Interview de Mme Sibeth Ndiaye, secrétaire d’Etat, porte-parole du Gouvernement, à BFM TV le 2 juillet 2019, sur l'accueil des migrants dans l'Union européenne et les accords CETA et MERCOSUR.

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Intervenant(s) : 
  • Sibeth Ndiaye - Secrétaire d'Etat, porte-parole du gouvernement

Média : BFM TV

Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN
Notre invitée ce matin, Sibeth NDIAYE. Bonjour.

SIBETH NDIAYE
Bonjour.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous, porte-parole du gouvernement. Alors Conseil européen suspendu hier, il reprendra à onze heures tout à l'heure. Décidément, l'Europe n'arrive pas à trouver son président de la Commission européenne, son président du Conseil de l'Europe, le président de la BCE, la Haute représentante ou le Haut représentant pour les Affaires étrangères. C'est un échec. Est-ce qu'il y aura un accord aujourd'hui ? Est-ce qu'il y aura des noms donnés aujourd'hui ?

SIBETH NDIAYE
Eh bien ce que je peux vous dire, c'est que nous l'espérons fortement. Evidemment ce que vous avez décrit est extrêmement décevant.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bien oui, oui.

SIBETH NDIAYE
Enfermer vingt-huit chefs d'Etat et de gouvernement à l'intérieur d'une pièce parfois un peu glauque au Parlement européen pour avoir ce résultat-là, évidemment c'est une image très dégradée qu'on donne de la démocratie européenne et ça montre bien que les institutions européennes, et on peut être pro-européen et en même temps lucide sur aujourd'hui les dysfonctionnements qu'il a dans l'Union européenne.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Et pendant ce temps-là en Italie, voilà que la capitaine du Sea-Watch 3, Carola RACKETE, est interpellée. Elle risque plusieurs années de prison. Vous parlez de stratégie d'hystérisation de la part de l'Italie. Mais pourquoi « hystérisation » ?

SIBETH NDIAYE
Je le maintiens parce qu'il faut être toujours précis et il faut regarder les chiffres précisément. Il y a quelques années, nous étions dans un moment de pic de la crise. En 2016, il y a eu 180 000 migrants qui ont tenté le franchissement de la Méditerranée. Aujourd'hui, depuis le début de l'année 2019, on est dans des ordres de grandeur du millier. Et donc on voit bien qu'on n'est pas dans le même moment de crise. Et entre temps ce qui s'est passé, c'est que l'Union européenne, la France, ont fait oeuvre de solidarité en direction de l'Union européenne.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il était temps.

SIBETH NDIAYE
Je ne suis pas d'accord avec vous. Parce que sous un gouvernement précédent en Italie, nous avons accompagné le gouvernement italien. Nous l'avons accompagné par l'Union européenne avec des fonds qui ont été débloqués.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Nous avons aussi fermé notre frontière à Vintimille en renvoyant tous les migrants en Italie.

SIBETH NDIAYE
Parce que, pardon, il y a des règles qui ont été établies et c'est des règles qu'on se donne collectivement et l'Italie…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Je suis d'accord mais mettez-vous à la place des Italiens.

SIBETH NDIAYE
Et l'Italie a accepté ces règles. Et donc qu'est-ce qui se passe concrètement dans ces règles ? On dit : le premier pays qui est en contact avec un migrant qui fait une demande d'asile doit instruire cette demande d'asile. Et ensuite, il y a effectivement un principe de solidarité qui doit s'appliquer. Mais pour chacun des bateaux qui ont débarqué en Italie depuis des années, la France à chaque fois a pris sa part. Pour chacune des relocalisations qui étaient prévues, sur les 10 000 prévues il y en a eu 8 000 qui ont eu lieu en France. Des gens qui sont arrivés en Italie pour lesquels la France s'est engagée à les accueillir en France et ils ont été accueillis et il y en a eu 8 000 depuis le début de la crise. Donc on ne peut pas dire de la France qu'elle n'est pas solidaire de l'Italie.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que Sibeth NDIAYE aujourd'hui vous êtes solidaire de la capitaine du Sea-Watch 3 ? Est-ce que vous demandez à l'Italie, est-ce que le gouvernement français demande à l'Italie de la libérer ?

SIBETH NDIAYE
Il ne s'agit pas… Evidemment il faut respecter la justice d'un pays qui est souverain.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous ne demandez pas sa libération.

