Texte intégral
Mesdames et Messieurs,
Collègues et collègues chercheurs,
Tout d'abord, je voudrais remercier Catriona Jackson, PDG d'Universities Australia et Margaret Gardner, présidente d'Universities Australia et vice-chancelière de l'Université Monash d'avoir organisé cet événement de manière aussi harmonieuse et m'avoir invitée à prendre la parole ici ce matin. Considérant les collaborations scientifiques florissantes que nos deux pays ont développées au cours des dernières années, je considère comme un honneur d'ouvrir la conférence et d'avoir la chance de m'adresser à une foule de représentants d'universités et de scientifiques universitaires australiens avec lesquels la France collabore Meilleur futur.
Je voudrais commencer ce discours en citant les paroles de Peter Doherty - pas la star du rock mais la lauréate du prix Nobel australien, mondialement célèbre,: "J'aime la complexité et je suis ravi de l'inattendu". Le titre de la conférence - degrés de changement - se rapporte très bien à cela. «Degrés de changement» pose une question épineuse à la science en général et aux universités en particulier. Comment les universités, la science et la production scientifique interagissent-elles avec le monde environnant? Outre les articles publiés dans des revues à comité de lecture, comment la science peut-elle changer la vie de chacun d'entre nous?
La période actuelle a révélé d'importants défis collectifs: par exemple, le changement climatique a eu des effets dévastateurs sur les populations, mais également sur la faune et la flore, telles que le récif corallien d'Australie, pour donner un exemple local; la pauvreté persiste tant dans les pays développés que dans les pays en développement, la santé humaine est toujours menacée par des maladies incurables telles que le virus Ebola, pour n'en nommer que quelques-unes. La science a fait connaître ces défis au grand public. Ma profonde conviction est que la science joue également l'un des rôles les plus importants dans la recherche de solutions. En fait, les plus grandes révolutions que le monde ait connues sont nées dans les laboratoires. Cela doit être dit et répété à tous ceux qui s'interrogent sur le rôle et la place de la science.
À l'époque où nos valeurs sont menacées, la recherche permet à nos modèles de société de s'adapter, de continuer à avancer malgré les difficultés, qu'elles soient environnementales, sociétales, technologiques ou médicales. Il permet à nos pays de choisir parmi une gamme de possibilités au lieu d'être poussés à choisir des solutions préférées et conçues par d'autres. La recherche permet à nos pays de choisir le chemin qui correspond le mieux à nos valeurs en période d'adversité. C'est encore une fois la recherche qui nous permet de garder notre liberté de choisir la façon dont nous voulons vivre notre vie, de choisir nos priorités et de choisir la façon dont nous voulons que le monde soit. Je ne présente pas la science comme un remède miracle, ni un absolu, encore moins un dogme ou une religion qui nécessiterait d'être prêché au plus grand nombre. Les questions brûlantes qui traversent notre société nous obligent à l'humilité et au pragmatisme. Mais pas à la renonciation, bien au contraire. Je crois fermement que la connaissance est la clé de toute transformation, actuelle ou future, individuelle ou collective.
Cependant, tout comme l'Australie, nous estimons qu'un certain nombre d'acteurs sont nécessaires pour que les résultats de la recherche se répercutent dans la vie de la circonscription, afin que les connaissances soient complètes. La France perçoit la connaissance comme le produit de trois acteurs: les institutions de recherche, l'enseignement supérieur et l'innovation. C'est ce que nous appelons le «triangle de la connaissance».
Premièrement, nous sommes fortement attachés au lien entre recherche et enseignement. La recherche, et plus particulièrement la recherche publique, n'a jamais été conçue pour être conservée entre pairs. La logique sous-jacente est extrêmement claire: les projets de recherche financés par des fonds publics devraient être mis à la disposition de la communauté. La science est un bien commun qui devrait être rendu accessible à tous.
Alors que les fausses nouvelles sont très facilement accessibles, les publications scientifiques sont protégées par des paywalls. Bien qu'il faille dix minutes pour inventer et diffuser une fausse nouvelle nette et facile à comprendre, il faut souvent dix ans pour produire une démonstration scientifique fournissant des informations et des arguments de qualité.
