Texte intégral
J'adresse en tout premier lieu mes plus chaleureux remerciements au président René Monory et au conseil général de la Vienne pour leur aide et leur accueil sur ce site si prestigieux du Futuroscope.
J'exprime également ma gratitude à Jean-Pierre Raffarin, ministre des PME, du commerce et de l'artisanat, président de la région Poitou-Charentes, dont l'aide nous a été si précieuse dans l'organisation de cette manifestation.
Vos travaux, que j'ai l'honneur de conclure, se situent au coeur de l'une des priorités essentielles du gouvernement : la lutte contre le chômage. Ils se situent aussi en cohérence avec une des orientations principales de mon département ministériel : favoriser le transfert de technologies des laboratoires publiques vers les entreprises.
Inciter les petites et moyennes entreprises à innover renforce leur position concurrentielle dans la compétition internationale et accroît leur capacité d'emploi des jeunes.
Formation
Dans cette optique, l'une de mes grandes préoccupations aux côtés de François Bayrou est d'améliorer l'adéquation de la formation de nos jeunes à leur future vie professionnelle, afin qu'ils apportent aux entreprises, et en particulier aux PME, les connaissances nécessaires à leur compétitivité.
Il s'avère, en effet, que plus de la moitié de nos jeunes iront travailler dans une PME, car c'est là que se trouve aujourd'hui le gisement le plus conséquent d'emplois productifs.
Avantage innovation
Dans un monde économique ouvert, où les entreprises sont soumises à une concurrence forte sur les produits de technologies mûres, l'innovation est le moyen le plus sûr de se démarquer, en tirant profit du niveau exceptionnel de formation de notre pays.
L'innovation constitue un avantage compétitif que les entreprises sont condamnées à constamment rechercher pour garder l'avantage sur les pays à faibles coûts salariaux et à réglementation environnementale et sociale moins rigoureuse.
Les petites et moyennes entreprises constituent, par leur versatilité et leur dynamisme, un source considérable d'innovation.
PME : synergie formation – innovation
Par ses actions en faveur de la formation et de l'innovation, notre ministère participe pleinement au plan PME du Premier ministre, Alain Juppé. Ce sont les lycées technologiques, les établissements d'enseignement supérieur et les organismes de recherche qui sont appelés à concourir pour relever ce double défi : former les hommes et soutenir les PME dans leurs projets d'innovation.
Je profite de cette occasion pour rendre hommage aux travaux interministériels de longue haleine qui ont abouti, entre autres, aux rapports du professeur Robert Chabbal sur l'innovation dans les PME.
Pour innover, les entreprises doivent pouvoir intégrer le plus tôt possible dans leurs produits, leurs procédés et leurs services, les connaissances les plus récentes en matière de technologie mais aussi d'organisation, d'ergonomie ou de gestion.
Il est donc essentiel de créer et maintenir entre les entreprises et les enseignants, chercheurs, ingénieurs et techniciens de nos unités d'enseignement et de recherche des liens étroits de coopération. Ils favorisent l'irrigation scientifique et technologique des entreprises, tout spécialement des PME.
Une telle démarche est profitable à tous les acteurs : les entreprises, bien sûr, trouvent un appoint à leurs propres forces, mais les enseignants et les chercheurs puisent aussi les éléments essentiels pour adapter le contenu de leur enseignement et orienter leurs travaux de recherche pour les besoins de la nation.
Les jeunes diplômés surtout, techniciens, ingénieurs, docteurs trouvent dans cet apport réciproque de l'enseignement et de la recherche à l'industrie, un facteur souvent décisif de leur insertion dans le monde professionnel. À ce titre, je considère que les différentes formules de stages longue durée avec accompagnement technologique, les CORTECHS, les CIFRE sont excellentes et méritent d'être poursuivies et amplifiées.
Il s'agit là, en effet, de mesures qui atteignent simultanément trois objectifs :
– elles assurent une formation pratique en entreprise ;
– elles permettent un transfert des techniques et des connaissances les plus récentes dans l'entreprise ;
– enfin, elles facilitent l'embauche stable des jeunes.
C'est donc un véritable partenariat que j'entends développer entre les PME, l'enseignement et la recherche.
Innovation dans les PME
Les travaux que vous avez conduits durant ces deux journées concernent plus précisément le volet innovation du partenariat avec les entreprises.
