Texte intégral
MARC FAUVELLE
Bonjour Jean-Baptiste DJEBBARI.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Bonjour à tous.
MARC FAUVELLE
Y aura-t-il des trains à Noël ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Alors, vous faites référence à l'annonce de la CGT-Cheminots qui a dit, hier, vouloir poursuivre la grève…
MARC FAUVELLE
Sur cette antenne.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Absolument, au-delà de Noël, elle portera cette responsabilité devant les Français. J'observe que… d'abord je dis que je trouve naturel que la CGT-Cheminots défende le régime spécial, de la SNCF notamment, mais moi je ne sais pas expliquer, par exemple, pourquoi aujourd'hui un comptable de la SNCF peut partir à compter de 57 ans, alors que c'est 62 ans pour tous les Français, je ne sais pas l'expliquer et je crois que les Français ne le comprennent pas. Et puis j'observe aussi que d'autres syndicats disent différemment. Hier matin Laurent BERGER, donc le patron de la CFDT, le secrétaire général de la CFDT, a dit vouloir se mobiliser le 17, mardi prochain, mais a dit aussi respecter le droit des Français de partir en vacances, et donc a appelé à la suspension du mouvement. Donc, je dis qu'il ne faut pas avancer masqué dans cette séquence, les Français savent ce qu'il se passe, vous savez que le gouvernement assume de porter une réforme, qui est ambitieuse, mais qui est difficile, et la CGT-Cheminots doit assumer ce jusqu'au-boutisme là.
RENAUD DELY
Donc vous ne pouvez pas aujourd'hui apporter de garanties aux Français qui s'apprêtent à partir en vacances, dans une semaine tout juste, pour savoir s'ils auront un train ou pas, le gouvernement n'en sait rien ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Ce que je veux dire aux Français c'est que le gouvernement est, depuis le début, extrêmement loyal dans cette négociation. J'avais pris des engagements très clairs avec les syndicats de la SNCF et de la RATP, notamment sur les générations concernées, et vous savez que 85% des conducteurs, qui sont aujourd'hui au régime spécial, ne seront pas concernés par la réforme, nous avons pris des engagements très clairs…
MARC FAUVELLE
Ce ne sont pas tout à fait les chiffres que donnent les syndicats, ils sont plutôt dans une fourchette autour de 70%, mais…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Selon les entreprises… pourquoi nous avions pris cet engagement ? Pour respecter ce qu'on appelle le contrat moral, ce n'est pas pareil d'être depuis 2 ans dans l'entreprise que d'être à 5, 6, 7 ans de la retraite, et je le rappelle, aujourd'hui tous les Français qui sont à 17 ans de la retraite ne seront pas concernés par le système universel, donc nous avons été loyal dans cette discussion. Nous discutons d'ailleurs très bien avec l'UNSA, avec la CFDT, qui contestent certains éléments de la réforme, notamment la dimension de l'équilibre…
MARC FAUVELLE
Mais pas avec la CGT, vous ne parlez plus ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
La CGT n'est jamais venue aux réunions, j'ai eu l'occasion de rencontrer le patron de la CGT-Cheminots, Laurent BRUN, mais n'est jamais venue s'agissant de la réforme des retraites, il faut juste comprendre que la CGT-Cheminots refuse absolument et ne demande que le retrait de la réforme des retraites. Moi je dis que dans cette séquence chacun doit avancer en responsabilité, la CGT-Cheminots connaît parfaitement le projet du gouvernement, nous avons dit être très ouverts sur les modalités, mais fermes sur les principes, et la CGT-Cheminots le sait très bien.
MARC FAUVELLE
Vous dites à la CGT "vous pouvez faire grève aussi longtemps que vous le voulez, on ne retirera pas la réforme" ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, je leur dis de ne pas avancer masqué et de ne pas dire que c'est la faute du gouvernement si. La CGT-Cheminots doit assumer, si elle fait grève le 24, le 25, le 26, je dis d'abord que ce n'est pas ce que disent les autres syndicats, je dis que le gouvernement est ouvert à la discussion, et je dis que depuis le début nous avons dit que nous avions vocation à ce que les régimes spéciaux intègrent le régime universel, ce que nous allons faire.
