Texte intégral
NICOLAS DEMORAND
Et avec vous, Léa, nous recevons ce matin dans « Le Grand entretien du 7-9 », la secrétaire d'Etat à l'Egalité femme-homme. Vos questions dans une dizaine de minutes, amis auditeurs : 01.45.24.7000, les réseaux sociaux et l'application mobile de France-Inter. Marlène SCHIAPPA bonjour.
MARLENE SCHIAPPA
Bonjour.
NICOLAS DEMORAND
Merci d'être à notre micro…
MARLENE SCHIAPPA
Merci à vous.
NICOLAS DEMORAND
A l'Assemblée nationale, démarre aujourd'hui l'examen d'un nouveau texte de la majorité qui vise à mettre en oeuvre les mesures issues du Grenelle des violences conjugales, on se souvient que le député LR, Aurélien PRADIE, avait coupé l'herbe sous le pied de la majorité en faisant voter le bracelet anti-rapprochement, la suspension de plein droit de l'autorité parentale. Alors dites-nous ce matin, Marlène SCHIAPPA, s'il y a besoin de mesures supplémentaires, et si oui, lesquelles ?
MARLENE SCHIAPPA
Plusieurs choses d'abord, on est là dans l'aboutissement concret, un des aboutissements concrets du Grenelle des violences conjugales qui a donné lieu à trois mois de consultations, d'échanges, de travail avec 11 groupes de travail thématiques. En ce qui concerne la première proposition de loi, moi, je ne vois pas les choses exactement comme ça, c'est-à-dire que quel que soit le législateur qui dépose une proposition de loi, je crois que la femme qui dispose d'un bracelet d'éloignement de son conjoint pour mieux la protéger…
NICOLAS DEMORAND
C'est positif pour elle…
MARLENE SCHIAPPA
Bien sûr, c'est positif…
NICOLAS DEMORAND
D'où que vienne la mesure…
MARLENE SCHIAPPA
Exactement, quel que soit le parti de la personne qui a déposé cette annonce, qui avait été faite par Edouard PHILIPPE, le Premier ministre. Et donc ensuite, oui, l'idée de cette proposition de loi, c'est de concrétiser des mesures qui ont été justement travaillées dans ces groupes, par exemple, la saisie des armes, vous savez dans les féminicides l'année dernière, plusieurs sont survenues alors que des femmes avaient déposé des plaintes et qu'on n'avait pas saisi les armes, qu'on ne s'était même pas posé la question de savoir si ces messieurs conservaient des armes à feu, des armes létales chez eux. Désormais, dès la plainte, on pourra saisir les armes avant même qu'il y ait une décision de justice, et ça, c'est important, ça peut sauver des vies.
LEA SALAME
Il y a la question de la levée du secret médical en cas de danger pour la femme, est-ce que vous avez tranché cette question-là, on se souvient du malaise de certains médecins qui disaient : ce n'est pas à nous de faire ça, ça va rompre le lien de confiance qu'on a avec les patientes, qu'est-ce que vous avez décidé sur la levée du secret médical ?
MARLENE SCHIAPPA
Oui, bien sûr, on a beaucoup écouté les médecins, moi, j'ai même reçu le président de l'Ordre des médecins, la ministre de la Santé a également mené ce travail, et nous, la proposition que nous faisons, que les parlementaires vont faire cet après-midi à l'Assemblée, c'est de dire que le médecin peut signaler les violences, il n'y a pas d'obligation, mais il peut le faire, et c'est sa responsabilité de le faire. Et la phrase que vous venez de dire, elle est très importante pour moi parce qu'elle est symptomatique de la manière dont on aborde les violences conjugales : le « ce n'est pas à moi de le faire », le voisin qui entend des cris : eh bien, « ce n'est pas à moi de le faire », je vais monter le son pour couvrir les cris de la dame qui hurle, et ce n'est pas à moi d'appeler la police ; certains policiers qui parfois se disent : « ce n'est pas à moi de le faire », c'est une affaire privée, c'est pour ça qu'on fait des formations, et avec Christophe CASTANER, on était à l'école de gendarmerie à Chaumont, à l'école de police, pour mettre en place 120 heures de modules contre les violences sexistes et sexuelles dès la formation initiale des forces de l'ordre. C'est la responsabilité de tout le monde…
LEA SALAME
Donc c'est aux médecins de le faire ?
