Texte intégral
JEAN-JACQUES BOURDIN
Laurent NUNEZ est avec nous, bonjour.
LAURENT NUNEZ
Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes Secrétaire d'Etat auprès du Ministre de l'Intérieur. Laurent NUNEZ, je voudrais simplement, parce que l'image a fait le tour de toutes les télévisions, la colère d'Emmanuel MACRON en Israël serré par les services de sécurité israéliens. Vous avez vu les images j'imagine. C'est joué ou c'est une colère spontanée ? Parce que beaucoup ont dit : "Il a voulu se mettre dans les pas de Jacques CHIRAC."
LAURENT NUNEZ
Non, ce n'est pas joué.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est spontané.
LAURENT NUNEZ
Le président de la République assistait à une altercation entre les services de sécurité français et israéliens. Il a rappelé les règles, voilà. Donc il ne faut pas accorder plus d'importance à cela mais ce n'était absolument pas joué. Il a rappelé aux services israéliens qu'il y avait aussi des services de sécurité français. Voilà, il faut travailler en bonne entente.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Les services de sécurité français qui sont sur, j'imagine, le pied… Pas de guerre, je vais oublier ce mot, je n'aime pas. Parce qu'on emploie ce mot à tort et à travers. Qui sont très concentrés autour d'Emmanuel MACRON aujourd'hui. Il y a des menaces sur la personne du président de la République ?
LAURENT NUNEZ
Il y a des menaces sur l'ensemble des personnalités, vous le savez. En tout cas il y a une protection qui est assez importante.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. Qui a été renforcée ou pas ?
LAURENT NUNEZ
Elle n'est pas renforcée. C'est une protection classique. Je n'ai pas à en donner les détails.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non.
LAURENT NUNEZ
Qui est assez efficace, qui permet d'entourer le président de la République au près, au plus loin, en fonction de ses activités, mais comme toutes les personnalités du gouvernement. Voilà, il est légitime et normal qu'il y ait cette protection.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je vous dis cela parce que l'ambiance, le climat pourrait entraîner une plus forte sécurité, plus forte mobilisation des services de sécurité.
LAURENT NUNEZ
Oui. Parce que vous voyez bien que le mouvement de contestation prend des formes qui se radicalisent. Il faut employer le mot : c'est de la radicalisation. On est passé de manifestations violentes qui continuent d'ailleurs d'être violentes – je pense qu'on en reparlera – à des actions coup de poing qui peuvent viser des parlementaires, qui peuvent viser des cérémonies de voeux qui sont très régulièrement perturbées dans le cadre d'actions coup de poing qui peuvent d'ailleurs se faire également dans la violence. Et donc forcément, il est normal que l'attention des services en charge de la protection des personnalités soit plus soutenue.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Des ministres ont reçu des menaces de mort.
LAURENT NUNEZ
Certains ministres ont reçu des menaces de mort encore récemment, oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Récemment.
LAURENT NUNEZ
Oui, oui. Et bien évidemment quand il y a des menaces qui sont reçues, elles sont analysées et surtout il y a des investigations qui sont menées au plan judiciaire pour essayer de trouver le plus vite possible les auteurs.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Précisément sur ces menaces de mort reçues notamment par Bruno LE MAIRE, est-ce que l'enquête avance ?
LAURENT NUNEZ
L''enquête est en cours. Je ne peux vous….
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, oui. Mais est-ce que vous pensez qu'on va découvrir les auteurs ?
LAURENT NUNEZ
Sachez que… Donc nous sommes sur Paris sur les ministères parisiens. C'est la Direction régionale de la police judiciaire de la préfecture de police de Paris qui est tout à fait performante et qui prend à coeur de conduire à bien ces enquêtes.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. La réforme des retraites. Est-ce que les coupures de courant revendiquées par la CGT sont des actes de délinquance à vos yeux ?
LAURENT NUNEZ
Ce sont des actes qui sont… Ce sont des actes qui sont illégaux en tout état de cause. Ça, c'est ce qu'il faut dire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est de la délinquance ou pas ? Vous emploieriez ce mot ?
