Texte intégral
STEPHANE SOUMIER
Tiens, on va juste modifier vos habitudes, bonjour Mounir MAHJOUBI, merci beaucoup de venir nous voir encore ce matin donc pour nous parler du Consumer Electronic Show de Las Vegas, mais justement, on va rentrer dans le dur avec Anthony MOREL qui nous raconte ça tous les matins, on a été bluffé par une technologie française, ensemble, Anthony, qu'on va raconter, alors, et c'est davantage du B to B, c'est plus entreprises pour entreprises, mais ça aussi, c'est important d'ailleurs, ce n'est pas juste des gadgets…
ANTHONY MOREL
Mais oui, exactement, voilà, ça sort un peu, voilà des gadgets, des objets connectés, et puis même, de toutes les innovations fondamentales grand public, là, cette incursion dans le B to B, avec une start-up qui s'appelle PROOVSTATION, qui veut simplifier et automatiser l'état des lieux du véhicule, vous savez, quand vous louez une voiture, il y a toujours ce moment un peu pénible, un peu embarrassant, vous faites le tour de la voiture avec le gars du service de location, ah, non, mais, je vous jure, Monsieur, la rayure, elle était déjà sur le rétroviseur avant, ce n'est pas moi qui l'ai faite, etc, c'est toujours un petit peu pénible, et donc eux, ils veulent simplifier ça, ils ont mis au point, et c'est ce qui est présenté au CES, un portique intelligent, qui est bardé de capteurs, d'appareils photo, de caméras, et qui va inspecter une voiture en trois secondes chrono, c'est-à-dire que quand vous rendez la voiture, vous allez passer sous ce portique, qui est comme un portique d'aéroport, mais au gabarit d'une voiture évidemment, quand vous entrez dans le parking. Les caméras se mettent en marche, vont prendre en photo et scanner la voiture sous tous ses angles et vont analyser et détecter au millimètre près la moindre éraflure, la moindre rayure, le moindre dommage, donc il faudra faire très attention avec les voitures à l'avenir, et va générer un rapport géolocalisé, horodaté en temps réel, voilà pour le loueur de voitures et pour l'utilisateur.
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STEPHANE SOUMIER
Vous voulez apporter un mot de commentaire, Mounir MAHJOUBI ?
MOUNIR MAHJOUBI
Non, je découvre, et je trouve ça formidable, et il faut le rappeler, au CES, cette année, il y en a certains qui me disaient hier : c'est encore plus gros que le Salon de l'automobile…
STEPHANE SOUMIER
C'est ce dont on parlait ce matin…
MOUNIR MAHJOUBI
C'est impressionnant.
ANTHONY MOREL
C'est devenu plus important que le Salon de Détroit par exemple qui était le Salon de référence aux Etats-Unis pour la voiture, et ils ont vraiment perdu des plume ces dernières années parce qu'aujourd'hui, les constructeurs, eh bien, maintenant, réservent leur budget com. et leurs grosses annonces au CES de Las Vegas.
STEPHANE SOUMIER
Vous nous disiez quoi tout à l'heure, Anthony, MERCEDES ?
ANTHONY MOREL
Par exemple, MERCEDES, ils ont présenté leur dernier coupé 4 portes qui était une des grosses annonces attendue cette année, et qui n'est même pas un modèle particulièrement bourré de technologies, en plus, mais simplement, c'est the place to be pour tous les constructeurs automobiles, et donc ils ont décidé de présenter ça au CES de Las Vegas, HARLEY DAVIDSON aussi pour leur moto électrique, ils l'ont présentée au CES de Las Vegas, et on peut parler des équipementiers français, VALEO par exemple, qui est très présent depuis des années là-bas…
MOUNIR MAHJOUBI
Enorme stand cette année, et j'ai eu hier les responsables qui m'ont dit qu'ils n'ont jamais fait autant de rencontres business, là, ils ont fait un stand de démo, et surtout, un énorme stand de rencontres, et là, ils rencontrent des prestataires, des futurs clients et distributeurs.