RENAUD DELY
Et donc vous dites, Jean-Baptiste DJEBBARI, aux usagers bloqués dans les transports, vous dites "c'est de la faute de la CGT" ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, je dis que chacun doit assumer ses responsabilités en démocratie, et que c'est trop simple de dire, ce que dit parfois la CGT-Cheminots, "c'est la faute du gouvernement, c'est le projet du gouvernement." Depuis le début…
RENAUD DELY
C'est le projet du gouvernement qui est à l'origine de ce mouvement social.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Oui, mais depuis le début nous avons eu une discussion extrêmement ouverte et très loyale avec l'ensemble des syndicats, y compris eux, qui ne sont pas venus discuter avec nous, nous leur avons dit, un, nous voulons la convergence des régimes spéciaux dans le régime universel, nous allons faire en sorte de construire les bonnes garanties, clarifier les générations à venir, s'assurer du niveau de maintien des pensions, donc nous avons été extrêmement clairs…
RENAUD DELY
Une discussion avec l'ensemble des syndicats, vous dites Jean-Baptiste DJEBBARI, qui aboutit à quoi aujourd'hui, à l'opposition de l'ensemble des syndicats, y compris des syndicats réformistes, à votre réforme.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Mais vous savez très bien, pour des raisons très différentes. La CFDT par exemple, mais l'UNSA aussi, au niveau national, veulent un système universel de retraites, et vous le savez très bien, ils disent juste que dans la réforme qui a été proposée il y a deux jours par le Premier ministre, il y a des éléments qui les irritent, notamment l'élément de l'âge d'équilibre, mais ils veulent un régime universel…
RENAUD DELY
L'âge d'équilibre à 64 ans, qui est négociable.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Ils veulent un régime universel, pour toutes les raisons qui ont été exprimées dans le débat public, du régime actuel qui présente un grand nombre d'inégalités, et effectivement ils discutent le sujet de l'âge d'équilibre disant, un, qu'il y a des alternatives, moi j'ai écouté avec attention Laurent BERGER hier matin, qui disait qu'on pouvait travailler sur d'autres objets, sur le niveau des cotisations, etc., etc., il y aura des discussions…
MARC FAUVELLE
Une porte fermée…
RENAUD DELY
Sur le montant des cotisations.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, porte qui reste ouverte au gouvernement, encore hier après-midi le Premier ministre, d'abord, s'est entretenu avec les syndicats, a dit que sa porte était ouverte, et il a toujours dit que si les syndicats venaient avec une proposition alternative qui satisfasse l'objectif d'équilibre, qui n'est pas un objectif infamant, avoir un système à l'équilibre c'est quand même quelque chose, à mon avis, d'abord de crédible sur le plan politique et de satisfaisant sur la durée, et le Premier ministre a dit être tout à fait ouvert à recevoir les syndicats, à recevoir leurs propositions, et le cas échéant, si elles sont meilleures leurs propositions, il les fera siennes.
MARC FAUVELLE
Pour en revenir à la question des régimes spéciaux Jean-Baptiste DJEBBARI, la réforme prévoit une bascule, dans quelques années, pour les cheminots, pour les générations 80 ou 85…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
85.
MARC FAUVELLE
Nés en 80 ou nés en 85, c'est sur la table ça aussi, la date d'entrée, ou ça pourrait être repoussé à plus tard, on sait que "la clause du grand-père" a été finalement écartée, est-ce qu'elle pourrait revenir par la fenêtre ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Vous savez, depuis le début, je vais vous dire ce que j'ai dit aux syndicats. Je leur ai dit on a, entre la génération 63 et "la clause du grand-père" de la latitude pour poser le curseur au bon niveau.
MARC FAUVELLE
Là vous avez mis la barre au milieu…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, pas au milieu.
