Texte intégral
JEAN-JACQUES BOURDIN
Elisabeth BORNE, notre invitée, ministre de la Transition écologique et solidaire, bonjour.
ELISABETH BORNE
Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous. Incendie actuellement à Villeurbanne, une épaisse fumée noire dans le ciel. Ce n'est pas un entrepôt ou une usine Seveso ?
ELISABETH BORNE
Selon les informations que nous a données la préfecture, ce n'est pas un site Seveso. C'est un entrepôt de stockage.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Stockage de quoi ?
ELISABETH BORNE
Plutôt de plastique mais on attend toutes les précisions. En tout cas, ça ne semble pas être un site Seveso et la préfecture est mobilisée sur le sujet.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Hommage aux victimes de la préfecture de police de Paris tout à l'heure à onze heures. Vous avez dirigé la RATP. A la RATP, il y a eu une forme de radicalisation chez certains rares agents de la RATP. Vous avez connu cela, Elisabeth BORNE.
ELISABETH BORNE
Il y a eu du communautarisme, c'est-à-dire notamment des agents qui refusaient de serrer la main des femmes, de conduire un bus derrière une femme. Moi j'ai vraiment été très intraitable, je dirais, sur le sujet. Dans une entreprise de service public…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ils ont été licenciés.
ELISABETH BORNE
Il y a des gens qui ont été licenciés s'ils n'ont pas repris un comportement normal après des avertissements. Je pense qu'il faut être très vigilant d'abord sur la vie dans un collectif de travail sur ces sujets de communautarisme. Et puis évidemment, il faut être aussi très vigilant sur tous les signaux faibles qu'on peut avoir sur des signes de radicalisation.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je vous parle de la RATP parce que c'est l'une des entreprises publiques qui est un peu montrée du doigt en expliquant que dans les transports, au-delà même plus que dans la police, plus que dans la gendarmerie, dans les transports il y a ce risque de radicalisation qui n'est pas nul.
ELISABETH BORNE
Alors…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Comment faites-vous pour justement déceler et lutter contre cette radicalisation dans une entreprise comme la RATP ?
ELISABETH BORNE
Vous pouvez manquer d'outils juridiques, et il y a une loi qui a été votée en 2016, la loi Savary, qui permet d'avoir des enquêtes administratives, ce qu'on appelle du criblage avant le recrutement et qui permet régulièrement de refaire des enquêtes administratives s'il y a des comportements qui peuvent donner des signes de radicalisation. Et donc moi, j'ai demandé à l'époque aux services d'être extrêmement vigilants et je pense que ma remplaçante Catherine GUILLOUARD à la même politique. Moi je vous dis, il y a à la fois le refus du communautarisme qui me semble indispensable dans une entreprise de service public, et puis une vigilance très grande qu'il faut avoir en permanence sur tous les signes de radicalisation qu'on peut avoir.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Franchement, l'islam radical est silencieux. Est-ce qu'on sait le combattre, Elisabeth BORNE ?
ELISABETH BORNE
Je ne peux pas vous dire qu'on peut avoir un risque zéro. Je pense que notre responsabilité à tous, c'est de s'assurer qu'on a fait le maximum, qu'on est vigilant surtout des signes et y compris sur les signaux faibles, et dans ce cas-là il faut faire des signalements. Voilà.
JEAN-JACQUES BOURDIN
LUBRIZOL, Rouen. Il y a toujours des odeurs ?
ELISABETH BORNE
Effectivement, il y a toujours des odeurs. Le préfet a pu en parler dans son point presse hier. On pense que ça vient des hydrocarbures qui ont été répandus pendant l'incendie, qui sont mélangés avec les produits que les pompiers ont utilisés pour éteindre l'incendie. On a remis la pression sur les deux industriels pour que le site soit nettoyé, les sites soient nettoyés au plus vite. Evidemment, moi je suis bien consciente à la fois de l'émotion et de l'inquiétude que les Rouennais ont pu ressentir après cet incendie et on est très mobilisé pour, effectivement, traiter ces odeurs à la source.
JEAN-JACQUES BOURDIN
L'autre site, c'est le site de NORMANDIE LOGISTIQUE.
ELISABETH BORNE
Absolument.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Qui a brûlé aussi en partie.