STEPHANE SOUMIER
C'est ça qui se joue aussi en ce moment, Mounir MAHJOUBI, on va reparler de la French Tech, et moi, je veux absolument, pour le dernier des rendez-vous se fixe, que vous alliez un peu plus loin sur la phrase que vous avez prononcée déjà deux fois, qui vous tient à coeur et qui est peut-être la phrase la plus importante finalement : il n'y a pas deux France, il n'y a pas la France de la French Tech et la France des gilets jaunes, mais d'abord, ce qu'on vit en ce moment, c'est une accélération technologique peut-être sans précédent, et j'ai l'impression que tout le monde a peur de passer à côté de quelque chose, ce qui explique peut-être cette frénésie, non ?
MOUNIR MAHJOUBI
Il y a une accélération technologique, c'est vrai, et donc ça change complètement notre façon d'être vis-à-vis de ces technologies, on a des boîtes qui ont investi depuis longtemps, qui ont recruté, qui ont formé tous leurs salariés, et donc face à cette accélération, ces boîtes-là, elles n'ont pas peur, ces entreprises, elles sont prêtes à courir derrière… VALEO par exemple, VALEO, il y a quelques années, on n'aurait pas dit que ça allait être une des boîtes françaises les plus innovantes.
STEPHANE SOUMIER
Ça, c'est clair !
MOUNIR MAHJOUBI
Aujourd'hui, c'est une des boîtes les plus innovantes sur le véhicule autonome, c'est celle qui a énormément d'ingénieurs en intelligence artificielle, qui font de la recherche sur l'optique vision, etc., c'est impressionnant ce qu'ils font, dans les start-up, c'est pareil, sauf que les start-up, elles sont un peu différentes, elles ne sont conçues et construites que par des gens qui aiment cette accélération du temps technologique, mais ce qui est très important, c'est que nos PME, nos ETI à côté, elles vivent cette même accélération, et pour ça, moi, je pense qu'il n'y a qu'un seul, c'est qu'il y a une interpénétration entre les start-up et les ETI, il faut qu'il y ait plus d'ETI qui les utilisent, qu'il y ait plus de gens qui passent de l'un à l'autre. Et c'est comme ça qu'on va créer des supers champions…
STEPHANE SOUMIER
Ça peut fonctionner ça, moi, les exemples que j'ai vus à chaque fois, c'était finalement des start-up qui petit-à-petit commençaient à s'endormir quand elles se mettaient à être récupérées par des ETI ou par des grands groupes, Mounir MAHJOUBI…
MOUNIR MAHJOUBI
Quand je parle d'ETI, ce n'est pas forcément de se faire absorber, c'est de devenir leurs clients, de devenir leurs…
STEPHANE SOUMIER
Oui, voilà, c'est ça, des partenariats…
MOUNIR MAHJOUBI
Eh oui, et là, une ETI qui fait du gros industriel, et qui intègre comme outil de visualisation, comme outil de performance, DCBrain, dont on a parlé hier, eh bien, cette ETI, elle va se transformer grâce à une start-up, et elle va apprendre, elle va se comporter différemment.
STEPHANE SOUMIER
Là-dessus, la commande publique, elle peut être importante ? Est-ce que la commande publique, elle peut injecter, parce qu'ils ont besoin de preuves de concepts, ces ETI, ils ont besoin d'être sûrs de la fiabilité de la start-up avec laquelle ils vont travailler, et c'est là où la commande publique peut être un levier important…
MOUNIR MAHJOUBI
La commande publique, la commande des grands groupes, la commande des ETI, sur la commande publique…
STEPHANE SOUMIER
Oui, mais elle y est prête, la commande publique, Mounir MAHJOUBI ?