MARLENE SCHIAPPA
Mais bien sûr, c'est à tout le monde. Il faut arrêter avec « ce n'est pas ma responsabilité », quelqu'un d'autre s'occupera de protéger cette femme, c'est une responsabilité de toute la société, le gouvernement fait tout ce qui est en son pouvoir, mais ne peut pas tout, tout seul, il faut qu'individuellement, on s'empare de cette protection des femmes victimes de violences conjugales.
NICOLAS DEMORAND
Marlène SCHIAPPA, l'autre grande question qui se pose aujourd'hui, qui a été relancée par l'affaire MATZNEFF, c'est celle du consentement chez les mineurs, vous aviez envisagé de fixer à 15 ans l'âge minimal en deçà duquel il y avait une présomption automatique de non-consentement, ça n'avait pas été adopté, est-ce que vous êtes prête désormais à rouvrir le débat ?
MARLENE SCHIAPPA
Alors, plusieurs choses, là encore, parce qu'il y a des choses fausses qui circulent, l'âge de 15 ans, il a bien figuré dans la loi et il a été adopté à l'unanimité. Que dit la loi de 2018, que nous avons présentée, qui a été votée à l'unanimité par tous les partis, Sénat et Assemblée nationale, elle dit que quand vous avez moins de 15 ans, c'est caractérisé par la contrainte morale que d'avoir un rapport sexuel avec un adulte, et donc c'est rattaché à la définition du viol, puisqu'en France, dans le code pénal, le viol, c'est un rapport sexuel avec pénétration obtenu sous la menace, les violences, la contrainte ou la surprise, le mot…
LEA SALAME
Est-ce que vous êtes prête à aller plus loin là ?
MARLENE SCHIAPPA
Oui. Le mot de consentement ne figure pas dans la loi, parce que le législateur a considéré qu'un consentement pouvait s'extorquer, et que cette définition était plus robuste, néanmoins, hier, j'ai confié une mission d'évaluation à la députée Alexandra LOUIS, qui avait été rapporteur de cette fois, elle doit nous dire si oui ou non, le monde de la justice s'est emparé de la loi, la loi protège mieux, mais est-ce que les décisions de justice appliquent mieux cette protection ? Elle va nous dire oui ou non, si le monde de la justice s'en est emparé, eh bien, fort bien, nous ferons davantage connaître cette loi. Si le monde de la justice, si les magistrats n'ont pas rendu davantage de décisions de justice basées sur cette loi, oui, je m'engage à rouvrir le dossier et à aller plus loin et à durcir la formulation de la loi encore…
LEA SALAME
C'est-à-dire, écrire le mot consentement, il y aurait un âge légal du consentement, vous pourriez l'écrire ?
MARLENE SCHIAPPA
Non, alors, beaucoup d'experts nous disent qu'il n'est pas souhaitable d'écrire le mot de consentement dans la loi, pourquoi…
LEA SALAME
Alors, qu'est-ce que vous pourriez écrire pour durcir…
MARLENE SCHIAPPA
Parce que, par exemple, j'ai une arme à feu sur moi, je vous menace, je vous dis : est-ce que tu es consentant, est-ce que tu veux avoir un rapport sexuel avec moi, vous dites oui, parce que vous êtes menacé par une arme, et dans un procès, il dira : mais cette personne a consenti…
LEA SALAME
Alors, qu'est-ce que vous pourriez… expliquez-moi, si vous ne voulez pas mettre le mot consentement, c'est quel mot…
NICOLAS DEMORAND
Quel mot ?
MARLENE SCHIAPPA
Eh bien, justement, c'est le travail délicat qu'on doit pouvoir faire, parce que cette loi 2018, elle n'était pas sortie d'un chapeau, nous l'avons travaillée avec des experts, avec le Conseil d'Etat, et nous sommes allés aussi loin que le Conseil d'Etat et le Conseil constitutionnel indiquaient que nous pouvions aller, maintenant, nous allons voir ce que ce rapport dit, je ne veux pas anticiper les conclusions de ce rapport, mais si ce rapport nous dit que la situation des mineurs de moins de 15 ans face aux violences sexuelles ne s'est pas améliorée, eh bien, nous trouverons des formulations encore plus dures pour les améliorer, moi, c'est vraiment la protection des victimes de violences sexuelles qui m'importe avant tout.
LEA SALAME
On parle du seuil d'âge de 13, 14 ou 15 ans, les gens ne sont pas… les experts ne sont pas d'accord sur cet âge-là, vous, qui travaillez sur ces questions-là depuis deux ans, quelle est votre intime conviction, est-ce que vous en avez une ?
