Texte intégral
Merci de venir nous rejoindre à la résidence de l'ambassade de France pour faire un point après la réunion de la coalition que nous avions nous-même sollicitée. Il nous paraissait nécessaire qu'il y ait une clarification parce qu'il y a eu un trouble après l'intervention de la Turquie dans le nord-est syrien le 9 octobre, puis après l'annonce par les Etats-Unis de leur retrait du nord-est syrien le 13 octobre. Il y a eu un trouble qui a entraîné des interrogations, peut-être même une question de confiance sur la capacité de la coalition à poursuivre le combat contre Daech, parce que ce n'est pas parce que le périmètre géographique du pseudo-califat avait été éradiqué que le combat contre Daech s'achevait.
Ce n'est pas uniquement parce que M. Baghdadi, ce qui est une très bonne chose, a été neutralisé, que la capacité de projection de Daech a été éliminée.
Et donc, lorsque nous nous sommes retrouvés il y a un mois devant cette situation - l'offensive turque et l'annonce du retrait américain -, nous avons demandé, j'ai demandé en particulier sur un média français, que la coalition se réunisse parce que nous étions, d'une certaine manière, mis devant le fait accompli et nous étions membres de la coalition depuis 2014 et que nous pensions que le combat contre Daech n'était pas achevé, en conséquence de quoi, nous considérions nécessaire de se réunir.
Cette demande de la France avait été relayée aussi par la demande des Européens puisque nous nous sommes réunis le 14 octobre en réunion des ministres des affaires étrangères de l'Union et que les 28 avaient demandé que la coalition puisse se retrouver pour s'interroger sur la suite de l'action.
La question que j'ai posée à mes collègues aujourd'hui, c'est une question très simple : "Formons-nous toujours ensemble une coalition ? Poursuivons-nous ensemble nos efforts politiques militaires de stabilisation, en prenant en compte la situation nouvelle ?".
Nous avions en fait cinq axes et cinq demandes de décisions à proposer à nos collègues de la coalition que je vais mentionner rapidement.
La première orientation, la première décision que nous attendions, c'est que l'ensemble des acteurs de la coalition évite de prendre des initiatives unilatérales sans consultation avec les autres membres, initiatives qui en plus pourraient remettre en cause nos efforts. Cet engagement est pris dans la déclaration des ministres, que nous avons agréée, et que vous devez maintenant avoir puisque nous l'avons rendue publique il y a peu de temps.
La deuxième décision, la deuxième proposition d'action, c'était de réaffirmer que nous poursuivrons notre engagement dans le cadre de la coalition et que nous y consacrerons les moyens nécessaires dans le nord-est syrien et en Irak. Vous avez constaté que les Etats-Unis ont pris la décision de maintenir une présence militaire dans le nord-est syrien pour poursuivre la lutte contre Daech et pour poursuivre le soutien de nos partenaires locaux, c'est une bonne nouvelle et la France continuera d'assumer toutes ses responsabilités et de participer comme auparavant à la coalition contre Daech. C'est, je crois, un point important de la matinée qui a été réaffirmé avec beaucoup de détermination par le secrétaire d'Etat Mike Pompeo.
La troisième orientation concerne la question des combattants étrangers de Daech, qui est une question importante. Ces combattants sont aujourd'hui, pour ceux qui ne sont pas dans la clandestinité, en détention soit en Irak soit dans le nord-est syrien, et quand je parle des combattants de Daech, je parle des combattants de Daech dans leur ensemble, parce qu'on oublie trop souvent que l'essentiel des détenus provient d'Irak et de Syrie. La question des combattants étrangers s'intègre à cette problématique, mais le nombre de combattants étrangers, singulièrement des combattants français, est un nombre très minoritaire dans la masse des combattants qui sont irakiens et syriens. Ce que nous avons décidé, c'est qu'il faut à tout prix garantir la détention sûre et durable des combattants afin d'éviter qu'ils s'éparpillent, qu'ils repartent dans le combat. C'est aussi de garantir l'impunité des crimes qu'ils ont commis et de continuer, pour notre part, à dire qu'ils doivent être jugés au plus près des crimes qu'ils ont commis, car n'oublions jamais que ces femmes et ces hommes qui ont rejoint Daech ont fait un choix en toute conscience, celui de se battre pour une organisation terroriste.
La quatrième orientation que nous proposions, c'était de continuer à financer, à soutenir l'effort humanitaire et l'effort de stabilisation, à la fois en Syrie - autant que possible et en Irak. Le retour du régime dans une partie du nord-est de la Syrie limite notre capacité d'action au-delà de l'aide humanitaire aux populations, même si l'aide humanitaire peut être répartie partout et nous le faisons, parce que nous ne voulons pas que la stabilisation et la reconstruction puissent se développer dans les zones tenues par le régime et que nous considérons que ces initiatives-là doivent être prises uniquement lorsque le processus politique, qui s'est ouvert enfin à Genève après la première réunion du Comité constitutionnel, aura abouti.
C'est d'ailleurs la même réflexion que nous faisons quant au soutien à des relocalisations forcées qui pourraient intervenir et qui ne bénéficiera pas de notre soutien de stabilisation.
Enfin notre cinquième orientation, c'est de réaffirmer notre engagement à poursuivre notre soutien auprès des autorités irakiennes dans la lutte qu'elles mènent contre Daech. Le gouvernement de l'Irak a relevé des défis immenses au cours de ces dernières années. La coalition doit rester à ses côtés dans la situation qui est très difficile qui est celle que nous connaissons dans ce pays.
Je constate dans le communiqué final qui a été validé que l'ensemble de ces axes a été retenu et je m'en réjouis. Ces orientations ont fait l'objet d'une réunion des Européens ce matin ainsi que toutes les orientations que je viens d'indiquer.
Donc c'est une réunion importante de clarification et de remobilisation contre le terrorisme, et je pense que c'est une nouvelle étape de l'action de la coalition qui s'est ouverte ce matin à la suite de cette rencontre que nous avions souhaitée et qui, je crois, a permis la nécessaire clarification que nous réclamions. Voilà ce que je voulais vous dire en introduction.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 21 novembre 2019