LAURENT NUNEZ
Je n'emploierais… Ecoutez, ce sont des actes illégaux. Regardez, vous avez des personnes qui ont été interpellées hier parce qu'il y a une mise en danger de la vie d'autrui. Quand vous coupez sciemment l'électricité, que vous pouvez toucher plusieurs dizaines de milliers de personnes sans savoir à quoi est utilisée l'électricité, qui peut être utilisée à des fins médicales, qui peut servir - et c'était le cas dans une affaire récente - à des dispositifs de sécurité par exemple dans des établissements Seveso établissements industriels à risque : vous avez des dispositifs de sécurité, par exemple de ventilation qui marchent à l'électricité quand ils sont coupés, vous pouvez avoir la vie de salariés qui est mise en danger.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'il y a eu la mise en danger d'autrui ?
LAURENT NUNEZ
Il y a eu des ouvertures d'enquêtes pour la mise en danger de la vie d'autrui. Oui, je vous le confirme. Donc c'est bien que nous sommes aussi dans une forme de délinquance.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que les auteurs seront conduits devant des tribunaux ?
LAURENT NUNEZ
Evidemment. Il y a des enquêtes qui sont en cours, il y a des investigations qui sont en cours et les auteurs, quand il y a eu des mises en danger de la vie d'autrui, bien évidemment sont susceptibles d'être poursuivis.
JEAN-JACQUES BOURDIN
A propos de la réforme des retraites, j'ai vu que la police technique et scientifique était en grève elle aussi.
LAURENT NUNEZ
Oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Parce qu'elle veut être traitée comme tout le reste de la police.
LAURENT NUNEZ
Oui. Oui, oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
En expliquant qu'elle est elle aussi en danger.
LAURENT NUNEZ
Oui, c'est exact.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors ?
LAURENT NUNEZ
Mais vous savez, le corps de la police technique et scientifique c'est un corps, en fait, administratif. Donc ce n'est pas un corps de policiers mais qui, de plus en plus, on mobilise de plus en plus la police technique et scientifique. La police a des résultats remarquables en matière d'élucidation. Vous savez, ce sont les experts - pour faire référence à certaines séries télévisées - qui vont relever les traces et indices et on les mobilise de plus en plus. On veut qu'ils se déplacent par exemple sur certains types d'infractions dans 100 % des cas. C'est le cas des cambriolages : on essaie d'avoir le maximum de relevés. Donc ils vont sur le terrain, ils sont sur le terrain et ils peuvent parfois être assimilés à des policiers. Donc nous sommes en train de discuter avec eux pour essayer de déterminer la caractéristique de leur mission, de savoir s'il y a une dangerosité ou pas. Donc les discussions se poursuivent et nous sommes en relation avec eux avec Christophe CASTANER.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Laurent NUNEZ, est-ce que les policiers sont violents ?
LAURENT NUNEZ
Les policiers évidemment ne sont pas violents. La violence de l'Etat, c'est une violence qui est légitime, c'est-à-dire qu'elle est très encadrée. Les policiers ne peuvent avoir recours à la violence que lorsqu'il y a une agression, lorsqu'ils sont eux-mêmes menacés pour mettre fin à des exactions et donc elle est extrêmement encadrée. L'usage de la violence par la police, il est extrêmement encadré. C'est ce qu'on appelle la violence légale. Encadrée, ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu'il faut qu'elle soit… Que la réponse soit toujours proportionnée, qu'elle soit juste et nécessaire. Et surtout quand il y a des fautes comme cela peut arriver, il y a bien évidemment le plus souvent saisine de l'autorité judiciaire ou il peut y avoir des sanctions administratives, c'est-à-dire des enquêtes qui sont diligentées. Mais les policiers ne sont pas violents, il faut réfuter ce terme de violence policière qui laisse à penser qu'il y a un système organisé qui voudrait que la police soit répressive pour faire taire une contestation. Ce n'est pas le cas. La police, elle est là pour encadrer les manifestations et faire qu'elles se passent bien.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il n'y a pas un système organisé mais il y a des doctrines du maintien de l'ordre. On est bien d'accord, Laurent NUNEZ.
LAURENT NUNEZ
Evidemment, évidemment.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je vais y revenir. Mais lorsque vous voyez ce qui est dit sur les réseaux sociaux par exemple ou ailleurs, ces débats qui sont ouverts sur l'attitude de la police en France, que dites-vous ? Vous pensez que les policiers trinquent pour le gouvernement ? Vous pensez que les policiers trinquent à cause de l'impopularité d'Emmanuel MACRON ? Franchement ?
