Texte intégral
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Alors, je reçois Marlène SCHIAPPA, secrétaire d'Etat à l'Egalité femmes/hommes. Bonjour Marlène SCHIAPPA.
MARLENE SCHIAPPA
Bonjour.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Alors, j'ai envie de vous dire, un été, une affaire, peut-être, François de RUGY, l'actuel ministre à la Transition écologique, quand il était président de l'Assemblée, recevait avec du homard et des grands vins, non seulement des invités liés à sa fonction, mais aussi peut-être des amis, sa famille. Est-ce que vous êtes choquée, Marlène SCHIAPPA ?
MARLENE SCHIAPPA
Eh bien, d'abord, je comprends effectivement l'émotion, et peut-être une forme d'indignation de gens qui découvrent des photos et qui découvrent les faits de la manière dont les faits ont été présentés sur Médiapart, c'est-à-dire, montrer des photos de homards et de grands crus et de contextes de soirées en disant que ce sont des soirées amicales et qui n'ont rien à voir avec les fonctions. Je comprends que ça puisse choquer et que ça puisse indigner. Néanmoins, je pense qu'il est aussi important de voir ce qui se passe au global. François de RUGY, quand il était président de l'Assemblée nationale, a fait baisser au global les frais de réceptions de 13 %…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Oui, mais ça, c'est sa défense, sauf qu'il l'a fait pour les parlementaires, et pour lui, on se demande s'il s'est appliqué le même régime de rigueur, si je puis dire, sa même diète.
MARLENE SCHIAPPA
Il faut que chacun puisse s'exprimer. François de RUGY, c'est quelqu'un qui a toujours été attaché à la transparence, il a fait partie des premiers élus à faire la publication et la transparence de son agenda par exemple, de ses dépenses, il est très attaché à ce principe de transparence. Donc je suis persuadée qu'il apportera toutes les réponses nécessaires à toutes les questions qui légitimement se poseront.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Alors, Médiapart promet de nouvelles révélations pour ce matin, on va voir dans quelques heures quelles sont ces révélations, on ne va pas faire de démagogie facile, mais on connaît les moyens de certains ministères, les grands ministères, les Assemblées, est-ce que c'est vraiment nécessaire aujourd'hui d'avoir plusieurs cuisiniers, des domestiques, j'ai envie de dire, des employés de maison, est-ce qu'on ne pourrait pas tout simplement faire appel à un traiteur quand on reçoit par exemple des personnalités, parce que c'est tentant au fond d'avoir tous ces moyens à sa disposition ; vous, par exemple, quels sont les moyens d'intendance dont vous disposez comme secrétaire d'Etat ?
MARLENE SCHIAPPA
Alors, nous, il y a un cuisinier qui est présent pour les repas qui se passent, qui sont des repas de travail, on a reçu par exemple les associations, il y a deux jours, des parlementaires, la délégation Droits des femmes, pour travailler. Mais moi, la première mesure que j'ai prise, c'est de faire en sorte… d'abord, moi, je ne bois pas d'alcool, donc il n'y a jamais d'alcool à ma table, mais ça, c'est autre chose, il y a un intendant qui est présent pour gérer cela, mais une des premières mesures que j'ai prise, c'est de faire en sorte qu'on serve de l'eau en carafe et des plats extrêmement simples, voilà, à table, parce que je…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
C'est votre recommandation d'ailleurs…
MARLENE SCHIAPPA
Ce n'est pas ma recommandation, moi, je n'ai pas…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Non, mais si, vous pourriez parce que moi, je pense que c'est de l'argent public, ce n'est pas pareil d'avoir une réception privée ou une réception… parce que les Français, qu'est-ce qu'ils voient ? Ils voient qu'on mange du homard et des grands crus avec leur argent, avec leurs impôts, ils ont raison de se dire ça, non ?
MARLENE SCHIAPPA
Mais moi, je vous dis que je comprends tout à fait l'émotion et l'indignation, je veux dire, là, on a parlé des gilets jaunes pendant des mois, moi, j'ai reçu énormément de mères isolées qui n'ont pas les moyens juste de payer des pâtes et du gruyère à leurs enfants à la fin du mois, je comprends tout à fait qu'en voyant des photos de vins à plusieurs centaines d'euros et de homard et en imaginant que c'est ce qui se passe tous les jours partout, il y a une ferme indignation, ça, sincèrement, et franchement, je le comprends, moi, je viens d'un milieu modeste, mes parents sont profs, mes grands-parents étaient fonctionnaires ou employés de bureau, ma grand-mère était femme de ménage, ma soeur… j'ai une soeur aide-soignante, une soeur qui travaille dans une école. Donc oui…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Donc en fait, on voit votre sincérité, vous êtes choquée ce matin ?
