Déclaration de M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, sur la transformation du système éducatif et le développement du numérique, Aix les Thermes le 20 août 2019.

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Circonstance : 16e édition de l'université d'été Ludovia, à Ax-les-Thermes (Ariège), du 20 au 23 août 2019

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs les recteurs,
Monsieur le directeur du numérique pour l'éducation,
Mesdames et Messieurs les professeurs,
Mesdames et Messieurs,


Même à distance, je tenais à être une nouvelle fois présent avec vous à Ludovia pour vous remercier chaleureusement d'organisateurs un tel événement. Vous permettez ainsi aux professeurs, aux chercheurs, aux développeurs, aux entrepreneurs, aux collectivités territoriales d'échanger sur le numérique éducatif dont nous savons qu'il est évidemment un de nos sujets principaux.

Comme je vous l'ai indiqué l'année dernière, le numérique constitue un des leviers majeurs de la politique éducative que nous menons actuellement. Cela repose au sein de l'Éducation nationale sur deux principes essentiels qui ont structuré mon discours de l'année passée: la protection car nous devons créer un cadre de confiance pour l'Éducation nationale et puis, l'ambition parce que nous devons avoir évidemment beaucoup d'ambition pour nos élèves, beaucoup d'ambition pour notre système scolaire qui doit même faire levier vis-à-vis de toutes les nouvelles technologies, à fortiori celles qui sont créées en France, qui sont pensée en France, qui ont pour vocation à faire réussir les élèves dans une perspective humaniste qui est la nôtre.

Depuis deux ans, nous avons engagé une profonde transformation du système éducatif. Vous le savez il s'agit de, à la fois d'assurer la justice sociale et de transmettre les connaissances et les valeurs et donc d'élever le niveau général de nôtre pays. Ce double objectif : justice social, élévation du niveau général structure l'ensemble des politiques publiques y compris les politiques numériques.

A l'école primaire cela veut dire que l'on met tout en oeuvre pour renforcer l'acquisition des savoirs fondamentaux, l'obligation de scolarisation à l'âge de 3 ans, les dédoublements de classes dans l'éducation prioritaire renforcée que nous allons faire maintenant de la grande section au CP et au CE1 et en cette rentrée c'est 300 000 élèves qui sont concernés par cette politique du dédoublement.

Au collège, nous soutenons la réussite de tous les élèves, avec un effort essentiel pour l'orientation et pour la lutte contre le décrochage scolaire. Et pendant toute cette période de l'école du socle, celle qui regroupe l'école primaire et le collège, ce que nous voulons c'est installer un socle communs pour tous les enfants qui repose sur deux mots clés : la Culture bien sûr et la Logique. Et de ce point de vue-là l'enseignement numérique contribue évidemment fortement aux deux. La systématisation de l'apprentissage de la programmation en particulier contribue à ce développement de la Logique auquel nous tenons tant.

Et au lycée vous le savez, la réforme du baccalauréat va offrir des parcours plus diversifiés, et permettre de laisser plus de place au contrôle continu avec au final un diplôme remusclé et une place extrêmement importante pour le numérique avec de profondes transformations pédagogiques et organisationnelles de notre école que nous menons depuis 2 ans.

En effet la réforme du lycée, vous le savez, a permis à la fois de faire émerger une nouvelle spécialité, un enseignement de spécialité intitulée : numérique et sciences informatiques. Cet enseignement de spécialité est une nouveauté à l'échelle nationale et même à l'échelle internationale et il va permettre évidemment d'avoir un développement très fort. Cela va s'accompagne de la création du CAPES d'informatique qui est évidemment une consécration de l'informatique au coeur de notre système scolaire, dans quelques années nous pourrons créer une agrégation d'informatique et nous aurons ainsi définitivement réussit l'intégration du numérique et de l'informatique comme étant des disciplines au cœur du système scolaire. C'est évidemment une véritable révolution et elle est en train de s'accomplir notamment à la faveur de la réforme du lycée.

