Texte intégral
FREDERIC RIVIERE
Bonjour Jean-Baptiste LEMOYNE.
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Bonjour.
FREDERIC RIVIERE
On va parler de la visite d'Emmanuel MACRON en Chine, on parlera également des mesures sur l'immigration qui devraient être annoncées demain, mais d'un mot pour commencer, on a beaucoup commenté hier le terme « d'imbéciles », employé par le Premier ministre pour qualifier les auteurs des violences de ce week-end à Chanteloup-les-Vignes. Rappelons qu'un cirque a brûlé, entre autres. Ce terme « d'imbéciles » vous semble-t-il le bon, vous semble-t-il à la hauteur de ce qui s'est passé ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Vous savez, définition du Larousse, imbécile : qui manque d'intelligence. Et ça en manque singulièrement, d'intelligence, que de s'en prendre à des biens comme ça, qui servent à des jeunes, à la communauté scolaire, et j'ajouterai que c'est sûrement aussi peut-être criminel. Imaginons s'il y avait eu des gens à l'intérieur de ce bâtiment…
FREDERIC RIVIERE
C'est peut-être ça que les gens avaient envie d'entendre.
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Et donc je crois que tout simplement, le Premier ministre il a dit très clairement, qu'il n'y aurait aucun répit dans la traque de celles et ceux qui veulent, comme cela, donner des coups de couteau à l'ordre républicain, qui veulent s'en prendre à des biens publics, et d'ailleurs on l'a vu, les dernières heures ont montré l'appréhension d'un certain nombre de suspects.
FREDERIC RIVIERE
Alors, Emmanuel MACRON est en Chine, deuxième visite d'Etat depuis son arrivée à l'Elysée. Est-ce que la guerre commerciale que les Etats-Unis ont déclarée à la Chine, a créé un nouveau contexte, peut-être plus favorable aux échanges entre l'Europe et la France, donc, qui d'ailleurs a du retard un peu à cet égard avec la Chine ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Alors, ce qui est sûr, c'est que nous devons avoir un dialogue constant avec nos amis chinois, sur les sujets commerciaux. Parce que, lorsque les Etats-Unis s'en prennent à la Chine, c'est pour évoquer des problèmes de subventions du capitalisme d'Etat, des subventions qui viennent miner finalement l'équité entre les producteurs dans le monde, et c'est un vrai sujet, et c'est pourquoi le président de la République a tenu à d'évoquer avec le président Xi JINPING, ces sujets de réforme de l'OMC, parce qu'on a besoin d'avoir une OMC qui a des règles adaptées au XXIème siècle, pour être respecté par tout le monde. Et puis la Chine c'est également ce pays, continent immense, avec en matière commerciale de formidables opportunités pour des filières françaises, et le président est parti avec notamment les filières agroalimentaire, aéronautique, etc., pour que les producteurs français profitent aussi de cette ouverture progressive. Elle est progressive et nous appelons les autorités chinoises à la poursuivre, c'est le sens du message que porte le président.
FREDERIC RIVIERE
Sur l'équité et le respect finalement des règles de la concurrence, le président de la République estime que Donald TRUMP pose les bonnes questions, mais n'apporte pas les bonnes réponses.
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Oui…
FREDERIC RIVIERE
Mais quelles seraient les bonnes réponses alors ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
La bonne réponse c'est tout simplement avoir un corps de règles, que tout le monde reconnaît, c'est-à-dire de dire que l'on ne peut pas subventionner, par subventions publiques, tel secteur etc., et donc ça c'est justement l'ambition de réformer, refonder cette organisation mondiale du commerce, qui est à deux doigts de la paralysie. Au mois de décembre prochain, cette organisation peut complètement être à l'arrêt, et c'est pourquoi il est très important d'imaginer les voies d'une réforme, sinon qu'est-ce qui va se passer ? Ça va être la multiplication des mesures unilatérales, ça veut dire des mesures décidées par un et un seul, on a vu les Etats-Unis imposer des sanctions, d'ailleurs aux Chinois, mais également aux Européens, l'acier européen est désormais taxé depuis plus d'un an, à des taux prohibitifs, et donc nous, nous ne nous faisons pas à cela, nous voulons absolument remettre à plat la feuille de route de l'OMC.
FREDERIC RIVIERE
L'Elysée a assuré qu'Emmanuel MACRON aborderait sans tabou les questions de droits de l'homme, la situation à Hong-Kong, mais Pékin a prévenu que ça n'était pas forcément très pertinent de mettre ces questions à l'ordre du jour, des questions qui relèvent des affaires intérieures. Comment trouver le bon équilibre entre les valeurs morales, auxquelles la France est attachée, et les valeurs sonnantes et trébuchantes ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Mais il n'y a pas à opposer l'une et l'autre.
FREDERIC RIVIERE
C'est parfois difficile à concilier.
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Il n'y a pas à opposer l'une et l'autre…
FREDERIC RIVIERE
Il ne faut pas fâcher, et en même temps il faut en parler.
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Mais toujours. Vous savez, dans tous les dossiers complexes liés aux droits de l'homme, eh bien la France et le président de la République, singulièrement, évoque ces sujets-là avec ses interlocuteurs.
