Interview de M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, à CNews le 5 septembre 2019, sur les candidatures à l'élection municipale de 2020 à Paris et la réforme des retraites.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Gabriel Attal - Secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

Média : CNews

Texte intégral

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Bienvenue Gabriel ATTAL. Bonjour.

GABRIEL ATTAL
Bonjour.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
J'ai vérifié, aujourd'hui ce n'est pas l'anniversaire d'Anne HIDALGO. Pourquoi VILLANI et GRIVEAUX lui font ce beau cadeau : une victoire à Paris ?

GABRIEL ATTAL
Ecoutez, il n'y a pas de victoire d'Anne HIDALGO pour l'instant. On part pour conquérir Paris et pour gagner Paris.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais vous savez ce que disait et vous vous rappelez ce que disait Richard FERRAND, président de l'Assemblée nationale : « La division égale l'échec. »

GABRIEL ATTAL
Oui, c'est vrai, bien sûr.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et donc si c'est l'échec, c'est la victoire de Madame HIDALGO.

GABRIEL ATTAL
Ce qu'on a vu hier, c'est l'image d'une division effectivement. Et pour moi c'est un immense regret, c'est vraiment dommage qu'on soit dans cette situation. Maintenant moi ce que je souhaite, c'est que dans les semaines qui viennent, les mois qui viennent, la discussion puisse se poursuivre et qu'à la fin, ils ne soient pas deux sur la ligne de départ, la vraie ligne de départ de l'élection mais qu'on puisse aller vers un rassemblement.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est la politique comme avant. C'est-à-dire l'orgueil blessé, les égos, les ambitions personnelles. Comme avant.

GABRIEL ATTAL
Voilà. Je constate comme vous cette situation. Encore une fois, on a un candidat qui a été investi par la commission nationale d'investiture, Benjamin GRIVEAUX, qui a entamé un rassemblement. Les autres candidats, notamment Mounir MAHJOUBI qui briguait aussi l'investiture, l'ont rejoint. Il a été rejoint par des formations politiques, des personnalités qui ne font pas partie de la majorité nationale à Paris. L'UDI, la maire du IXème arrondissement.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais Cédric VILLANI dit lui aussi qu'il rassemble. Et puis il est mathématicien, il a fait ses calculs et il pense qu'il a toutes les chances pour Paris.

GABRIEL ATTAL
Ecoutez, moi je pense que pour avoir les chances pour Paris…

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Qu'il peut déclencher un mouvement avec lui.

GABRIEL ATTAL
Pour avoir les chances pour Paris, il faut rassembler sa famille et aller au-delà de sa famille politique. Benjamin GRIVEAUX a rassemblé sa famille politique à l'exception de Cédric VILLANI qui a décidé personnellement de se lancer. Il rassemble au-delà. Encore une fois, la maire du IXème arrondissement qui est une personnalité importante…

JEAN-PIERRE ELKABBACH
On ne va pas faire la liste.

GABRIEL ATTAL
Oui, parce qu'elle est nombreuse.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais qu'est-ce que ça veut dire de la part de VILLANI ? Comment se fait-il qu'un Macroniste puisse s'attaquer à un Macroniste et qu'il n'y ait pas de conséquences ?

GABRIEL ATTAL
Vous savez, moi je n'ai pas la réponse. C'est une décision qu'il a prise. Je comprends qu'il ait été frustré et déçu de la décision de la commission d'investiture. On l'a vu, il l'a dit d'ailleurs avant l'été. Il a pris cette décision-là, moi je ne peux que la regretter. Parce qu'encore une fois, vous avez rappelé les propos de Richard FERRAND tout à l'heure : la division, ça ne peut jamais permettre de gagner.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
On va l'écouter, on va dire ce qu'il croit représenter. Cédric VILLANI.

CEDRIC VILLANI, CANDIDAT A LA MAIRIE DE PARIS
Avant l'été, j'ai participé à un processus de désignation dont j'ai pu constater l'inadaptation pour faire éclore les projets, pour laisser s'exprimer l'indispensable liberté. J'ai pu mesurer les limites du fonctionnement d'appareils politiques que nous dénoncions il y a peu. Vous avez été si nombreux tous les jours à venir m'encourager, vous m'avez dit : « Vous êtes libre, allez-y. » Je veux être le premier maire véritablement écologiste de Paris.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il a de la conviction et de l'ambition.

