Interview de M. Bernard Van Craeynest, président de la CFE CGC, dans "Cadresattitude" d'octobre 2007, sur les négociations engagées sur la modernisation du travail.

Prononcé le 1er octobre 2007

Intervenant(s) : 

Média : Cadresattitude

Texte intégral

Question : Que pensez-vous des négociations sur la "modernisation du travail" ?

Réponse : Elles sont dans la continuité de ce qui a été entamé fin 2006 avec la constitution de plusieurs groupes de travail qui ont abouti à la réunion du 19 juin 2007 où a été décidé le lancement de cette négociation. Celle-ci se déroule selon une méthode qui nous ravit et qui nous change des sessions jusqu'à une heure du matin ! Se réunir tous les vendredis matin, 3 h et demie, pas plus, c'est une idée de cadre bien organisé dans sa vie professionnelle. C'est une idée de la CFE-CGC ! Sur le fond, sans préjuger des résultats de la négociation, on ne peut que regretter que le gouvernement ait imposé en parallèle la fusion ANPE-Unedic. Nous sommes là face à un dossier qui impacte le fonctionnement du marché du travail et qui aurait dû être négocié avec les partenaires sociaux.

Q : Comment votre Confédération s'organise-t-elle dans cette période ?

R : Nous devons gérer des problèmes de staff compte tenu de la multiplication des chantiers et des délais imposés : on nous demande de courir un marathon mais on nous fait démarrer comme pour un 100 mètres ! Il faut donc jongler avec le temps. Nos homologues syndicaux ont le même problème. Et ce qui est rassurant, les cabinets ministériels aussi. Involontairement, ce sont eux qui servent de garde-fous à des excès de réforme dans la mesure où ils sont débordés et ne peuvent pas aller plus vite. On l'a vu par exemple lors du Grenelle de l'Environnement. Le ministère avait promis un document de travail pour le jeudi 11 octobre. Il est bien sorti à temps, mais édulcoré du nucléaire, des pesticides, de la gouvernance...

Q : Quelle est votre implication personnelle dans les négociations ?

R : Une partie de mon rôle est la représentation médiatique : interventions radio, interviews, plateaux télé... Il y a de très nombreux contacts en tête à tête ou en délégation avec les ministres concernés. Quant au président de la République, je l'ai vu plusieurs fois depuis cet été, notamment en petit comité avec son conseiller pour les Affaires sociales, Raymond Soubie. Je suis frappé à chaque rencontre avec le chef de l'État par sa méthode : on s'occupe d'un dossier ; il dit ce qu'il a à dire ; je lui réponds pour faire passer notre message. Exemple : au moment où se mettait en place le "paquet fiscal", j'ai la faiblesse de croire que c'est la CFE-CGC qui lui a fait comprendre à quel point le forfait jour concernait aussi les cadres.

Q : En fin de compte, quelle est la différence de la CFE-CGC avec les autres syndicats ?

R : Notre Confédération a une assise plutôt centrée sur le secteur privé : métallurgie, banques, agrolimentaire, chimie, santé... Elle est donc plus à même que d'autres de comprendre les mécanismes économiques, la mondialisation... La CFE-CGC est ancrée dans l'économie concurrentielle et veut mettre en exergue son pragmatisme. Nous ne sommes pas guidés par l'idéologie. Exemple : nous sommes d'accord pour examiner le principe de séparation d'un commun accord entre l'entreprise et le salarié, proposé par le Medef, à condition qu'il y ait des contreparties au niveau de l'assurance-chômage.

Une autre spécificité est notre combat pour le pouvoir d'achat des cadres. Il y a des personnes locomotives dans toute organisation économique, elles ont besoin d'être reconnues. Or des études comme celle du sociologue Louis Chauvel démontrent que le pouvoir d'achat des cadres est identique à celui d'il y a 40 ans. Il faut envoyer des signaux de motivation aux cadres concernant leur revenu net disponible. Sinon, on court le risque que certains baissent les bras ou partent à l'étranger. Il faut accompagner les éléments dynamiques pour tirer le pays vers le haut, par opposition à des raisonnements corporatistes ou séculaires. Nous savons qu'il faut créer de la richesse avant de songer à la distribuer.


source http://www.cfecgc.org, le 4 janvier 2008