LAURENT NUNEZ
Non. Attendez, la police intervient. Il faut rappeler le contexte.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.
LAURENT NUNEZ
Vous avez des manifestations…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les policiers sont aux ordres.
LAURENT NUNEZ
Vous avez des manifestations qui pendant un an, plus d'un an, ont été extrêmement violentes. Vous avez des individus ultras qui les infiltrent et qui en profitent pour s'en prendre aux forces de l'ordre, s'en prendre aux commerces, commettent des exactions, commettent des violences, commettent des dégradations. Ça ne s'est pas arrêté avec le mouvement sur les retraites. Il faut arrêter de se voiler la face : ça ne s'est pas arrêté. On continue à avoir des ultras qui incorporent les cortèges et commettent des violences.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Qui sont toujours là ces ultras qu'on n'arrête pas.
LAURENT NUNEZ
Et la police comme la gendarmerie intervient uniquement dans ce cas-là. Elle intervient uniquement dans ce cas-là pour mettre un terme aux exactions. Ça, il faut le rappeler. Il faut quand même arrêter. Certains essaient de faire croire que les violences policières sont dirigées contre… Ce qu'ils appellent, pardon, les violences policières, ce que nous nions totalement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous ne voulez pas de ce mot. Vous n'en voulez pas.
LAURENT NUNEZ
Seraient dirigées pour réprimer un mouvement contestataire. Ça n'est pas le cas. Quand les manifestations sont organisées, quand elles se déroulent sans violence, elles se passent bien. Il n'y a pas d'incidents. Il y a des interventions de la police quand il y a des exactions qui sont commises. C'est le rôle de la police et de la gendarmerie qui sont deux institutions républicaines. Il faut le rappeler avec force et je le fais ce matin.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais les policiers sont aux ordres. Est-ce qu'ils trinquent pour la popularité d'Emmanuel MACRON ?
LAURENT NUNEZ
Non. Ils ne trinquent pas pour l'impopularité. D'abord l'impopularité d'Emmanuel MACRON, c'est vous qui le dites.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce n'est pas moi. Ce sont les sondages.
LAURENT NUNEZ
C'est vous qui le dites Jean-Jacques BOURDIN.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dans tous les cas une forme d'impopularité, pardon, qui s'exprime. Qui s'exprime.
LAURENT NUNEZ
Non. Les policiers ne trinquent pas. Les policiers, ils sont là pour rétablir l'ordre public républicain. C'est ce qu'ils font maintenant depuis un an et demi avec beaucoup de courage, beaucoup d'engagement et ils ont le soutien de la majorité de la population dans cette action qui est déterminante pour faire en sorte que nos institutions républicaines fonctionnent correctement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. On va parler de la doctrine mais auparavant deux cas. Le cas de Clément, on va employer son prénom, interpellé samedi à Paris en marge d'une manifestation de Gilets jaunes. Il est au sol, un policier le frappe. Alors on a vu un extrait d'une vidéo. Ce policier a été identifié évidemment, une enquête est ouverte, on est d'accord. Pourquoi le frappe-t-il d'ailleurs ?
LAURENT NUNEZ
Il faut être prudent. Il y a une enquête qui est ouverte, une enquête judiciaire qui est ouverte pour violences par personne dépositaire de l'autorité publique. Violences volontaires donc l'enquête est ouverte. L'Inspection générale de la police nationale est saisie, elle investigue, voilà. Il y a, vous le savez, il y a deux théories. La presse s'en est faite l'écho.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.
LAURENT NUNEZ
Moi je n'ai pas de raison de penser que ce que dit le fonctionnaire de police est inexact. Ce qui est sûr, c'est qu'il y a des investigations en cours et toute la lumière sera évidemment faite sur cette affaire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce jeune homme a insulté le policier, lui a craché dessus.
LAURENT NUNEZ
C'est ce qui est dit effectivement. Il a tenté de se rebeller. Voilà, c'est ce qui est dit. Encore une fois, il y a des investigations en cours et on saura si l'usage qui a été pratiqué de la violence était proportionné ou pas. On le saura.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-il vrai d'ailleurs que ce policier a été placé sous trithérapie ?
LAURENT NUNEZ
Ecoutez, évidemment. Evidemment. Vous savez, quand il y a des interventions de police…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Parce qu'un crachat, on n'attrape pas le sida. Mais enfin, bon.
