Texte intégral
Mme la présidente. Nous abordons l'examen des crédits relatifs à l'enseignement scolaire (no 2301, annexe 24 ; no 2302, tome II).
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Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Le présent projet de budget de l'enseignement scolaire traduit la priorité accordée à l'éducation par le Président de la République et par le Gouvernement. Ce projet de budget confirme bien nos engagements – je vous remercie de l'avoir noté. Il prolonge la loi pour une école de la confiance, que vous avez adoptée cet été. Il permet la mise en œuvre effective de nos réformes, dont l'ambition est claire : la réussite de tous les élèves, qui passe par le rehaussement du niveau général et la justice sociale. Le budget de la mission “Enseignement scolaire” qui vous est proposé pour 2020 s'établit à 52,1 milliards d'euros, hors cotisations aux pensions de l'État. Cela représente une augmentation de près de 2%, soit un peu plus de 1 milliard d'euros supplémentaires, somme qui nous permettra de poursuivre les transformations profondes du système éducatif.
Le présent projet de budget réaffirme notre ambition pour l'école primaire. Celle-ci doit conduire à la maîtrise par tous les élèves des savoirs fondamentaux : lire, écrire, compter, respecter autrui. Si nous réussissons cela pour tous les élèves de l'école primaire, alors nous réaliserons le premier des objectifs de justice sociale qu'un pays peut se fixer. L'effort en faveur du premier degré est en effet la première des priorités. Comme les années précédentes, des créations de postes sont prévues, dont 440 à l'école primaire, alors que le contexte est celui d'une baisse démographique, puisqu'il y aura 50 000 élèves de moins à la rentrée 2020. L'effet combiné de ces deux tendances permettra d'améliorer encore le taux d'encadrement dans chaque département de France.
Ce projet de budget soutient l'une des mesures de justice sociale les plus importantes du Gouvernement : la réduction du nombre d'élèves dans les classes où sont posées les bases de l'apprentissage. Nous consoliderons le dédoublement des classes de CP et de CE1 en REP et REP+. Comme vous le savez, cela concerne aujourd'hui 300 000 élèves, soit 20% d'une classe d'âge. Nous étendrons progressivement aux grandes sections de l'école maternelle du réseau d'éducation prioritaire le dédoublement des classes ; 150 000 élèves supplémentaires seront concernés par cette mesure. C'est un signal important, alors que la nouvelle politique de l'école maternelle était au coeur de la loi pour une école de la confiance. Nous limiterons progressivement à vingt-quatre élèves par classe à partir de la rentrée scolaire de 2020 les effectifs des classes de grande section, CP et CE1, pour toute la France. Nous accueillerons 26 000 élèves supplémentaires par an, avec l'abaissement de l'âge de la scolarité obligatoire à 3 ans. Toutes ces mesures représentent pour l'école primaire une politique volontariste, de justice sociale et de hausse du niveau général.
Le présent projet de budget accompagne tous les élèves vers la réussite. Le volume d'enseignement du second degré public sera maintenu en 2020, du fait de l'augmentation du volume des heures supplémentaires.
Ce projet de budget renforce le soutien aux élèves les plus fragiles, qui s'agisse de fragilités sociales – comme je l'ai indiqué en commission, le montant alloué aux bourses de collège et de lycée augmente de 5% – ou de fragilités liées au handicap, puisque les moyens permettant de rendre l'école pleinement inclusive sont très significativement renforcés. Nous pouvons parler depuis cette rentrée d'un véritable service public de l'école inclusive ; en 2020, nous consacrerons ainsi plus de 3 milliards d'euros par an à l'accompagnement des élèves en situation de handicap. Depuis 2017, c'est l'action dont la hausse a été la plus importante, puisqu'elle a été de 44%. Nous en sommes fiers, parce que c'est une de nos priorités.
Le projet de budget vise à permettre le déploiement de 3 000 pôles inclusifs d'accompagnement localisés, les PIAL, qui représentent une nouvelle organisation de notre système. Le projet de loi crée également un service de gestion dédié aux accompagnants.
Enfin, ce projet de budget pour 2020 remédie à la précarité des personnels, en achevant la transformation des contrats aidés en contrats d'AESH et en généralisant le recrutement sur la base d'un contrat de droit public de trois ans renouvelable une fois, avant la signature d'un contrat à durée indéterminée pour ceux qui le souhaitent. Le financement de 4 000 postes d'AESH supplémentaires à la rentrée de 2020 montre bien qu'il s'agit d'un déploiement quantitatif ; il va de pair avec une évolution qualitative de l'école, plus inclusive.