SIBETH NDIAYE
Je ne demande pas sa libération parce que, c'est une évidence, il faut respecter la justice d'un pays souverain. Je l'attendrais pour la France de la part de n'importe quel autre pays et c'est ce que nous faisons dans toutes les circonstances.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous n'allez pas jusque-là.

SIBETH NDIAYE
Il n'en demeure pas moins qu'il existe des lois maritimes. Que ces lois maritimes nous disent que lorsqu'il y a des gens qui sont en détresse sur la mer ils doivent être déposés dans le port le plus proche, le plus sûr. Et en l'occurrence, il s'agit de ports italiens.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Même en forçant l'accès au port. Même en menaçant une vedette de la police maritime italienne.

SIBETH NDIAYE
On parle de vies humaines. On parle de vies humaines à la fin et chaque mort est une mort de trop. Donc évidemment, lorsqu'il y a des lois maritimes qui peuvent s'appliquer, elles doivent s'appliquer. Je vous ai dit qu'il y avait de la solidarité envers l'Italie, je vous dis aussi que je pense que les ONG doivent être précautionneuses dans la manière dont elles agissent en Méditerranée.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Elles sont complices parfois ? Est-ce qu'on peut penser qu'elles deviennent parfois complices ?

SIBETH NDIAYE
Moi, je ne crois pas une demi-seconde qu'il y ait des ONG qui de manière voulue, qui sciemment décident d'aller se faire complices des passeurs qui aujourd'hui…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais sans que ce soit voulu…

SIBETH NDIAYE
D'aller se faire complices des passeurs. Mais on a des circonstances dans lesquelles leur présence peut être utilisée à leur corps défendant par les passeurs pour en faire en quelque sorte des points d'appui pour ce passage.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors je vous pose une question directe Sibeth NDIAYE. Est-ce que le gouvernement italien dans cette histoire est indigne ?

SIBETH NDIAYE
Je crois que le gouvernement italien effectivement n'est pas à la hauteur de ce qu'est…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'il est indigne ?

SIBETH NDIAYE
Le gouvernement italien n'est pas à la hauteur de ce qu'il devrait être, de ce que devrait être une grande…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous n'osez pas reprendre le mot « indigne » parce que là ça risque de provoquer…

SIBETH NDIAYE
Non, il ne s'agit pas d'être… Il s'agit d'être respectueux de nos partenaires et des autorités italiennes parce que l'Italie est un grand pays en Europe, a une histoire qui est une histoire commune avec la nôtre mais donc moi…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais est-ce que monsieur SALVINI est indigne dans son comportement ?

SIBETH NDIAYE
Moi, je considère que oui, en l'occurrence l'Italie n'est pas un pays indigne mais le comportement de monsieur Matteo SALVINI n'est pas un comportement qui est acceptable de mon point de vue sur les sujets migratoires parce que, et je l'ai déjà dit, il est dans une situation… dans une stratégie d'hystérisation qui consiste à monter en épingle un sujet qui est un sujet qui est douloureux, qui est un sujet qui est complexe et pour lequel l'Union européenne et la France ont été solidaires vis-à-vis de l'Italie.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Donc vous ne prononcez pas le mot « indigne » mais, bon, vous le pensez. Dites-moi, est-ce que la France est digne lorsque des CRS utilisent du gaz lacrymogène pour évacuer des manifestants pacifiques ?

SIBETH NDIAYE
Je crois que dans ces sujets-là, il faut toujours d'abord regarder les vidéos en entier puisqu'on parle de la vidéo du pont de Sully.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Exactement. A Paris vendredi.

SIBETH NDIAYE
Il faut agir toujours avec précaution et avec mesure. Moi je crois qu'il faut s'appuyer sur des principes. Le premier principe, c'est que nos forces de l'ordre doivent être exemplaires en tout temps, en tous lieux et à tout moment. Il y a une enquête qui a été ouverte, on verra les développements de cette enquête et il appartiendra au parquet, et non pas au gouvernement, de décider s'il y a matière à poursuite, à des poursuites judiciaires. Ça, c'est le premier élément et c'est un principe qui doit être un principe intangible. Le deuxième principe, monsieur BOURDIN, c'est que dans notre démocratie c'est mieux quand une manifestation est déclarée. Que dans notre démocratie, c'est mieux quand on ne met pas en danger d'autres personnes à travers la manifestation que l'on a soi-même. Parce que s'il y a une intervention de la police et des CRS à cet endroit-là, c'est parce que c'est tout Paris qui est bloqué par l'occupation de ce pont donc il faut avoir de la mesure. Je reconnais que ces images sont choquantes. Moi quand je les ai regardées, j'ai été…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Elles vous ont choquée.

