Texte intégral
VINCENT PARIZOT
Bonjour Agnès PANNIER-RUNACHER.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Bonjour Vincent PARIZOT.
VINCENT PARIZOT
Secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Economie et des Finances, merci d'être en direct avec nous ce matin. Après 19 jours de grève dans les transports contre la réforme des retraites, et après un week-end, en plus, dans certaines régions, très agité sur le plan de la météo, on se dit que les commerçants, en tout cas certains d'entre eux, qui misent une bonne partie de leur chiffre d'affaires sur les fêtes, doivent beaucoup souffrir. Est-ce que vous avez des éléments ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, on a surtout des éléments sur l'hôtellerie, la restauration, tout ce qui est traiteurs également, qui a beaucoup souffert de ces trois dernières semaines, avec une vraie opposition entre Paris et le reste de la France. Sur Paris, des chiffres inquiétants, des pertes de réservation de 50 %, des pertes de chiffre d'affaires de 30 % pour certains hôtels, en revanche on retrouve plutôt un commerce un peu timoré en province, mais évidemment les blocages ne se manifestent pas de la même façon.
VINCENT PARIZOT
Ça veut dire que c'est donc Paris, région parisienne, qui sont particulièrement touchés, parce qu'on ne se déplace pas facilement en raison de la grève, parce que les touristes, également, annulent et viennent moins nombreux ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors les touristes ils annulent au fil de l'eau, c'est-à-dire que les 15 derniers jours étaient, jusqu'à récemment encore, protégés, et c'est la perspective de ne pas pouvoir se déplacer qui conduit, notamment les gens de province, à ne pas venir jusqu'à Paris et à reconfigurer leurs vacances de Noël. Et puis on voit aussi les salles de spectacle qui souffrent, non seulement il y a des gens qui ne se présentent pas, alors ça c'est du chiffre d'affaires qui n'est pas perdu, simplement les gens, du coup, ne réservent pas, et ça c'est beaucoup plus inquiétant également.
VINCENT PARIZOT
Certains commerçants risquent de se retrouver rapidement avec des problèmes de trésorerie, là, on le sait, c'est souvent le début de la spirale infernale, qu'est-ce qu'on peut faire pour justement l'empêcher ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Nous, depuis le 10 décembre grosso modo, nous avons réactivé les dispositifs qui avaient très bien marché pendant la crise des Gilets jaunes, il s'agit de donner de la trésorerie aux entreprises. Comment fait-on ? Eh bien on leur propose de repousser le paiement des échéances fiscales et sociales, pour vous donner une idée, c'était 300 millions d'euros de trésorerie qui ont été donnés sous forme de cotisations sociales, et 100 millions d'euros sous forme d'impôts, l'année dernière, à peu près au même moment, pour les Gilets jaunes.
VINCENT PARIZOT
N'empêche, il y a aussi des histoires d'agios bancaires qui peuvent intervenir.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, ça aussi, moi j'appelle très solennellement les banques à faire preuve de bienveillance avec les commerçants qui seraient soumis à forte pression sur leur trésorerie, pour des raisons qui ne leur appartiennent pas, ce n'est pas inhérent à la qualité de leur travail, c'est inhérent aux dysfonctionnements de l'économie française. Nous l'avions fait l'année dernière, ça avait plutôt bien marché avec les banques, nous avions passé plusieurs messages et nous étions intervenus avec la Médiation du crédit de la Banque de France, donc je le redemande aux banques, à la Fédération française bancaire. et puis, bien sûr, tout le personnel de la Banque de France, et en particulier la Médiation du crédit, est à disposition des commerçants pour intervenir et faire en sorte que ça se passe bien et qu'il n'y ait pas ces agios, enfin, voilà, que les frais ne s'ajoutent pas aux frais quand toutes ces difficultés ne sont, une fois de plus, pas inhérentes aux commerçants.
VINCENT PARIZOT
Ça c'est l'appel que vous lancez ce matin aux banques, n'alourdissez pas la facture…
AGNES PANNIER-RUNACHER
La charge.
VINCENT PARIZOT
La charge, avec les agios. On imagine que le commerce en ligne se porte très bien en ce moment !
AGNES PANNIER-RUNACHER
Eh bien pas tant que ça. La surprise…
VINCENT PARIZOT
Il souffre aussi ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
La surprise c'est justement qu'ils ont annoncé des chiffres plutôt de stagnation, on pense qu'il y a eu un effet Black Friday qui a absorbé beaucoup de ventes et que, en fait, ça se régule, mais il n'y a pas de transfert évident entre commerce physique et commerce en ligne, donc c'est plutôt une position d'attentisme des Français, et moi si j'ai un message pour les Français, c'est de leur dire c'est vraiment le meilleur moment pour consommer responsable, c'est-à-dire allez chez vos commerçants de proximité, allez faire le dernier cadeau de Noël au bas de chez vous, vous allez rendre un fier service à vos commerçants, et en plus vous ferez plaisir à tout le monde, à vous-même et à ceux pour qui vous aurez fait ce petit cadeau.