GABRIEL ATTAL
A l'évidence oui. Vous savez, moi Cédric VILLANI, j'ai partagé les bancs à l'Assemblée nationale avec lui pendant un an et demi quand j'étais parlementaire avant d'entrer au gouvernement. C'est quelqu'un qui est dans sa première expérience politique comme moi d'ailleurs et qui se sent…

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il y a des jours où je vous ai connu moins embarrassé mais c'est l'embarras général de ceux qui sont la Macronie.

GABRIEL ATTAL
Mais on ne peut pas dire que ce soit…

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Pardon, ça ne peut pas dire que… ?

GABRIEL ATTAL
On ne peut pas dire que ce soit une très bonne nouvelle. Je ne vais pas vous mentir. C'est sûr que c'est…

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et pourquoi le président de la République n'a pas cherché à le traiter, à le chouchouter, à le dissuader en tout cas.

GABRIEL ATTAL
Mais parce que le président de la République, il est président de la République. Ce n'est pas son rôle, ce n'est pas comme ça qu'il le considère, d'intervenir dans des enjeux internes d'un parti politique.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc il le demande à Stéphane (sic) GUERINI… à Stanislas GUERINI.

GABRIEL ATTAL
Et si le président de la République intervenait dans les investitures de la République en Marche, on trouverait partout des gens pour le lui reprocher et pour dire qu'il a plus important à faire. La réalité c'est que c'est le cas et ce n'est pas comme ça qu'il considère son rôle de président.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous êtes en train de nous dire qu'il n'en parle pas du tout avec Stanislas GUERINI.

GABRIEL ATTAL
Je ne dis pas ça.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il ne s'en mêle pas.

GABRIEL ATTAL
Non. Ce que je dis par ailleurs, c'est que, vous savez, la République en Marche on est un mouvement politique nouveau. Ça fait deux ans qu'on existe. On a pour ambition de se structurer et de devenir une formation politique installée dans le paysage politique. Si on va chercher en permanence les réponses à nos investitures, à nos difficultés ailleurs, on n'arrivera pas à se structurer comme formation politique.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Normalement, je n'ai pas envie d'en parler tellement parce que c'est un événement qui est peut-être important mais qui est peut-être petit, mais qui est significatif de ce qui est en train de se passer. Est-ce que vous allez le gronder, lui tirer les oreilles, l'exclure ?

GABRIEL ATTAL
Cédric VILLANI ne sera pas exclu de la République en Marche. Benjamin GRIVEAUX a dit qu'il ne souhaitait pas qu'il soit exclu et moi j'ai trouvé que cette position de Benjamin GRIVEAUX l'honore et, par ailleurs, elle le met déjà dans les habits d'un maire rassembleur. C'est ça aussi savoir être rassembleur. C'est ne pas…

JEAN-PIERRE ELKABBACH
On ne fait pas de Cédric VILLANI un martyr - on ne sait jamais, il peut servir encore - mais il n'y a pas de sanction.

GABRIEL ATTAL
Non, il n'y a pas de sanctions qui sont prévues. Ce qui est certain, c'est qu'en prenant cette décision, Cédric VILLANI se met quand même un peu en marge de la République en Marche. Il ne respecte pas les instances. Je l'ai entendu dire dans le son que vous avez diffusé qu'il contestait le mode de désignation. Mais c'est le même mode de désignation qui a été utilisé pour les députés et il en faisait partie.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais ça veut dire qu'il s'en va tout seul, qu'il s'exclut tout seul.

GABRIEL ATTAL
Non, je ne dis pas ça. Je dis qu'il se met un peu en marge mais nous, en tout cas, on ne l'exclut pas et ce n'est pas ce que Benjamin GRIVEAUX souhaite.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et s'il y avait d'autres cas comme ça de dissidence ? Si par exemple à Lyon, parce qu'on n'arrive pas à trancher entre Gérard COLLOMB et David KIMELFELD, il y avait deux candidats. Si dans d'autres villes, il y avait aussi de la dissidence, on laisse faire ?

