Texte intégral
JOURNALISTE
Le ministre de l'Intérieur est notre invité ce matin Mathieu FERRI.
MATHIEU FERRI
Et il est au téléphone avec nous. Bonjour Christophe CASTANER.
CHRISTOPHE CASTANER
Bonjour.
MATHIEU FERRI
On l'a dit, vous venez à Montauban pour visiter une plateforme téléphonique qui est unique en France, elle est commune aux pompiers, au SAMU, aux services sociaux. Mais vous arrivez dans le Tarn-et-Garonne aussi Christophe CASTANER, alors que les pompiers sont en grève comme dans d'autres départements, vous venez éteindre l'incendie ?
CHRISTOPHE CASTANER
D'abord regardons ce pourquoi je viens. Ce projet que vous avez évoqué rapidement, c'est un projet unique, ambitieux, innovant et donc le territoire doit en être fier, il peut permettre de lier les interventions de nos pompiers, mais aussi de nos ambulanciers, de nos structures d'urgences sanitaires et sociaux pour être plus efficace. Et c'est vraiment un projet qui est effectivement exemplaire et qui permet d'améliorer la coordination entre tous les services, et d'optimiser les interventions de nos pompiers en particulier. Et c'est une première réponse à ces tensions que vous évoquiez, parce que c'est vrai que depuis 10 ans, les services d'intervention et de secours ont connu une augmentation de 50% du nombre d'interventions annuelles, donc pour ces urgences aux personnes ; et elles représentent 85% de l'activité des pompiers, c'est vrai que dans votre région comme partout en France. Et donc ça provoque une saturation, des difficultés d'intervention et donc il faut agi. Il y a un mouvement, j'ai encore reçu les partenaires sociaux cette semaine, une réunion qui s'est bien passée pour travailler sur le sujet des retraites, parce que les pompiers ont une retraite spécifique liée à la dangerosité de leur métier, ils ont des inquiétudes sur la réforme des retraites que nous conduisons actuellement. Et donc nous devons travailler avec eux, c'est normal et légitime.
MATHIEU FERRI
Mais Christophe CASTANER, il y a la question effectivement de la sursaturation des pompiers, mais il y a la question des violences urbaines quand ils interviennent à Chanteloup-les-Vignes, quand ils interviennent à Castres comme ça a été le cas chez nous il y a quelques jours dans le Tarn, ils sont menacés les pompiers. Qu'est-ce que vous leur dites, comment on peut les protéger ?
CHRISTOPHE CASTANER
Alors c'est aussi un des sujets d'inquiétude, même si – je reprends les mots du président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers volontaires qui m'accompagnera d'ailleurs tout à l'heure lors du congrès de Vannes – on ne mesure pas forcément une augmentation du nombre d'agressions. Il faut avoir en tête que plus de la moitié des agressions sont issues des personnes que l'on vient secourir elles-mêmes, qui sont dans un état qui peut être personnel, qui peut être lié à la drogue, à l'alcool mais qui peut être aussi lié à des problèmes psychologiques ou psychiatriques, donc on a ce phénomène-là, donc il nous faut les protéger. J'ai mis en place des dispositifs, par exemple depuis un mois et demi nous expérimentons les caméras piétons dont sont équipés aujourd'hui les policiers et les gendarmes, au moment de l'intervention ils branchent le dispositif. Ce sera un élément qui permet d'abord de faire de la prévention, celui qui sait qu'il est filmé a un comportement différent ; et ça doit nous permettre aussi de faire de la judiciarisation, c'est-à-dire que chaque fois qu'un pompier est agressé, je les ai encouragés, je leur demande, je ne suis pas leur autorité mais je leur demande de porter plainte de façon systématique. Et c'est ça qui augmente, ce sont les plaintes et c'est une bonne chose, parce que ça doit nous permettre de sanctionner ceux qui au fond menace ceux qui viennent pour les sauver.
MATHIEU FERRI
Christophe CASTANER, je reviens quand même sur les violences urbaines, à Castres il y a quelques jours explosion d'une bombe aérosol dans une voiture dans un quartier, les pompiers interviennent pour éteindre cette voiture, il y a des blessés. Nous y sommes allés cette semaine à Castres et je vous propose d'écouter la réaction d'un des jeunes du quartier.
INTERVENANT
Les pompiers, on s'en fout nous d'eux, nous c'est la police.
INTERVENANT
Ils croient que c'est fini mais ce n'est pas fini du tout.
INTERVENANT
Maintenant la prochaine fois qu'ils reviennent, eh ben ! Vous avez compris ce qui va se passer.
MATHIEU FERRI
Ce jeune d'un quartier de Castres qui dit « les pompiers ont ne leur en veut pas mais les policiers par contre, ce sont nos ennemis ». Qu'est-ce que vous répondez Christophe CASTANER ?