ELISABETH BORNE
Qui a brûlé en partie, absolument.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'aujourd'hui on peut dire que tout danger est écarté ?
ELISABETH BORNE
Alors ce qu'on peut dire, c'est que toutes les analyses - on n'a pas encore tous les résultats d'analyses - toutes les analyses qu'on a eu sur l'air, sur l'eau, sur les sols jusqu'à présent sur les produits agricoles, ont montré que tous les produits qu'on a recherchés, on est en-dessous des seuils et on est même sur des quantités non mesurables pour la plupart…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Tous les produits ? Dioxine, amiante, tous les produits ?
ELISABETH BORNE
Jusqu'à présent, tous les produits. Vous parlez de la dioxine : je vous confirme que jusqu'à présent les résultats ont été rassurants. De la même façon sur l'amiante, on a fait des mesures à trois cents mètres, à cinq cents mètres, à quelques kilomètres : on n'a pas trouvé de fibres d'amiante ou en tout cas dans des quantités inférieures à ce qui déclenche une vigilance quand on est dans un bâtiment. Donc on est en-dessous des seuils, c'est rassurant, mais on a des analystes qui sont encore en cours notamment sur les produits agricoles.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc lorsque je vous pose la question, est-ce que tout danger est écarté, que me répondez-vous ?
ELISABETH BORNE
Ce que je peux vous dire, c'est qu'à ce stade donc comme je vous le disais…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Tout danger est écarté ou pas ?
ELISABETH BORNE
A ce stade, toutes les analyses ont été rassurantes. On va mettre en place un suivi dans la durée, un suivi environnemental, un suivi sanitaire et on veut avoir la plus grande transparence. C'est pour ça que le Premier ministre a annoncé qu'on mettrait en place un comité pour la transparence avec les élus, avec les riverains, avec les associations.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça veut dire que tout danger n'est pas écarté encore ?
ELISABETH BORNE
Ça veut dire que dans la durée, on continuera à faire un suivi environnemental et sanitaire et je pense que c'est ce que les Rouennais peuvent attendre de nous. Avec Agnès BUZYN, on sera en fin de semaine sur place pour installer ce comité.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les suies ont été analysées aussi.
ELISABETH BORNE
Absolument.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez ces résultats ? Parce qu'on a eu des résultats sur la dioxine, sur l'amiante mais pas sur les suies.
ELISABETH BORNE
On a eu tous les résultats sur les suies dès le départ.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc rien. Rien d'inquiétant.
ELISABETH BORNE
Sur les produits qu'on avait recherchés, aucun produit n'était dans une teneur qui aurait pu nous alerter. Et sur ces suies, on avait interrogé deux agences, l'INERIS et l'ANSES, qui nous ont dit qu'il n'y avait pas de produits supplémentaires à rechercher. Donc sur les suies, je pense qu'on peut être rassuré. Ensuite, je vous dis, sur les produits agricoles il y a encore des prélèvements et des analyses qui sont en cours.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Voilà, j'allais vous le dire. Les agriculteurs, trois mille en comptant la région rouennaise mais aussi d'autres départements, trois mille qui sont concernés, qui n'ont toujours pas le droit de vendre leurs produits. Jusqu'à quand ?
ELISABETH BORNE
On applique un principe de précaution maximale et là aussi transparence maximale, absolue et précaution maximale. C'est pour ça que toutes les communes dans lesquelles on a pu trouver des suies, du panache, on a consigné les productions agricoles, le temps de faire les analyses et de s'assurer qu'il n'y avait aucun produit qui pouvait poser des problèmes pour la santé. Alors moi, je comprends que c'est très difficile pour les agriculteurs…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Surtout qu'ils n'ont reçu aucune aide, toujours aucune aide, alors qu'elle était promise.
ELISABETH BORNE
Didier GUILLAUME a annoncé que, notamment pour le lait, les productions seront payées normalement par l'interprofession qu'évidemment on remboursera. Et puis n'oublions pas la responsabilité première, c'est celle de l'industriel.
JEAN-JACQUES BOURDIN
LUBRIZOL.
ELISABETH BORNE
On est sur un principe de pollueur-payeur, et donc l'industriel devra indemniser non seulement tous les riverains…
JEAN-JACQUES BOURDIN
LUBRIZOL s'est engagé à indemniser.