GABRIEL ATTAL
Je vais vous dire ce qui va se passer. On investit avec la commission d'investiture dans chaque ville une tête de liste, un premier démarcheur qui est chargé de porter la candidature d'En Marche. S'il si devait y avoir des dissidences, c'est ce premier démarcheur, cette tête de liste qui dira s'il considère que les personnes qui sont en dissidence doivent être exclues ou pas de la République en Marche. A Paris, Benjamin GRIVEAUX a dit qu'il ne souhaitait pas que Cédric VILLANI exclu.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est la nouvelle ligne.

GABRIEL ATTAL
C'est comme ça qu'on va avancer. On avait un bureau exécutif d'En Marche hier et c'est la discussion qu'on a eue.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Est-ce que vous ne croyez pas que l'ombre d'Edouard PHILIPPE est en train tout doucement et malgré lui de rôder autour de Paris, de planer ?

GABRIEL ATTAL
Je vois beaucoup d'articles, de journalistes qui écrivent ça. Moi je ne crois pas du tout. Le Premier ministre, il est à fond à sa tâche. On a eu un séminaire gouvernemental hier.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
On va en parler, on va en parler.

GABRIEL ATTAL
On a beaucoup parlé des dossiers à venir.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Là, vous allez à la fin de la semaine, le week-end, à Bordeaux.

GABRIEL ATTAL
Oui.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il y a une grande réunion de votre parti. Il va y avoir « Villani Paris, Villani zizanie », ils vont venir tous les deux d'ailleurs ?

GABRIEL ATTAL
Je ne sais pas du tout. C'est une bonne question.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous leur demandez de venir tous les deux ?

GABRIEL ATTAL
Ils font ce qu'ils veulent. Ils sont aussi en campagne donc moi j'entends parfaitement cela.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Votre mouvement En Marche a été créé pour conquérir le pouvoir. Vous avez le pouvoir. Est-ce que vous pouvez devenir un parti politique comme un autre ?

GABRIEL ATTAL
Mais c'est la vraie question et je pense que ça va être une vraie question du campus qui aura lieu ce week-end. C'est vrai que la République en Marche, c'est un mouvement qui a été créée, qui a été organisé, qui a été structuré avec pour objectif de gagner l'élection présidentielle et d'appliquer un projet qui est celui d'Emmanuel MACRON. Maintenant, il faut qu'on devienne une formation politique structurante dans la vie politique française, et donc ça fait partie de notre travail mais ça ne se fait pas en un jour forcément. Ça se fait petit à petit. Ça fait deux qu'on est aux responsabilités.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc c'est vers ça que vous allez.

GABRIEL ATTAL
Oui, bien sûr. C'est vers ça qu'on va.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et donc, il faut être présent dans toutes les élections, qu'elles soient municipales, législatives. Donc pour la rentrée, il y a eu en effet le séminaire dont vous avez parlé. Quels ont été les maîtres-mots ou j'ai envie de dire les messages du Maître ?

GABRIEL ATTAL
C'est vraiment ce virage en termes de méthodes qui fait suite au Grand débat national et au mouvement des gilets jaunes.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Comment vous le définissez ?

GABRIEL ATTAL
Je le définirai en disant que…

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Changement de méthode ?

GABRIEL ATTAL
Pendant deux ans, on a réformé pour les Français et que, là, on a l'ambition de réformer avec eux. Et ce n'est pas un slogan. Ça veut dire que ce qui s'est passé avec le mouvement des gilets jaunes et ce qu'on a perçu avec le Grand débat national, c'est qu'il y a des Français qui ont envie de participer concrètement aux politiques publiques. Qui ont envie qu'on ouvre grand les portes, les fenêtres de la maison pour qu'ils puissent rentrer et qu'ils puissent y participer.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Là, vous n'aviez pas compris alors.

GABRIEL ATTAL
Insuffisamment en tout cas. Peut-être qu'on a eu des initiatives pour essayer d'y répondre.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc il y a eu des malentendus.

GABRIEL ATTAL
Oui. Je pense que…

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Maintenant, on va essayer de corriger.

