Texte intégral
France Inter le mardi 19 mai 1998
France Inter : Est-il fictif d’envisager une convocation judiciaire du président de la République ? Derrière l’affaire Tibéri, c’est le fonctionnement de la mairie de Paris, dont Jacques Chirac assura la direction de 1977 à 1995, qui pose des questions : la ministre de la justice, Madame Guigou, questionnée sur la procédure, a expliqué que rien ne s’oppose juridiquement à une simple audition du président de la République en tant que témoin. Reste qu’un tel événement, par sa gravité, constituerait un bouleversement politique. L’importance de la situation et son développement ces derniers jours sont-ils le produit d’une manipulation de l’opinion, orchestrée de manière grossièrement préméditée, pour reprendre les termes du communiqué publié, hier soir, par le RPR. Y-a-t-il donc une tentative de déstabiliser Jacques Chirac ?
François Hollande : Tentative de qui ? Déstabilisation de qui ? Je crois qu’il y a une justice qui fonctionne, cela n’a pas toujours été le cas dans un passé pas si lointain. Je crois que c’est bien qu’elle fonctionne librement sans entrave, et dans la transparence. Et moins les politiques feront de commentaires sur les procédures, même si cela ne les empêche pas de faire des commentaires sur les suites à donner à telle ou telle procédure, je pense que mieux le pays s’en portera.
France Inter : Est-ce qu’il ne faut pas beaucoup de calme de tout côté, y compris chez vous, quand on voit Monsieur Glavany dire, hier : « personne – je dis, personne – n’est au-dessus des lois. » Il est clair qu’il visait Jacques Chirac. Est-ce que, là, compte tenu de la gravité de la situation, il n’y a pas intérêt à ce que tout le monde calme un peu le jeu ?
François Hollande : Il faut toujours rester calme. C’est un principe de bonne éducation et de bon comportement. En même temps, il ne faudrait pas donner le sentiment – qui serait fâcheux – qu’il y a une espèce d’arrangement entre tous les partis pour que rien ne sorte et que rien ne bouge, et que rien ne soit connu. Il faut simplement dire que la justice doit travailler, les enquêtes administratives doivent passer. On parle d’emplois fictifs à la mairie, on doit les connaître, savoir, tout simplement savoir. Je crois que cela fait partie d’une éthique de l’information et du journalisme, et qu’à partir de là, chacun fera son choix politique ou son jugement politique. Ce serait tout à fait mal venu de ma part, comme d’autres, d’aller tout de suite jusqu’au jugement. Tant qu’un jugement n’a pas été prononcé, finalement chacun est présumé innocent. C’est un bon principe.
France Inter : Mais si on pose des questions, faut-il donc poser toutes les questions ? C’est-à-dire poser la question premièrement de Roland Dumas, deuxièmement de Jean Tibéri, et troisièmement de Jacques Chirac.
François Hollande : Écoutez, ce n’est pas comparable. Je crois qu’il y a des procédures judiciaires qui donnent lieu à des mises en examen, d’autres pas. Il y a des condamnations qui peuvent être prononcées et d’autres qui ne le sont pas, bref. Essayons de bien les comprendre et de distinguer les cas. À chaque fois qu’il y a jugement – pour l’instant, cela n’a pas été le cas ni pour Monsieur Tibéri, Madame Tibéri, vous avez cité Monsieur Dumas : il n’y a pas de jugement – donc il faut garder un certain nombre de précautions. Et en même temps, cela ne doit pas nous empêcher de vouloir connaître. Et je comprends tout à fait la démarche des élus socialistes de la mairie de Paris lorsqu’ils apprennent qu’il y a eu pendant des périodes qui ne sont pas forcément récentes – cela est vrai –, qui remontent à loin, des emplois qu’ils ne connaissaient pas, des personnes qu’ils ne connaissaient pas et qui n’étaient pas dans les registres habituels des comptes de la ville de Paris. Il n’est quand même pas anormal que les élus socialistes et que les élus de gauche demandent d’en savoir davantage et demande au maire de s’expliquer. Le maire peut dire que c’était son prédécesseur, et que c’était une équipe différente ou l’administration. Bref, il peut donner ses réponses, mais on doit comprendre et on doit savoir. Je crois qu’on ne s’en sortira pas avant d’avoir eu toutes les informations nécessaires.