En tant que scientifiques, notre devoir est d'éclairer nos concitoyens. Nous devons être en mesure de diffuser nos résultats rapidement, de manière transparente et complète à tous les citoyens, quelles que soient leurs frontières. Comme le disait Louis Pasteur, le célèbre biologiste français: «La science n'a pas de nationalité». La science ouverte est le véhicule idéal de la connaissance face aux populations rurales. Je ne me résigne pas au fait que nous devons confiner nos résultats scientifiques derrière un mur de paiement, en séparant ceux qui savent de ceux qui sont condamnés à ignorer.
C'est dans cette perspective que la recherche mérite d'être enseignée. C'est avec cet idéal en tête que la France a choisi de réorganiser son paysage de l'enseignement supérieur en grappes importantes, appelées IDEX et I-site, regroupant des centres de recherche et des universités, alimentant des conférences inspirées par une science de pointe, et apporter de nouveaux cerveaux et idées inventives à la recherche.
Le troisième acteur de la connaissance est bien sûr l'innovation. L'innovation est souvent la partie la plus visible du triangle de la connaissance. C'est une recherche directement transformée en biens et services utiles. L'innovation, en particulier l'innovation à forte intensité technologique, est une priorité pour moi, car j'estime qu'elle constituera un élément important de la solution aux grands défis de notre époque, qu'il s'agisse du changement climatique, de la transformation numérique ou du vieillissement de la population. Toutefois, l'innovation ne peut être réduite à une invention à la hauteur de son marché. Derrière un produit innovant se cachent des start-ups émergentes, des petites et moyennes entreprises qui accroissent leur compétitivité, des entreprises qui prennent le leadership dans un secteur. L'innovation est au coeur de nos économies. Ainsi, l'innovation n'est rien de moins que la science en action, la science qui s'engage dans la transformation du monde.
En matière d'innovation, la France a une grande ambition: devenir le pays des start-ups et de l'entrepreneuriat, devenir la "nation des start-ups" du monde. Le président français Em-manuel Macron a appelé à la construction d'un «entrepreneuriat des Lumières, en réinventant nos valeurs, en réinventant notre amour de la liberté des droits et de la justice». En d'autres termes, «un pays de licornes». Sortir des sentiers battus et promouvoir un véritable esprit d'entreprise est l'une des pierres angulaires de notre nouvelle politique en matière d'innovation, tout comme la promotion des talents et des compétences des personnes est au coeur de la stratégie nationale australienne en matière d'innovation et de science. Les liens que nous créons en intégrant de plus en plus de structures d'innovation sur les campus universitaires sont l'une des nombreuses initiatives que nous avons prises pour rapprocher l'innovation, l'enseignement supérieur et la recherche.
L'Union européenne estime également que le monde économique, la science et l'enseignement supérieur font tous partie du même domaine. Pour la France, l'Union européenne n'est pas qu'un nom, c'est à la fois notre histoire et notre avenir. En deux décennies, nous avons fini par créer un langage commun qui permet à nos systèmes d'enseignement supérieur d'interagir. Cette grammaire commune repose sur la structuration des études en 3 cycles, en utilisant des crédits ECTS communs et la reconnaissance mutuelle des diplômes. Il y a la lettre et l'esprit: en demandant toujours plus à nos établissements d'enseignement supérieur, en nous garantissant mutuellement la qualité, nous avons inséré une éthique dans le dialogue européen. C'est indéniablement la confiance qui permet à nos étudiants de déménager et à nos institutions de coopérer. Nos systèmes d'enseignement supérieur sont plus lisibles, notre offre plus attrayante et nos étudiants passent plus de temps à l'étranger. De l'autre côté de la médaille, chaque pays européen est devenu une porte, un accès à l'espace européen pour les étudiants et chercheurs étrangers, et la France promeut cette vision.