GABRIEL ATTAL
Exactement. On change de méthode.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais dire : écouter, concerter, consulter etc, en fait est-ce que c'est pour mieux réaliser des réformes – on démine, on démine, on démine - ou pour qu'elles n'aient pas lieu ? Qu'elles soient édulcorées et puis bazardées ?

GABRIEL ATTAL
Mais c'est pour qu'elles aient lieu. On a vu ce que ça donnait, une réforme, qu'on voulait appliquer rapidement parfois sans suffisamment consulter. La taxe carbone, c'est quand même un bon exemple et le mouvement des gilets jaunes. Résultat, il n'y a pas eu de réforme. Si on veut pouvoir aboutir sur des grands chantiers structurants, il faut le faire avec les Français, avec les partenaires sociaux, les syndicats qu'on a peut-être insuffisamment aussi pendant ces deux premières années accompagné avec nous sur ces sujets. C'est ce qui s'entame là sur la réforme des retraites mais c'est ce qui s'entame aussi sur la question de la transition écologique. A la fin du mois, il y a cent cinquante citoyens tirés au sort qui vont participer à une Convention citoyenne pour définir avec nous des solutions sur la transition énergétique, l'écologie et c'est comme ça qu'on entend avancer maintenant.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Oui, et pour la réforme des retraites, là dans quelques minutes le Premier ministre va recevoir à tour de rôle les syndicats etc, à la fois pour leur donner peut-être le calendrier et en même temps les écouter. Et on a nommé celui qui est le négociateur le plus compétent, le plus respecté y compris par les syndicats Jean-Paul DELEVOYE dans le gouvernement. Est-ce que c'est pour, là encore, calmer les réformes, faire attendre ou vraiment faire cette réforme ? Parce que vous changez de calendrier. Vous nous dites : il y a une consultation qui commence aujourd'hui. Mais il y a eu dix-huit mois de consultations. Donc c'est pour la reporter ? La noyer dans le temps ?

GABRIEL ATTAL
Non. Non, non, c'est vraiment deux étapes différentes. Jean-Paul DELEVOYE, il était Haut-commissaire en dehors du gouvernement donc il avait un rôle technique et il a eu des discussions avec les responsables techniques des retraites de chacun des syndicats. Il a fait des préconisations techniques. Maintenant on passe dans une phase politique où il y a le Premier ministre qui voit les patrons des centrales syndicales qui vont dire comment elles ont perçu les propositions de Jean-Paul DELEVOYE. Ils vont discuter d'un calendrier pour cette consultation, et là maintenant on va avancer et le Premier ministre l'a dit, je crois, il y a quelques jours mais il le précisera la semaine prochaine. C'est une question de mois donc on va avancer dans les prochains mois à la fois avec les partenaires sociaux…

JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est-à-dire dans le courant de 2020. A la fin de 2020.

GABRIEL ATTAL
Oui. Je crois que c'est ce qu'il a… Enfin, il a dit « dans les prochains mois », donc ça va aller assez vite.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Le séminaire du gouvernement du gouvernement a eu lieu à l'Elysée et pas à Matignon. Quelles indications ça donne sur les rapports ou les responsabilités au sommet de l'Etat ?

GABRIEL ATTAL
Il a eu lieu à l'Elysée parce que toutes les semaines, vous avez le conseil des ministres à l'Elysée et que ça se faisait dans un format de conseil des ministres. Mais ce que ça donne comme indication, c'est que le président de la République donne le cap. Il nous donne des objectifs à atteindre et le Premier ministre qui gouverne, il est chargé de faire en sorte que ces objectifs soient atteints.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ça veut dire que l'on revient à une formule classique du fonctionnement des institutions gaullistes de la Vème République. Le président est là en haut, il inspire, et le Premier ministre gouverne.

GABRIEL ATTAL
Oui. C'est ce qu'a dit le président de la République aussi dans sa conférence de presse après le Grand débat national.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et ça va durer longtemps ?