France Inter : Justement au moment où il y a, avait là une tentative de reconstruction un peu du paysage politique français avec la mise en place d’Alliance – qui était peut-être au fond une opportunité pour rétablir à nouveau un débat républicain entre la droite et la gauche –, tout est en train d’exploser ?
François Hollande : Il ne faut pas exagérer.
France Inter : Mettez-vous à la place de ceux qui écoutent la radio ou qui lisent les journaux ce matin, cela fait bizarre.
François Hollande : Cela fait bizarre d’apprendre qu’à la mairie de Paris, tout un système était organisé pour un parti ? C’est cela qui gêne, qui heurte la conscience. C’est de se dire qu’une mairie, qui est importante, la capitale de la France était organisée, pour partie – heureusement pas en totalité – en faveur d’une famille politique qui y était depuis vingt ans. C’est cela qui mérite, je crois, qu’on s’y arrête un moment et, ensuite, qu’on en tire des leçons. Et ensuite, il y a des regroupements politiques dont d’ailleurs personne ne comprend grand-chose, parce que moi j’ai compris que, jeudi il y avait Alliance, et que dimanche il y avait Monsieur Madelin qui sortait de l’UDF pour ensuite entrer dans Alliance. On va les laisser faire leur rapprochement, on a connu des périodes pour la gauche qui n’étaient pas bien glorieuses et bien simples. Ce que l’on voudrait dans notre démocratie, c’est bien comprendre quels sont les projets des uns et des autres. Pour la gauche, le projet c’est ce qui se fait. Dans une certaine mesure, c’est ce qui sera de nouveau proposé aux Français le moment venu, à partir du bilan de l’action gouvernementale. Pour la droite, je ne sais pas si c’est le libéralisme tendance Madelin, le gaullisme tendance Séguin ou s’il y a maintenant du Léotard. À eux de savoir ce qu’ils pensent. Pour l’instant, j’ai l’impression qu’ils ne pensent pas grand-chose, qu’ils construisent un édifice, une architecture, sans savoir comment ils vont vivre.
France Inter : Y a-t-il un projet politique à droite ou à gauche qui soit crédible aussi longtemps qu’il n’y aura pas eu une moralisation de la vie politique ? Vous parlez de la mairie de Paris, mais la question s’est posée de la même manière pour les socialistes – on ne va pas revenir aux affaires Urba qui ont d’ailleurs coûté très cher à Monsieur Emmanuelli. Est-ce qu’on peut envisager un projet politique auquel on puisse croire aujourd’hui, qui puisse mobiliser les citoyens, aussi longtemps qu’on se dit : « ils sont tous pareils, ils s’en mettent tous dans les poches » ?
François Hollande : Je suis tout à fait hostile qu’on puisse penser qu’il y a une espèce de prolongation de l’état de financement antérieur à la loi de 1990 et que les partis politiques en seraient encore à savoir comment ils se financer. Non, en 1990, il y a eu une loi de moralisation et on a dit que c’était fini et que les partis politiques ne se financeront plus comme ils le faisaient jusqu’à présent par du bricolage qui avait donné lieu à des enquêtes judiciaires et à une condamnation en ce qui concerne le Parti socialiste – pas un individu mais le Parti socialiste –. Eh bien, à partir de 1990, il doit y avoir la netteté et donc la clarté, la transparence et lorsqu’on apprend qu’après 1990, il y a eu des dévoiements, des détournements, des financements occultes, alors là on doit être d’une sévérité absolue. Justement parce qu’on est sorti d’une période de confusion et de troubles pour entrer dans une période de clarté. La moralisation est en cours, car il faut que la justice aille jusqu’au bout, il faut qu’on en termine non pas avec des périodes où on ne savait pas très bien quel était l’état de droit. Là, on le connaissait parfaitement puisqu’il y avait une loi qu’on avait votée, qui avait pu être contestée par certains, mais qui avait été votée pour justement dire : les partis se financent à partir de fonds publics liés au résultat qu’ils font aux élections et au nombre d’élus. C’est comme cela que vit le Parti socialiste et tous les partis d’ailleurs. Alors si d’autres partis se sont livrés à d’autres agissements, à d’autres moyens de financement, eh bien ils doivent être sanctionnés et sanctionnés très lourdement. Oui, il faut que la moralisation soit totale pour précisément qu’on évite cette tentation : tous les mêmes, tous pourris, etc., qui fait tant de mal à la démocratie. Cela est inacceptable et ce ne sera pas accepté par nous en tous cas.