Nous voulons produire aujourd'hui tout simplement une politique publique du numérique éducatif et vous le savez cela passe par différents aspects que je regroupe l'an dernier autour de ces expressions : protection et ambitions. Et qui partent du principe déjà que nous produisons un très grand nombre de données, qui sont liées à la vie scolaire, aux évaluations, aux résultats des élèves, aux travaux au devoir qu'il réalise. Nous souhaitons que ces données soient au cœur de la stratégie numérique du ministère au service et au service seulement des élèves. Il s'agit de les protéger et en même temps d'élaborer les outils nécessaires pour en faire profiter, dans le respect des libertés, l'ensemble de la communauté éducative pour mieux personnaliser le parcours de chaque élève. C'est pourquoi dans la dimension de protection, il m'a semblé indispensable d'avoir un délégué à la protection des données que j'ai nommé au mois d'août 2018. Ce délégué coordonne aujourd'hui l'action des délégués académiques à la protection des données et puis je vais installer à mes côtés à cette rentrée scolaire un comité d'éthique pour les données d'éducation composé de personnalités et d'experts reconnus. Il m'éclairera par ses avis sur les différents projets que nous avons en matière d'utilisation des données et je remercie Claudie Haigneré d'avoir accepté de présider ce comité d'éthique.

Dès lors qu'il est sécurisé et encadrer le traitement de masse des données est un outil fondamental, un outil fondamental de progrès pour la réussite scolaire et un outil fondamental pour mieux gérer notre institution. Ainsi je pourrais nommer à la rentrée le nouvel administrateur ministérielle des données chargé de définir la politique de la donnée et rattaché au directeur du numérique pour l'éducation.

On doit aussi évidemment parler de l'intelligence artificielle et je suis sûr que cela va être très fortement abordé à Ludovia. Parce que nous devons mettre l'intelligence artificielle au service de l'éducation ceci fait déjà l'objet d'un groupe de travail spécifique du conseil supérieur de scientifiques de l'éducation nationale qui rassemble les meilleurs chercheurs en la matière. Sur ce point les expérimentations qui sont conduites posent la question fondamentale de la valorisation du numérique comme vecteur de la diffusion de la recherche et de l'innovation dans l'enseignement scolaire. Des incubateurs sont déjà mis en place dans les académies il faut pouvoir amplifier et surtout structurer ce que l'on peut appeler le passage à l'échelle. Nous nous y emploierons au cours des mois et des années à venir avec le Conseil scientifique. Concrètement, pour tester et pour étudier les potentialités que l'intelligence artificielle pourrait apporter aux apprentissages deux projets sont rentrés dès cette rentrée 2019.

La première va porter dans le cadre du plan langues vivantes sur l'expérimentation d'un assistant vocal pour l'apprentissage de l'anglais à l'oral cela va concerner d'abord les élèves du premier degré, cet outil permettra en complément et en soutien des activités renforcées mené avec le professeur d'aider chaque élève de manière personnalisée à progresser dans l'apprentissage linguistique. C'est donc un projet extrêmement innovant qui peut tirer vers le haut les Edtech de façon à nous permettre d'avoir un outil totalement nouveau au service de l'apprentissage des langues.

Le second projet est un partenariat d'innovation pour l'intelligence artificielle portant sur les apprentissages fondamentaux en français et en mathématiques au cycle 2. Dès l'automne les solutions basées sur l'intelligence artificielle seront ainsi proposées aux enseignants volontaires.

Pour ces deux projets un cadre éthique rigoureux a été défini et nous devons donc évidemment développer l'enseignement 21e siècle par le numérique dans ce cadre éthique rigoureux.

En ce qui concerne l'enseignement général il va y avoir aussi un développement des outils ce sont des outils accessibles à tous qui sont maintenant amplement déployés. Je peux en citer quelques-uns mais qui n'épuisent pas l'ensemble des outils que l'on pourrait mentionner. Je pense au service D'col, proposé par le CNED, qui est désormais une véritable académie numérique et ce service D'col est étendu à l'ensemble des élèves de CM1 de CM2 de 6e pour tous les élèves qui ont besoin d'un accompagnement en français et en mathématiques.

On peut aussi citer un grand succès qu'est la nouvelle plateforme “Classe à 12” qui a pour objectif de valoriser les retours d'expériences et les échanges de pratiques entre les professeurs concernés par le dédoublement des classes de CP et de CE1. Il s'agit d'une plateforme de courtes vidéos qui permettent à tous les enseignants de ces classes dédoublées de partager des outils des ressources et des pratiques professionnelles.

Voilà un bel exemple de pratiques qui sans faire beaucoup de bruit en réalité change la vie de l'école, parce que c'est très clairement en soutien des professeurs pour tous les projets et progrès pédagogique qui peuvent souhaiter.