SIBETH NDIAYE
Elles m'ont choquée. J'ai été très interrogative. Je ne sais pas ce qui s'est passé pendant les deux heures qui ont précédé et c'est pour ça que je fais confiance à la justice de mon pays.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Sibeth NDIAYE, l'accord entre l'Union européenne et le Mercosur, les quatre pays du Mercosur qui sont l'Uruguay, le Paraguay, le Brésil et l'Argentine. Est-ce que la France va signer cet accord ?

SIBETH NDIAYE
Eh bien, je ne peux pas vous le dire aujourd'hui parce que tout simplement il faut faire les choses dans l'ordre.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.

SIBETH NDIAYE
L'Union européenne a reçu un mandat il y a bien des années avant que nous n'arrivions au pouvoir.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, vingt ans.

SIBETH NDIAYE
Il y a une vingtaine d'années. Ce mandat lui a permis de négocier avec les quatre pays que vous citez du Mercosur. On va recevoir le contenu de cet accord et on va regarder. Je veux juste vous signaler une chose. Nous avions une crainte pour certaines filières, notamment les filières sucrière et bovine, parce qu'on craignait qu'il puisse y avoir une déstabilisation compte tenu des pratiques agricoles dans ces pays et en particulier au Brésil. Qu'avons-nous fait ? Nous avons demandé ce qu'on appelle une clause de sauvegarde. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que l'accord qui a été aujourd'hui signé, qui n'est pas encore ratifié par le Parlement français, ça viendra dans un deuxième temps.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais il faut d'abord que le gouvernement français donne son accord.

SIBETH NDIAYE
Bien sûr.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il faut aussi que cet accord soit ratifié par le Parlement européen.

SIBETH NDIAYE
Par le Parlement européen et donc on est dans une procédure qui est encore longue. Je termine juste. Cette clause de sauvegarde que nous avons obtenue permet de décider de stopper net - je dis bien de stopper net - les importations dans des filières fragiles s'il y a une déstabilisation manifeste de ces filières.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est quoi…

SIBETH NDIAYE
C'est la première fois…

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est simplement la déstabilisation de la filière ?

SIBETH NDIAYE
Oui, bien sûr.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire si on importe trop de boeuf brésilien par exemple en France. C'est ça ?

SIBETH NDIAYE
Ce n'est pas une question de trop, ce n'est pas la question des quotas.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, non. Ça n'a rien à voir avec la manière dont les boeufs sont élevés au Brésil.

SIBETH NDIAYE
Mais si bien sûr.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bon ?

SIBETH NDIAYE
Ce que je veux vous dire, il y a dans tous les accords internationaux aujourd'hui des normes environnementales et des normes sanitaires. Donc comme pour le CETA, nous n'allons pas importer de boeuf aux hormones, de saumon transgénique ou de choses qui sont interdites dans l'Union européenne. Et on met en place des filières de traçabilité et on évalue les accords. Pourquoi est-ce qu'aujourd'hui nous faisons en sorte de ratifier le CETA ? Parce que depuis 2017, nous avons mis en place une commission qui a évalué le CETA et nous ferons la même chose pour le Mercosur.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais une commission qui a dit quoi ?

SIBETH NDIAYE
Une commission qui a dit : il y a des points de vigilance. Ces points de vigilance, nous les avons traités avec le Canada. Je vais vous donner un seul chiffre. Le CETA, il s'applique depuis un an.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.

SIBETH NDIAYE
Oui. 6,6, vous savez ce que c'est comme chiffre ? C'est l'augmentation de nos exportations en direction du Canada.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, oui.

SIBETH NDIAYE
6,6, vous savez ce que c'est comme chiffre ? C'est la diminution des importations que nous avons depuis le Canada. Nous avons été gagnants dans cet accord. Nos filières agricoles ont été gagnantes. Aujourd'hui, vous ne pouvez plus falsifier du jambon de Bayonne au Canada parce qu'on reconnaît nos indications géographiques protégées.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors je voudrais quand même vous poser une question, des questions. D'abord je ne comprends pas. Vous, vous avez l'air très positive sur cet accord mais je vois par exemple Jérémy DECERLE qui est un député européen de la République en Marche, qui est ancien Jeunes agriculteurs, qui n'approuve pas ce traité. Je vois Pascal CANFIN qui dit que ce n'est absolument pas acquis. Est-ce que vous comprenez ?