ELISABETH BORNE
Moi j'ai vu le PDG de LUBRIZOL. Moi je lui ai dit que je trouvais que l'entreprise n'a pas été à la hauteur. Dans le temps qu'ils ont mis à nous fournir les listes de produits, dans le temps qu'ils mettent à nous donner leurs propositions pour une étude environnementale dans la durée, et qu'on attendait d'eux qu'ils montrent de la considération, qu'ils reconnaissent aussi toute la gêne et l'inquiétude qu'a pu causer cet incendie, et qu'ils soient exemplaires dans l'indemnisation, sans attendre les décisions de justice.
JEAN-JACQUES BOURDIN
On n'a pas encore le montant de l'aide évidemment. Il faut une évaluation si j'ai bien compris.
ELISABETH BORNE
Je pense que dans le principe, ils auront à prendre en charge tous les dégâts causés par cet incendie. C'est très clair. On est sur un principe pollueur-payeur et moi je peux vous assurer que j'y veillerai personnellement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Même les dégâts pour les agriculteurs.
ELISABETH BORNE
Et y compris les préjudices pour les agriculteurs.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon. Dites-moi, pourquoi est-ce qu'on n'a pas été vraiment informés de l'augmentation des produits stockés dans l'usine ? C'était en janvier dernier, je crois. Les riverains ont été peu informés et peu informés de la nature des produits. Il y a eu un assouplissement de la loi en 2018, je crois, sur les règles d'autorisation des sites contenant des substances dangereuses. C'est bien cela ?
ELISABETH BORNE
Il y a eu une simplification des procédures sans pour autant ne pas baisser la garde sur tout ce qui est étude de danger. Donc c'est simplification de procédures, notamment sur les évaluations environnementales quand on est sur des adaptations mineures des produits sur le site.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire que là, pardonnez-moi mais chez LUBRIZOL à Rouen, on a stocké beaucoup plus de produits dangereux en janvier.
ELISABETH BORNE
Non, ça n'est pas le cas. Non, non, ça n'est pas le cas. Ça n'est pas le cas. Il y a eu deux arrêtés qui ont été pris.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Par le préfet.
ELISABETH BORNE
L'un qui concerne un site tout à fait éloigné de là où s'est passé l'incendie, un autre qui n'a pas été mis en oeuvre. Donc il n'y a aucun rapport entre ces arrêtés et ce qui a pu se produire avec cet incendie.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il n'y a pas eu un stockage, un nouveau stockage, une augmentation du stockage de produits dangereux chez LUBRIZOL.
ELISABETH BORNE
Il n'y a pas eu une augmentation de la capacité de stockage pour autant que je puisse le savoir. Vous savez que moi, j'ai demandé une enquête administrative. Je veux avoir tous les éléments sur le sujet et on en tirera toutes les conséquences
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Les contrôles des sites Seveso, Seveso haut. Sept cent quarante-quatre sites en France. Ils sont moins nombreux. Est-ce que c'est vrai qu'ils sont moins nombreux ?
ELISABETH BORNE
C'est vrai que les contrôles sont moins nombreux, les sanctions sont plus nombreuses. Les contrôles sont moins nombreux, ce n'est pas parce qu'il y a moins d'inspecteurs. Je peux vous assurer qu'il n'y a pas moins d'inspecteurs, qu'il n'y en aura pas moins l'an prochain. Il y a beaucoup de procédures administratives, beaucoup plus qu'avant.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire que les inspecteurs sont dans leur bureau au lieu d'aller contrôler sur le terrain.
ELISABETH BORNE
Mais c'est aussi pour ça que des simplifications de procédures ont été envisagées. Parce que quand on s'occupe de papiers, on n'est pas en train de faire des contrôles.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Evidemment.
ELISABETH BORNE
Donc c'était ça l'esprit des simplifications. Mais je pense que c'est l'occasion aussi de tout remettre à plat et qu'on regarde si on a bien effectivement le meilleur équipement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous allez tout remettre à plat sur les contrôles ?