MARC FAUVELLE
Entre la génération 63, que souhaitait Jean-Paul DELEVOYE, et "la clause du grand-père" qui nous aurait emmené encore plus loin, en gros on est au milieu.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Nous avons fait en sorte…
MARC FAUVELLE
Vous pouvez aller plus loin ou pas ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Nous avons fait en sorte de respecter ce contrat moral-là, et nous avons dit effectivement toutes les personnes, à 17 ans de la retraite, à 17 ans de la retraite vous pouvez commencer à vous projeter, mais c'est quand même assez loin, la barre initiale c'était 5 ans, à 17 ans de la retraite vous n'êtes pas concerné par le système universel, qui d'ailleurs j'ajoute, va apporter un grand nombre de droits nouveaux, et je ne doute pas que certains, à certains moments, dans l'ensemble de la société…
MARC FAUVELLE
Ce curseur-là il est négociable ou pas ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Ce curseur-là n'est pas négociable en soit, nous avons dit génération 85, vous l'avez dit, la plus grande partie des agents, de la RATP et de la SNCF aujourd'hui, ne sont pas concernés, notamment les conducteurs, ne sont pas concernés par le régime universel. Nous avons dit vouloir être très très clairs, et j'ai fait des vidéos en ce sens, à l'ensemble des agents, nous allons travailler très précisément pour dire exactement quel sera le niveau de pension des gens qui vont être concernés par le régime universel…
RENAUD DELY
Ils le sauront quand ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Alors c'est un travail qui est en cours actuellement…
RENAUD DELY
Et dont on aura les résultats ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Et j'ai vocation à ce que ce travail soit assez abouti courant du week-end.
MARC FAUVELLE
Jean-Baptiste DJEBBARI, secrétaire d'Etat aux Transports, vous restez avec nous, on s'interrompt quelques instants.
(…)
MARC FAUVELLE
Jean-Baptiste DJEBBARI, mardi prochain l'ensemble des syndicats appellent donc à défiler contre cette réforme, ils ne seront pas seuls, à Lille, dans le cortège, il y aura une certaine Martine AUBRY, qui était notre invitée ce matin.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
J'ai entendu.
MARTINE AUBRY
On le voit bien les Français ils demandent quoi dans cette réforme ? Moi je suis pour la réforme, ils demandent plus de justice, plus d'équité et de la clarté, de la clarté parce qu'autrement… eh bien tout ce qu'annonce le gouvernement est anxiogène. Aujourd'hui on comprend que ce n'est qu'à 64 ans qu'on pourra avoir une retraite complète. C'est une réforme totalement libérale, mais comme tout ce qu'a fait le président de la République depuis qu'il est là.
MARC FAUVELLE
Elle vous avez manqué Martine AUBRY.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Beaucoup, évidemment. J'observe que les Français aujourd'hui partent en moyenne à 63,5 ans, et que c'est le fait de la loi Touraine, donc je pense que les leçons des politiques qui, parfois pour faire les vraies réformes, ont manqué soit de vision, soit de courage, je les écoute toujours avec beaucoup d'attention, mais je crois que les Français savent où s'en tenir. Moi ce que je veux dire juste ici c'est que, je pense quand même aussi aux millions de Français qui chaque matin galèrent pour effectivement prendre leur voiture, pour prendre le train, et je voudrais dire ceci, c'est que la réforme que nous proposons, c'est une réforme en équité pour les Français, c'est une réforme qui va créer de nombreux nouveaux droits, je pense d'ailleurs à la retraite minimale de 1000 euros, je pense à l'ensemble des droits qui vont être créés pour les femmes, je pense à des populations en Haute-Vienne, les agriculteurs qui aujourd'hui, bien souvent, ont des niveaux de pension extrêmement faibles, 400, 500, 600 euros…
MARC FAUVELLE
Si c'est vrai, pourquoi les Français ne le pensent pas aujourd'hui dans les enquêtes d'opinion ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Mais parce que les Français, je pense… d'abord ils disent souvent des choses un peu différentes, ils disent vouloir refonder en profondeur le régime de retraites, ils disent souvent être inquiets pour l'avenir, et je pense qu'il y a ça…
RENAUD DELY
Très concrètement, Jean-Baptiste DJEBBARI, notre sondage Odoxa-Dentus Consulting pour France Info ce matin, dit que 68% des Français trouvent le mouvement de grève en cours justifié, plus de 2 Français sur 3 soutiennent les grévistes contre le gouvernement.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Eh bien ça veut dire qu'il faut encore convaincre, et dans les réunions publiques que j'avais faites d'ailleurs, dès 2017, sur ces sujets, parce que nous nous sommes engagés politiquement, vous savez que le président Emmanuel MACRON, dans son programme, avait mis sa volonté, s'était engagé à faire des régimes de retraites un régime universel par répartition et par points. Le député que j'étais, s'était engagé, devant les Français, dans de multiples réunions publiques, et c'était un des sujets, d'abord c'est toujours compliqué le sujet des retraites…
RENAUD DELY
Ça fait 18 mois que la concertation a été ouverte, il y a une semaine d'ailleurs, avant le début du mouvement, c'était la même proportion de Français qui soutenaient les grévistes, donc on voit bien que le gouvernement est inaudible.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Oui, soutien et sympathie, et le chiffre que vous dites c'est soutien et sympathie, ce n'est pas tout à fait différent, ce n'est pas tout à fait pareil d'avoir de la sympathie pendant un moment que de le soutenir, et si vous posez question de savoir si les Français ont de la crainte pour l'avenir, en général ils répondent plutôt oui. Moi ce que je veux dire sur mon expérience personnelle, et j'en ai fait encore l'expérience dans la séquence des Gilets jaunes l'année dernière. Le sujet des retraites c'est toujours un sujet compliqué, et on l'aborde par la crainte et l'anxiété, peut-être aussi parce que ça projette des choses de la fin de vie, etc.