SIBETH NDIAYE
Mais bien sûr.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous comprenez que des députés de la République en Marge, députés européens, ne votent pas ce texte ? Est-ce que vous accepteriez qu'ils ne votent pas ce texte ?

SIBETH NDIAYE
Je pense… Moi je n'ai pas à décider…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais d'accord, mais…

SIBETH NDIAYE
Moi je suis le pouvoir exécutif dont je ne décide pas à la place des députés.

JEAN-JACQUES BOURDIN
D'accord mais s'ils n'ont pas envie de le voter, c'est bien qu'il y a des raisons.

SIBETH NDIAYE
Bien sûr et donc on va examiner les choses. Et donc pourquoi est-ce qu'aujourd'hui le même Pascal CANFIN vous dit que pour le CETA, il est d'accord pour le voter ? Parce que tout simplement ce qui s'est passé…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Je vous parle du Mercosur.

SIBETH NDIAYE
Mais je vous dis bien que ce qu'on disait du CETA il y a cinq ans, ce n'est pas ce qu'on dit du CETA aujourd'hui. Parce que le CETA d'il y a cinq ans, ça n'est pas le CETA d'aujourd'hui. Parce qu'il y a des garanties que nous avons obtenues dans nos discussions avec le gouvernement canadien et nous allons faire de même avec les pays du Mercosur. Moi je ne peux pas vous dire que nous allons aujourd'hui ratifier le Mercosur. On va le regarder dans le détail et en fonction de ce détail, nous allons décider.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc la France pour l'instant n'est pas prête à ratifier. On est bien d'accord.

SIBETH NDIAYE
La France pour l'instant n'est pas prête à ratifier.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon. « Je ne veux plus d'accords commerciaux internationaux qui alimentent le dumping social et environnemental » c'est ce que disait Emmanuel MACRON avec monsieur BOLSONARO. On alimente quoi ? On alimente la déforestation. On alimente quoi ? On alimente la suspicion sur le réchauffement climatique. On alimente tout avec monsieur BOLSONARO et nous passons un accord avec monsieur BOLSONARO. Et j'ai une autre question à vous poser Sibeth NDIAYE. Faire parcourir des milliers de kilomètres à un morceau de boeuf pour qu'il soit consommé dans un pays qui en produit comme le nôtre, n'est-ce pas franchement stupide ?

SIBETH NDIAYE
Alors vous avez deux questions. La première, elle concerne monsieur BOLSONARO. Monsieur BOLSONARO il y a quelques semaines se rapprochait des Etats-Unis et faisait le choix potentiellement de se retirer de l'accord de Paris. Les obligations qu'il a dans cet accord, c'est douze millions d'hectares de reforestation. Pour pouvoir signer le Mercosur, il accepte de rester dans l'accord de Paris. Ça c'est une victoire diplomatique qui est importante.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Terminée la déforestation au Brésil, c'est ce que vous me dites.

SIBETH NDIAYE
Je ne dis pas « terminée la déforestation au Brésil », ce que je vous dis aujourd'hui, accord ou pas accord, il y a la déforestation.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. Donc on va continuer.

SIBETH NDIAYE
Donc la question elle est : est-ce que des pays qui sont en train de s'éloigner de l'accord de Paris, est-ce qu'on les y ancre ? Est-ce qu'on les fait rester du bon côté de la barrière en quelque sorte ? Donc on peut avoir de la théorie, on peut se monter le bourrichon. Moi j'essaye de regarder concrètement ce qu'on peut faire. Et avec les Brésiliens, nous avons réussi à les garder dans l'accord de Paris. Maintenant il faut vérifier les choses et c'est ce qu'on aura l'occasion de faire dans le cas du Mercosur. Deuxième chose, vous me posez la question en quelque sorte de ces marchandises qu'on fait voyager à travers le monde.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.

SIBETH NDIAYE
Moi vous savez, je suis aussi attachée à l'environnement qu'à notre capacité à la fois à faire vivre notre économie, parce que nous on exporte des choses.

JEAN-JACQUES BOURDIN
A faire vivre nos éleveurs aussi.

SIBETH NDIAYE
Nous, on fait vivre les éleveurs et vous savez quoi ? On exporte beaucoup de céréales en France, dans d'autres pays et parfois dans des pays qui sont loin.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, on est d'accord. Mais enfin, je vous parle des éleveurs.