FREDERIC RIVIERE
Mais à huis clos, désormais, à huis-clos, c'est une manière plus habile de le faire ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Oui, mais vous savez, lorsqu'on cherche des résultats, de l'efficacité, la meilleure façon de faire ce n'est pas forcément d'aller faire un point Presse devant 400 journalistes, c'est tout simplement d'évoquer un certain nombre de cas, de situations très concrètes avec nos interlocuteurs, ici ou ailleurs, c'est la façon de faire, et encore une fois qui peut permettre d'obtenir…
FREDERIC RIVIERE
Et finalement, du coup, personne ne sait si le sujet a vraiment été évoqué, et comment il a été évoqué, s'il l'a été.
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Ecoutez, je peux vous dire que si, et j'ai des précédents en tête, sur des rencontres avec d'autres chefs d'Etat et de gouvernement, sur... la question pouvait se poser justement de sujets importants de ce type-là, à évoquer, le président l'a toujours fait. Vous savez, il porte les valeurs de la France.
FREDERIC RIVIERE
Le gouvernement devrait instaurer un délai de carence de 3 mois avant que les demandeurs d'asile ne puissent accéder à la Protection Universelle Maladie, la fameuse PUMA, ce sera l'une des 20 mesures qu'Edouard PHILIPPE doit dévoiler demain à l'issue d'un Comité interministériel sur l'immigration. Est-ce que vous ne craignez pas que ce genre de mesure ne fracture la majorité ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Alors, s'agissant des mesures et du contenu, je renvoie naturellement au Comité interministériel qui se tiendra demain, au Premier ministre qui les annoncera. Ce que je peux vous dire…
FREDERIC RIVIERE
Il sera question d'immigration aussi.
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Ce que je peux vous dire, c'est que ce sujet de l'immigration, eh bien nous l'avons mis justement à l'ordre du jour des débats du Parlement, il y a eu un débat à l'Assemblée nationale, au Sénat, parce qu'il est important que sur ces sujets-là on puisse faire un diagnostic, pointer un certain nombre de dysfonctionnements, et puis du coup procéder à un certain nombre d'ajustements. Et aussi ça permet de lutter contre un certain nombre d'idées reçues, parce qu'il y a bien des gens qui parlent d'immigration, mais en parlent mal ou instrumentalisent le sujet. Et donc nous, nous voulons je dirais faire la vérité des faits, objectiver, et derrière prendre des mesures adéquates. Vous parliez de la majorité, moi je veux saluer le travail…
FREDERIC RIVIERE
Oui, on sait qu'il y a une aile gauche à la République En Marche, Aurélien TACHE, par exemple, vous n'avez pas, vous ne craignez pas qu'un certain nombre d'entre eux se désolidarise de ces initiatives-là, et aussi par exemple de celle sur les quotas d'immigration, pour répondre aux impératifs économiques de la France ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Il y a eu un très gros travail, fait avec la majorité, avec les parlementaires, qui ont rencontré les différents ministres du gouvernement sur le sujet, le Premier ministre, et qui chaque semaine ont co-construit un certain nombre de solutions, un certain nombre de mesures, donc je crois qu'au contraire, sur ce dossier-là, c'est l'exemple d'un travail partenarial avec la majorité, et on a tout à s'en réjouir. On est tous là, justement on a tous fait le choix, que ce soit au Parlement ou au gouvernement, de dépasser des clivages obsolètes, d'en finir avec des politiques qui parfois n'étaient pas forcément efficaces, parce que je peux vous dire que ceux qui musclent, qui ont les petits bras musclés sur l'immigration, en réalité souvent ils n'ont pas fait grand-chose, je renvoie notamment Les Républicains à leur bilan.
FREDERIC RIVIERE
Alors, par exemple, sur les quotas, puisqu'il devrait être question, il devrait être établi... des quotas devraient être établis pour l'immigration, en fonction des besoins des entreprises, et ça, même la droite, dont vous venez d'ailleurs, n'avait pas osé le faire.
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Je crois que, vous savez, il faut regarder d'où on vient. Il existait une liste des métiers en tension. Cette liste elle n'avait pas été actualisée depuis plus de 10 ans, donc on va faire tout ce travail, et surtout l'idée c'est de pouvoir répondre à des besoins de l'économie française, de court terme et de moyen terme, c'est-à-dire que l'on va faire un travail, notamment statistique, territoire par territoire, pour voir quels sont les métiers, les filières qui connaissent des tensions. Parce que moi, il n'y a pas un déplacement que je fasse en tant que secrétaire d'Etat, notamment chargé du tourisme, sans que je rencontre des hôteliers, des restaurateurs, qui me disent : « On a du mal, on n'arrive pas à recruter, je ne fais pas de deuxième service parce que je n'ai pas suffisamment de main-d'oeuvre ». Eh bien on va faire cette cartographie statistique des besoins de l'économie française, pour justement pouvoir réguler les entrées et aussi s'adresser aux compétences dont on a besoin. Par exemple, cette liste des métiers en tension, ne comprenait pas la catégorie des codeurs, et on sait que l'économie a besoin dans les nouvelles technologies, de ce type de métier. Voilà, il s'agit de se mettre à jour et puis d'ajuster un certain nombre de dispositifs, parce qu'il faut lutter contre un certain nombre de dévoiement. Vous évoquiez la PUMA, qui concerne les demandeurs d'asile, oui nous sommes humains et les demandeurs d'asile qui sont persécutés, ont vocation à être accueillis, mais d'autres peut-être n'ont pas cette vocation-là.
FREDERIC RIVIERE
Merci Jean-Baptiste LEMOYNE, bonne journée.
ARNAUD PONTUS
Jean-Baptiste LEMOYNE, secrétaire d'Etat auprès du ministre des Affaires étrangères, invité de Frédéric RIVIERE, sur RFI.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 15 novembre 2019