RENAUD DELY
Peut-être aussi parce que l'incertitude entretenue par le gouvernement sur ses réformes a accentué cette anxiété.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, non, mais peut-être aussi… ce que je veux dire c'est que, on a toujours réussi dans les réunions publiques que j'ai faites, toujours réussi à conclure sur le fait que le système d'aujourd'hui il était assez inefficace, il était créateur d'inégalités, il fallait le changer. Après, effectivement, peut-être que nous avons tardé à le communiquer, mais en tout cas aujourd'hui l'architecture elle a été posée très clairement par le Premier ministre, les Français savent parfaitement s'ils sont en dehors ou dedans, et ils savent parfaitement aussi que ce système il va être créateur de nombreux droits nouveaux, notamment pour les femmes, notamment pour les gens qui toute leur vie sont au SMIC, et ça il faut le dire, cette réforme elle va améliorer substantiellement la situation de 40% des Français les moins aisés d'entre nous, et c'est donc une avancée sociale considérable.
MARC FAUVELLE
Jean-Baptiste DJEBBARI, hier les policiers, qui s'inquiétaient pour certaines mesures qui sont liées à leur régime de retraite, le fait qu'ils bénéficient notamment d'une année de cotisation à chaque fois qu'ils travaillent pendant 5 ans, ont été reçus par leur ministre, à la sortie, coup de baguette magique, le mouvement s'arrête, les policiers suspendent leur mouvement. Est-ce que c'est une première brèche, qui veut dire que, finalement, ce que vous dites depuis des semaines, un seul régime pour tout le monde, c'est en train tout doucement de s'effacer ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, les policiers voulaient très précisément que l'ensemble de la communauté policière, pour le dire simplement, bénéficie du départ anticipé et des conditions particulières…
MARC FAUVELLE
Vous reconnaissez qu'il y a donc des exceptions à la règle ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, nous avons toujours dit que pour les catégories actives, les policiers, les gendarmes, les militaires, les surveillants de prison, un certain nombre de métiers, de sécurité, exposés, avec une dimension opérationnelle très forte, pour ces métiers-là nous avons toujours dit qu'il était normal de construire les bonnes garanties. Il se trouve que la proposition que nous avions faite pour les policiers est apparue incomplète, que la discussion a eu lieu, et je l'ai toujours dit, mais le gouvernement est dans une position de trouver les bons compromis, ce bon compromis a été trouvé, ainsi soit-il.
MARC FAUVELLE
La SNCF, citée ce matin par nos confrères de LCI, affirme que certains wagons, notamment du RER, en région parisienne, sont réservés aux personnes les plus vulnérables qui souhaitent voyager. Est-ce que vous confirmez, tout d'abord ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Alors, je n'ai pas cette information, mais je vais aller la chercher.
MARC FAUVELLE
Est-ce que ce serait une bonne idée ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Ça paraît effectivement une idée de bon sens, mais je prends la proposition, je vais me renseigner, et je reviendrai vers vous.
MARC FAUVELLE
Réserver des wagons aux personnes les plus fragiles, donc à qui, aux femmes, aux enfants ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Oui, effectivement, les personnes vulnérables, les personnes âgées, les femmes, les enfants, traditionnellement c'est à ces personnes-là que sont réservés les wagons, mais, encore une fois, une idée de bon sens, j'en parlerai notamment à Jean-Pierre FARANDOU et à Catherine GUILLOUARD pour voir si opérationnellement tout cela est possible.