L'essence de la réussite d'un tel partenariat est la confiance. Elle ne pourra s'établir que dans un climat de compréhension réciproque, qui nécessite l'expression de part et d'autre d'un grand professionnalisme. Ce sérieux que je préconise et que je compte asseoir sur des mesures concrètes, concerne, entre autres, deux dispositifs clefs de l'interface avec les entreprises :
– les conseillers en innovation et technologie ;
– les centres de ressources technologiques (CRT).
Les conseillers en innovation et technologie
Les conseillers en innovation et technologie ont pour métier de détecter par des visites régulières, les besoins latents ou explicites des entreprises, par l'établissement de relations de confiance avec les entrepreneurs.
Ils ont une mission de service public parce qu'ils sont financés par des fonds collectifs et qu'ils sont indépendants de l'offre de prestations technologiques. Ils devront faire preuve de ce professionnalisme que nous attendons d'eux, sans lequel, leur action ne pourra satisfaire l'exigence de leurs clients, les PME.
L'État compte assumer sa responsabilité dans l'amélioration générale de la qualité des services d'innovation aux PME. C'est pourquoi l'action des conseillers en innovation et technologie sera coordonnée dans le cadre d'un comité de pilotage régional réunissant :
– le directeur régional de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE) ;
– le directeur régional de la recherche et de la technologie ;
– le délégué régional de l'ANVAR ;
– et, bien entendu, un représentant du conseil régional.
Les centres de ressources technologiques
Par ailleurs, les centres de ressources technologiques regroupent en un même lieu des ingénieurs et techniciens qui, avec des enseignants et des chercheurs, s'engagent à répondre, en termes professionnels, à la demande technologique des PME. Ils sont particulièrement soumis à des obligations de résultats, de coût, de délai et de confidentialité.
Ils sont spécialisés sur une technologie particulière, comme par exemple, la métrologie, les traitements de surface, le formage des matières plastiques, la mécanique industrielle ou l'extraction d'éléments essentiels en agroalimentaire.
Le gouvernement a décidé, dans le cadre de la composante innovation du plan PME, de soutenir, dès 1996, les centres de ressources technologiques dont le professionnalisme aura été reconnu.
La contribution de mon ministère à cette opération consiste, tout d'abord, en coopération étroite avec les ministères en charge de l'industrie et des PME, à mettre en place la procédure de reconnaissance de la qualité de centre de ressource technologique à partir d'un cahier des charges établi avec l'aide des spécialistes de l'AFNOR.
Les dossiers des CRT seront alors examinés, après une évaluation conduite par l'AFNOR, par une commission indépendante présidée par un industriel et composée en majorité de patrons de PME. Elle recommandera ou non la reconnaissance.
Ensuite, chacun sait qu'il y a plus de difficultés à travailler avec les PMI qu'avec les grands groupes : les contrats sont en général d'un montant moins élevé et nécessitent beaucoup plus d'efforts pour leur mise au point.
Pour compenser ce surcoût et inciter davantage les CRT à travailler avec les petites entreprises, j'ai donc décidé de mettre en place, à titre expérimental, dès cette année 1996, dans quelques régions, un financement par abondement : l'aide apportée aux CRT sera directement proportionnelle au montant des contrats réalisés avec des PMI.
J'ai réservé à cet effet, sur le fonds de la recherche et de la technologie, une enveloppe indicative de 20 millions de francs.
C'est donc un encouragement que je lance aujourd'hui à ceux qui, dans les écoles d'ingénieurs, les universités, et en particulier les IUT, les lycées technologiques, se sentent attirés par cette forme de participation au développement technologique national par des prestations techniques.
Complémentarité avec le secteur privé
Qu'on me comprenne bien. L'abondement aux actions des CRT est réservé aux programmes qui ne peuvent pas être financés par les mécanismes de marché. Il doit compenser les surcoûts de transaction rencontrés quand les CRT doivent travailler avec des PME peu enclines et peu armées pour chercher à étendre leur portefeuille technologique.
Je suis très attaché à ce que les dispositifs mis en place par l'État ne viennent pas perturber le marché de la prestation technologique. Mon collègue Franck Borotra et moi-même sommes convenus d'étudier en détail l'articulation entre les procédures publiques et le marché privé du conseil, afin d'éviter toute concurrence déloyale.
Bien au contraire, nous sommes déterminés à fournir à la libre entreprise, les conditions propres à son développement, tout en insistant sur la nécessaire qualité des prestations.