MARLENE SCHIAPPA
Non, ce n'est pas que je suis choquée, parce que je comprends aussi qu'il y ait des contraintes de réception, moi, je vais vous donner un exemple, parce que c'est trop facile de donner les bons et les mauvais points, je vous dis, moi, j'ai donné des consignes sur ce qui concerne les repas du quotidien. Néanmoins, par exemple, ce soir, moi, dans mon ministère, j'accueille un événement pour le lancement du Forum mondial des femmes, lancé par l'ONU en 2020, eh bien, je n'ai pas encore consulté le menu qui me sera proposé, mais je suis persuadée qu'il y aura des choses haut de gamme, parce qu'on reçoit des ambassadeurs de tous les pays et qu'on veut représenter l'excellence française…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Mais bien sûr, et ça, il n'y a pas de problème…
MARLENE SCHIAPPA
Et donc je suis persuadée qu'il y aura un menu et un cocktail haut de gamme qui sera proposé aux invités qui viennent de tous les pays, pour ce lancement…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Mais là, les questions qui sont posées par Médiapart…
MARLENE SCHIAPPA
C'est une question de représentation et de symbole de la France également…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Bien sûr, mais peut-être que pour ces événements, on peut faire appel peut-être à un traiteur exceptionnellement, une fois par semaine, alors que là, la question, c'est : est-ce que ces moyens publics servent à des fins privées, c'est la question qui se pose pour François de RUGY…
MARLENE SCHIAPPA
Oui, c'est la question, mais vous savez…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Le dîner de Saint-Valentin, est-ce que c'est vraiment le rôle des fonctionnaires de l'Assemblée de préparer un dîner pour la Saint-Valentin, pour le ministre et sa femme…
MARLENE SCHIAPPA
Je ne sais pas, très honnêtement, moi, je suis vraiment très attachée à la dépense de l'argent public, j'ai été formée par le sénateur-maire du Mans Jean-Claude BOULARD, qui était réputé pour être un peu radin avec l'argent public, et je crois que j'ai gardé un peu ça de lui, moi, je ne fais pas…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Il a raison, si c‘est l'argent public, c'est l'argent de tous les Français…
MARLENE SCHIAPPA
Exactement, et il nous disait : on n'a pas besoin d'aller au restaurant faire des notes de frais pour travailler, on peut travailler sans manger, néanmoins, je suis un peu mal à l'aise avec une forme de chasse aux sorcières ou d'accabler quelqu'un qui n'est pas là pour se défendre…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Bien sûr, c'est vrai, c'est vrai aussi, c'est vrai…
MARLENE SCHIAPPA
Je pense que François de RUGY, c'est quelqu'un qui a toujours été attaché justement au global à l'argent public, il a pu y avoir peut-être un ou deux moments qui posent des questions, je le comprends, mais c'est à lui d'y répondre, et je n'aime pas tellement les phénomènes de meute et de lynchage, et donc, je pense qu'il faut aussi respecter les personnes dans ce débat qui se tient, et puis, faire en sorte que François de RUGY puisse s'exprimer et apporter tous les éclairages de bonne foi, et qu'on n'ait pas juste une enquête manifestement à charge, et qui souhaite simplement accabler pour se payer un ministre, je crois qu'il faut aussi raison garder et trouver une forme d'équilibre dans cette analyse des faits.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Vous avez raison. On a aussi appris hier la démission de son actuelle directrice de cabinet qui a bénéficié d'un logement HLM, qu'elle n'occupait pas pendant 12 ans, alors ça, peut-être que François de RUGY ne le savait pas, et il a pris la sanction immédiate de lui demander de partir, il a bien fait, ou est-ce que dans le contexte actuel, c'est un petit peu facile de demander à la directrice de cabinet de partir ?
MARLENE SCHIAPPA
Moi, enfin, sincèrement, je ne suis pas là pour donner les bons et les mauvais points, la question de l'occupation des HLM, je crois que c'est une question très générale et très globale qui se pose…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Très importante, là aussi, vous comprenez, ce n'est pas possible, on ne peut pas avoir des centaines de milliers de Français qu'attendent un logement social…
MARLENE SCHIAPPA
Bien sûr, mais complètement, je partage…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Il y a des gens qui ont des logements sociaux alors que leurs revenus ne devraient pas leur permettre de l'avoir, et en plus, qui ne l'occupent pas.