CHRISTOPHE CASTANER
On a bien vu, alors c'est une particularité de la fête d'Halloween, mais les violences urbaines on en a hélas tout au long de l'année, même si sur la plaque parisienne elles sont en baisse cette année. Ce que l'on constate, c'est plus en plus de violence et des pièges, des guet-apens. Ce qu'on a vu pour Halloween, c'est d'abord un défi lancé entre les quartiers, entre les cités sur les réseaux sociaux pour être celui qui fera le plus gros coup entre guillemets, donc qui menacera, qui blessera des forces de sécurité, des policiers ou des gendarmes. Et puis on a vu, à Chanteloup-les-Vignes en particulier mais à Castres une enquête est en cours, je ne me prononcerai pas mais on voit aussi ces violences urbaines qui visent effectivement nos forces de secours. Et elles sont organisées, à Chanteloup-les-Vignes les voyous s'étaient mis au sommet des angles d'immeubles, ils avaient préparé leur coup ils avaient acheté du matériel pour cela. Et donc oui, ils considèrent qu'il y aurait 2 bandes, la bande de la sécurité et la bande du quartier, et qu'il faut organiser des interventions sur ce sujet. Hier après-midi, j'étais à Chanteloup-les-Vignes… d'abord cette semaine, j'étais hier après-midi avec le président de la République et nous travaillons sur un plan d'action que nous devons renforcer, pour protéger les interventions des pompiers à chaque fois que c'est nécessaire, protéger aussi nos forces de sécurité et renforcer notre présence dans ces quartiers. C'est ce que nous faisons, je dois vous dire aussi que c'est la conséquence du plan d'action fort que nous menons contre le trafic de drogue, qui fait que quand on tape le business, quand on tape les ressources financières on a aussi ces réactions-là. Dans l'Essonne pour Chanteloup-les-Vignes, on a augmenté de 50 % le nombre de trafics démantelés depuis le début de cette année…
MATHIEU FERRI
Christophe CASTANER, pour en revenir sur le cas des pompiers, on a parlé de Castres effectivement…
CHRISTOPHE CASTANER
…Pompiers mais vous me posez une question, je tente d'y répondre même pour les policiers…
MATHIEU FERRI
Mais je reviens quand même sur la question des pompiers, on pose la question d'ailleurs ce matin aux auditeurs de France Bleu Occitanie, les pompiers doivent-ils refuser d'intervenir quand ils risquent des violences, qu'est-ce que vous dites-vous, est-ce qu'ils peuvent refuser de le faire ?
CHRISTOPHE CASTANER
D'abord ils ne doivent pas et ils ne le font pas parce que ce sont des femmes et des hommes engagés et courageux et je veux les saluer. Ce que je sais par contre, c'est que dans les quartiers sensibles nous avons demandé à tous les préfets de faire une cartographie. Et il y a des endroits où avant d'intervenir, ils doivent attendre la présence des policiers ou des gendarmes, des forces de sécurité pour les protéger. Et ça, nous devons le mettre en place, c'est dans le cas dans le département du Tarn-et-Garonne et évidemment nous devons l'avoir partout de façon systématique. Alors des fois, c'est mal compris par nos concitoyens parce que le véhicule des pompiers peut arriver et dans ce cas-là, les pompiers ont l'instruction de ne pas sortir des véhicules des pompiers tant qu'il n'y a pas le renforcement de la présence policière. Ça n'est pas la majorité des cas bien heureusement, et je voudrais quand même rappeler que vous êtes une région où les pompiers sont protégés naturellement, à commencer par la population elle-même.
MATHIEU FERRI
Merci Christophe CASTANER, restez avec nous, on fait une pause de 2 minutes et puis on vient pour la suite de cette interview.
(…)
JOURNALISTE
Le ministre de l'Intérieur Christophe CASTANER est notre invité ce matin Mathieu FERRI.
MATHIEU FERRI
Christophe CASTANER, reparlons des policiers, vous êtes régulièrement interpellé par le maire de Toulouse qui dit qu'il lui manque des fonctionnaires de police pour assurer la sécurité dans la ville. Qu'est-ce que vous lui répondez à Jean-Luc MOUDENC ?
CHRISTOPHE CASTANER
Je lui réponds ce que nous faisons pour l'ensemble du territoire national, je porte un plan de recrutement de 10.000 policiers et gendarmes supplémentaires et évidemment pour l'ensemble du territoire national, dont Toulouse, d'ailleurs en 2018 on a déjà une croissance des effectifs sur Toulouse, directement sur Toulouse. On a un maintien cette année d'un haut niveau de présence, mais par contre sur Toulouse on a une sur-sollicitation de nos forces et en particulier liées aux manifestations des Gilets jaunes qui, à Toulouse comme à Paris mais à Toulouse de façon plus significative encore, se sont maintenues de façon pérenne. Toulouse est au fond… la modélisation des Gilets jaunes la 2ème ville de France avec systématiquement des violences, des mises en cause, des attaques contre nos policiers et nos gendarmes qui font la sécurité. Et c'est aussi ça qui pose problème à Toulouse.
MATHIEU FERRI
Et donc est-ce qu'il y aura des policiers supplémentaires, vous dites qu'il y a eu des recrutements mais Toulouse c'est la 4ème ville de France, il y a quand même 200 policiers de moins qu'à Bordeaux !