GABRIEL ATTAL
Ecoutez…

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Oui, il y a les tensions et les habitudes personnelles. J'ai envie de vous demander, qu'est-ce que vous pensez de la douleur des 5 800 fonctionnaires de Bercy qui vont disparaître dans les trois ans ? Et vous aviez déjà pris des mesures depuis 2017, c'est-à-dire plus de 10 000. Les syndicats sont en colère. Est-ce que vous pouvez renoncer à cette mesure ? Même en étant profane on peut dire : « Ce n'est pas possible », mais si vous ne renoncez pas, est-ce que vous pouvez réduire le nombre des 5 800 départs ?

GABRIEL ATTAL
Ecoutez, ça c'est vraiment Gérald DARMANIN et Olivier DUSSOPT qui sont en charge. Moi, je vais vous dire ce que je comprends de ces décisions. On a fait des réformes qui sont structurelles et que les Français ont vu. Le prélèvement à la source par exemple qui change totalement la manière de recouvrer l'impôt. On a supprimé un certain nombre de petites taxes. Vous savez, ces petites taxes qui coûtaient presque plus cher à collecter que ce qu'elles rapportaient en moyens financiers. Il y en a plusieurs centaines qui sont supprimées. Forcément quand vous prenez ces décisions, ça nécessite moins de personnel dans l'administration de Bercy pour recouvrer l'impôt, et donc c'est la conséquence logique de ça. Maintenant il faut donner de la prévisibilité, je crois que c'est ce qui a été fait puisqu'on parle sur plusieurs années, et il faut accompagner les transitions, et c'est ce que vont faire Gérald DARMANIN et Olivier DUSSOPT.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais en même temps…

GABRIEL ATTAL
Vous savez…

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Allez-y.

GABRIEL ATTAL
Non mais je pense que c'est aussi un des enseignements du mouvement des gilets jaunes et de ce que le président de la République a dit dans sa conférence de presse. On ne se donne pas un objectif de nombre de fonctionnaires dont on supprime les postes et on regarde ensuite comment on l'atteint. On fait des réformes et on voit ce que ça peut produire comme économies. C'est ce qui s'est passé.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais le gouvernement aujourd'hui doit dire la vérité.

GABRIEL ATTAL
Oui.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Puisqu'il y a les conséquences des algorithmes, de l'intelligence artificielle, de tout le développement de la révolution numérique qui va toucher, on dit souvent impacter, tous les métiers, toutes les professions.

GABRIEL ATTAL
Bien sûr.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc autant dire la vérité même si parfois elle est douloureuse.

GABRIEL ATTAL
Oui.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Qu'est-ce que vous allez faire pour réduire le mouvement de grève dans les urgences ? Parce que vous avez vu que les syndicats, les personnels hospitaliers sont mécontents. Est-ce qu'il faut les augmenter encore un peu ?

GABRIEL ATTAL
C'est un sujet qui est très complexe. D'ailleurs eux-mêmes le disent. Ça fait des années que ça dure.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais gouverner, c'est réduire des complexités.

GABRIEL ATTAL
Oui, bien sûr.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Les résoudre. Essayer de les résoudre.

GABRIEL ATTAL
Oui. Et ce qui est très complexe, c'est que c'est un enjeu de réforme du système lui-même. Le problème et ce que disent les soignants des urgences, c'est qu'il y a beaucoup de personnes qui viennent aux urgences. On a un système qui s'ankylose parfois et qu'il faut mieux organiser les liens entre les urgences, entre l'hôpital et la médecine de ville. Tout de suite quand on se lance là-dedans, ça fait assez technique. Mais c'est ça qu'on essaye de faire et c'est ça que porte Agnès BUZYN. Encore une fois, ça ne se fait pas en un jour.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est une réforme ou une révolution des moeurs dans le monde de la santé et médical.

GABRIEL ATTAL
Oui, bien sûr.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
La première expérience des jeunes du service national, vous avez bien conduit le service national universel, a plutôt réussi et elle est bien perçue. Est-ce qu'elle va continuer ? Est-ce qu'elle aura une suite ?

GABRIEL ATTAL
Oui, bien sûr. Dès l'année prochaine, on va commencer la montée en puissance du dispositif. Là c'était une phase pilote pour tester nos organisations. On va commencer la montée en puissance et vous aurez plusieurs dizaines de milliers de jeunes qui feront leur service national en 2020.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et qu'est-ce que vous allez corriger ou donner comme nouvelle mission, peut-être même sur l'écologie, sur d'autres choses ? Le bien-être animal, j'ai lu dans vos documents que vous vous y intéressez beaucoup.