MARC FAUVELLE
Le patron de la SNCF et la patronne de la RATP.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Absolument.
RENAUD DELY
On a vu, Jean-Baptiste DJEBBARI, des incidents dans des dépôts de bus ces derniers jours, notamment une vidéo qui a beaucoup tourné hier, sur des personnels non-grévistes de la RATP, des chauffeurs de bus, injuriés, hués, par des personnels grévistes, la CGT a d'ailleurs publié un communiqué hier soir pour dénoncer ces comportements, mais aussi pour considérer que c'était le gouvernement qui était responsable de cette montée de la tension.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Mais, c'est ce que je disais, c'est, il ne faut pas avancer masqué. Quand vous avez des personnes qui se revendiquent de votre syndicat et qui pratiquent l'intimidation sur leurs collègues, qui pratiquent l'insulte, l'insulte homophobe, cela est d'abord illégal, c'est répréhensible pénalement, et moi j'ai demandé systématiquement, ce que la RATP a fait, de porter plainte, de saisir le procureur de la République…
MARC FAUVELLE
Ce qu'elle n'a pas fait, semble-t-il, pour l'instant.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
La RATP a saisi le procureur de la République…
MARC FAUVELLE
Elle a saisi le procureur ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Et c'est normal, nul ne peut… mais, le gouvernement il accepte parfaitement qu'on conteste sa politique, sa réforme, dans la rue, par la voie de mobilisations, par l'exercice normal du droit de grève, mais là, y compris les coupures d'électricité, le fait d'intimider ses collègues, le fait de les insulter, le fait de mettre de la pression psychologique, le fait de bloquer des dépôts, je le dis, c'est illégal, c'est répréhensible pénalement, et systématiquement j'ai demandé à la RATP et à la SNCF de porter plainte, parce que les gens qui pratiquent, qui contournent la loi, doivent évidemment répondre.
MARC FAUVELLE
Ça veut dire que vous enverrez systématiquement les forces de l'ordre lorsqu'il y a des blocages d'entrepôts ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Ça veut dire que tous les dépôts, chaque matin, sont débloqués. Vous avez effectivement des tentatives, sur, trois, quatre, cinq dépôts, le matin, systématiquement, en coordination avec la préfecture de police de Paris, nous faisons débloquer les dépôts, évidemment.
RENAUD DELY
Au risque là aussi qu'il y ait des incidents, des violences.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, mais la France est un Etat de droit, donc il n'y a pas eu d'incidents et de violences, nous disons simplement que d'abord, ces centres dépôts, ils appartiennent aux citoyens français, que nous reconnaissons parfaitement, et c'est normal, l'exercice normal du droit de grève pour ceux qui contestent la politique du gouvernement, mais que nous ne permettons pas, à des gens qui contestent la politique du gouvernement, d'empêcher leurs collègues d'aller travailler, de les insulter ou de bloquer les bus qui tentent de sortir pour aller satisfaire les besoins des milliers de Français, des millions de Français, qui en ce moment galèrent dans les transports.
RENAUD DELY
Et si le blocage des transports à la SNCF ou à la RATP perdure Jean-Baptiste DJEBBARI, est-ce que vous irez jusqu'à réquisitionner des personnels grévistes, comme le réclame la droite ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Alors d'abord, réquisitionner c'est compliqué, mais je le dis, nous allons observer très attentivement, au gouvernement, ce qui va se passer dans les prochains jours, et le cas échéant nous apporterons les éléments de réponse complémentaires, y compris par la loi, de manière à faire en sorte que, aujourd'hui ceux qui dévoient, qui contournent l'exercice du droit de grève, nous puissions construire les bonnes réponses.
RENAUD DELY
Y compris par la loi, ça veut dire la loi pourrait être réformée pour imposer un service minimum, un service garanti ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Ça c'est toujours compliqué, mais il y a plein de façons d'amélioration la situation…
RENAUD DELY
Lesquelles ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Plein de façons de le faire, d'améliorer la situation des Français, pour assurer plus de continuité du service public, il y a des éléments, effectivement, il y a des façons aujourd'hui qui sont utilisées de contourner l'exercice du droit de grève, nous sommes attentifs à tout cela, et je le dis, le gouvernement regardera la meilleure façon d'apporter les bonnes réponses aux Français.