MARLENE SCHIAPPA
Mais c'est 15 ans, bien sûr que j'en ai une. Et pour moi, c'est 15 ans, parce que c'est l'âge… je ne vois pas… on a mis 15 ans dans la loi, si on mettait maintenant 13 ans, ça veut dire qu'on abaisserait le seuil, puisque ce seuil existe, encore une fois, beaucoup de fausses informations ont circulé, y compris sur les réseaux sociaux, des centaines de milliers de pages partageant en disant qu'il n'y a pas d'âge, il y a un âge, et cet âge est 15 ans, et je le répète, parce que c'est un message adressé aussi aux pédocriminels qui, lorsqu'ils voient ces fausses informations, se disent : ah ben, j'ai le droit, la loi française ne me l'interdit pas, si, la loi française interdit à un adulte d'avoir un rapport sexuel avec un mineur de moins de 15 ans, c'est interdit, c'est puni par la loi d'amendes, d'années de prison, c'est sanctionné, c'est interdit, il faut le redire.
NICOLAS DEMORAND
Marlène SCHIAPPA, le Parquet de Paris a ouvert contre Gabriel MATZNEFF une enquête préliminaire pour viols commis sur mineur de moins de 15 ans. Il a fallu donc la publication d'un livre pour que la justice se saisisse de l'affaire, alors que Gabriel MATZNEFF racontait tout en détail dans son journal depuis 30 ans, est-ce que vous reconnaissez une erreur de la justice, un dysfonctionnement majeur ?
MARLENE SCHIAPPA
Bien sûr, un dysfonctionnement majeur de toute la société, et vous savez, moi, j'écoute France Inter, tous les matins, et il y a une interview que j'ai particulièrement appréciée, c'est celle de Christine ANGOT, qui est venue sur votre antenne et qui a posé cette question que je trouvais glaçante et très juste : faut-il écrire un livre pour que la justice s'intéresse aux violences sexuelles ? Elle a raison souvent, on dit : les auteurs de violences sexuelles puissants sont à l'abri. Ce n'est pas la question de la puissance de l'auteur, c'est la question de la puissance de la victime, quand vous êtes une enfant ou quand vous êtes anonyme ou quand vous êtes dans une position d'infériorité hiérarchique, eh bien, vous avez toutes les peines du monde à obtenir justice, mais quand vous obtenez une forme de puissance, et c'est le cas de Vanessa SPRINGORA, qui a obtenu une légitimité dans le monde de l'édition, supérieure à celle de son agresseur, elle a pu écrire, elle a pu parler, être crue, et la justice a ouvert une enquête, mais je salue le fait que la justice ait ouvert une enquête, mais des MATZNEFF, il y en a partout, il y en a dans tous les milieux, ce n'est pas seulement dans le milieu des intellectuels, des écrivains, il y en a partout, et il faut, encore une fois, les dénoncer, il faut appeler le 17, il fallait sur la plateforme « arrêtonslesviolences.gouv.fr », signaler à la police, à la gendarmerie ce qui se passe pour protéger les enfants et les femmes.
LEA SALAME
Vous dites protéger les enfants et les femmes, c'est intéressant, des prédateurs, il y en a partout, et vous avez raison, la question des prédatrices, Olivier ASSAYAS, dans un texte très fort, publié dans Le Point, raconte qu'il a été sous l'emprise de sa professeur de français quand il avait 15 ans, qu'elle l'a initié au sexe, qu'il y a eu traumatisme, et il pose la question : l'emprise serait-elle par essence masculine, lui dit non, il dit que les femmes aussi peuvent mettre les hommes et les enfants sous emprise, qu'est-ce que vous en pensez ?
MARLENE SCHIAPPA
Bien sûr, il a raison, mais c'est pour l'ensemble des violences sexistes et sexuelles, ce qu'on constate, c'est qu'il y a beaucoup de pays d'ailleurs qui les appellent violences de genre, le terme de diplomatie dans les instances multilatérales, c'est violences de genre, parce que très souvent, c'est l'homme qui est du côté de la personne violente, et c'est la femme, parce que c'est culturellement, Françoise HERITIER, ça, l'expliquait très bien, et Michelle PERROT aussi, plus récemment, culturellement, c'est comme ça que les répartitions se sont faites, néanmoins, ça ne veut pas dire qu'il n'y ait pas d'hommes victimes de violences sexistes et sexuelles, et d'ailleurs, en France, il n'y a pas de numéro de téléphone, il n'y a pas d'association connue, financée par l'Etat qui s'intéresse aux hommes victimes de violences sexuelles, nous allons bientôt lancer d'ailleurs un appel sur ce sujet particulièrement…
LEA SALAME
J'ai dit Olivier, mais c'est Michka ASSAYAS qui a écrit ce texte très fort. Vous lui conseillez d'aller en justice par exemple ?