MARLENE SCHIAPPA
Mais là encore, je ne veux pas me joindre à la meute et blâmer une personne que je ne connais pas, et dont je ne connais pas les raisons, et dont nous n'avons pas entendu la version elle-même. Maintenant, il y a un principe au-delà qui est très important, moi, je suis attachée, non pas à la transparence dans la vie privée des gens, parce que voir les photos des repas de Saint-Valentin, qu'on connaisse la vie privée des uns et des autres, je ne pense pas que ce soit de la transparence, je pense que c'est une forme de voyeurisme…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Non, mais quand c'est un repas qui est organisé à l'Assemblée par des fonctionnaires…
MARLENE SCHIAPPA
En revanche, je suis très attachée à la transparence dans par exemple les process d'attribution, c'est la raison pour laquelle je pense que pour l'attribution des HLM, il devrait y avoir un barème de transparence comme pour l'attribution des places en crèche. C'est une proposition que j'avais faite avec mon association à mon travail, il y a une dizaine d'années, faire en sorte – et que le gouvernement a reprise avec l'AMF, et sur laquelle nous travaillons depuis un an avec les différentes parties prenantes – faire en sorte qu'il y ait une transparence et peut-être qu'on revoie régulièrement aussi, quand on attribue un HLM…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Pourquoi il n'y a pas de transparence, parce que vous avez raison, on sait qu'il y a des logements sociaux qui sont occupés par des gens qui n'ont rien à y faire, comment on fait pour instituer cette transparence que vous…
MARLENE SCHIAPPA
Mais je pense que justement, on pourrait avoir un barème qui soit public et dans lequel chacun connaisse les critères d'attribution des HLM, et on pourrait ainsi dire…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Et ça, ce n'est pas public le barème ?
MARLENE SCHIAPPA
Ça dépend des villes, parce que vous savez que c'est la compétence des collectivités, et donc chacune peut le décider. Mais on pourrait aussi se dire que tous les cinq ans, tous les dix ans, on regarde ce qu'il en est. Il y a des élus de La France Insoumise qui occupent des HLM, ça a été indiqué, il y a des élus de tous les bords d'ailleurs, je ne blâme pas particulièrement un parti ou un autre, je pense qu'à un moment, on peut aussi remettre sur la table cette occupation, mais là, encore, manifestement il n'y avait pas de mauvaise foi derrière, c'est un logement qui lui a été attribué, de ce que j'en ai compris, il y a une dizaine d'années.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Oui, même 18 ans, et pendant 12 ans, elle ne l'a pas occupé, c'est ça…
MARLENE SCHIAPPA
Voilà, je crois, je ne sais pas, je ne connais pas, je ne connais pas sa vie.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Vous vous rendez compte le contexte, on sort de six mois de gilets jaunes avec ce sentiment qu'il y a deux France, et cette affaire, là, au début de l'été, c'est terrible…
MARLENE SCHIAPPA
Oui, bien sûr, mais je vous dis, je comprends tout à fait l'indignation et l'émotion, et il faut que des réponses soient apportées, et s'il doit y avoir un changement, un changement d'habitudes, je pense que tout le monde est disposé à faire en sorte qu'il survienne. Si vous voulez, ce sont des pratiques qui existent depuis extrêmement longtemps…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
C'est l'ancien monde…
MARLENE SCHIAPPA
Exactement, c'est l'ancien monde. Alors peut-être qu'on attend plus de nous, parce qu'on a eu cette promesse de renouvellement des usages, etc.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Il y a votre promesse, oui, je vous le confirme, oui, c'est vrai…
MARLENE SCHIAPPA
On essaie de s'y conformer, on est challengé, comme on dit, maintenant, les uns, les autres, sur ce sujet, et je pense qu'effectivement, c'est une question qui doit être remise à l'ordre du jour, peut-être qu'on pourrait aller vers la transparence des frais de représentation des uns et des autres, moi, d'ailleurs, j'ai demandé ce matin aux personnes qui s'occupent, à ma chef de cabinet et à l'intendance du ministère, dont j'ai la responsabilité, de me sortir le budget des frais de représentation pour qu'on voie ce qu'on a dépensé ou pas. Mais je vous donne un exemple, l'année dernière, sur cette ligne de budget, qui m'était attribué, il y a environ 200.000 euros que nous n'avons pas utilisés pour faire des représentations, des cérémonies, des soirées, etc, que j'ai re-fléchés en subventions vers les associations. Et je ne suis pas la seule, je sais qu'il y a beaucoup de ministres et beaucoup d'élus qui procèdent de la sorte et qui sont vigilants sur la question de l'argent public. Après, je crois que François de RUGY a expliqué que ça n'était pas une demande de sa part, parfois, quand on est président de l'Assemblée nationale, on ne se préoccupe pas de savoir ce qu'il va y avoir au menu ou d'aller… ce n'est pas lui qui va chercher les vins à la cave…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Non, mais c'est pour ça que peut-être il y a trop de moyens à disposition de certaines personnalités, et que pour éviter les tentations et les dérapages, il faut peut-être juste supprimer ces moyens.
