Entretien de Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'Etat aux affaires européennes, à CNews le 20 juin 2019, sur les négociations en cours sur la future présidence de la Commission européenne.

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Média : CNews

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Q - Amélie de Montchalin, vous êtes la secrétaire d'Etat chargée des affaires européennes je le rappelle. Qui est le candidat de la France ? Il y en a un, forcément, pour remplacer M. Juncker à la présidence de la Commission ?

R - Nous avons une exigence, c'est d'abord que les discussions de cet après-midi soient fructueuses. Actuellement les chefs d'Etat et de gouvernement échangent sur le climat, sur la sécurité, sur les frontières, sur les migrations, bref, sur notre ambition pour les cinq prochaines années. Et c'est à partir de cette discussion de fond que ce soir, autour du dîner, il y aura effectivement un échange sur qui pourrait être le président de la Commission.

Une chose est sûre, c'est que les "Spitzenkandidaten" le système qui devait, de manière quasi automatique, désigner tel ou tel candidat et en l'occurrence Manfred Weber, à la tête de la Commission, parce qu'il avait la majorité, en tout cas le plus grand nombre de sièges au Parlement européen, ce système, on le voit, n'est pas automatique, il ne nous plaisait pas sur l'idée-même du respect de la démocratie et des urnes.

Je crois que ce soir, nous allons constater que Manfred Weber n'a pas de majorité au Parlement et qu'il n'en a probablement pas au Conseil. Tout le travail maintenant, c'est de construire une solution qui fasse consensus, qui puisse rassembler les chefs d'Etat, qui puisse rassembler le Parlement, non pas pour se rassembler autour d'un nom ou d'un drapeau, mais bien pour se rassembler autour de quelqu'un qui a les compétences et l'expérience pour porter la feuille de route qui est actuellement en train d'être discutée, pour avoir une ambition climatique forte, pour avoir une ambition de protection des citoyens qui soit forte, pour avoir une Europe sociale qui soit forte, bref, pour avoir des résultats concrets au service des citoyens. Pour cela, il nous faut quelqu'un qui ait ces qualités-là, c'est encore à construire.

Q - Je vous propose cette photo où l'on voit Donald Tusk, le président du Conseil européen avec Angela Merkel et Emmanuel Macron. Je veux bien vous croire, on doit discuter de grands sujets, mais on doit aussi parler du nom et des postes d'importance à Bruxelles. Emmanuel Macron est-il en position de force, ces attaques de Nathalie Loiseau contre les alliés potentiels de la République En Marche au sein du groupe Renew ont quand même affaibli le président. Est-il affaibli aujourd'hui ?

R - Je ne crois pas que le président soit affaibli. Depuis ce matin, il a rencontré six chefs d'Etat et de gouvernement, depuis ce matin, il est bien là pour défendre le contenu de ce qui a été la campagne, en France mais aussi ailleurs, de ce qui est maintenant le groupe centriste au Parlement. Hier, ce groupe a élu Dacian Ciolos à sa tête, c'est un ancien commissaire, il vient de Roumanie, il a été Premier ministre de son pays, il porte une vision extrêmement intéressante, à la fois de progrès mais aussi très ancrée dans les territoires. Aujourd'hui on a toutes les capacités de pouvoir continuer, non pas à avoir de l'influence attachée à notre drapeau, mais à avoir de l'influence sur le fond.

Ce qui compte, c'est que nos idées progressent, non pas dans une visée nationaliste, le but n'est pas de travailler pour les Français uniquement, le but c'est de travailler pour les Européens, et ainsi servir ce que les Français et les Européens ont mis dans leur vote.

Vous savez qu'aujourd'hui la grande différence, c'est que la droite et la gauche européenne n'ont plus la majorité absolue ensemble au Parlement européen. Cela veut dire que le groupe centriste a un rôle à jouer, cela veut dire que le groupe des verts a un rôle à jouer. Ce que nous essayons de faire, c'est que la personne porte le projet, et que le projet lui-même soit le reflet de cette élection qui a bouleversé le paysage politique.

C'est la raison pour laquelle cela prend peut-être un peu plus de temps que d'habitude, mais c'est parce que les élections européennes ont envoyé un message fort : c'est qu'on voulait une Europe différente, et nous essayons donc d'organiser cette Europe pour qu'elle soit différente, pas juste dans les nominations, mais bien dans le projet qu'elle porte.


Source : Service d’information du Gouvernement, le 24 juin 2019