Cohérence du secteur public
Bien entendu, la cohérence des aides publiques aux prestations liées à l'innovation est fondamentale. Je réfléchis en ce moment, aux côtés de François Bayrou et avec mes collègues Franck Borotra et Jean-Pierre Raffarin, à ces questions d'articulation et d'efficacité, dans un contexte économique évolutif.
Je rappelle, à ce titre, que l'innovation ne peut exister si les PME ne trouvent pas un financement adapté aux risques spécifiques de leurs projets. Le développement du capital-risque et l'émergence du nouveau marché sont, à ce titre, des facteurs clefs de réussite. L'ANVAR joue et jouera son rôle dans cette perspective, non seulement par son aide au conseil, mais aussi par ses soutiens financiers aux PME.
Prise en compte du transfert de technologie dans l'évaluation
Le cadre administratif est maintenant défini grâce à l'existence des CRT pour lesquels une procédure officielle d'évaluation va, comme je viens de le dire, être mise en place. Il devient donc possible de prendre en compte, dans d'évaluation des carrières des ingénieurs, techniciens et administratifs (ITA), des enseignants et des chercheurs, leur contribution aux transferts de technologie.
Dans les contrats d'objectifs que je signerai avec les établissements ou les organismes de recherche, je veillerai à intégrer le transfert de technologie comme une des missions essentielles. Je demanderai, à cet effet la mise en place de critères de résultats précis.
J'attire aussi l'attention des présidents d'université et des directeurs d'IUT sur leur position tout à fait privilégiée pour répondre efficacement à la demande des PME.
Les IUT sont bien répartis sur l'ensemble du territoire, proches des bassins industriels et donc des entreprises ; leur personnel fait preuve d'une grande compétence technologique et a souvent conservé des liens étroits avec la recherche ; ils disposent d'équipements performants qui, en dehors de leur usage pédagogique, pourraient être utilisés pour des prestations technologiques.
Ces conditions sont donc favorables pour faire de ces établissements un support bien adapté à la création de CRT, qui pourraient s'appuyer sur des laboratoires de l'université, mais aussi attirer des enseignants des lycées technologiques proches.
Je demande à chacun d'entre vous de ne pas hésiter, en fonction de la demande des entreprises, à susciter la mise en place de centres de ressources technologiques. En effet, comme je l'ai déjà indiqué, il est de votre mission de favoriser le rapprochement avec les PME.
Nécessité d'une coordination et d'un retour d'expérience
Le travail que vous avez accompli au cours de ces deux journées, et les réalisations présentées dans le cadre de l'exposition montrent qu'un progrès considérable a déjà été effectué pour professionnaliser les services à l'innovation.
Vous avez étudié les problèmes de gestion, de fiscalité, de comptabilité analytique, posés par ce type de structure, examiné les formes juridiques les mieux adaptées, les statuts des personnels… Ces échanges d'expériences et cette capacité de dégager ensemble les meilleures solutions me paraît la méthode la plus concrète et la plus efficace pour avancer.
Mes services sont, bien entendu, prêts à vous aider en rassemblant et rediffusant les « bonnes pratiques » dont l'efficacité a été constatée.
Je m'attacherai, pour ma part, à veiller, aux côtés de François Bayrou, et avec l'appui des directions du ministère, à ce que la participation au transfert de technologie dans un cadre bien défini, évaluable, ayant toute la transparence souhaitée en matière financière, soit prise en compte au titre de la mobilité, de manière valorisante, dans le cursus des enseignants, des chercheurs et des personnels techniques.
Final
Avant de conclure, laissez-moi remercier les organisateurs de ces deux journées de travail, dont le succès est, semble-t-il, unanimement reconnu. Il présage bien de la mobilisation générale pour l'innovation et pour l'emploi.
La recherche, publique ou privée, est le ferment de notre excellence technologique. Pour notre pays, c'est un atout capital que nous devons exploiter par tous les moyens, avec tout notre enthousiasme et toute notre intelligence.
Pour ma part, je ne ménagerai pas mes efforts pour convaincre les laboratoires et les entreprises de l'immense avantage réciproque qu'ils tirent de leurs travaux communs. C'est de leur rencontre que naissent les innovations les plus spectaculaires. C'est par leur rencontre que notre pays maintiendra sa place dans l'économie mondiale et offrira à nos enfants les perspectives d'avenir et d'emplois que nous leur devons.