MARLENE SCHIAPPA
La question peut se poser, mais là, si on est, un peu pas démago, et un peu sincère deux minutes…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Non, non, mais…
MARLENE SCHIAPPA
Quand on est président de l'Assemblée nationale, il y a des moyens qui sont mis à votre disposition pour nécessité de services, c'est-à-dire que si vous avez, de façon impromptue, le ministre d'un autre pays que vous devez recevoir à la place du président ou du Premier ministre, vous devez pouvoir être en mesure de le recevoir, d'être dans des conditions de travail efficaces, etc. Mais tout peut se discuter. Moi, je ne suis opposée à rien, il n'y a aucun tabou, et on peut débattre de tout.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Encore un mot sur une actualité brûlante, hier, La République En Marche a désigné son candidat pour Paris, pour la bataille de Paris, ça sera donc Benjamin GRIVEAUX. Cédric VILLANI n'a pas l'air très content, une heure avant la décision, il a expliqué que la procédure finalement ne pouvait pas… n'était pas telle qu'il aurait pu être investi, c'est un peu alambiqué, mais c'était comme ça qu'il l'a dit. Et il donne rendez-vous dans quelques jours : j'aurai prochainement l'occasion de m'exprimer sur les perspectives qu'il convient à présent d'ouvrir. Vous avez un message pour Cédric VILLANI, sur ces perspectives, s'il allait tout seul à la bataille de Paris, il aurait tort ?
MARLENE SCHIAPPA
Oui, et je pense que ce n'est pas une bonne idée. Je pense que Cédric VILLANI, c'est une personnalité importante qui a décidé de s'engager en politique avec En Marche pendant les élections présidentielles, qui a sollicité l'investiture pour les législatives, et nous lui avons accordé cette investiture et la confiance du mouvement, je faisais partie de cette commission nationale d'investiture à l'époque. Et nous en sommes très heureux, parce qu'il a été un très bon parlementaire pour Saclay et pour l'Essonne. Il a également porté beaucoup de choses sur l'intelligence artificielle, c'est quelqu'un qui est médaillé Fields, on connaît son parcours…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Oui, c'est quand même le Prix Nobel de mathématiques…
MARLENE SCHIAPPA
Tout à fait. Et il représente quelque chose. Donc moi, je souhaite effectivement qu'il s'engage avec Benjamin GRIVEAUX, je pense qu'il y a de la place pour tout le monde et qu'il faut vraiment se rassembler maintenant pour un projet d'alternance pour Paris. Je crois que Cédric VILLANI avait beaucoup de propositions, beaucoup d'idées, ce serait intéressant maintenant de se rassembler et de se mettre ensemble, comme chacun s'y est engagé... ;
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Donc vous croisez les doigts pour qu'il fasse équipe commune avec Benjamin GRIVEAUX ?
MARLENE SCHIAPPA
Je ne croise pas les doigts, mais je le souhaite fortement. Et je pense que son entourage pourrait être amené aussi à lui proposer de continuer ce rassemblement, il s'y est engagé quand il a présenté sa candidature à la commission d'investiture ; chaque candidat s'est engagé à rejoindre le candidat qui serait investi, le candidat qui est investi, c'est Benjamin GRIVEAUX, on peut le féliciter d'ailleurs chaleureusement à cette occasion, parce qu'il a été déterminé, que c'était le meilleur candidat, qui a porté le projet le plus solide, le plus de soutien, qu'il était le mieux à même de gagner Paris, et de faire un bon maire de Paris pour porter des projets d'alternance pour cette ville.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Alors, votre combat, et c'est un bon combat, c'est évidemment faire en sorte qu'il y ait moins de féminicides, comme on dit aujourd'hui, de femmes tuées souvent par leur conjoint, alors il y a déjà ce chiffre qu'on a appris hier pour l'année 2018, 127 féminicides en France, et puis, il y a deux jours, on parlait de 75 féminicides pour 2019, on en est déjà aujourd'hui malheureusement à 76 femmes tuées par leur conjoint, c'est pourtant la grande cause nationale la violence faite aux femmes, pourquoi est-ce qu'on en est encore là, Marlène SCHIAPPA ?