MOUNIR MAHJOUBI
Oui, et vous savez que j'ai annoncé, ça va devenir une réalité, là, cette année, qu'on allait ré-hausser le seuil à partir duquel on peut… jusqu'au quel on a le droit de faire ce qu'on appelle un contrat avec une mise en concurrence simple, c'est un gros mot, mais ça veut dire que l'acheteur public, il n'est pas obligé de faire un appel d'offres traditionnel, qui prend beaucoup de temps, et qui fait surtout qu'on exclut 100 % des start-up parce qu'avec un appel d'offres traditionnel, elles ne peuvent pas rentrer et candidater, eh bien, là, on a passé ce seuil à 100.000 euros, ce qui va permettre de pouvoir faire plus qu'une preuve de concept, pour pouvoir avancer, il faut quand même mettre une mise en concurrence entre plusieurs start-up, mais on pourra aller jusqu'à très loin, ça, ça va faciliter l'achat aux start-up…
STEPHANE SOUMIER
Alors question aussi que finalement me posait hier un start-uper, sachant que vous reveniez encore aujourd'hui, alors, franchement, on n'en avait pas parlé ensemble, donc vous sortez votre joker, et dans la Fonction publique, où sont les start-up de la Fonction publique, où sont les start-up de la modernisation de l'Etat…
MOUNIR MAHJOUBI
Vous êtes dur, elles sont très nombreuses…
STEPHANE SOUMIER
Me demandait-il…
MOUNIR MAHJOUBI
Elles sont très nombreuses. Je dirige une administration qui s'appelle la DINSIC, qui s'appelle maintenant Tech.Gouv, qui est dirigée Nadi BOU HANNA, à l'intérieur, il y a les start-up d'Etat, près d'une centaine de start-up d'Etat…
STEPHANE SOUMIER
Mais qui font quoi alors, Mounir MAHJOUBI ?
MOUNIR MAHJOUBI
Alors, je vais vous donner un exemple…
STEPHANE SOUMIER
Allez-y…
MOUNIR MAHJOUBI
Par exemple, il y en a une sur l'intelligence artificielle dont l'objectif est d'utiliser la cartographie satellitaire pour identifier les zones de décharges sauvages pour attribuer des lieux prioritaires de contrôle pour les agents publics chargés du contrôle sanitaire à travers la France, on en a fait une autre start-up d'Etat basée sur l'intelligence artificielle pour identifier les contrôles de restaurants. Et donc ça prend tous les commentaires qui existent sur Internet et ça fait une cartographie avec un gros score de probabilités qui indique à l'agent contrôleur de se dire : eh bien, ce serait important que vous alliez voir par ici. On essaie d'optimiser le travail…
STEPHANE SOUMIER
On découvre des trucs, c'est passionnant votre truc sur les restaurants, là…
MOUNIR MAHJOUBI
A Bercy, aujourd'hui, on a les équipes de contrôle qui, pareil, disent pour qu'on puisse faire les contrôles sur les personnes les plus intéressantes, sur les entreprises de plus intéressantes, jusqu'à aujourd'hui, on avait plein d'outils pour le faire, mais des outils très artisanaux, même s'il y avait beaucoup de numérique dedans, eh bien, cette direction-là, à Bercy, depuis dix ans, elle investit, elle investit, aujourd'hui, on a plusieurs chercheurs en intelligence artificielle et en Big Data qui aident les inspecteurs du fisc, pas à cibler le contribuable… pour lui faire un contrôle, non, qui ciblent celui qui fait des voyages un peu bizarres, celui qui déclare des revenus une année sur deux, et puis, celui dont on se dit : quand même, les stat de cette boîtes sont très bizarres, et il y aurait une grande probabilité, et on va la contrôler.
STEPHANE SOUMIER
Voyez Anthony… en même temps, c'est ça notre souci, c'est-à-dire que, on est super fort pour aller chercher l'impôt, Mounir MAHJOUBI. La dématérialisation de la déclaration de revenu ça a été, je crois, la France, ultramoderne là-dessus…
MOUNIR MAHJOUBI
Mais parce que c'est un des services publics qui est utilisé par le plus de Français. Et par contre, il y a un autre projet qui me tient très à coeur, c'est l'identité numérique, qui va faire qu'on va pouvoir se connecter à tous les services publics, avec un seul login, un seul mot de passe, ultra sécurisé, avec notre carte, ça, ça va être une réalité dès 2020 et on a des super équipes qui travaillent là-dessus.
ANTHONY MOREL
Mais il faut que vous communiquiez sur toutes ces boîtes, parce qu'on fait de la veille technologique, pour le coup tous les jours, je n'avais jamais entendu parler de…
MOUNIR MAHJOUBI
Je peux prendre l'engagement aujourd'hui de, je vous invite, et je vous fais faire un tour incroyable, avenue de Ségur à Paris, vous avez une équipe de plusieurs centaines de personnes qui sont les transformateurs de l'Etat là-bas.