MARC FAUVELLE
Est-ce qu'il doit y avoir, Jean-Baptiste DJEBBARI, un geste sur les abonnements à la RATP, à la SNCF ? Notamment les billets lorsque les trains ne roulent pas sont remboursés, mais pour l'instant il n'y a rien sur les abonnements.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Alors traditionnellement après une grève longue…
MARC FAUVELLE
On ne le saura qu'à la fin.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
En général, puisque vous savez que c'est la Région qui organise les transports, notamment en Ile-de-France, et qu'on parle notamment du passe Navigo, et en général 50% des abonnements sont remboursés, parfois jusqu'à 100%, mais ça c'est la responsabilité de la Région, de Madame Valérie PECRESSE, en lien avec la RATP, avec qui elle a noué un contrat, mais traditionnellement c'est ce qui se passe en cas de service très dégradé, 50% des abonnements sont remboursés…
MARC FAUVELLE
Vous souhaiteriez qu'on aille au-delà de ça vu l'ampleur des perturbations depuis 9 jours ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Il y aura une discussion à avoir, qui sera menée par, à la fois la RATP, la SNCF, et la présidente de Région Valérie PECRESSE, mais évidemment le service est très dégradé, et d'ailleurs les discussions contractuelles auront lieu entre la Région aussi, et la RATP, pour les services qui n'auront été que partiellement offerts.
RENAUD DELY
Vous évoquiez la gêne dans les transports pour les usagers, Jean-Baptiste DJEBBARI, de profession vous êtes pilote de ligne.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Absolument.
RENAUD DELY
Vous êtes, ou vous étiez syndicaliste, syndiqué au syndicat national des pilotes de lignes.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
J'étais adhérent au SNPL, absolument.
RENAUD DELY
Vous n'avez jamais fait grève ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non.
RENAUD DELY
Jamais ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non.
RENAUD DELY
Ça c'est déjà vu le transport aérien perturbé par des grèves du syndicat des pilotes de ligne, vous jamais ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
J'étais affectivement adhérent au SNPL, et je n'ai jamais fait grève, parce que je n'ai jamais pensé que les mots d'ordre qui étaient donnés au moment où ils existaient quand j'étais dans cette profession, me poussaient effectivement à me mobiliser de la sorte.
MARC FAUVELLE
8h50. Dans un instant on va parler de ce qui se passe en ce moment chez UBER avec des centaines de témoignages de femmes qui affirment avoir été agressées par leur conducteur, Jean-Baptiste DJEBBARI vous nous direz ce que vous pensez pouvoir faire, on parlera également des bouchons monstres depuis quelques jours autour de certaines villes françaises.
(…)
MARC FAUVELLE
Jean-Baptiste DJEBBARI, des centaines de femmes racontent ces derniers jours sur les réseaux sociaux les agressions qu'elles auraient subies, y compris parfois des agressions sexuelles et des viols, de la part de chauffeurs UBER. Qu'est-ce que vous pouvez faire ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
D'abord UBER a été reçu hier par Marlène SCHIAPPA, secrétaire d'Etat en charge de l'Egalité femmes hommes, qui a mis en place avec UBER et d'une manière générale avec l'ensemble des plateformes les bonnes formations, la bonne façon de faire la bonne information.
MARC FAUVELLE
Ce n'est pas uniquement une question de formation.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Mais évidemment. Il y a ce qui y trait au régime pénal et évidemment toutes les plaintes sont déposées. Evidemment qu'il faut sensibiliser plus fortement les chauffeurs à avoir le bon comportement.
MARC FAUVELLE
Dans certains cas, des femmes racontent que lorsqu'elles ont appelé UBER, on leur a proposé de rembourser la course.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
C'est évidemment… D'abord 1/ c'est évidemment insupportable, c'est pénalement répréhensible. Et donc à chaque fois que cela est le cas, les plaintes doivent être déposées et je crois que c'est ce qui a été aussi rappelé très fortement hier par la secrétaire d'Etat. Mais il y a aussi une dimension de prévention et d'information à la fois des chauffeurs dans le comportement qu'ils doivent avoir et évidemment de la bonne information des usagers. Et puis toutes les mesures qui sont prises actuellement sur les numéros d'appel d'urgence, la façon de pouvoir très rapidement être secouru dans ces cas-là, je crois que Marlène SCHIAPPA s'est engagée très fortement sur le sujet et a eu raison de rappeler encore hier les dispositifs qui sont à la disposition de ces femmes. Vous savez que c'est un sujet de maintenant avec UBER mais le sujet de l'agression des femmes dans les transports, c'est malheureusement un sujet qui est connu depuis quelque temps. En 2016 d'ailleurs dans le précédent quinquennat, une loi avait été votée, la loi Savary, qui avait déjà apporté un certain nombre de réponses au travers de la vidéosurveillance et de certains dispositifs pour améliorer la sécurité des femmes dans les transports.