VINCENT PARIZOT
Ça aussi c'est un appel, c'est-à-dire que vous dites, d'abord il y a plein de raisons, et plein de bonnes raisons, de retourner, parce qu'on les a un petit peu oubliés, à tel point que beaucoup ont fermé dans les centres-villes, retournez dans les petits commerces, c'est l'occasion de le faire à 2 jours de Noël.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Exactement, on est tous très attachés à ces petits commerçants, mais si on ne va pas les voir régulièrement, il ne faut pas s'étonner qu''ils disparaissent, donc ils ont vraiment besoin de nous maintenant, ils ont fait énormément d'efforts aussi pour faciliter la vie de leurs clients, ils font du « click and collect », ils font des « marketplaces », enfin, ils se mettent au goût du jour. ils sélectionnent la marchandise pour qu'elle soit responsable, vous n'avez pas le type de surprise que vous pouvez avoir lorsque vous achetez en ligne, vous savez qu'on a fait une enquête de la DGCCRF en achetant en clients mystère des petits jouets, petits bijoux, une marchandise sur deux ne respectait pas les consignes de sécurité européennes, ça veut dire que, les trucs de base, vous aviez du cadmium dans les bijoux, enfin des choses absolument incroyables, donc ça vous ne l'avez pas chez vous commerçants de proximité, allez-y, c'est le moment.
VINCENT PARIZOT
Voilà, encore un appel lancé ce matin sur RTL. Parlons de cette grève quand même. 19 jours, vous l'avez dit, ça commence quand même à peser sur l'économie du pays, les commerces, mais aussi certaines entreprises. Le refus des syndicats, mais aussi de la base d'ailleurs, d'observer une trêve des confiseurs, de lever le pied pour les fêtes, ça dit aussi quelque chose de leur détermination, qu'est-ce que vous avez envie de leur exprimer, de leur dire ce matin, aux grévistes ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
J'ai envie de dire que cette réforme, encore une fois, c'est une réforme de justice sociale, c'est une réforme qui repose sur un principe très simple, pour le même travail, quel que soit l'endroit où vous travaillez, vous payez les mêmes cotisations et vous avez la même retraite, et je crois que c'est quelque chose de très logique. Et lorsque le président de la République, il ne renonce pas à sa retraite, il dit juste « ça sera les mêmes règles, je cotiserai comme les autres à ma retraite, parce que ça sera une étape de ma vie, et à chaque fois qu'on a un travail, qu'on fasse un job étudiant ou qu'on soit président de la République, eh bien on accumule des points. » Et je pense que ça, cette logique-là, elle est très importante, et c'est aussi une garantie pour les plus jeunes d'avoir une retraite, je dirais honnête, et aujourd'hui ce n'est pas garanti parce que le régime il est déséquilibré, c'est ça la réalité.
VINCENT PARIZOT
Vous évoquez ce geste d'Emmanuel MACRON. On a vu, avec Martial YOU, que ça se calcule en millions d'euros, jusqu'à 8 millions d'euros s'il renonce à son siège au Conseil constitutionnel. Franchement, est-ce que c'était opportun d'annoncer cela au moment où certains, vu le montant de leur pension, regardent à l'euro près ce qu'ils risquent de perdre, par exemple ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est simplement de dire que tout le monde a les mêmes règles, ça ne va pas au-delà, tout le monde a les mêmes règles, même le président de la République, et qu'il n'y a pas de gens qui échapperaient à la règle – j'espère que les sénateurs vont rejoindre le mouvement, parce que eux peuvent décider de leurs conditions de retraite – mais les députés se sont mis dans le rang, les ministres cotisent au régime général, le président de la République est traité comme les autres, et ça ne va pas au-delà, c'est une question, encore une fois, de justice sociale et de cohérence dans le moment. Alors évidemment, si vous prenez quelqu'un qui a à peine 40 ans et que vous accumulez les années, ça donne un montant très impressionnant, mais, encore une fois, il s'agit simplement de revenir à la base de cette réforme de justice sociale.
VINCENT PARIZOT
Et si les sénateurs font de la résistance, qu'est-ce qui va se passer ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je pense que l'opinion publique jugera, et je doute que dans la durée ce soit vraiment tenable.
VINCENT PARIZOT
Donc là aussi un appel aux sénateurs, sans doute, pour que la raison l'emporte.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Oui, et très bienveillant, très bienveillant encore une fois, c'est-à-dire que, au fond, si on veut être crédible collectivement, il faut appliquer les mêmes règles, qui dit universalité, dit que ça s'applique à tout le monde, très simplement.
VINCENT PARIZOT
Agnès PANNIER-RUNACHER, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Economie et des Finances, merci d'être venue sur RTL, et on retient cet appel que vous avez lancé sur RTL pour les fêtes de Noël : allez chez vos petits commerçants.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Merci beaucoup.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 3 janvier 2020