Texte intégral
Messieurs les directeurs généraux, messieurs les directeurs,
Mesdames et Messieurs les professeurs,
Mesdames et Messieurs,
C'est pour moi un grand plaisir de clôturer, ce soir, ce colloque qui marque le 25ème anniversaire des trois instituts nationaux polytechniques, les INP comme nous les appelons de manière abrégée. J'en suis particulièrement heureux pour plusieurs raisons :
D'abord, parce que vous me donnez l'occasion de saluer des établissements qui contribuent autant à notre rayonnement intellectuel qu'à notre vitalité économique.
Vos trois instituts, constituent en effet une force de frappe considérable : ils regroupent actuellement 21 écoles et délivrent chaque année environ 2 200 diplômes d'ingénieurs, soit près de 16 % du flux national. A ces diplômes d'ingénieurs, il convient d'ajouter, comme vous le savez, 500 doctorats.
En 25 ans, le nombre d'élèves ingénieurs a été multiplié par trois, le corps professoral a doublé, regroupant aujourd'hui quelques 800 enseignants-chercheurs, et les budgets ont été multipliés par 6.
Ce bilan est remarquable. Et les appréciations particulièrement élogieuses des chefs d'entreprise qui ont embauché vos anciens élèves, le confirment. Plus qu'une formation scientifique et technique du meilleur niveau, vous avez su insuffler aux jeunes générations d'ingénieurs cet esprit d'entreprise et d'initiative dont nous avons aujourd'hui tant besoin pour défendre notre compétitivité et conquérir de nouveaux marchés.
Cette volonté d'entreprendre, il faut la cultiver, en donner le goût à tous, et c'est là toute la responsabilité des professeurs.
Mon deuxième motif de satisfaction renvoie plus particulièrement à ma fonction de secrétaire d'État à la recherche.
L'attention que vous portez à votre mission de recherche, et de formation par la recherche, mérite en effet d'être mise en avant. Pourquoi ? Parce que vous la menez en vous efforçant de conserver un bon équilibre entre les projets exploratoires à long terme et ceux plus directement liés à une demande industrielle précise et urgente.
Vous m'avez mentionné l'existence de plus de 1 000 contrats de recherche actuellement en cours d'exécution dans vos laboratoires, plus de 70 brevets maintenus au niveau international, mais aussi la création de 11 entreprises industrielles contrôlées par vos instituts.
Ce résultat est tout à votre honneur. Vous savez que, si la France est la nation au monde qui consacre, au titre du budget civil, la plus forte part de son produit intérieur brut à la recherche et développement, elle n'est pas championne en matière de valorisation.
Nous ne valorisons pas autant que nous pourrions le faire les produits de notre recherche. Nous avons surtout du retard par rapport à certains de nos concurrents.
Je reviens des États-Unis où j'ai pu constater le dynamisme et l'esprit d'initiative des chercheurs et des professeurs. Les enseignants ont coutume de passer en moyenne un jour par semaine à travailler pour une entreprise.
Certains d'ailleurs franchissent le pas et créent leur propre société. Ils y consacrent un ou deux années « sabbatiques », avant de revenir occuper leur chaire d'origine. J'ai rencontré des chercheurs qui avaient fondé plusieurs entreprises successives.
On peut aussi observer des parcours qui seraient considérés ici comme extravagants : ce professeur d'université (Anita JONES), par exemple, qui a monté une industrie de haute technologie employant 30 personnes, et anime maintenant la direction de la recherche de défense à Washington.
Bien sûr ces expériences sont facilitées par la disponibilité des capitaux à risques. Les fonds de pension et les investisseurs privés n'hésitent pas à parier sur des technologies nouvelles. Le NASDAQ leur offre un marché de sortie liquide pour réaliser leurs bénéfices.
C'est pourquoi j'attache une grande importance à la création récente du Nouveau Marché. Le succès de l'introduction de la première société cotée, lnfonie, est, je l'espère, le gage d'une progression rapide de cette bourse des sociétés de croissance.
Nous ne ferons pas l'erreur de laisser les investisseurs sans capacité de compréhension et d'analyse des innovations technologiques proposées par les petites entreprises. J'ai donc demandé à l'ADIT (Agence pour le développement de l'information technologique) de développer une activité de conseil technologique, ADIT finance, pour permettre aux acteurs de se rencontrer, de parler et de comprendre le même langage de croissance et d'innovation.
ADIT finance mettra à la disposition des investisseurs et des sociétés de conseil les connaissances accumulées au sein de son réseau de correspondants dans le monde.
Afin de faciliter cet essaimage et cette valorisation de notre recherche, essentielles pour la compétitivité de notre pays, je suis résolu à donner aux enseignants et aux chercheurs entreprenants toutes les facilités pour faire profiter l'économie de leurs inventions.
D'une part, j'ai repris avec vigueur la question de l'intéressement des chercheurs publics aux résultats de leurs travaux. Je suis, pour ma part, favorable à ce que les redevances qu'ils reçoivent à titre personnel soient déplafonnées.
En cas de grande découverte valorisée dans l'industrie, il est normal que l'organisme de recherche en profite, que le laboratoire y gagne, mais aussi que le réel inventeur ait sa juste part. Je prépare à cet effet les textes réglementaires qui permettront ces bénéfices exceptionnels.
D'autre part, je compte clarifier les conditions dans lesquelles un chercheur public peut en même temps assumer ses responsabilités dans son organisme ou son université et travailler à la valorisation de ses inventions dans une entreprise.
Je déplore en effet une certaine insécurité juridique qui freine même les plus dynamiques. J'examine les textes juridiques qui clarifieront les droits et les devoirs ainsi que les méthodes d'évaluation des carrières qui reconnaîtront et encourageront la valorisation des recherches.
Enfin, les associations ou les filiales d'universités, d'organismes ou d'écoles d'ingénieurs qui permettent concrètement de traiter les contrats de service avec les entreprises sont encore diverses et complexes.
Nous devons veiller à maintenir un équilibre entre la transparence de gestion et l'efficacité. Peut-être pourrions-nous songer à une nouvelle structure juridique utilisable par tous qui rénoverait et clarifierait ces relations ?
En choisissant comme thème de votre colloque « les ingénieurs du XXlème siècle. Leur rôle dans la société », vous avez posé une question essentielle. Vous avez bien mesuré, je crois, combien l'ingénieur se trouve au cœur des interactions entre science, technologie, culture et société.
Vous avez conscience du virage, et même du virage relevé, que prend notre société toute entière. Vous avez compris que, dans la formation de nos futurs ingénieurs, l'apport des sciences économiques et sociales était fondamental.
Surtout, vous vous êtes préoccupés des formes plus actives que peuvent prendre vos relations avec les entreprises, en particulier en matière de recherche.
A tous ces égards, vos débats sont des exemples à suivre et à renouveler. Ils dessinent les contours de notre avenir technologique et décrivent les conditions de notre prospérité.