ELISABETH BORNE
Forcément. Vous savez, après une catastrophe de ce type, il faut en tirer toutes les conséquences. C'est le sens de l'enquête administrative que j'ai demandée en complément de l'enquête judiciaire qui permettra d'établir les responsabilités et, évidemment, on en tirera toutes les conséquences.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les pesticides maintenant, l'épandage des pesticides. Où est-ce qu'on en est ? Cinq ou dix mètres, c'est décidé ?
ELISABETH BORNE
On a mis en consultation des textes qui prévoient pour la première fois en France et en Europe des distances minimales pour protéger les habitations avec effectivement deux distances : dix mètres pour les cultures hautes et cinq mètres pour les cultures basses. On a fait une grande concertation, cinquante mille personnes se sont exprimées sur le site.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et alors ?
ELISABETH BORNE
Et donc on va se donner le mois d'octobre pour analyser ces contributions.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous les avez ces contributions ?
ELISABETH BORNE
Oui. Je ne les ai pas encore analysées. Cinquante mille. Mais donc, on va analyser ces contributions. On reverra les professionnels, les associations de protection de l'environnement et ensuite on prendra des décisions pour que cet arrêté, ces arrêtés, ces textes soient en vigueur au 1er janvier.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Au 1er janvier. Mais cinq à dix mètres, c'est la proposition que vous faites et c'est la proposition sur laquelle vous allez vous arrêter.
ELISABETH BORNE
Alors ce n'est pas la proposition que je fais.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pas vous, pas vous.
ELISABETH BORNE
C'est la proposition des scientifiques, ces préconisations des scientifiques. Donc je pense que c'est important sur ces sujets, vous voyez, de ne pas sortir des distances d'un chapeau et donc on prend les préconisations des scientifiques. S'il y a des nouvelles études scientifiques, s'il y a des nouveaux modes de traitement, on en tiendra compte. Mais à ce stade, c'est la proposition qui a été faite par les scientifiques.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc cinq-dix mètres, nous verrons mais c'est probablement ce qui sera retenu.
ELISABETH BORNE
Et vous avez un dispositif qui permet aussi des adaptations par les chartes.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais les agriculteurs sont fous de rage, ils ne veulent pas de ces cinq, dix mètres, cinq ou dix mètres.
ELISABETH BORNE
Ecoutez, je pense qu'il y a des enjeux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'entendais Christiane LAMBERT tout à l'heure sur RMC.
ELISABETH BORNE
Il y a des enjeux de santé publique avec lesquels on ne peut pas transiger. Quand les scientifiques nous disent qu'il est raisonnable d'avoir ces distances de cinq à dix mètres, forcément on écoute les scientifiques. C'est un enjeu de santé publique.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est un enjeu de santé publique mais les agriculteurs disent : « c'est aussi un enjeu pour nous, un enjeu. On ne peut pas, on ne peut pas. » Ils sont obligés de se soumettre.
ELISABETH BORNE
Il y aura la possibilité d'avoir des chartes discutées localement avec les riverains, avec les associations, avec les élus. S'il y a des précautions complémentaires qui peuvent être prises, alors il pourra en être tiré des conséquences localement. Mais je vous dis, c'est un enjeu de santé publique donc on ne peut pas transiger avec ces sujets.
JEAN-JACQUES BOURDIN
L'exposition aux pesticides, cause majeure du cancer ?
ELISABETH BORNE
Je vois à quoi vous faites référence.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.
ELISABETH BORNE
Je pense qu'en tout cas, si l'idée est de dire qu'il n'y aurait pas de problèmes de santé liés à l'utilisation des pesticides, là je ne suis pas d'accord. Je pense qu'il y a des conséquences sanitaires. Plus on fait des études, plus on se rend compte qu'il y a des conséquences sanitaires.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais enfin, cause majeur du cancer du sein, ce n'est pas tout à fait vrai.
ELISABETH BORNE
Voilà, moi je ne vais pas rentrer… Je ne suis pas scientifique, je ne suis pas médecin.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais je sais. Vous avez été directrice de cabinet de Ségolène ROYAL, je comprends votre prudence mais…
ELISABETH BORNE
Ce que je peux vous dire, c'est qu'il y a des conséquences pour la santé. Plus on mène des études, plus on peut le mesurer. Et donc non seulement il faut des distances de sécurité, mais en plus il faut réduire l'usage des pesticides et c'est bien ce à quoi on travaille avec l'objectif de réduire de 50 % d'ici 2025.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les agriculteurs en ont assez de cet agri-bashing. Ils en ont assez, ils n'en peuvent plus. Ils sont en train de manifester aujourd'hui. Que leur dites-vous ce matin ? Que leur répondez-vous ?