SIBETH NDIAYE
Et parfois dans des pays africains. Et donc en fait, l'agriculture, tout se tient. Il n'y a pas d'un côté les éleveurs contre les céréaliers. Et donc on est bien dans des filières qu'on doit être capable de structurer. La question qui se pose, je vais vous donner un exemple : est-ce que vous considérez demain qu'il faut arrêter de manger des bananes en France quand elles viennent de Guadeloupe ? On peut le décider. Moi le choix que je fais…

JEAN-JACQUES BOURDIN
De toute façon, elles viennent de France.

SIBETH NDIAYE
Elles viennent de France, exactement. Elles viennent de France jusqu'à la métropole mais il faut quand même traverser tout pareil un océan. Et donc la question…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il faut dire que nous ne produisons pas beaucoup de bananes.

SIBETH NDIAYE
Effectivement, mais la question…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors que nous élevons des boeufs, ce qui n'est pas tout à fait pareil. Pardon Sibeth NDIAYE.

SIBETH NDIAYE
Pardon mais quand on exporte de la viande qui a des qualités gustatives particulières, parce que je suis fière de notre agriculture, quand on exporte cette viande on peut en être fier et on peut faire de la compensation carbone, et je pense que c'est important de le dire.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, Sibeth NDIAYE, la réforme des retraites. Est-il vrai que le gouvernement va revoir son agenda ?

SIBETH NDIAYE
Eh bien écoutez, moi l'agenda que je connais, que je peux vous donner et qui a été celui qui a été donné par le Premier ministre…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.

SIBETH NDIAYE
Cet agenda nous dit que d'ici une quinzaine de jours, Jean-Paul DELEVOYE qui est le Haut commissaire qui a géré les négociations jusqu'à présent sur la réforme des retraites présentera un rapport et des préconisations. Qu'à l'automne le gouvernement présentera le projet de loi. Qu'entre-temps, avant la présentation de ce projet de loi, donc à l'issue à partir du mois de juillet et y compris après la présentation de ce projet de loi, nous aurons des concertations avec les organisations syndicales. Et si nous faisons le choix de la concertation, c'est parce que nous considérons que c'est une réforme qui est une réforme d'une telle ampleur…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon. Alors est-ce que… Question précise, Sibeth NDIAYE. Discussions et projet de loi à l'Assemblée nationale avant les municipales ou pas ?

SIBETH NDIAYE
A ce stade, ça n'a pas été tranché et ça n'a pas été tranché…

JEAN-JACQUES BOURDIN
On prend les paris ?

SIBETH NDIAYE
Ça n'a pas été tranché…

JEAN-JACQUES BOURDIN
On prend les paris que ça ne sera pas avant les municipales ?

SIBETH NDIAYE
Ça n'a pas été tranché.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Sibeth NDIAYE, ce matin…

SIBETH NDIAYE
Je ne fais pas de Paris avec Jean-Jacques BOURDIN quel que soit le plaisir que j'ai à discuter avec lui.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, non, Sibeth NDIAYE, pourquoi est-ce que je vous dis ça ?

SIBETH NDIAYE
Ce que moi je vous dis, c'est que la décision elle n'était pas prise il y a un mois au moment où le Premier ministre a fait son discours de politique générale. Elle n'est toujours pas prise parce que nous souhaitons…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc on ne sait pas si la discussion aura lieu avant les municipales ou après.

SIBETH NDIAYE
Je ne peux pas vous le dire actuellement.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, j'ai compris ça. En revanche ce que vous pouvez nous dire, c'est qu'avant cette grande réforme, le gouvernement pourrait allonger la durée de cotisation. Oui ou non ?

SIBETH NDIAYE
Alors il y a aujourd'hui une réforme qui a été portée par Marisol TOURAINE, qui était la ministre socialiste de la Santé et des Solidarités dans un gouvernement précédent, et elle a mis en place une réforme qui conduit à un allongement de la durée de cotisation. C'est déjà là, ce n'est pas nous qui l'avons fait.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc on va poursuivre…

SIBETH NDIAYE
Je donne juste un fait.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais vous allez poursuivre.

SIBETH NDIAYE
Bien sûr.

JEAN-JACQUES BOURDIN
On est bien d'accord.

SIBETH NDIAYE
Mais c'est une loi qui a été adoptée par le Parlement précédemment.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. Ajouter un trimestre de cotisation par an.

SIBETH NDIAYE
Alors je n'ai pas en tête… Je ne voudrais pas vous dire de bêtise.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais moi, je vous dis que c'est comme ça que ça va se passer.