France Inter : Vous avez raison d’insister sur le fait que la présomption d’innocence est l’une des choses les plus importantes qui soit. Reste qu’en terme d’image et encore une fois pour l’image de la politique. Pardon, mais reprenons le cas de Roland Dumas : est-ce que le fait qu’il ne démissionne pas, n’est pas finalement quelque chose d’assez grave pour ce qu’il représente : président du Conseil constitutionnel. Ce n’est quand même pas rien. Il est impliqué, il y peut-être la présomption d’innocence, mais il ne démissionne pas.
François Hollande : Lui, il considère – cela est sa position, il faut la respecter – qu’il est innocent, qu’il fait l’objet d’une poursuite judiciaire qui n’a pas de sens et il dit que cela n’entrave pas sa fonction au Conseil constitutionnel. Chaque individu peut raisonner en conscience comme il l’entend. C’est sa position. Mais ce qui compte c’est que la justice continue sur l’affaire dite Roland Dumas, comme sur, je l’espère, celle dite Tibéri ou d’autres. Il faut qu’on soit convaincu et on doit l’être parce que le garde des sceaux l’a rappelé, c’est la position du Premier ministre et en tout cas la position du Parti socialiste : rien ne doit être fait pour gêner de quelque façon la justice. Et lorsque je vois Monsieur Toubon, ancien garde des sceaux, qui lui-même avait envoyé des hélicoptères pour rechercher un juge, qui nous dit que ce juge n’est pas le bon, que la procédure… Il faut en finir avec cela. Laissons la justice. Elle peut avoir ses excès : c’est vrai, on dit quelques fois et ce n’est pas faux, qu’elle fonctionne sous les médias, sous les projecteurs, c’est ainsi. Mais laissons-la au moins aller jusqu’au bout de ses investigations. Lorsque l’investigation est terminée, il y a procès. Et quand il y a procès, il y a ou relaxe ou condamnation. Et au moins, on en sait davantage.
France Inter : Avez-vous le sentiment, aujourd’hui, encore une fois, compte tenu des enjeux engagés par les questions qui sont posées qu’en effet, aujourd’hui, la fonction présidentielle est atteinte par ces questions-là ?
François Hollande : C’est trop tôt pour le dire. Moi, je crois que si la justice démontre qu’il y avait tout un système avant 1995 qui fonctionnait en faveur d’un parti présidé par quelqu’un qui est devenu ensuite président de la République. Elle fera les investigations qu’elle estime nécessaires, et procédera aux auditions. Mais pour le moment, c’est plus sur la justice, que moi, je voudrais intervenir : protégeons-la, que sur les hommes politiques qui n’ont pas besoin d’être protégés, mais qui ont besoin simplement d’être entendus parce qu’il y a quelques informations qui pèsent sur eux. Lorsqu’il n’y en a pas, il n’y a besoin non plus de les entendre, parce qu’il n’y a pas de raison de mettre le soupçon là où il ne devrait pas être.
France Inter : Vous n’avez pas l’intention de vous en servir comme d’un outil politique ?
François Hollande : Moi, le seul message politique c’est : que la justice travaille. Je ne veux pas essayer, avant que la justice n’ait elle-même procédé à ses enquêtes, de faire le jugement à sa place.
RTL le lundi 25 mai 1998
RTL : Nicolas Sarkozy au « Grand Jury », hier soir, a été clair : Monsieur Jospin, a-t-il dit, n’a pas de leçon de morale à donner ; il était premier secrétaire du Parti socialiste au moment de l’affaire Urba.
François Hollande : Pour des hommes politiques qui demandent qu’on ne parle plus des affaires, que l’on fasse consensus, que l’on n’exagère pas ces problèmes, je pense que Nicolas Sarkozy a, une nouvelle fois, laissé parler son tempérament. Je crois que nous, socialistes, nous avons pendant des années été mis en cause par rapport à des financements avant la loi de 1990. Cela s’appelait l’affaire Urba. Un des nôtres, le trésorier, a été condamné très lourdement en notre nom, et il a même perdu ses droits civiques. Rendez-vous compte de la gravité de la sanction. Je ne dis pas que nous avons toujours respecté les lois ; il n’y avait pas de loi. Donc, ces sanctions étaient sans doute trop lourdes ; elles pesaient sur un homme, ce qui n’était pas non plus la bonne façon de procéder, puisque c’était une organisation. Mais nous, nous avons collectivement, même si c’est un homme qui a payé en notre nom, été sanctionnés. Pour le reste, il n’y a plus rien à dire sur cette période. Les autres formations politiques avaient les mêmes financements que nous avant 1990 : ils ne le disaient pas ; maintenant, des procédures sont en cours. Deuxièmement – et c’est cela le plus grave, semble-t-il –, cela a continué après les lois de financement des partis politiques. Nous, cela n’a pas continué, cela a cessé.