LAURENT NUNEZ
Voilà, c'est l'usage. C'est un protocole, voilà. Ce que je voulais vous dire quand même…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, allez-y.
LAURENT NUNEZ
Ayez quand même en tête que la police nationale, c'est 7% de la Fonction publique, c'est 55 % des sanctions disciplinaires qui sont appliquées. Voilà, il faut bien avoir ça en tête. Donc la police et les gendarmes également…
JEAN-JACQUES BOURDIN
La police est punie parfois.
LAURENT NUNEZ
Ce sont des corps qui sont extrêmement contrôlés et, bien sûr, des fonctionnaires de police ou des militaires de gendarmerie sont effectivement punis. Il faut arrêter de dire qu'il y a un déni. C'est totalement faux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
L'affaire Cédric Chouviat, parlons-en aussi. Mort après une interpellation à Paris dans le VIIème arrondissement de Paris. Enquête ouverte là encore pour homicide involontaire. Pourquoi est-ce que les quatre policiers impliqués ne sont pas suspendus ?
LAURENT NUNEZ
Pour une raison qui est très simple, pour une raison qui est très simple.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.
LAURENT NUNEZ
Vous avez, vous venez de le dire, une enquête, une information judiciaire qui a été ouverte pour homicide involontaire. Donc la justice est saisie et la justice fait son travail. L'ouverture d'une enquête administrative et donc d'éventuelles sanctions administratives portera exactement sur le même fait que ce pourquoi la justice est saisie. Donc généralement, on laisse la justice se dérouler et effectuer ses investigations qui sont plus poussées que ce qu'on pourrait avoir dans une enquête administrative. Maintenant, et Christophe CASTANER, je crois, l'a dit à la famille qu'il a reçue. Evidemment il y a des règles de procédure qui permettent à l'autorité judiciaire d'être déliée du secret de l'instruction dans ce genre de cas. Et si une faute apparaissait, elle peut le communiquer à l'autorité administrative qui peut prendre une sanction administrative. Mais nous n'en sommes pas là. Il y a une enquête judiciaire qui est ouverte, les investigations se poursuivent et s'il apparaissait qu'il y a une faute de l'un des quatre fonctionnaires qui sont mis en cause dans cette affaire, il pourrait y avoir des sanctions administratives. Mais nous n'en sommes pas là, il faut laisser la justice faire son travail dans cette affaire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Deux stagiaires parmi les quatre policiers, Laurent NUNEZ. La technique du plaquage ventral…
LAURENT NUNEZ
Stagiaire, il faut bien que les gens comprennent. Un stagiaire, c'est un gardien de la paix qui a été formé, qui sort de l'école et pendant un an n'est pas titulaire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Justement…
LAURENT NUNEZ
Ce sont des policiers. Ils sont formés, ce sont des vrais policiers. Il faut faire attention aux mots qu'on emploie.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Justement, ce n'est pas un hasard si je…
LAURENT NUNEZ
Non mais pardon, il faut être précis.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors allez-y, Laurent NUNEZ.
LAURENT NUNEZ
Un stagiaire, c'est quelqu'un qui a passé le concours de gardien de la paix, qui a été formé en formation initiale, qui a appris tous les gestes d'interpellation, qui a appris à se servir d'une arme, qui a appris…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'il a été bien formé pour le plaquage ventral par exemple ?
LAURENT NUNEZ
Qui a appris toute la réglementation et qui pendant un an, donc ensuite il y a une titularisation. C'est ce qu'il vaut pour toute la Fonction publique de l'Etat territoriale et hospitalière. Voilà. Les mots ont un sens quand même. Il faut…
JEAN-JACQUES BOURDIN
D'accord.
LAURENT NUNEZ
A un moment, je crois qu'il faut qu'on s'exprime clairement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Jeunes policiers.
LAURENT NUNEZ
Jeunes policiers mais qui sont formés et qui sont expérimenté. La technique d'interpellation…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Voilà. Qui est interdite en Suisse et en Belgique.
LAURENT NUNEZ
Je vais vous dire ce qu'on fait en France.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Allez-y. Qu'est-ce que vous en pensez ?