ANTHONY MOREL
Avec plaisir.
STEPHANE SOUMIER
J'avoue, j'ai vécu il y a deux jours, expérience numérique avec l'Etat, besoin de refaire une carte grise, « est-ce que vous voulez vous connecter avec votre compte fiscal ? », « oui, d'accord », et boom ! J'ai fait un clic…
MOUNIR MAHJOUBI
Ça c'est le French connect, Bam-Bam, direct…
STEPHANE SOUMIER
Fantastique, un seul clic, il sait qui je suis, il retrouve tout, etc.
MOUNIR MAHJOUBI
Je vous invite à venir rencontrer les équipes…
STEPHANE SOUMIER
Mounir MAHJOUBI, cette France-là, pourquoi vous nous dites que c'est la même que celle des gilets jaunes, ce n'est pas vrai finalement, et ce qu'on est en train de traverser ce sont des gens qui se disent mais moi je n'ai pas droit à tout ça et à cette accélération.
MOUNIR MAHJOUBI
Exactement. Aujourd'hui on a un sujet sur comment on se projette dans l'avenir, qu'est-ce que c'est la suite, c'est quoi les années, les décennies qui arrivent, pour la France ? il ne peut pas y avoir d'un côté des gens qui ont très confiance et qui se disent « on va être la France des start-up qui innovent, qui construisent, et on fait ça pour nous », et il ne peut pas y avoir d'un autre côté des gens qui disent « nous on a été humiliés depuis des décennies, et puis là, ce dernier mouvement d'accélération numérique, c'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase, c'est-à-dire que, ça y est, on a vraiment compris que ce n'était plus pour nous. » Et donc, face à ça, on ne va pas se résigner, donc on se révolte. Et c'est là où il y a un double sujet, et c'est pour ça que, aujourd'hui, moi un des objectifs que je me suis donné, un des objectifs que le président de la République m'a donné, c'est comment cette technologie elle est là pour le bien, « Tech for Good », et c'est pour ça que j'ai rappelé que la stratégie de la France c'est, du numérique et de la performance, au service des humains et de la planète. Parce que si jamais on s'éloigne, si on fait le numérique au service du profit, si la bande des startuper…
STEPHANE SOUMIER
Si vous partagez les richesses ça ira le numérique au service du profit, c'est « Tech for Good », ou « Tech for partage de richesse » que veulent les gilets jaunes aujourd'hui ?
MOUNIR MAHJOUBI
C'est « Tech for profit, for impact on human and planet.”
STEPHANE SOUMIER
Oui, mais, là je n'ai pas le mode d'emploi Mounir MAHJOUBI.
MOUNIR MAHJOUBI
Alors, il n'y a pas de mode d'emploi universel, celui qui dit aux start-up comment elles doivent se comporter, celui-là il ne fait pas le bon métier. Par contre, une start-up qui fait un produit nouveau, qui change la vie des malades, qui fait un prix accessible, et qui fait beaucoup de profits, si elle a réussi à transformer la vie de ses salariés, transformer la vie de ses patients, et que grâce à ça tout le monde comprend à quoi ça sert dans nos vies la technologie, celle-là, elle a changé le monde. Quand je vous parlais hier d'un assureur qui change la façon de faire de l'assurance et qui arrive à baisser les prix, là il a changé la vie des personnes. Si par contre la Tech c'est un truc inaccessible, qui fait des objets chers, ça, ça ne change rien dans notre pays, et ça ce n'est pas souhaitable. C'est pour ça que la « Tech for Good » ce n'est pas de la mauvaise Tech, ce n'est pas de la petite Tech, c'est de la Tech très productive, c'est de la Tech qui fait du profit, c'est de la Tech qui transforme le monde, mais qui se pose la question des valeurs, elle n'est pas là pour absorber vos données, les utiliser contre vous et faire de la manipulation derrière.
STEPHANE SOUMIER
Mounir MAHJOUBI, merci beaucoup d'être venu nous voir pendant 3 jours…
MOUNIR MAHJOUBI
Merci à vous.
STEPHANE SOUMIER
Et puis, oui, la France a tout pour réussir.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 11 janvier 2019