La France est actuellement le 4ème pays le plus attractif de la planète pour les étudiants étrangers et le premier non anglophone. Nous travaillons d'arrache-pied avec la campagne «Choose France» pour renforcer cet attrait en développant des programmes enseignés en anglais et en proposant des cours de français intensifs aux étudiants pendant leur séjour à l'intérieur de nos frontières. Pour renforcer la visibilité des établissements d'enseignement supérieur à forte ouverture internationale, nous avons même créé le label «choisir la France». Pour les étudiants australiens, cela signifie un accès facile aux institutions qui répondent le mieux à leurs critères lors de leur recherche d'une université d'accueil en France. Lors de sa visite en Australie l'année dernière, le président Macron a encouragé les étudiants australiens à venir en France en plus grand nombre. Notre mobilité d'étudiants bilatéraux reste déséquilibrée, avec un plus grand nombre d'étudiants français venant en Australie que l'inverse, notamment grâce aux accords d'échange que vos universités ont conclus avec des partenaires français. L'augmentation de la mobilité sortante des étudiants australiens est un défi que les universités françaises sont prêtes à relever avec vous. Aujourd'hui, l'éventail d'opportunités offertes à vos étudiants en France est plus vaste que jamais. En plus des programmes d'échange, le niveau croissant de coopération entre nos universités ouvre de nouvelles voies pour que vos étudiants puissent découvrir notre pays et tout ce qu'il a à offrir. Des programmes d'été courts aux recherches et stages en entreprise, du double master au doctorat conjoint «cotutelle», les étudiants australiens sont plus que jamais «Bienvenue en France».
Comme je le disais plus tôt, l'un des nombreux atouts que nous pouvons offrir aux étudiants australiens est notre capacité à leur garantir une expérience fructueuse de la formation ou de la recherche en France, tout en leur permettant de voyager à travers l'Europe pour découvrir tout ce que notre continent a à offrir. offrir. Parce que si la tour Eiffel est définitivement à Paris, vous devez toujours vous rendre en Italie pour voir le Ponte Vecchio. Comme le dit l'adage français, le voyage façonne la jeunesse.
Pour la recherche, l'Union européenne est également une opportunit�� qui mérite l'attention des scientifiques australiens. Horizon 2020 constitue le plus grand programme de recherche et d'innovation de l'UE à ce jour, avec près de 80 milliards d'euros (127 milliards de dollars australiens) de financement disponible sur 7 ans (2014-2020), en plus des investissements privés que cet argent attirera. Il promet davantage de percées, de découvertes et de premières mondiales en transférant les meilleures idées du laboratoire au marché. Les scientifiques australiens peuvent participer à cet effort en accordant un financement européen équivalent. Les projets dans les domaines de la santé, de la recherche médicale et des projets innovants, qui sont au coeur du plan stratégique australien à l'horizon 2030, bénéficient même d'un mécanisme de cofinancement UE-Australie. Aujourd'hui, des scientifiques français et australiens participent à plus de 90 projets dans le cadre du programme de financement H2020 et devraient continuer à le faire, car ils aident les deux parties à progresser dans la réalisation de leurs objectifs d'excellence scientifique.
Cependant, la politique française en matière d'enseignement supérieur et de recherche ne s'arrête pas aux portes de l'Europe. Cela va bien au-delà des frontières du marché commun. Par exemple, en promouvant des initiatives telles que le campus franco-sénégalais ou l'université franco-tunisienne, la France souhaite exporter l'excellence de son système d'enseignement supérieur vers le continent africain tout en adaptant son offre aux besoins spécifiques du marché local. . Ces campus bilatéraux souhaitent garantir une meilleure employabilité aux jeunes diplômés. Leur rayonnement régional offre aux étudiants une formation qui correspond mieux à la réalité du marché local. Les formations proposées au sein de ces plateformes bilatérales vont des formations professionnelles aux programmes de doctorat et l'ambition de la France est qu'elles soient reconnues à la fois en France et dans le pays où elles sont définies.
Cette politique africaine ambitieuse s'inscrit dans l'une des convictions profondes du président français Emmanuel Macron, à savoir que la jeunesse africaine devrait être engagée sans tarder, car c'est l'avenir de l'un des continents au potentiel le plus important en général, ainsi que pour la recherche, l'innovation et l'enseignement supérieur dans le monde. particulier. Le rayonnement de la France en matière d'enseignement supérieur, de recherche et d'innovation s'étend également à la Chine. Afin d'exporter notre excellence, nous avons par exemple créé 11 instituts franco-chinois axés sur l'ingénierie. Ces initiatives visent à créer des conditions de concurrence égales pour tous avec la Chine et reposent toujours sur les concepts de réciprocité et de résultats bénéfiques pour toutes les parties pour les deux pays.
