne retrouverons pas le chemin du progrès économique et social sans un sursaut, sans que chacun se ressaisisse. Et, pour cela, il faut un déclic. Il faut que les Français aient le sentiment qu’il se passe quelque chose de nouveau.
B. Schönberg : Est-ce un programme de gouvernement que vous nous exposez là ?
Édouard Balladur : Non ! c’est un certain nombre de propositions que nous aurons l’occasion de développer dans les semaines et dans les mois qui viennent. Je crois très important que les Français se ressaisissent et retrouvent confiance dans l’avenir. Ce ne sera possible, je le répète, que s’ils ont le sentiment qu’il se passe quelque chose de nouveau, qu’on va plus loin, de façon plus dynamique et plus ambitieuse.
B. Schönberg : À votre avis, vous n’êtes-vous pas assez écouté ou commencez-vous à être entendu ?
Édouard Balladur : Il m’arrive d’être entendu et ça faut des mois et des mois que je réclame une baisse d’impôts plus importante. J’espère que tous ceux qui la réclament avec moi vont être entendus dans les semaines qui viennent. C’est en tout cas ce qui a été annoncé. Nous verrons bien le moment venu. Pour ce qui me concerne, la seule chose qui me motive, qui m’intéresse, c’est que notre pays se redresse et se porte mieux, et que les Français retrouvent l’espoir dans l’avenir. Je suis tout à fait disposé et déterminé à apporter ma contribution à cela.
B. Schönberg : Vous parliez de « quelque chose de nouveau ». Pour vous, est-ce un changement éventuel de Premier ministre ?
Édouard Balladur : Non, non ! Je parlais de la politique que l’on doit mener. Je répète que cette politique doit être marquée par une volonté plus forte d’abaisser les dépenses et baisser les impôts, et d’alimenter l’économie et les entreprises par une monnaie plus abondante ; et que pour cela, il faut recréer la confiance. Il faut que tous les Français se rendent compte que cela dépend bien sûr du Gouvernement, mais aussi d’eux. Il faut que cette cohésion nationale nous permette de repartir de l’avant.