SIBETH NDIAYE
Je n'ai pas en tête le rythme d'allongement qui est prévu par la réforme Touraine. Si vous me dites que c'est un trimestre par an, je vous crois.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. C'est-à-dire que dans un premier temps, on va allonger la durée de cotisation. C'est parfait, comme ça financièrement comme les caisses sont en train de perdre de l'argent et qu'il faut renflouer un peu les caisses, on va renflouer les caisses et la grande réforme, elle viendra après les municipales.

SIBETH NDIAYE
Attendez…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Nous verrons.

SIBETH NDIAYE
Non mais là, je ne suis pas d'accord avec vous.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Eh bien nous verrons.

SIBETH NDIAYE
On doit se poser la question de pourquoi est-ce qu'on fait une réforme. Aujourd'hui, il y a beaucoup trop de Français qui vous disent qu'ils pensent qu'il y a des gens qui grugent, que ce n'est pas juste, que le système il est illisible et qu'on ne sait pas aujourd'hui de quelle retraite on bénéficiera demain. Donc moi quand je suis face à cette situation, je considère normal qu'on essaie de changer le système. Et par ailleurs, oui, il faut que ce soit un système qui soit équilibré parce que c'est bien beau de dire aux gens qu'on leur promet une retraite mais si on n'est pas capable de la leur payer, ça n'a absolument aucun sens.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que les traitements homéopathiques ne seront plus remboursés par la Sécurité sociale ?

SIBETH NDIAYE
C'est une décision qui n'a pas encore été prise par le gouvernement.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bon ?

SIBETH NDIAYE
Nous avons reçu un rapport de l'Agence nationale de sécurité du médicament…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, ça je sais.

SIBETH NDIAYE
Et donc on est en train d'instruire ce rapport y compris en interministériel.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous y êtes favorable ? Vous pensez qu'il faut cesser le remboursement ?

SIBETH NDIAYE
Moi vous savez, je n'ai pas de prétention scientifique et donc en l'occurrence je me garderai bien d'avoir une opinion là-dessus.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes porte-parole pourtant.

SIBETH NDIAYE
Oui, bien sûr. Mais je n'ai pas de prétention scientifique et en l'occurrence, il y a une balance qui doit être réalisée entre l'apport scientifique, ce qu'on sait scientifiquement de l'apport de l'homéopathie, des questions évidemment économiques puisque derrière il y a des emplois forcément, mais aussi ce qui est du bien-être de la population française et de ceux qui les utilisent.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Sibeth NDIAYE, j'ai une dernière question. Après le débat autour du burkini à Grenoble, est-ce que les piscines publiques municipales doivent être sanctuarisées comme les écoles publiques ?

SIBETH NDIAYE
Moi, je considère aujourd'hui que les règlements intérieurs des piscines publiques…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ils sont suffisants ?

SIBETH NDIAYE
Sont largement suffisants, il convient de les faire appliquer. Et ils sont suffisants pourquoi ? Parce qu'il y a des normes qui existent, qui disent dans quelle tenue vous devez plonger dans une piscine. Vous ne pouvez pas être topless dans une piscine et vous ne pouvez pas être en burkini dans une piscine. C'est pour des questions d'hygiène et de sécurité. Ça n'est en aucun cas, mais alors en aucun cas, des normes qui ont été édictées pour empêcher des personnes de telle ou telle communauté religieuse de pouvoir bénéficier d'activités nautiques. Et donc les choses sont claires, elles sont simples. Ça, c'est un premier débat.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et vous n'irez pas plus loin.

SIBETH NDIAYE
Et je n'irai… Et nous n'irons pas plus loin. E il y a un deuxième débat qui est un débat, pour le coup, qui est politique et qui n'est en aucun cas religieux. Parce qu'il ne faut pas se cacher derrière notre petit doigt : les associations comme celle qu'on a vue à Grenoble sont des associations communautaristes qui mènent un combat politique. Et ce combat politique ce n'est pas un combat religieux, parce que moi je ne crois pas que nous ayons des milliers de nos compatriotes d'origine ou de culture musulmane ou de religion musulmane – pardon, origine n'est pas le bon terme - qui demandent de pouvoir se baigner burkini. Donc c'est un débat qui est un débat qui est instrumentalisé par une minorité politique.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Sibeth NDIAYE, merci d'être venue nous voir ce matin sur RMC et BFMTV.

SIBETH NDIAYE
Merci à vous.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 10 juillet 2019