MARLENE SCHIAPPA
Moi, je n'ai pas de conseil à donner à qui que ce soit, et je suis très opposée à l'injonction à porter plainte, mon rôle en tant que pouvoir public, membre du gouvernement, c'est permettre la plainte, donc on forme les forces de l'ordre, on crée une plateforme de dialogue avec les policiers, disponibles 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, on finance les numéros d'écoute, on libère cette écoute, mais ensuite, c'est le choix de chacun d'aller déposer plainte ou non, je ne crois pas qu'il faille blâmer en plus les victimes en leur disant : vous êtes obligés de porter plainte, c'est une épreuve parfois de porter plainte, il faut aussi se sentir sera prêt, pour ne pas avoir un deuxième traumatisme. Et donc, on fait tout ce qu'on peut pour que ce ne soit pas un deuxième traumatisme, mais à la fin, c'est un choix individuel.
NICOLAS DEMORAND
Je voudrais vous lire, Marlène SCHIAPPA, un extrait d'une tribune publiée par l'académicien Dominique FERNANDEZ, dans Le Monde, c'était il y a une quinzaine de jours, je le cite : répugnante est cette période où nous sommes entrés, cette chasse aux sorcières qui permet de ruiner un écrivain ne correspondant plus aux nouveaux critères de respectabilité, il parle, là, de Gabriel MATZNEFF. Les auteurs devront présenter des papiers en règle, PASOLINI fut renvoyé de l'école où il enseignait en Italie dans le Frioul et obligé de s'enfuir à Rome parce qu'il avait entraîné des collégiens derrière des buissons. Va-t-on interdire ses livres et ses films ? Le Caravage a peint dans une pose impudique son amant tout nu de 12 ans, le musée de Berlin, pour contenter les familles, va-t-il mettre au rebut l'amour victorieux admiré par des millions de visiteurs, que la curée n'épargne aucun chef-d'oeuvre, dit-il, quelle est votre réaction à un texte de ce genre ?
MARLENE SCHIAPPA
Je trouve qu'il y a beaucoup de confusions, beaucoup de confusions, d'abord, entre deux mouvements, le mouvement en France qui n'appelle pas ou très minoritairement à cette forme de censure, et le mouvement américain, où là, on a effectivement, américain ou d'ailleurs dans certains autres pays du monde, dans lesquels on appelle à la censure des œuvres d'art, personne en France n'a demandé qu'on censure l'enlèvement des Sabines ou qu'on couvre les RUBENS. Ce n'est pas la question. Le problème de MATZNEFF, ce n'est pas ce qu'il écrit, c'est ce qu'il fait, un écrivain, il peut écrire tout ce qu'il veut, c'est le propre de l'écrivain, quelqu'un qui écrit des romans de la Série Noire, en écrivant, en expliquant qu'il est un tueur en série, qu'il a tué des gens, etc., on ne va évidemment pas censurer ses oeuvres, mais en revanche, la question qui se pose, c'est ce que font ces personnes, et il ne s'agit pas de morale, vous savez, comme disait NIETZSCHE dans : Par-delà le bien et le mal, il n'y a pas de phénomènes moraux, il n'y a qu'une interprétation morale des phénomènes, donc chacun a une interprétation de la morale, là il s'agit simplement de droit et de respect. A l'époque de MATZNEFF, il était déjà interdit d'avoir des rapports sexuels avec des enfants.
LEA SALAME
André GIDE, il écrivait et il faisait aussi, il en parle Dominique FERNANDEZ, André GIDE qui allait en Algérie à la chasse, à la chasse, je cite, des petits arabes. Il écrit toujours, à propos de GIDE : l'Etat n'était pas si prude, il y a encore trois ans, puisque le ministre de l'Education nationale mettait au programme en terminale littéraire, « Les faux monnayeurs », roman ouvertement pédérastique, ce ministre devra-t-il offrir sa démission ? Plus sérieusement, est-ce qu'il y a une prescription pour GIDE et pas pour MATZNEFF ?