CHRISTOPHE CASTANER
Non mais vous savez, on n'est pas sur une cartographie qui doit s'appliquer en fonction de la taille de la ville. On est en fonction des quartiers, des réalités que nous connaissons. Et Marseille vous répondra : mais alors je suis la 2ème, je suis moins bien dotée que Toulouse. On n'est pas sur ce type de concours, on doit prendre en compte l'ensemble de la réalité…
MATHIEU FERRI
Oui mais on sent qu'il y a des règlements de compte de plus en plus à Toulouse, qu'il y a des questions de trafic de drogue, on le sens ça et les policiers ils ont l'air d'être en retard.
CHRISTOPHE CASTANER
Non, les policiers ne sont pas en retard, à moins que vous ayez des éléments sur les retards de la police, moi je ne pense pas qu'ils le soient. Ils sont juste très mobilisés sur-mobilisés, mais il faut des moyens supplémentaires pour Toulouse, pour l'ensemble du territoire et c'est pour cela que nous procédons à ces plans de recrutement. Quand les gens sortent d'école, nous faisons une répartition nationale et Toulouse n'est pas oubliée, parce qu'il y a des vrais problèmes à Toulouse. Vous évoquez le trafic de drogue qui, hélas ! Ne touche pas que Toulouse et qui touche aujourd'hui même la ruralité. Donc nous devons progresser sur ces sujets, c'est ce que ne nous faisons pas un plan massif de recrutement.
MATHIEU FERRI
Bientôt Christophe CASTANER, c'est le 1er anniversaire de la mobilisation des Gilets jaunes. Pour vous, est-ce que le mouvement est encore vivant ?
CHRISTOPHE CASTANER
Oui en termes de mobilisation et je peux vous dire que même si cette mobilisation est faible, nous du côté des forces de sécurité intérieure, chaque samedi nous nous préparons à ces manifestations qui sont presque systématiquement violentes, même s'il y a moins de monde. Et donc du coup, il nous faut chaque samedi mettre des moyens, des forces pour que les choses se passent bien. On en parle moins parce qu'il y a moins de casse, mais en réalité… et beaucoup moins de monde qui se mobilisent, mais on a systématiquement la volonté de violences et sur Toulouse en particulier où, je vous l'ai dit, on est vraiment sur un des points de tension les plus forts de France depuis le début du mouvement. Et le nombre de plaintes pour dégradation de commerces, de banques, d'institutions au centre-ville de Toulouse s'élèvent par exemple à 364, presque tous les samedis il y a cette volonté de violence.
MATHIEU FERRI
Et il y a aussi des plaintes contre les comportements des policiers, il y a des enquêtes de la police des polices. A Toulouse ça n'avance pas, pourquoi ? A Paris, il y a 2 policiers qui vont être jugés en correctionnelle bientôt.
CHRISTOPHE CASTANER
Attendez ! La décision est tombée hier pour Paris et des décisions, s'il doit y en avoir, tomberont pour Toulouse. Vous savez les enquêtes, elles ne sont pas… ce n'est pas la police qui enquête sur elle-même, même si l'expression police des polices est charmante. La réalité c'est que les enquêtes sont conduites sous l'autorité d'un procureur de la République. Et donc quand on fait des enquêtes judiciaires, ça prend un certain temps – vous le savez – et on doit traiter de la même façon les policiers qu'on doit traiter dans l'exemplarité, dans l'exigence n'importe quel citoyen, donc il faut le temps de l'enquête. S'il y a des fautes, elles doivent être sanctionnées et c'est la responsabilité du procureur qui dirige l'enquête d'en décider. C'est ce qui s'est passé sur Paris, moi il ne m'appartient pas de commenter, juste ma responsabilité, c'est d'en prendre acte.
MATHIEU FERRI
Un dernier mot Christophe CASTANER sur les municipales, est-ce qu'il faut un candidat la République en marche dans toutes les grandes et moyennes villes de France, est-ce qu'il en faut à Montauban face à Brigitte BAREGES par exemple ?
CHRISTOPHE CASTANER
Vous savez, j'ai été responsable de la République en marche, maintenant je suis ministre de l'Intérieur en charge des élections et pas en charge du mouvement politique la République en marche.
MATHIEU FERRI
Vous avez quand même un avis sur la question !
CHRISTOPHE CASTANER
Bien sûr que j'ai un avis, mais là vous interrogez le ministre de l'Intérieur et donc je ne me prêterai pas aux décisions et aux discussions politiques, voilà. J'ai tourné la page de ma responsabilité à la tête de la République en marche, ça n'est pas aujourd'hui pour émettre des opinions et des soutiens diverses et variés. Je viens comme ministre de l'Intérieur soutenir cette belle initiative à Montauban, cet engagement courageux du département d'avoir cette plateforme exemplaire, soyons fiers de cela.
MATHIEU FERRI
Merci Christophe CASTANER d'avoir choisi France Bleu Occitanie et France 3 Occitanie, en tout cas ce matin vous venez donc à Montauban en tant que ministre de l'Intérieur pour inaugurer cette plateforme unique en France du pompier, du Samu. Merci Christophe CASTANER, bonne journée.
CHRISTOPHE CASTANER
Merci bien.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 19 novembre 2019