Interview de M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse à RMC le 7 juin 2019, sur les difficultés de lecture des élèves et la réforme de l'école maternelle et l'instruction obligatoire à 3 ans.

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Média : Emission Forum RMC FR3 - RMC

Texte intégral


JEAN-JACQUES BOURDIN
Un jeune français sur 10, 16-25 ans, en difficulté de lecture, 1 sur 20 est illettré, Jean-Michel BLANQUER, ministre de l'Education nationale et de la Jeunesse, est avec nous, Jean-Michel BLANQUER bonjour.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Bonjour.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Etude du ministère de l'Education qui s'appuie sur des tests conduits auprès des 713.000 participants à la Journée défense et citoyenneté en 2018, l'année dernière. Alors, 11,5 % des 16-25 ans en difficulté de lecture, ça veut dire quoi en difficulté de lecture ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
En difficulté de lecture ça veut dire qu'on a du mal à comprendre un texte, et ça renvoie beaucoup à la pauvreté du vocabulaire et à la difficulté à déchiffrer, ce sont ces deux éléments-là que l'on voit dans l'illettrisme.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, et 1 sur 20 en situation d'illettrisme, ça c'est vraiment très inquiétant !

JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, oui. Alors, cela dit c'est un chiffre qui est stable, c'est toujours le même depuis un bon nombre d'années, et ça nous renvoie tout simplement à des enjeux qui sont en amont, et notamment à l'école primaire, c'est pour ça que nous faisons tout ce que nous faisons.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, que faire, justement Jean-Michel BLANQUER, parce que le chiffre est là, maintenant que faire ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
Le plus important c'est déjà l'action le plus tôt possible, et donc l'action le plus tôt possible c'est l'école primaire. Vous savez, j'insiste beaucoup sur l'école maternelle avec l'instruction obligatoire à 3 ans, je rappelle qu'avec cette mesure, que nous sommes en train de prendre, à partir de l'année prochaine il y a 25.000 enfants, qui habituellement ne vont pas à l'école maternelle, qui iront, et ça correspond très souvent aux milieux les plus défavorisés. L'école maternelle, elle est essentielle, parce que c'est justement le moment où on va compenser les inégalités familiales en donnant plus de vocabulaire aux enfants. Quand vous chantez, quand vous jouez, quand vous faites toute une série de choses à l'école maternelle, l'acquisition de vocabulaire est un point essentiel, parce que plus vous avez de mots dans la tête, plus vous connaissez de mots, plus lorsque vous entrez ensuite en cours préparatoire, votre capacité de déchiffrer des mots va vous renvoyer à des mots que vous connaissez déjà. Et les deux choses qui font la lecture, c'est savoir bien déchiffrer, et avoir du vocabulaire, et donc comprendre, d'une part la fluidité de lecture, d'autre part la compréhension.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, Jean-Michel BLANQUER, à partir de quel âge… est-ce que vous rajeunissez, si je puis dire, l'apprentissage de la lecture ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
Je ne le dirais pas comme ça, mais ce qui est certain c'est que chaque enfant a son rythme, c'est très important, au cours du parcours en maternelle, de connaître ses lettres, de commencer à identifier des syllabes, et puis de connaître ses chiffres aussi, parce qu'on pourrait parler aussi de l'innumérisme, du niveau de mathématiques, et donc ce sont des choses que l'on apprend, même parfois en jouant à l'école maternelle, et qui vous préparent ensuite à bien réussir le CP. Et c'est pour ça qu'on fait… maintenant, vous savez, on fait des évaluations en début de CP, en milieu de CP et en début de CE1, ça aussi c'est une innovation, qui a maintenant 1,5 an, et ça nous permet justement d'éviter qu'il y ait des trous dans la raquette, si vous me permettez l'expression, autrement dit des enfants qui passent par le CP et le CE1, et qui en sortant du CE1 auraient déjà des bases extrêmement fragiles. Donc, ce qui est très important, pour nous, c'est de prendre le sujet très en amont et puis ensuite d'encourager, évidemment la lecture tout au long du parcours de l'élève, évidemment à l'école primaire et au collège.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et pour encourager la lecture, vous allez prendre de nouvelles initiatives ou pas, non ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui. On a un plan lecture, qui est d'ailleurs avec le ministère de la Culture, par exemple pour renforcer les bibliothèques, on a une mesure qui commence à s'étendre dans toute la France, qu'on appelle « Le quart d'heure lecture », qui est un moment où tout le monde s'arrête dans l'école ou le collège, ou le lycée d'ailleurs, et tout le monde lit, mais c'est vrai de tout le monde, y compris les adultes qui travaillent dans l'établissement, et donc on essaye aujourd'hui de renforcer l'engouement pour la lecture…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce « Quart d'heure lecture » il est obligatoire ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
Non, non, enfin il est obligatoire quand un établissement a décidé de le faire, mais chaque établissement fait ce qu'il veut.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais vous, vous allez demander à tous les établissements de le faire ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
On propose à tous les établissements de faire ce « Quart d'heure lecture. » Vous savez, tous ceux qui le font sont très heureux, parce que c'est un moment de silence, c'est un moment de concentration, et en fait les enfants et les adolescents aiment beaucoup la lecture, dès qu'on leur donne les conditions de concentration et puis des livres. On fait d'autres opérations, par exemple en ce mois de juin on va donner les Fables de La Fontaine à tous les élèves de CM2 de France, c'est 800.000 enfants, qui vont recevoir dans des cérémonies de fin d'année les Fables de La Fontaine illustrées par Voutch, au cours de ce mois de juin, donc on appelle ça « Un livre pour l'été », parce que l'objectif c'est aussi qu'ils rapportent un livre à la maison, qu'ils lisent pendant l'été…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Un livre à la maison, les Fables de La Fontaine distribué à tous les enfants de CM2 ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, en ce mois de juin, et c'est un des exemples, si vous voulez, de cet encouragement à la lecture que nous donnons, et qui continue au collège.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Un mot Jean-Michel BLANQUER, parce que le temps me presse. Le bac ne sera pas perturbé par la grève ?

JEAN-MICHEL BLANQUER
C'est évidemment mon devoir de faire en sorte que le bac se passe bien, et donc il se passera bien, nous sommes en train de nous organiser pour cela, de façon à ce que la surveillance ait lieu comme il convient dans chaque établissement, et donc il faut que les élèves qui préparent leur bac le fassent en toute tranquillité.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Jean-Michel BLANQUER, merci beaucoup.

JEAN-MICHEL BLANQUER
Merci à vous. Au revoir.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 14 juin 2019