ELISABETH BORNE
Evidemment, moi je ne peux pas cautionner l'agri-bashing. Je pense qu'il faut aussi respecter les agriculteurs qui font un métier difficile et on doit les accompagner pour avoir des pratiques plus respectueuses de l'environnement. Moi je crois beaucoup à l'agro-écologie qu'on porte avec Didier GUILLAUME. Je pense qu'on peut avoir d'autres pratiques qui consomment moins d'intrants, qui consomment moins de pesticides, qui consomment moins d'eau.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais ils sont en train de manifester. Que leur dites-vous ?
ELISABETH BORNE
Moi je leur dis qu'on prend en compte leurs préoccupations….
JEAN-JACQUES BOURDIN
« Arrêtez » ? « Vous n'avez pas à vous préoccuper, on s'occupe de tout » ?
ELISABETH BORNE
Non, je ne leur dis pas ça. Je leur dis que je suis consciente qu'il y a des transitions dans ce secteur comme dans beaucoup. Vous savez, la transition écologique ça suppose des changements qu'il faut qu'on accompagne et c'est aussi ce qu'on fait, y compris avec de l'argent, de l'argent des agences de l'eau pour aider à utiliser moins de pesticides. On va continuer à les accompagner. La discussion sur la politique agricole commune, ça sera aussi l'occasion d'avoir notamment une prise en compte des services environnementaux de l'agriculture.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je me mets à leur place. Le CETA, ils ne veulent pas du CETA. Le Mercosur, on en est où ?
ELISABETH BORNE
Je crois que le président de la République a été très clair sur le sujet.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est fini, ça. C'est fini.
ELISABETH BORNE
Un pays qui ne respecte pas l'accord de Paris…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc on ne signera pas, c'est définitif, le Mercosur ?
ELISABETH BORNE
On ne signera pas des accords. On est le seul pays, vous savez, qui a refusé un traité avec les Etats-Unis…
JEAN-JACQUES BOURDIN
L'Autriche, l'Autriche.
ELISABETH BORNE
Qui est sorti qui sorti de l'accord de Paris.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, c'est vrai.
ELISABETH BORNE
Et on a dit très clairement qu'un pays qui ne respecte pas la forêt amazonienne, qui ne respecte pas l'accord de Paris, on ne peut pas signer un traité commercial avec.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc on ne signe pas le Mercosur. L'Autriche a décidé de ne pas signer définitivement.
ELISABETH BORNE
En tout cas, la France a annoncé très tôt qu'elle ne pourrait pas signer le Mercosur dans ces conditions.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dans ces conditions. Nous verrons s'il y a évolution. Extinction Rebellion qui occupe une place à Paris, la place du Châtelet, qui manifeste une forme de désobéissance civile. C'est l'instrumentalisation de l'écologie selon vous ?
ELISABETH BORNE
Ecoutez, moi que les gens se préoccupent du climat, forcément je ne peux pas être contre. Au contraire, je pense que c'est une préoccupation qu'il faut qu'on partage tous. Après, quels sont les messages ? Vous voyez, quand j'entends : « il faudrait reconnaître l'urgence écologique et climatique », on l'a inscrit dans la loi. Quand on nous dit : « il faudrait mettre en place des assemblées citoyennes », moi je le dis très clairement à tous ceux qui manifestent pour avoir des assemblées citoyennes. Ça tombe bien, ce week-end on a installé une Convention citoyenne de cent cinquante Français qui vont réfléchir aux solutions qu'on peut proposer précisément pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre très fortement et pour aller vers la neutralité carbone au milieu du siècle. Donc je pense qu'il y a beaucoup de ces questions auxquelles on apporte des réponses, et voilà. Moi je crois qu'il ne faut pas non plus se tromper de combat, c'est peut-être des mots d'ordre qui sont importés d'autres pays. En tout cas en France, l'urgence écologique on la reconnaît. Les conventions citoyennes, on en a mis une en place.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dites-moi Elisabeth BORNE, pour défendre le climat, tous les moyens sont légitimes ?