RENAUD DELY
Jean-Baptiste DJEBBARI, votre collègue du gouvernement Jean-Paul DELEVOYE, le Haut-commissaire chargé de la Réforme des retraites, confie ce matin à nos confrères de Libération qu'il a songé à démissionner. On sait que Jean-Paul DELEVOYE s'est engagé à rembourser une somme, une rémunération qu'il continuait de percevoir alors qu'il était membre du gouvernement, ce qui n'est pas simplement contestable mais ce qui est illégal au regard de la Constitution.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je crois d'ailleurs qu'il a remboursé cette somme intégralement. En tout cas c'est ce qu'il a annoncé. Il a dit avoir commis un oubli et il a dit avoir réparé cet oubli.
MARC FAUVELLE
Ce n'est pas plus grave que ça ? Un oubli qui est anticonstitutionnel et donc potentiellement illégal, c'est juste un oubli ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Moi je vous dis ce qu'il a dit et je crois que je vais m'en tenir à ça. Il a dit ne pas avoir, quand il a fait sa déclaration à la Haute Autorité de la transparence pour la vie publique, de ne pas avoir effectivement notifié cette rémunération. En tout cas que cette rémunération plutôt qu'il a notifiée, ne lui a pas été notifiée comme étant non conforme. C'est un peu compliqué tout ça.
MARC FAUVELLE
Mais nul n'est censé ignorer la loi, y compris un ministre. Surtout un ministre.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non mais moi je ne veux pas du tout évacuer le sujet. Je dis ce que Jean-Paul DELEVOYE a dit. Il a dit : "J'ai commis un oubli. On ne m'a pas notifié l'incompatibilité et donc j'ai réparé cet oubli ou cette non-conformité."
RENAUD DELY
Ça fait beaucoup d'erreurs, beaucoup d'oublis puisqu'il avait aussi oublié de déclarer qu'il présidait bénévolement un institut de formation dans le monde de l'assurance. Jean-Paul DELEVOYE, il faut rappeler que ce n'est pas un personnage du nouveau monde politique. Il a quarante ans de carrière politique derrière lui, il a déjà été ministre sous Jacques CHIRAC avant la création de la Haute autorité sur la transparence financière.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Et donc je vous propose de le recevoir pour qu'il vous explique lui-même les raisons…
MARC FAUVELLE
L'invitation a été lancée, rassurez-vous Jean-Baptiste DJEBBARI. S'il était mis en examen, il ne resterait pas.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Ecoutez, moi je ne suis ni juge, ni procureur, ni commentateur politique. Vous savez très bien qu'il y a un cadre qui est posé, un cadre informel d'ailleurs, que tout membre du gouvernement mis en examen quitte le gouvernement, démissionne du gouvernement. Ce cadre il a été posé ; il a d'ailleurs été appliqué à plusieurs reprises à plusieurs ministres.
MARC FAUVELLE
Y compris pour François BAYROU.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Y compris dans les quinquennats précédents.
RENAUD DELY
En l'occurrence il y a une plainte déposée par l'association Anticor.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Anticor. J'ai vu, oui.
RENAUD DELY
Et cette plainte pourrait aboutir éventuellement à une mise en examen.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Moi, vous savez, je suis très respectueux du droit. Le droit s'applique évidemment à ce gouvernement comme aux autres. Et donc le cadre qui a été posé évidemment s'applique ici. Si vous voulez parler Jean-Paul DELEVOYE, je vous propose de l'inviter.