GABRIEL ATTAL
Oui, absolument mais je m'y intéresse beaucoup parce que les jeunes aussi s'y intéressent beaucoup. J'attends un rapport de scientifiques sur le service national universel pour la fin de la semaine. Ils sont venus regarder dans les centres comment ça se passait, ils ont échangé avec les jeunes donc j'en tirerai les conséquences. Mais d'ores et déjà ce qui est certain, c'est qu'il y aura des adaptations à faire sur l'agenda et sur la journée des jeunes. Ils étaient quand même assez fatigués, c'était très dense. Et puis ensuite sur le fond, sur les contenus, c'est vrai qu'on peut aller davantage vers ce qu'attendent les jeunes. Vous avez parlé de l'environnement : oui, il faut davantage de missions d'intérêt général et d'engagement pour les jeunes en matière d'environnement. Sur le bien-être animal aussi, c'est une cause générationnelle qui rassemble les jeunes. Il faut qu'on avance, il faut que les jeunes puissent participer. Il faut aussi que le gouvernement y travaille et dans le courant du mois d'octobre, le gouvernement présentera des mesures sur la question du bien-être animal.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
A la fois Didier GUILLAUME et la ministre de l'Ecologie.

GABRIEL ATTAL
Absolument.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ce sont des mesures que vous attendez. Mais la défense du bien-être animal, qui peut être contre la maltraitance ou la souffrance des animaux ? Il faut être fou pour ne pas les combattre. Mais seulement est-ce qu'il faut répéter que la priorité reste la cause de l'homme ? Parce qu'on est en train d'oublier qu'il y a peut-être des hiérarchies, en tout cas chez les militants intégristes. Je ne sais pas si vous avez vu ce qui s'est passé en Espagne : il y a une vidéo qui tourne partout avec beaucoup d'influence. Des Vegans veulent séparer les poules des coqs pour éviter qu'elles ne soient violées. Regardez.

(Diffusion de la vidéo)

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et les responsables Vegans ont dénoncé ces mesures, ces images, en disant les coqs veulent violer les poules, il faut donc les séparer, mais on peut défendre les animaux et éviter le ridicule…

GABRIEL ATTAL
Oui je pense que… enfin on voit toujours des actions et des prises de position qui sont un peu extrêmes, mais il y a quand même des enjeux sur lesquels on peut avancer. Vous parlez des poules et des coqs, il y a un enjeu aujourd'hui, en tout cas moi c'est quelque chose que me remontent beaucoup les jeunes, c'est la question du broyage des poussins mâles. Vous savez qu'aujourd'hui, dans un certain nombre d'élevages, une fois que l'oeuf a éclos, et qu'on a un poussin mâle, il arrive qu'ils soient broyés, et vous avez aujourd'hui des marques, des entreprises, qui s'engagent, il y a une entreprise française, par exemple, qui s'appelle Poulehouse, qui a importé une technique allemande pour pratiquer ce qu'on appelle un « sexage » des oeufs, c'est-à-dire avant que l'oeuf n'éclot, on regarde si c'est mâle ou femelle, ce qui permet de prendre ses décisions en amont. Voilà, c'est aussi vers cette transition-là qu'il faut aller.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Puis les lapins, puis les animaux, tous les animaux, c'est vrai. Je comprends pourquoi L214, qui lance une forme de liste de la terreur, et qui classe désormais les hommes politiques, vous considère comme un homme politique qui défend les animaux. Mais, est-ce que vous allez tous vivre avec la peur, d'être mal classés pour les prochaines élections municipales ?

GABRIEL ATTAL
Je ne vis pas avec la peur du tout. Moi, vous savez, j'étais parlementaire il y a encore 1 an, et c'est vrai que j'avais défendu des amendements qui vont dans le sens du bien-être animal. Je pense qu'on peut évoluer dans notre mode de consommation, notre mode de production, pour faire des progrès à ce niveau-là. Encore une fois, il faut le faire avec les agriculteurs, il ne faut pas le faire contre les agriculteurs, il ne faut pas le faire contre les consommateurs, et moi ce qui me gêne avec un certain nombre de mouvements c'est ça, c'est finalement, c'est ces anathèmes en permanence contre les agriculteurs, contre les bouchers, contre ceux qui mangent de la viande, je ne suis pas sûr que c'est comme ça qu'on arrivera à avancer.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et pas de recours à la violence dans ces cas-là.