La rentrée de 2020 sera également celle de l'aboutissement de la refonte du baccalauréat et des programmes du lycée, qui doit permettre à chacun de s'approprier progressivement son avenir.
Le présent projet de budget, enfin, marque le souci de renforcer l'attractivité des métiers des professeurs et des personnels concourant aux missions d'éducations. Comme je l'ai dit au moment de la rentrée scolaire, une des grandes priorités de l'acte II du quinquennat concerne les ressources humaines du ministère.
À l'occasion de la présentation du projet de budget, je veux insister sur les conditions de travail des personnels de l'éducation. Dans la société du XXIe siècle, les missions évoluent et peuvent s'exercer de manière différenciée. Les carrières doivent donc accompagner ces évolutions, l'investissement et le niveau de formation doivent être reconnus, et l'attractivité du métier d'enseignant maintenue. Cela dépend non seulement des mesures que nous prenons, mais aussi de nos discours et des représentations que nous nous faisons du métier d'enseignant.
Le schéma d'emploi du ministère est sanctuarisé. Il y aura donc au cours de l'année autant d'arrivée que de départs. La stabilisation des emplois administratifs du ministère doit aussi être soulignée. Elle accompagne la mise en œuvre d'une politique plus qualitative de gestion des ressources humaines de proximité, au plus près des professeurs, comme l'ont souligné la rapporteure spéciale et la rapporteure pour avis.
Cette politique de gestion des ressources humaines de proximité est une des révolutions de cette rentrée. Elle concerne, dans un premier temps, près d'un quart des enseignants, et elle les concernera tous à terme. Il s'agit en effet de proposer la possibilité d'entretiens réguliers pour l'ensemble des personnels de l'éducation nationale. Nous voulons désanonymiser la vie professionnelle des professeurs et des personnels.
Sur 1 milliard d'euros de crédits supplémentaires, les crédits de masse salariale représentent 823 millions d'euros ; il s'agit d'un abondement net. Ainsi, 80% de l'augmentation du budget bénéficiera directement au personnel du ministère, contribuant aux hausses du pouvoir d'achat pour l'année 2019-2020.
Pour presque la moitié, soit 300 millions d'euros, cette hausse résulte principalement de la progression naturelle du déroulement des carrières à l'ancienneté. L'autre moitié, de l'ordre de 400 millions d'euros, correspond à des mesures catégorielles : 300 millions au titre de la revalorisation des carrières dans le cadre du PPCR, 60 millions pour la troisième revalorisation des personnels exerçant en REP+ – j'insiste sur ce point car cette revalorisation, réclamée depuis longtemps, permet, après trois rentrées scolaires, d'assurer l'attractivité des postes en réseau d'éducation prioritaire renforcé ; une enveloppe indemnitaire de 30 millions est en outre destinée à accompagner les mesures de ressources humaines de l'agenda social, par exemple en améliorant le taux d'accès à la hors classe des professeurs des écoles.
Telles sont les grandes lignes du projet de budget que je vous présente et qui concrétise notre engagement à faire de l'école un lieu d'épanouissement et de réussite au service de tous. Surtout, ce projet de budget accompagne une évolution qualitative de l'enseignement scolaire, qui concerne en priorité l'enseignement primaire, car nous voulons l'ancrage des savoirs fondamentaux pour tous les élèves, mais aussi le collège, où le programme devoirs faits porte ses premiers fruits en matière d'évolution pédagogique, ainsi que le lycée : la réforme du lycée professionnel et celle du baccalauréat général et technologique se concrétisent en 2019-2020 et transforment la vie des lycées. Les lycéens, en effet, auront une bien plus grande liberté de choix et, en préparant le baccalauréat, pourront se préparer à réussir au-delà.
Il ne s'agit donc pas que d'une forte augmentation budgétaire, il s'agit aussi d'une évolution qualitative, qui se traduit par une transformation concrète et souvent attendue du système éducatif. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM, UDI, Agir et Indépendants.– Mme Agnès Thill applaudit aussi.)
Mme la présidente. Nous en venons aux questions des députés. Je vous rappelle que la durée des questions et des réponses est fixée à deux minutes.
La parole est à Mme Sabine Rubin.