MARC FAUVELLE
Vous êtes ministre de tous les transports et donc du rail dont on a beaucoup parlé mais aussi des routes. Je pense à tous ceux qui nous écoutent en ce moment dans les bouchons. Est-ce que vous avez un plan si ça continue les centaines de kilomètres chaque matin autour de certaines grandes villes ? Est-ce que notamment vous pourriez généraliser l'ouverture des couloirs de bus sur certaines autoroutes aux voitures qui transportent au moins trois personnes et qui donc pratiquent le covoiturage ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Nous l'avons fait effectivement sur les accès parisiens parce que c'est là où se situent les plus gros noeuds de trafic. Donc sur l'ensemble des axes autoroutiers qui amènent au périphérique sur l'A6, sur l'A10, sur l'A1, nous avons ouvert les voies réservées au covoiturage à ceux effectivement qui transportent plus de trois personnes. Le trafic est important en ce moment mais ç'a plutôt bien fonctionné la deuxième journée et donc nous réfléchissons encore effectivement aujourd'hui à toutes les hypothèses pour améliorer ou fluidifier le trafic qui est comme vous le dites, aujourd'hui et comme les autres jours, très saturé.
MARC FAUVELLE
Les cars Macron que vous aviez mobilisés au début, c'est terminé ? Ça a fait un flan ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, ça marche très bien entre les métropoles. Il y a plus 10 et plus 15% sur les grandes lignes entre métropoles.
MARC FAUVELLE
Non mais ça, vous n'y êtes pour rien sur les lignes normales qui sont ouvertes et qui sont plus fréquentées en ce moment.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Alors on n'y est pour rien quand ça marche bien et on y est pour tout quand ça dysfonctionne.
MARC FAUVELLE
Il y avait une tentative pour que ces bus desservent les villes aussi.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Ce que j'avais proposé, c'est effectivement que les cars Macron partent de Saint-Denis, traversent Paris et puis aillent jusqu'à Massy pour avoir comme ça une meilleure desserte de Paris. Et nous avons rendu le dispositif possible par…
MARC FAUVELLE
Et ça n'a pas marché.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Ça n'a pas marché parce que Madame HIDALGO, la maire de Paris, n'a pas voulu ouvrir les dessertes. Moi j'avais proposé qu'il y ait trois dessertes : gare du Nord, Châtelet et Denfert-Rochereau.
MARC FAUVELLE
Je crois que les bus Macron n'ont pas le droit aujourd'hui de s'arrêter en ville tout simplement. C'est la loi, non ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Ils ont le droit de s'arrêter à la gare de Bercy, ce que FLIXBUS…
MARC FAUVELLE
Oui, c'est la gare routière de Paris.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Absolument. Ce que FLIXBUS a fait la journée pendant laquelle il a opéré. Mais effectivement la desserte, le fait d'autoriser les dessertes, c'est du ressort de la maire de Paris qui n'a pas souhaité ouvrir les dessertes aux cars Macron, à FLIXBUS et à BLABLACAR pour le dire très concrètement.
MARC FAUVELLE
Vous allez remettre le sujet sur le tapis ou c'est terminé ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, non. D'abord nous observons tout cela très attentivement. Nous préparons peut-être un cadre un peu différent avec l'utilisation possiblement d'autres outils donc nous observons tout cela.
MARC FAUVELLE
Lesquels ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Nous regardons s'il est possible d'utiliser par exemple les voies réservées des bus. Nous regardons un ensemble de dispositifs qui pourraient relever à la fois du ministère de l'Intérieur et de la mairie de Paris pour voir, parce que mon souci à moi chaque jour, c'est quand même de permettre aux Français d'avoir des moyens complémentaires à la RATP et à la SNCF de se déplacer. C'est ça mon sujet, ce n'est pas de faire des petites guéguerres politiques. Et aujourd'hui je vois que souvent, en tout cas certains, choisissent de faire de la politique plutôt que de s'occuper de la fluidité de la vie des Français.
RENAUD DELY
Et si la situation ne se débloque pas à la SNCF par exemple, vous inviter donc les Français - les départs en vacances, c'est dans tout juste une semaine - à se tourner vers les cars Macron pour partir en vacances ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Vous savez, d'abord les Français s'organisent et ils sont intelligents. J'ai écouté dans d'autres émissions que certains, beaucoup d'entre eux s'étaient déjà organisés pour les vacances de Noël au regard de la situation qui existait aujourd'hui, et donc nous allons continuer à la fois à discuter et à construire les solutions alternatives. C'est ça la responsabilité politique.
MARC FAUVELLE
Merci à vous, Jean-Baptiste DJEBBARI, et bonne journée à vous.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 16 décembre 2019