Créer une stratégie commune ambitieuse franco-australienne n'a pas toujours été facile, notamment à cause des 16909 kilomètres qui séparent Canberra de Paris. Pour nous, l'Australie se trouve littéralement de l'autre côté de la terre. Mais la France et l'Australie ont dépassé cette distance considérable pour apprendre des forces de chacun. En 2016, l'Australie a décidé de faire confiance à la société du groupe de la marine française pour la construction de 12 sous-marins. Ce contrat couvre une période de 50 ans et comprend d'importantes facettes de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. En effet, la construction de sous-marins suppose une main-d'oeuvre suffisante pour assurer leur maintenance, ce qui nécessitera une formation. Le transfert de savoir-faire faisant partie du contrat comprend également d'importants aspects de la recherche. De ce point de vue, les acteurs français et australiens ont franchi un grand pas en jetant les premières pierres du Technocampus OzCean réunissant des universités, des centres de recherche, des représentants des gouvernements et de l'industrie marine réunis dans un lieu commun. Cette initiative ambitieuse a pour objectif de mettre en relation les différents acteurs du secteur afin de nourrir les idées et, éventuellement, d'innover. L'échange d'expertise entre nos deux pays sera également facilité par l'accord sur la reconnaissance professionnelle des diplômes d'ingénieur, signé il y a quelques jours à peine, entre Ingénieurs Australie et la Commission française des titres d'ingénieurs (CTI).
Le meilleur atout du partenariat stratégique franco-australien réside dans le caractère commun de nos valeurs. À deux pas de ce bâtiment, le Mémorial de la guerre australien nous rappelle le sacrifice inestimable consenti par l'Australie pour protéger la liberté et la justice sur la terre de la France. Comme notre Premier ministre Edouard Philippe l'a déclaré en novembre dernier lors de la célébration du centenaire de la bataille de Villers-Bretonneux: «Nous n'oublierons jamais qu'il y a 100 ans, un pays jeune et courageux de l'autre côté du monde a marqué l'histoire en écrivant notre histoire. . »
Aujourd'hui, notre vision du monde est semblable à bien des égards. Nous partageons un souhait commun de transparence. La France et l'Australie sont également deux pays fortement attachés au droit international. Cela est important à un moment où le contexte géopolitique subit de profonds changements, avec l'influence croissante de la Chine dans le monde et plus encore dans cette région, ou lorsque l'influence de l'intelligence artificielle soulève des questions sociétales et éthiques globales, ces deux questions étant en quelque sorte liées. Nos valeurs communes nous permettent de coopérer largement car nous sommes souvent sur le même plan éthique et juridique.
En fait, demain, la réunion conjointe franco-australienne sur la science et l'innovation se tiendra dans cette ville sur différents thèmes: la santé; espace et astronomie; matériaux, énergie et mines; industrie du futur, y compris intelligence artificielle; climat, environnement et sciences marines; écologie végétale et agriculture. Ces domaines de recherche ne sont que la partie visible de la coopération entre la France et l'Australie qui pourraient et devraient se développer pour conduire la transformation. Nos atouts mutuels dans des secteurs tels que la santé et l'IA pourraient tirer grandement parti de programmes de coopération plus larges, d'un plus grand nombre de collaborations et de publications et d'un plus grand nombre d'échanges d'étudiants. Aujourd'hui, un ensemble important de collaborations sera signé entre laboratoires et universités français et australiens. Par exemple, notre université parisienne Paris Science et Lettre ouvre un bureau de liaison à la Australian National University afin de renforcer les collaborations scientifiques mais également de garantir aux étudiants australiens souhaitant se rendre en France pour leurs études à l'étranger une meilleure information sur les procédures à suivre. Ce sont ces types de collaborations qu'il faut faire avancer. Pour la même raison que nos deux pays sont aux côtés opposés du globe. Des rencontres telles que la réunion conjointe sur la science et l'innovation qui aura lieu demain nous permettront d'aller de l'avant et de rassembler avec nous le monde et nos mandants respectifs. Ils nous permettent de transformer le monde, en amenant nos jeunes à voir autre chose, à expérimenter un autre mode de vie et divers modes de pensée, en leur montrant comment différents systèmes peuvent également contribuer à l'excellence. Ils nous permettent également de transformer le monde grâce aux collaborations de recherche que nous développerons au cours de ces réunions, aux résultats d'innovation de ces mêmes programmes de coopération qui atteindront le marché avec l'aide d'entreprises innovantes.
Je pense que c'est ce que le monde de l'enseignement supérieur et de la recherche peut apporter pour changer le monde. Je pense qu'il est de notre devoir en tant qu'universités d'agir dans la mesure du possible.
Merci de votre attention.
Source https://au.ambafrance.org, le 1er mars 2019