ELISABETH BORNE
Non, je ne dis pas ça. Je dis que c'est très important de se mobiliser pour le climat et je dis que c'est aussi important de tenir compte de ce qui est fait, notamment de respecter le travail de la Convention citoyenne qu'on a mis en place. Je pense que c'est une très belle avancée de dire « on ne fait pas les réformes pour les Français, on fait les réformes avec eux. » Ils vont nous faire certainement des propositions qui par ailleurs répondront mieux aux contraintes, aux aspirations des Français. Il faut tenir compte de ce qui se fait. Et puis évidemment, moi je ne peux pas non plus être d'accord s'il y a des actions violentes, des actions de blocage.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Elisabeth BORNE, Greta THUNBERG qui pourrait - je mets tout cela au conditionnel - recevoir le prix Nobel de la Paix. Ce serait justifié ?
ELISABETH BORNE
Je pense que Greta THUNBERG, elle a eu un rôle très important pour mobiliser notre jeunesse. C'est bien légitime que la jeunesse se mobilise parce que la planète dont on est en train de parler en 2050, c'est la leur. Donc je pense important cette prise de conscience, je pense que c'est très positif. Après, on doit aussi passer à l'étape d'après de se dire : qu'est ce que chacun propose comme solution, comment…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc c'est insuffisant. Greta THUNBERG, c'est…
ELISABETH BORNE
Je dis que je pense qu'aujourd'hui…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est une alerte.
ELISABETH BORNE
Oui. Alerter c'est bien, participer à construire des réponses…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais ce serait justifié le prix Nobel de la Paix ?
ELISABETH BORNE
Moi je pense qu'elle a eu, je vous dis, une action très importante. Ce n'est pas moi qui délivre le prix Nobel de la Paix. En tout cas, je pense que cette prise de conscience de la jeunesse est très importante, c'est un levier important. Pour moi, c'est une force pour agir sur la transition écologique mais il faut passer aussi à autre chose.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Lanceuse d'alerte. Il faut qu'elle passe à autre chose ?
ELISABETH BORNE
Et proposer des solutions qui permettent cette transition écologique sans laisser personne sur le bord de la route et je pense que c'est ma préoccupation centrale.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le bien-être animal des espèces sauvages captives, vous avez cela en charge aussi.
ELISABETH BORNE
Absolument.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors les visons élevés pour leur fourrure ?
ELISABETH BORNE
On a mis en place donc…
JEAN-JACQUES BOURDIN
On arrête ?
ELISABETH BORNE
Dès mon arrivée, vous savez, je me suis attelée à ce sujet. Je pense qu'il est très important. Je pense que l'état d'esprit des gens a beaucoup évolué sur ces sujets, et je crois que ça dit beaucoup aussi du respect qu'on peut avoir pour la nature. Donc c'est très important d'avancer sur ces sujets du bien-être animal.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Faut-il supprimer les animaux dans les cirques ?
ELISABETH BORNE
On a des concertations. Je ne vais pas vous faire des annonces c matin. Moi j'ai souhaité prendre le temps d'écouter à la fois les associations très mobilisées sur ces sujets.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous y êtes favorable, vous, à titre personnel ?
ELISABETH BORNE
Je ne vais pas vous donner un point de vue personnel sans mener ces concertations dans lequel évidemment il faut progresser sur ce bien-être animal. Il faut aussi écouter les professionnels mais, voilà, moi je n'hésiterai pas à prendre des mesures d'interdiction si elles sont nécessaires pour un meilleur bien-être animal.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Interdiction. Interdiction de quoi ? Animaux dans les cirques ? Je ne sais pas, moi, les cétacés dans les delphinariums par exemple, sur ces espèces sauvages, ces animaux sauvages ?
ELISABETH BORNE
Ecoutez, on travaille sur le sujet et on fera des annonces prochainement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais vous n'hésiterez pas à interdire.
ELISABETH BORNE
Je vous dis, je n'hésiterai pas à prendre des interdictions si c'est ce qui est nécessaire pour assurer le bien-être de ces animaux sauvages en captivité.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Elisabeth BORNE d'être venue nous voir ce matin.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 9 octobre 2019