MARLENE SCHIAPPA
Mais je crois que là encore, on confond plusieurs choses, l'idée, ce n'est pas de censurer les écrits d'André GIDE, l'idée, ce n'est pas de dire : plus personne ne doit aller voir Othello, plus personne ne doit jouer ou aller voir la Traviata, qui sont des pièces dans lesquelles on peut interroger la place de la femme, et c'est un euphémisme, donc idée n'est pas d'aller vers une censure des oeuvres pour ce que les gens ont écrit. L'idée, c'est simplement de…
LEA SALAME
Celle de MATZNEFF, si, par contre…
MARLENE SCHIAPPA
Non, l'idée, c'est…
LEA SALAME
Eh bien, si, puisque Gallimard renonce à publier son journal…
MARLENE SCHIAPPA
Mais écoutez, ça, c'est le choix de Gallimard, moi, je n'ai jamais appelé à la censure de MATZNEFF, et Vanessa SPRINGORA, pour ceux qui ont lu son livre, « Le Consentement », n'appelle pas non plus à la censure, elle explique très clairement qu'il est possible pour un éditeur de publier des livres en mettant un avertissement, en disant par exemple : attention, ce livre fait l'apologie de tel ou tel crime, ou attention, ce qui est décrit ici est interdit par la loi, il faut protéger les enfants, les violences sexuelles ne sont pas tolérées, c'est très simple de mettre un avertissement à l'entrée d'un livre…
NICOLAS DEMORAND
Y compris dans des romans et dans des oeuvres de fiction, c'est ça ce que vous dites ?
MARLENE SCHIAPPA
Non, pas forcément, je dis qu'il y a…
NICOLAS DEMORAND
Non, mais y compris ?
MARLENE SCHIAPPA
Non, vous savez, moi, je ne suis pas du tout… j'écris des livres moi-même, je ne suis pas du tout pro-censure, et je pense que…
NICOLAS DEMORAND
Non, mais là, on parle d'un avertissement, c'est vous qui parlez d'un avertissement…
MARLENE SCHIAPPA
Non, ce n'est pas moi qui en parle, c'est Vanessa SPRINGORA, dans un cas très particulier, c'est-à-dire, un cas de journaux intimes d'un homme qui dit : je n'écris pas une fiction, qui dit : c'est mon journal intime, et j'ai violé des petits Philippins, voilà, et c'était très bien, et j'assume de le faire, eh bien, Vanessa SPRINGORA, elle propose, non pas la censure, mais un avertissement disant à l'entrée de ce livre : ce qui est là est une apologie du crime, tout simplement, ce n'est pas très difficile et elle-même l'explique très bien.
LEA SALAME
Une question sur le cyber harcèlement, Marlène SCHIAPPA, qu'est-ce que vous avez pensé de ce qui s'est passé avec la jeune Mila, 16 ans, menacée de mort sur les réseaux sociaux parce qu'elle a qualifié l'islam de religion de haine, parce qu'elle a insulté l'islam sur Instagram, le responsable du Conseil français du culte musulman a dit sur Sud Radio : elle l'a cherché, elle assume les propos qu'elle a tenus, je ne peux pas les accepter. Une réaction ?
MARLENE SCHIAPPA
Plusieurs choses d'abord sur le harcèlement de la jeune Mila, j'étais évidemment comme tout le monde très choquée, et je lui ai apporté mon soutien non pas en faisant un tweet, mais en faisant contacter sa famille directement, et sa famille nous a fait part de leur souhait, d'abord, 1°) : de ne plus voir sa photo et sa vidéo diffusées sur les réseaux sociaux, et donc j'ai adressé un message à la presse en leur demandant, en privé, en interne de ne plus le faire, si c'était possible, pour la protéger, elle. Et deuxième chose, il nous a dit qu'il ne voulait pas de récupération politique d'aucune sorte, c'est la raison pour laquelle je ne me suis pas exprimée plus que ça, mais je lui ai évidemment apporté mon soutien, et je me suis assurée auprès de la préfecture que toutes les mesures de protection suite à sa plainte aient bien été prises, donc j'ai préféré agir dans le respect de son souhait. En ce qui concerne…
LEA SALAME
Abdallah ZEKRI, elle l'a cherché, elle assume…
MARLENE SCHIAPPA
Alors, en ce qui concerne ses propos moi, je trouve que ce sont des propos criminels. Ce sont des propos coupables, et je me bats contre cette idée selon laquelle une femme, une jeune fille, en l'occurrence, mais qui que ce soit, qui serait victime de violences, de cyber harcèlement, ce serait parce que cette personne l'aurait cherché. Je trouve ses propos indignes, ils sont indignes d'un responsable qui est un leader d'opinion et qui a une parole dans le débat public, et je rappelle que le cyber-harcèlement en meute, depuis la loi de 2018, que j'ai fait voter, est condamné, c'est un délit de s'adonner à du cyber harcèlement en meute.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 29 janvier 2020