MARLENE SCHIAPPA
Oui, effectivement, nous avons, avec Christophe CASTANER, publié les chiffres de ce qu'on appelle les morts violentes dans le couple traditionnellement pour 2018, il y en a un petit peu moins que 2017. Donc il y a une trajectoire de baisse, mais néanmoins, les premiers chiffres de 2019 nous montrent que ça fluctue, en fait, année après année…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Oui, on est plutôt au-dessus de la tendance…
MARLENE SCHIAPPA
On est plutôt au-dessus, 2019, 2018…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Malheureusement…
MARLENE SCHIAPPA
2018, on est plutôt en dessous 2017, mais il y a une trajectoire au global en légère baisse, mais année après année, c'est quelque chose qui est fluctuant, mais peu importe, parce que même si c'était 10 femmes, ce serait 10 femmes de trop, depuis deux ans, le gouvernement fait tout ce qui est en son pouvoir, on a lancé une plateforme de dialogue avec les policiers. On a mobilisé deux unités de police et de gendarmerie disponibles 7 jours sur 7, 24 heures sur 24 sur « servicepublic.fr »…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Mais ce qu'on dit parfois, c'est que ce n'est pas suffisant, c'est-à-dire qu'il y a des femmes qui signalent les violences qui leur sont faites et qui ne sont pas suivies suffisamment, d'ailleurs, l'une est morte il y a trois, quatre jours…
MARLENE SCHIAPPA
Vous avez tout à fait raison, et c'est la raison pour laquelle aussi nous lançons ce Grenelle des violences conjugales…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Le 3 septembre prochain…
MARLENE SCHIAPPA
Exactement, le 3/09/19, en écho au numéro du 39 19 de la Fédération nationale Solidarité Femmes parce qu'il y a des femmes qui ont porté plainte une fois, deux fois, cinq fois…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
C'est ça…
MARLENE SCHIAPPA
Moi, j'ai reçu, après le meurtre de Julie DOUIB, j'ai reçu à mon ministère toutes les parties prenantes, les élus, les services de la préfecture, les parlementaires, les services du ministère de l'Intérieur, de la Justice, pour faire en sorte de voir s'il y avait eu des dysfonctionnements, et manifestement, il y en a eu, et ce n'est pas entendable pour moi qu'une femme ait déposé plusieurs plaintes, ses parents aussi, j'ai reçu son père récemment qui m'indique que lui également s'était rendu auprès du commissariat et qu'elle n'a pas été prise en charge. Donc…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Alors comment on fait, comment on fait en sorte que ?
MARLENE SCHIAPPA
Alors, je mobilise tout à l'heure les préfets, avec Christophe CASTANER, nous allons nous adresser à eux pour faire en sorte qu'aucune femme ne ressorte d'un commissariat sans avoir eu une prise en charge et une proposition d'accompagnement, que toutes les plaintes soient évidemment prises, et dans ce Grenelle, le 3/9/19, nous allons parler avec les avocats, avec les familles de victimes, avec les expertes et les experts, les scientifiques, les professionnels de santé, les urgentistes, les experts du Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes et tous les ministres concernés pour voir ensemble quelle est la différence entre la politique publique qu'on impulse et la réalité du terrain, et aussi quelles sont les nouvelles mesures qu'ensemble, nous pouvons prendre parce que nous estimons qu'elles aideront à sauver des femmes…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Dernière question, ça concerne aussi l'égalité femmes/hommes, les salaires, je recevais votre collègue Muriel PENICAUD, qui porte avec vous ce combat pour l'égalité salariale, on va baisser le seuil des entreprises, qui devront publier leur index de l'égalité salariale, on va passer de 150 salariés, puis, 50, je crois, l'an prochain, et le name and shame, ça veut dire qu'on pourra publier le nom des entreprises qui sont le moins respectueuses de cette égalité, c'est bien de montrer du doigt, de désigner, et de nommer les vilains petits canards ?
MARLENE SCHIAPPA
Je crois qu'en matière d'égalité salariale, il faut effectivement avoir une politique à 360 degrés, c'est-à-dire, à la fois, avoir des mesures incitatives, mais aussi des mesures cœrcitives. Et on est en 2019, il n'est plus acceptable qu'on paye une femme moins qu'un homme à compétences égales, le World Economic Forum a calculé que si on ne fait rien de plus que ce qui est fait actuellement au niveau mondial, on atteint l'égalité professionnelle en 2234, c'est trop tard, donc maintenant, il faut y aller de façon volontariste, donc, oui, tout cela est positif.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Merci beaucoup Marlène SCHIAPPA d'avoir été notre invitée…
MARLENE SCHIAPPA
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 12 juillet 2019