On peut aussi citer un autre exemple, c'est l'outil numérique d'accompagnement de l'opération “Devoirs faits”, là aussi c'est le CNED qui l'a développé. Cet outil s'appelle Jules, il fournit une aide instantanée sur des questions simples portant sur des savoirs et des compétences du collège en français et en mathématiques.

De même à partir de la rentrée, cette rentrée 2019, De nouvelles banques de ressources numériques éducatives seront disponibles. Pour accompagner les enseignants dans leur mission d'aide à l'orientation l'ONISEP proposera ainsi aux collèges et aux lycées une solution intégrée de produits et de services dit “Onisep services” avec des ressources en appui aux apprentissages.

S'agissant du lycée professionnel son attractivité dépend en grande partie de notre capacité à construire une offre éducative numérique de qualité adaptée aux enjeux de la formation professionnelle et préparant les élèves à exercer les métiers de demain. En partenariat avec le monde industriel nous avons ouvert avec l'aide de Réseaux Canopée la plateforme “Étincel” qui permet aux lycéens d'être immergés dans des situations industrielles authentiques. Enfin la rentrée 2019 va être marquée aussi par la création d'un site ONISEP dédiée à la transformation de la voie professionnelle. Parce que nous voulons position les lycées professionnels à la pointe des compétences numériques d'avenir, nous avons aussi une centaine de lycées professionnels qui expérimente actuellement le dispositif dit “ProFane” et ce n'est pas moins de 50 chercheurs qui analysent les évolutions des métiers avec le numérique. La plateforme qui présentera les résultats de recherche ouvrira très bientôt.

Ces outils numériques sont par ailleurs indispensable pour atteindre notre objectif d'une école pleinement inclusive. Dès septembre 2019 les enseignants qui scolarisent en milieu ordinaire des élèves en situation de handicap auront accès à une plateforme numérique. Cette plateforme nous l'appelons “Cap École inclusive”. Elle est réalisée par le Réseau Canopé et, vous le savez, cette plateforme numérique “Cap École inclusive” est au cœur de cette nouvelle politique d'un service public de l'école inclusive qui lui aussi se déploie en cette rentrée. Cette plateforme va les guider pour mieux évaluer les besoins éducatifs particuliers des élèves, pour proposer des ressources numériques en lien avec leurs besoins et aussi mettre en relation directe les paires les plus chevronnés et les proches géographiquement. En outre que les outils numériques vont nous aider considérablement à répondre aux fractures territoriales de notre pays je pense particulièrement aux écoles rurales qui bénéficies d'un investissement conséquent et je sais qu'à Ludovia il y a de très belles démonstrations sur les expérimentations existantes en la matière. J'ai l'académie de Clermont-Ferrand à l'esprit mais je sais aussi par exemple, l'académie de Nancy-Metz a fait de très belles choses.

Un appel à projets financé par le PIA, dénommé ENIR, est destinée à soutenir le développement de l'innovation numérique pour l'éducation dans les écoles des communes rurales de moins de 2 000 habitants. Avec cet appel à projets ce sont plus de 3 000 écoles qui bénéficient d'aides à l'équipement.

Outre cet enseignement par le numérique il s'agit de développer les compétences numériques des élèves. L'enseignement du numérique et de l'informatique est considérablement renouvelée, je vous le disais, grâce à ce qui va se passer en classe de seconde avec l'enseignement commun obligatoire sciences numériques et technologies, et puis l'enseignement de spécialité auquel je faisais référence NSI comme on dit maintenant numérique et sciences informatiques. Rappelons que cela représente quatre heures en première, 6 heures en terminale, et que c'est donc un enseignement présent dans plus de la moitié des lycées publics qui va représenter une évolution considérable.

Tout ceci donc est cohérent avec l'existence d'un CAPES et d'une agrégation et ses nouveaux enseignements vont placer la France en tête des pays développés en termes de généralisation que de profondeur des apprentissages numériques et informatiques dans l'enseignement du second degré.

Par ailleurs en articulation avec ses évolutions l'année scolaire 2019-2020 sera marquée par le développement de la certification PIX qui certifie vous le savez les compétences numériques en fin de collège et enfin le lycée.