Mme Sabine Rubin. Dans un rapport de 2018, la Cour des comptes a jugé que les données quantitatives budgétaires et financières concernant les AESH étaient “opaques”. En effet, une part importante des AESH sont placés hors titre 2, c'est-à-dire hors du plafond d'emplois, parce qu'ils sont employés directement par leur établissement d'enseignement. Ainsi, 2,03% des AESH inscrits au titre 2 en 2019 se retrouvent inscrits hors titre 2 en 2020, ce qui permet de ne plus justifier au premier euro quelque 800 millions d'euros de crédits. Cette tendance n'est pas prête de s'inverser : entre 2019 et 2020, les crédits hors titre 2 augmentent de 17,4%, alors que les crédits relevant du titre 2 n'augmentent que de 8,2%.
Pour les AESH inscrits hors titre 2, les conséquences sont concrètes : précaires parmi les précaires, ils perdent de nombreux droits. De plus, leur rémunération n'est pas incluse de manière précise dans les documents budgétaires du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse, car elle est noyée dans les subventions accordées aux établissements publics. Pour cette même raison, il est très difficile de recenser le nombre d'AESH qu'emploie votre administration.
Quand c'est flou, c'est qu'il y a un loup, monsieur le ministre. Pour nous, cela pose deux problèmes majeurs. D'une part, les comptes que vous présentez à la représentation nationale violent le principe de sincérité budgétaire, car nous ne saurions légiférer sans avoir accès à des statistiques précises. D'autre part, l'augmentation des crédits hors titre 2, réservée aux AESH mutualisés – point important – laisse envisager que le payeur, en l'occurrence votre ministère, devienne le prescripteur des notifications en lieu et place des maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH. Sinon, comment le ministère pourrait-il anticiper, dans ses prévisions budgétaires, des recrutements d'AESH mutualisés plus importants que ceux d'AESH individualisés ? En réalité, l'augmentation des crédits hors titre 2 traduit votre philosophie en matière d'inclusion scolaire : la mutualisation à tout prix, au détriment des besoins réels des élèves en situation de handicap – ce qui nous pose problème.
Nous proposons un remède à ces deux maux : la titularisation de tous les AESH, comme il est proposé dans notre contre-budget. Pourquoi ne pas choisir cette voie au bénéfice des AESH et des élèves et pour rendre lisible votre politique d'inclusion ? (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Je l'ai dit à la tribune, madame la députée : le budget augmente de 44% en deux ans. Il faut donc tout votre talent pour décrire cette évolution comme une quelconque régression.
Mme Sabine Rubin. Nous parlons là des AESH !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. S'y ajoute en outre, comme je l'ai indiqué, une déprécarisation des personnels que chacun peut constater en cette rentrée. Il faut donc aller chercher très loin des arguments techniques pour tenter de décrire la situation à l'inverse de ce qu'elle est ! Les documents budgétaires contiennent toutes les descriptions souhaitées. Les reproches de la Cour des comptes portent sur le passé ; les choses se sont améliorées depuis. La situation sociale des AESH n'est en rien différente selon qu'ils relèvent du titre 2 ou non. Qu'ils dépendent du rectorat ou de l'établissement public local d'enseignement, l'EPLE, ils perçoivent le même salaire et sont recrutés dans le cadre de contrats de trois ans, comme les assistants d'éducation. Vous devriez donc vous réjouir que cette rentrée se caractérise par une stabilité beaucoup plus forte pour les AESH.
Quant à la discussion relative aux AESH mutualisés ou individualisés, nous l'avons eue à plusieurs reprises, y compris dans le cadre de la commission d'enquête sur l'inclusion des élèves handicapés dans l'école et l'université de la République, qui y consacre plusieurs pages de son rapport. Comme vous le savez, nous faisons preuve sur ce point d'un grand pragmatisme et partons de l'intérêt de l'élève, qui peut consister à bénéficier d'un accompagnement mutualisé ou individualisé selon les cas. Il m'est arrivé de me rendre dans des classes où la présence de trois accompagnants ne se justifiait pas en soi. La bonne gestion n'est pas un gros mot et ne saurait être reprochée, car elle est au service des élèves. Il m'est aussi arrivé de rencontrer des élèves non accompagnés alors qu'ils semblaient prioritaires par rapport à d'autres élèves accompagnés.