RTL : Vous pensez que cela a continué après, du côté du RPR ?
François Hollande : C’est ce que laissent entendre ces procédures. Faisons confiance à la justice de notre pays et regardons ce qui va se passer, sereinement. Mais nous, nous avons été jugés, condamnés, trop lourdement, mais condamnés ; un homme a payé en notre nom ; maintenant, il serait quand même paradoxal que la justice ne puisse plus enquêter ou avant 1990, ce qui pourrait effectivement laisser penser à une certaine indulgence que nous n’ayons pas eue, ou après 1990, et là, la sévérité doit être absolue.
RTL : Nicolas Sarkozy dit que l’affaire Urba fait un peu office de jurisprudence en matière de financement occulte des partis politiques : c’est au trésorier d’assumer les responsabilités, et pas à un niveau plus élevé ?
François Hollande : Nous, c’est ce qui s’est produit. On verra ce qui se passera pour les autres formations politiques. Cela a été contesté que ce fût le seul trésorier. Dans une certaine mesure, ce trésorier ne savait pas ce qui s’était passé. Nous, c’était pour le cadre d’Urba, puisqu’Urba n’était pas rattaché… On ne va pas revenir sur cette affaire, puisqu’elle a été clôturée et jugée. Mais Henri Emmanuelli ignorait jusqu’à ces événements, et pourtant, il a été condamné. Je ne sais pas ce qui se passera pour les autres formations politiques. Il y a des trésoriers – Nicolas Sarkozy l’a rappelé – qui ont été mis en examen pour le Parti républicain, pour le CDS, pour le RPR ; les procédures judiciaires sont en cours ; que la justice aille jusqu’au bout. Ce que je ne voudrais pas, c’est qu’alors que nous, nous avons été soumis à la sévérité de la justice, que maintenant, parce que cela touche des formations politiques de droite pour des faits dont certains sont postérieurs à 1990, il faudrait parler de complot. Quand il s’agissait de nous, personne ne parlait de complot : tout le monde demandait que la justice aille jusqu’au bout. Elle est allée jusqu’au bout. Eh bien, que la même chose se passe pour l’ensemble des formations politiques, et que l’on regarde bien quels étaient les financements : étaient-ils antérieurs à 1990 ou postérieurs ? Si c’est encore plus postérieur, il faudrait être encore plus sévère.
RTL : Pourquoi y a-t-il eu cette salve groupée le même week-end : Monsieur Bartolone qui évoquait des élections présidentielles anticipées, Élisabeth Guigou et Jean Glavany qui évoquaient une possible audition du président de la République par les juges ?
François Hollande : Parce qu’il ne faut pas toujours répondre aux questions des journalistes ! Donc, certains de mes amis doivent comprendre qu’à un certain moment, lorsqu’on vous interroge sur certaines personnalités, le mieux est de se taire.
RTL : C’est ce que vous allez faire ?
François Hollande : Ce que je veux faire, mais vous ne m’avez pas interrogé, car vous avez ce talent-là.
RTL : Je voudrais savoir, concernant le président de la République !
François Hollande : Ma réponse est très simple : la justice doit faire son travail ; ne préjugeons pas sur ses interventions.
RTL : La trêve que Lionel Jospin et Jacques Chirac ont tenté d’instaurer la semaine dernière sera respectée, à votre avis ?
François Hollande : De notre côté, elle l’est, et elle doit l’être, parce que je pense qu’il n’est pas bon que la vie politique soit empoisonnée par un débat sur les affaires. Il y a mieux à commenter. Nous, la gauche, nous pouvons dire ce que nous avons fait : les emplois-jeunes, la réduction du temps de travail, la relance de la croissance, la baisse du chômage. La droite peut également faire valoir son projet. Je crois qu’on redonnera confiance à la vie politique uniquement s’il y a un débat de fond, pas simplement par des jets de pierre.