Nous devons aussi accompagner au mieux les professeurs nous avons ainsi un Mooc développé par l'INRIA proposé depuis février dernier aux enseignants de lycée qui souhaite enseigner le nouvel enseignement obligatoire en seconde. Ils sont plus de 13 000 à s'y être inscris. C'est vraiment un grand succès significatif de notre capacité d'alliance entre le monde universitaire et l'enseignement scolaire pour une formation continue de nos professeurs nous permettant d'être à la pointe de l'enseignement de l'informatique. Il y a eu aussi le développement d'un diplôme inter-universitaire un DIU qui s'intitule Enseigner l'Informatique au Lycée et qui a été spécifiquement créée en 2019 pour accompagner les futurs professeurs dans l'acquisition des connaissances et compétences nécessaires à l'enseignement de la nouvelle spécialité NSI en classe de première comme en classe de terminale. Nous avons formé par ce biais-là plus de 2 000 professeurs formés dans 19 universités.

Enfin il faut rappeler qu'il y a un dispositif de mentorat qui va permettre de mettre en relation dès la prochaine rentrée des professeurs de sciences numériques et technologies avec des mentors issues de l'écosystème des startup, des grands groupes, des universités, des instituts de recherche afin de les accompagner de répondre à leurs questions. Et plus largement la certification des compétences numériques va devenir obligatoire dans les master MEFF cela signifie donc que notre formation initiale devient pleinement numérique avec la maîtrise des compétences numériques professionnelles acquises en cours de carrière qui pourra aussi être validée dans le cadre de ce qu'on appelle un PIX enseignants.

La formation au et par le numérique est enfin développée grâce au renforcement de la plateforme de formation à distance m@gistère qui est déjà un grand succès. Mais aussi à des grâces à des formations d'initiatives locales que nous encourageons.

C'est avec de très nombreux partenaires vous le voyez que le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse développe ainsi un environnement favorable aux numérique. Parce que il faut le préciser au niveau national nous devons parvenir à mieux coordonner nos efforts pour que les offres publiques et privées soient mieux connus des enseignants et que les dispositifs d'acquisition soient simplifié. Au sein du ministère nous allons ainsi structurer dans les prochains mois une véritable stratégie éditoriale pour mieux identifier les contenus éducatifs qui sont produits par des acteurs très différents et ainsi garantir un meilleur accès. Mais aussi avec les collectivités locales notre objectif est de définir conjointement un socle numérique de base, proposé récemment par la cour des comptes d'ailleurs, et qui nous paraît particulièrement pertinent. Dans le respect des compétences et des responsabilités de chacun nous devons progressivement aboutir à ce que chaque école, chaque établissement, est un niveau de base en ce qui concerne l'équipement, la connectivité, les ressources numériques. Ceci permettra un usage raisonné progressif et grâce à la collecte des données dans l'outil eCarto qui est développé avec la caisse des dépôts, les prises de décisions pourront s'établir en toute transparence et le dialogue en sera renforcé au sein de la communauté éducative. Les différentes parties Etat et collectivités pourront ainsi s'engager plus fortement dans les conventions passées au niveau local.

Plusieurs collectivités d'ailleurs ont annoncé des grands investissements numériques évidemment je m'en réjouis que ce soit au niveau des outils mais aussi au niveau des manuels scolaires numériques. La direction du numérique pour l'éducation qui est représentée par son directeur, à Ludovia, Jean-Marc Merriaux ainsi que tous les acteurs académiques du numérique sont mobilisés pour accompagner ces initiatives. J'ai demandé la mise en place de conventions spécifiques pour formaliser cet accompagnement.

Pour ce défi essentiel de l'école du 21e siècle nous devons poursuivre avec beaucoup de détermination et d'enthousiasme l'oeuvre à laquelle chacun d'entre vous, acteurs publics de Edtech contribuez. L'animation d'une communauté du numérique éducatif où chacun apporte ce qu'il sait faire de mieux au service des élèves. Vous le voyez, cette actualité du numérique éducatif est extrêmement riche le nombre d'exemples est considérable il y a, en cette rentrée 2019 je dirais un embrayage de ce que je vous annonçais en 2018 quand je parlais de protection et d'ambition cela devient maintenant la réalité de grands projets, dont vous êtes les acteurs, dont l'ensemble des acteurs du système éducatif ont vocation à été participants et donc je vous remercie d'être si actif dans ce sens parce que derrière cela il y a ce double enjeu que je rappelais en introduction : l'élévation du niveau général, la justice sociale, et donc un monde meilleur, plus humaniste grâce aux nouvelles technologies je vous souhaite donc des échanges fructueux, dans le cadre de Ludovia, et par la suite merci beaucoup.


Source https://www.ac-paris.fr, le 1er octobre 2019