En clair, l'amélioration de la gestion, outre qu'elle est un objectif en soi, est au service de la situation des AESH et de celle des élèves. Ne mettons pas ces trois critères en contradiction ; au contraire, l'amélioration de cette rentrée se produit sous ces trois angles, et c'est un élément de satisfaction. N'essayons pas de faire croire à une quelconque intention cachée. Encore une fois, nous avons augmenté le budget de 44% en deux ans et j'ignore par quel tour de passe-passe nous pourrions faire passer cette hausse pour une économie budgétaire.
Mme Sabine Rubin. Ce n'est pas ce que j'ai dit !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Vous le voyez : nous savons dépenser plus, mais nous savons aussi dépenser mieux. Nous faisons l'un et l'autre à la fois, car il s'agit d'une priorité majeure. Nous visons naturellement l'intérêt des élèves et celui des personnels. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
Mme la présidente. La parole est à M. Alexandre Freschi.
M. Alexandre Freschi. Vous avez rappelé, monsieur le ministre, que les maîtres-mots de votre action sont une plus grande justice sociale et l'élévation du niveau général, et aussi une plus grande justice territoriale. Les programmes de la mission que nous examinons sont en parfaite cohérence avec les objectifs de la loi pour une école de la confiance. Je pense en particulier à la hausse importante de 14% des crédits consacrés à l'action « Inclusion scolaire des élèves en situation de handicap » et à la hausse des crédits du programme “Enseignement scolaire public du premier degré”.
Il y a quelques semaines, monsieur le ministre, vous avez confié à Mme Salomé Berlioux une mission de réflexion sur les obstacles que rencontre la jeunesse en milieu rural. De même, vous recevrez prochainement le rapport de Mme Azéma et de M. Mathiot visant à repenser l'éducation prioritaire en tenant compte de l'ensemble des enjeux liés aux territoires urbains et ruraux.
Ma question est donc la suivante : quelle stratégie déploie le ministère à travers l'augmentation importante des crédits consacrés à la mission “Enseignement scolaire”, et comment comptez-vous la mettre au service de tous les élèves, dans tous les territoires ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Monsieur le député, je vous remercie pour cette question importante sur le devenir de l'école rurale, que nous avons souvent abordée dans cet hémicycle et que concerne le présent projet de budget. Nous avons mis au point une véritable stratégie pour l'école rurale, qui repose sur des critères à la fois quantitatifs et qualitatifs.
S'agissant des aspects quantitatifs, dans les quarante-cinq départements les plus ruraux, 270 postes supplémentaires ont été créés depuis trois ans, en incluant la rentrée actuelle et la rentrée suivante, pour 57 000 élèves en moins. Nous avons maintenu l'école rurale à un haut niveau de densité, puisque 20% des écoles de France comptent une ou deux classes, ce qui traduit le volontarisme du Gouvernement. L'amélioration du taux d'encadrement des élèves dans tous les départements est encore plus vraie dans les cinquante départements les plus ruraux, de façon à offrir un service d'éducation plus efficace partout sur le territoire. En Lozère, par exemple, les classes comptent en moyenne quatorze élèves entre la petite section et le CM2 ; dans le Cantal, cette moyenne est de dix-sept élèves. Le Président de la République s'est engagé – et nous appliquons cet engagement – à ce qu'aucune école ne ferme avant la fin du quinquennat sans accord préalable du maire de la commune concernée.
Les territoires ruraux bénéficient en priorité de mesures spécifiques relevant de l'ensemble de notre politique éducative. Je pense à la revitalisation des internats, que plusieurs d'entre vous ont saluée et qui bénéficiera notamment aux territoires ruraux ; je pense aussi au plan bibliothèques, qui permet de constituer des fonds de livres dans des écoles isolées et qui est doté de 2 millions d'euros, ou encore à l'appel à projets « Écoles numériques innovantes et ruralité », lancé dans le cadre du programme d'investissements d'avenir – PIA – et doté d'environ 20 millions d'euros, qui permettra à 3 800 écoles dans 3 570 communes rurales de bénéficier d'équipements numériques destinés à favoriser les apprentissages. Enfin, les conventions ruralité, vous le savez, constituent une politique qualitative que nous avons poursuivie et approfondie. Aujourd'hui, quarante-neuf départements sont déjà couverts par ces conventions qui permettent de constituer des pôles scolaires, de mettre les écoles en réseau, de diminuer le nombre d'écoles à classe unique, d'encourager l'innovation pédagogique, d'adapter les services de transport scolaire et de recourir aux ressources numériques.