GABRIEL ATTAL
Absolument.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Une question internationale. Vous avez vu ce qui se passe à Londres, les malheurs de Boris JOHNSON, trois échecs cinglants et publics en même pas 2 jours. Il se croyait invisible, on vient de lui montrer, il découvre qu'il ne l'est pas. Est-ce que la solution pour le Brexit peut, ou va entraîner des conséquences pour le Royaume-Uni, peut-être pour l'Europe, est-ce qu'on peut lui accorder encore un nouveau délai, pour le Brexit, à Monsieur JOHNSON ?

GABRIEL ATTAL
Ecoutez, ce n'est évidemment pas moi qui décrète ça, évidemment, comme je savais que je venais vous voir, je me suis renseigné. On attend que les décisions qui ont été prises hier passent devant la Chambre des lords, on va voir les décisions qui sont prises par les Britanniques. Ce qui est certain c'est que, et ça fait maintenant plusieurs mois qu'on l'a dit, il faut trancher. La fin octobre c'est déjà un nouveau délai qu'on a donné par rapport à un délai précédent qui avait été accordé, donc à un moment il faut prendre une décision. Il y a un accord, qui a été négocié, qui est proposé, soit ils le prennent, soit c'est une sortie sans accord, qu'on ne souhaite pas parce que ça aura des conséquences, mais évidemment on s'y est préparé, le 9 septembre prochain le Premier ministre va réunir tous les ministres concernés par ce sujet pour faire le point et se préparer à une potentielle sortie sans accord.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Alors il paraît que j'ai 1 minute encore, je vais en profiter pour vous parler du Grenelle contre les violences conjugales, le Grenelle continue, plus nécessaire que jamais, et le président de la République vient de faire l'expérience, il était témoin surpris, surprise et surpris, il a entendu un gendarme refuser l'appel au secours sur 39.19 d'une femme qui était terrorisée par son mari. Qu'est-ce qu'il faut faire pour que tous les gendarmes – d'abord ils ne sont pas en majorité concernés – mais qu'est-ce qu'il faut faire, justement, est-ce qu'il n'y a pas une directive nette, claire, à donner aux forces de l'ordre pour qu'elles tendent l'oreille, et en même temps la solidarité beaucoup plus nettement qu'aujourd'hui ?

GABRIEL ATTAL
On est là, très concrètement, dans ce qu'on va essayer de travailler avec le Grenelle, c'est-à-dire identifier là où ça bloque, là où on peut mieux former les personnels. Dans le cas que vous avez cité, effectivement, c'est une femme qui avait visiblement été battue par son conjoint, qui voulait aller chercher ses affaires chez elle, qui a demandé aux gendarmes s'ils pouvaient l'accompagner parce qu'elle avait peur, et les gendarmes lui ont dit « désolé madame, ce n'est pas dans le code de procédure pénale », c'est ce que j'ai compris. Comment est-ce que, avec ces situations très concrètes, on modifie les règles, on forme mieux l'ensemble des forces de l'ordre, des fonctionnaires, pour que ça ne se produise pas et que les femmes se sentent en sécurité. C'est ce qu'on va essayer de lever pendant ce Grenelle contre les violences faites aux femmes, c'est un travail dense, mais c'est ce qu'on a engagé, il y a un enjeu très fort de formations.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Qui va durer 3 mois, jusqu'au 25 novembre, date de la Journée internationale de lutte contre les violences conjugales.

GABRIEL ATTAL
C'est ça, vous êtes très bien informé.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Merci. Tous les deux, avec l'extinction de voix, nous nous en sommes pas trop mal tirés.

GABRIEL ATTAL
Je crois que ça va.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ça va, pourvu que ça tienne cette journée et les autres.

GABRIEL ATTAL
C'est ça.

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Merci, bonne journée.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 19 septembre 2019