RTL : Dans « Le Figaro » ce matin, Philippe Séguin dit qu’il faut un vrai statut de l’élu, qu’il faut parler du financement des partis politiques, des salaires des élus, que les maires de grandes villes ont d’énormes responsabilités en gagnant beaucoup moins que des PDG d’entreprises…
François Hollande : Distinguons les problèmes : pour le financement des partis politiques, il n’y a plus rien à faire ; je crois que la loi de 1990 a donné aux partis politiques le bon mode de financement ; cela a été, en plus, complété heureusement par d’autres dispositions. Donc, pour les partis politiques, surtout, n’y touchons plus, car nous sommes aujourd’hui dans la rectitude et le bon usage des fonds publics. Sur les élus, c’est vrai que si nous allons plus loin sur la limitation du cumul des mandats, c’est-à-dire si nous empêchons un maire de grande ville, un président de conseil général ou régional, d’être également député ou sénateur, il n’est pas du tout anormal qu’il y ait une amélioration du statut de ces maires de villes, parce qu’il est très important qu’il puisse y avoir une mobilisation de ces élus sur le seul emploi qu’ils occupent, en l’occurrence maire d’une ville. Là-dessus, le Parti socialiste est très favorable à ce qu’il y ait, en même temps que la limitation du cumul des mandats, une revalorisation du statut de ces élus.
RTL : Sur la limitation du cumul des mandats, cela chauffe ! Au PS, il y a un certain nombre de députés qui ne sont pas contents ; à droite, on ne veut pas entendre parler de l’interdiction d’être à la fois parlementaire et maire ; vos alliés, les radicaux de gauche sortent du bois et en ont marre.
François Hollande : Du bosquet, vous voulez dire ? Mais cela n’est pas grave. Un certain nombre d’élus ne sont pas forcément favorables à ce qu’on remette un certain nombre de situations acquises en cause. Je peux les comprendre, d’ailleurs, parce que souvent, ce sont des hommes et des femmes qui se battent au quotidien pour améliorer le sort de leurs concitoyens. Ils pensent, et n’ont pas toujours tort, qu’en étant à la fois maire et député, ils servent mieux leur collectivité. Nous, nous leur disons que c’est vrai qu’aujourd’hui, on ne peut plus être et député, et maire d’une ville importante, et président d’un conseil général. Mais en même temps, il faut que vous vous consacriez complètement à votre rôle d’élu. Si vous êtes député, il faut que vous soyez un véritable parlementaire. Cela ne vous empêchera pas d’être conseiller municipal ou adjoint au maire ; cela ne vous empêchera pas d’être vice-président d’un conseil général ou d’un conseil régional. Mais on ne peut pas mêler les gens, on ne peut pas confondre les intérêts locaux ou nationaux. Je crois qu’il faut faire ce pas supplémentaire vers la démocratie locale. En même temps, je le disais, il faut qu’il y ait un statut de l’élu, une amélioration de la décentralisation. Il faut que le Parlement trouve son équilibre, ce qui n’est pas tout à fait le cas par rapport à l’exécutif. Tout cela, cela va être l’objet du débat parlementaire. Les Français y sont favorables. Il faut y aller.
RTL : Les mêmes sont également très mécontents du projet de modification du mode de scrutin aux élections européennes : les Verts, le Parti communiste parlent d’hégémonisme du Parti socialiste.
François Hollande : Nous avons fait une proposition : nous avons constaté que les élections européennes n’emballent pas les Français, qu’il y a des niveaux d’abstention qui sont tout à fait insatisfaisants. Alors, nous disons : « Est-ce qu’il ne vaut pas mieux rapprocher le député européen d’une circonscription ? » On ne peut pas contester le découpage : c’est celui qu’avait proposé Monsieur Barnier, qui est pourtant de l’opposition, lorsqu’il était lui-même ministre des affaires européennes. Si nos partenaires, si nos concurrents à droite trouvent un meilleur système, nous serons tout à fait ouverts. Nous ne sommes pas là pour imposer une règle. Nous souhaitons simplement – le président de la République a eu le même vœu – qu’il y ait des députés européens que les Français connaissent au moins dans un cadre territorial donné.
RTL : Il n’y aura pas de 49-3 ?
François Hollande : Non, on ne fait pas des réformes de mode de scrutin dans le dissensus, dans le conflit et dans la brutalité. Nous sommes – cela a été prouvé – des hommes et des femmes de consensus.