J'ai proposé à tous les interlocuteurs concernés, notamment dans le cadre des rapports auxquels vous avez fait référence, monsieur le député, de déployer une stratégie qualitative de rebond de l'école rurale. J'en ai de multiples exemples, comme cette école que j'inaugurai la semaine dernière non loin d'ici, où se fait ce que nous préconisons pour l'ensemble de la France, à savoir le renforcement de l'attractivité par une politique de l'école rurale, le rebond de l'école pouvant entraîner le rebond démographique d'un village. C'est cette stratégie qualitative que nous souhaitons pour l'école rurale, en ne nous contentant pas d'agir sur la défensive, mais en étant aussi à l'offensive. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
Mme la présidente. Permettez-moi de vous rappeler, monsieur le ministre, que la durée de deux minutes s'impose à la réponse du Gouvernement aussi.
La parole est à Mme Agnès Thill.
Mme Agnès Thill. Force est de constater que cette année, le budget de l'éducation est en hausse, ainsi que le taux d'encadrement des élèves, que l'école primaire est la priorité – ce dont je me réjouis sincèrement – et que les salaires des enseignants en REP augmentent.
Ces dernières semaines, l'actualité de l'école s'est accélérée : prise de conscience croissante du harcèlement et des violences à l'école, formation et appui sur les fondamentaux, débat sur le voile islamique pour les accompagnatrices scolaires, suicide d'une directrice d'école. Autant de sujets qui mériteraient d'être traités individuellement, mais j'irai à l'essentiel, car nous devons être pragmatiques.
Le premier point que j'évoquerai concerne ce tragique événement que nous avons tous suivi : le suicide de Mme Christine Renon, directrice de l'école Méhul de Pantin. Un tel drame suscite des interrogations et exige des réponses ; cela ne doit pas se reproduire. N'est-il pas temps de doter les directeurs et directrices d'école d'un véritable statut ? Quelles sont les mesures prévues pour soulager leur charge de travail croissante depuis des années et pour revaloriser leur rémunération, afin de rendre plus attractive la profession de ceux qui se trouvent en première ligne dans l'instruction de nos enfants ? Rappelons qu'un professeur des écoles ayant vingt-quatre années d'ancienneté gagne 2 000 euros par mois, sans possibilité d'heures supplémentaires.
Ma seconde question porte sur l'objectif ambitieux que le Président de la République, Emmanuel Macron, dévoilait le 25 avril : parvenir, d'ici à la fin du quinquennat, c'est-à-dire en trois ans, à ce qu'aucune classe de grande section, de CP et de CE1 ne compte plus de vingt-quatre élèves. C'est l'objectif affiché de classes “à taille humaine”, dans toutes les écoles de la République. Cette annonce, au-delà de l'ambition qu'elle incarne, suscite un problème majeur : il faudra consentir un effort budgétaire considérable. Comment le Gouvernement compte-t-il financer une telle mesure ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. S'agissant des directeurs d'école, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire ici, des évolutions se produiront au retour des vacances de la Toussaint. D'abord, je réunirai le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ministériel pour faire le point sur les conditions d'exercice du métier. Ensuite, un questionnaire, conçu avec les organisations syndicales, sera envoyé à l'ensemble des directeurs d'école, afin d'obtenir des informations qualitatives. D'ores et déjà, les charges administratives ont diminué et des aides supplémentaires ont été débloquées pour améliorer les conditions de travail. Je crois qu'un certain consensus règne sur ce sujet.
Quant au plafonnement des effectifs dans les grandes sections de maternelle et les classes de CP et de CE1 dans toute la France, il commencera, je le répète, dès la rentrée de 2020, grâce à ce projet de loi de finances. La mesure sera effective dès la rentrée prochaine dans toutes les grandes sections de maternelle. L'objectif est un plein déploiement de cette disposition à la rentrée de 2021. La mise en œuvre de la mesure nécessitera par conséquent deux projets de loi de finances.
Le plafonnement est déjà effectif dans plus de la moitié des classes de CP et de CE1 depuis la rentrée de cette année. Nous piloterons cette évolution progressive au cas par cas, en fonction des constats démographiques dressés dans chaque département.
Il y aura donc trois temps : une première étape a eu lieu à la rentrée de cette année ; une deuxième, qui apparaît dans la programmation budgétaire, se déroulera à la rentrée de l'année prochaine ; enfin, la rentrée de 2021 constituera le troisième temps de la mise en œuvre de la mesure.
Source http://www.assemblee-nationale.fr, le 31 octobre 2019