Texte intégral
Monsieur le Ministre,
Messieurs les Ministres,
Mesdames les Présidentes,
Messieurs les Présidents,
Mesdames, Messieurs, Chers Amis Paysans,
Aujourd'hui, je suis particulièrement heureux. En effet, avec nos collègues de différents pays du Sud, lors de nos discussions à Ouagadougou, à Dakar, à Bobo Dioulasso, à Cancun, il nous est apparu urgent de faire entendre notre voix.
Eh bien, mes Amis, avec émotion et fierté, aujourd'hui nous pouvons dire que nous l'avons fait !
Nous l'avons fait sur l'initiative des organisations professionnelles agricoles. Et avec l'AFDI, avec FARM, nous avons pu mette en ?uvre cette conférence où les paysans ont pris la parole à 15 jours de ce rendez-vous très important de Hong-Kong.
Alors merci.
Merci à tous les paysans du Sud qui ont pu participer activement à cette conférence.
Merci à toutes celles et tous ceux qui ont donné tant de vie et de richesse à cette manifestation.
Merci à toutes celles et tous ceux qui ont ?uvré pour l'organisation et la réussite de nos deux journées.
Merci pour leur soutien à Groupama, au Crédit agricole, au ministère des Affaires étrangères et au ministère de l'Agriculture.
Merci aussi à nos amis malgaches qui ont réalisé la pochette qui contenait les documents de ces journées.
Monsieur le Ministre, avec vos homologues, vous allez participer aux négociations de l'Organisation Mondiale du Commerce à Hong-Kong.
A la veille de cette échéance, nous, les paysans du Nord et du Sud, nous avons tenu à nous exprimer en espérant que tout ce qui a été dit ici ne restera pas lettre morte. Lorsqu'on veut bien nous écouter, on se rend compte combien nous sommes proches les uns des autres, à quel point nos positions se rejoignent et combien nous partageons les mêmes valeurs.
Ainsi, à notre façon, avec nos mots, avec nos différences culturelles, nous avons réaffirmé notre mission première, celle de nourrir les hommes ; nous avons insisté sur cette agriculture à dimension familiale qui est essentielle pour assurer, sur toute la planète, l'occupation et l'aménagement des espaces cultivables, l'équilibre économique et social de nos sociétés, le développement de l'activité et des emplois, le respect de nos cultures et de la place des femmes dans la société.
C'est la raison pour laquelle, Monsieur le Ministre, un produit agricole n'est pas un objet de commerce comme tous les autres : il mérite un traitement différent.
Nos fermes ne sont pas délocalisables et, en faisant disparaître les agriculteurs, ce n'est pas seulement le chômage que l'on fait apparaître, mais aussi la désertification, l'émigration, la pauvreté, l'insécurité, la perte d'indépendance nationale.
Nous ne voulons pas d'une mondialisation débridée. Nous sommes pour une mondialisation à visage humain. Une mondialisation où la dimension de l'Homme l'emporte sur les biens marchands. Nous en avons donné l'illustration pendant ces deux jours.
Ici le dogme de la libéralisation des échanges a volé en éclat. Tout le monde l'a dit, en particulier nos amis africains. Disposer de systèmes de protection est vital pour ne pas ruiner les agriculteurs, pour permettre des prix rémunérateurs, pour garantir et faire respecter nos différences sociales et culturelles.
Il n'est pas acceptable d'envisager, dans chacun de nos pays, sur nos marchés, l'alignement des prix sur le niveau le plus bas dans le monde. Ce serait suicidaire, ruineux pour la plus grande majorité des paysans du monde.
Chaque pays ou groupe de pays doit avoir la liberté d'affirmer sa souveraineté alimentaire, de décider de sa politique agricole avec toutes les conséquences économiques et sociales qui en découlent.
Mais les soutiens des pays développés ne doivent pas déstabiliser les agricultures du Sud, en servant de support à des politiques d'exportation agressives et d'aide alimentaire en nature, destructrices des économies locales.
En un mot, nos discussions conduisent à lier :
- soutien avec maîtrise des productions
- soutien avec régulation de l'offre
- soutien avec organisation des marchés
Ensemble, paysans du Nord et du Sud, nous estimons qu'il serait catastrophique et irresponsable, Monsieur le Ministre, que les choix des négociateurs de l'OMC se fassent au détriment de toute souveraineté alimentaire nationale ou régionale.
Ce serait faire triompher le court terme au détriment de l'avenir.
Ce serait sacrifier, demain, les conditions de vie et d'alimentation de nos petits-enfants.
Ce serait prendre des risques énormes sur l'évolution du monde.
Il est sans doute encore temps de reprendre ses esprits, de revenir sur ce qui a été mal fait.
Nous demandons aux responsables politiques de nous écouter et d'organiser le commerce mondial avec des règles permettant à chacun, dans le respect de l'autre, d'assurer son développement en symbiose avec sa culture et la réalité de ses marchés de proximité.
Nous demandons à nos responsables européens de rediscuter les accords de partenariat, les fameux APE, qui vont pénaliser rapidement nos partenaires du Sud.
Pour ma part, avec mes amis français, je voudrais simplement rappeler que l'Union européenne représente d'abord un modèle de développement dont certains aspects peuvent être déclinés dans les pays en développement.
Nous sommes vos partenaires et je peux vous affirmer notre volonté de faire vraiment du cycle de Doha le cycle du développement. Dans mon esprit, deux avancées sont prioritaires : sauver la production africaine de coton par la réforme du marché et ouvrir les marchés de tous les pays développés aux produits agricoles des Pays les Moins Avancés (PMA), à l'exemple du "tout sauf les armes" européen.
Monsieur le Ministre, les paysans du monde ont un bon sens commun. Les paysans français, africains, nord-africains et malgaches l'ont exprimé ici.
Nous faisons beaucoup ensemble au quotidien et notamment avec l'Afdi dont nous fêtons les trente ans : cela ne se sait pas car nous privilégions le souci de l'efficacité sur celui de la communication. Nous sommes paysans, nous sommes solidaires : c'est un pléonasme souvent nécessaire à répéter.
Nous n'accepterons pas que l'agriculture soit la variable d'ajustement des négociations internationales en cours.
Doha est le cycle du développement et comme chacun le sait, la première étape du développement est l'agriculture. Une agriculture qu'il ne faut pas déstructurer, désorganiser et détruire mais au contraire soutenir, organiser et moderniser. En pensant sans cesse aux hommes et aux femmes qui veulent chaque jour en vivre.
Merci à tous !
(Source http://www.fnsea.fr, le 2 décembre 2005)