LAURENT NUNEZ
D'abord un individu, les interpellations, elles se passent normalement dans des conditions de sécurité absolue. Quand vous avez un individu qui se rebelle, qui vient de commettre un outrage, qui ne se laisse pas interpeller, il y a effectivement des techniques qui sont enseignées en école de police comme en école de gendarmerie qui consistent à emmener au sol cet individu pour pouvoir le menotter. Et il y a un certain nombre de règles qui sont prévues très claires qui indiquent qu'il faut éviter d'avoir des points de compression, c'est-à-dire de peser sur cette personne, il faut le faire le moins longtemps possible et il y a des règles qui régissent le transport de l'individu une fois qu'il est interpellé. Suite à un certain nombre de décès qu'il y a pu avoir par le passé, on interdit par exemple le transport d'individu en position ventrale. Voilà. Et quand l'interpellation s'est déroulée de manière un peu musclée, il doit automatiquement y avoir un examen médical. Et tout ça, c'est appris évidemment en école de police et ces techniques, elles sont appliquées tous les jours quand vous avez des individus qui ne se laissent pas interpeller.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et pourquoi est-ce interdit en Belgique et en Suisse ? Pourquoi est-ce que c'est interdit ? Est-ce qu'il y a une réflexion autour de cette technique ?
LAURENT NUNEZ
Alors j'allais y venir, Jean-Jacques BOURDIN. J'allais y venir. Le Ministre de l'Intérieur quand il a reçu la famille de Cédric CHOUVIAT pour lequel j'ai une pensée - on ne doit pas mourir dans le cadre d'une interpellation évidemment - mais le Ministre de l'Intérieur a demandé que l'on passe en revue l'ensemble de ces techniques et c'est ce qui va être fait. Mais sachez que ces techniques, elles sont rendues indispensables…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça pourrait être interdit ? Ça pourrait être interdit ou pas ?
LAURENT NUNEZ
Ecoutez, je ne vois pas comment on pourrait interpeller un individu récalcitrant, violent sans le conduire au sol et le menotter. Moi je ne vois pas comment les policiers feraient. Et il en va aussi du respect du bon ordre et de la sécurité dans notre pays. Des individus qui se rendent coupables d'outrage, qui se rendent coupables de faits délictueux, ils doivent être interpellés et l'interpellation elle obéit à des règles précises. Quand l'individu est violent, il y a un certain nombre de gestes techniques qui sont très encadrés et qui doivent pouvoir être pratiqués. Encore une fois, il y va de la sécurité de nos concitoyens aussi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le préfet de police de Paris, démission de Marine LE PEN. J'ai écouté Anne HIDALGO qui dit : « Il faut changer de doctrine, il faut revenir à la doctrine Grimaud. » Est-ce que vous avez pensé à une démission pour le préfet de police de Paris ?
LAURENT NUNEZ
Le préfet de police fait un excellent travail depuis qu'il a été nommé, il applique la doctrine que nous avons souhaitée avec Christophe CASTANER, qui est une doctrine qui est une doctrine qui ne tolère pas qu'il puisse y avoir des exactions, qu'il puisse y avoir des prises à partie des forces de l'ordre, qui puisse y avoir des dégradations ou des pillages de commerces. Parce que c'est de ça dont il s'agit. Et donc ce que fait le préfet de police, c'est d'appliquer cette doctrine qui est une doctrine qui je le rappelle est de grande mobilité, de grande réactivité, de déconcentration du commandement au plus près du terrain pour qu'on puisse intervenir tout de suite quand il y a des exactions, y mettre un terme, et interpeller et avoir des poursuites judiciaires.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Marine LE PEN dit : le préfet est responsable de l'aggravation des tensions. Ce sont les ordres, enfin le préfet il est aux ordres…
LAURENT NUNEZ
Marine LE PEN, je trouve, fait preuve de beaucoup de clémence, beaucoup de clémence vis-à-vis des personnes qui sont violentes lors des manifestations, c'est plutôt là que devrait se porter son regard. Parce que si la police intervient comme elle le fait, c'est parce qu'en face d'elle il y a beaucoup de violence, et les policiers et les gendarmes engagés sur Paris sous l'autorité du préfet de police, sont là pour protéger les biens et les personnes. C'est leur mission essentielle, et elle est indispensable.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Indispensable et la doctrine Grimaud, comme le rappelle Anne HIDALGO, parce que beaucoup ne savent pas ce qu'est la doctrine Grimaud.
LAURENT NUNEZ
Madame HIDALGO évoque la doctrine Grimaud, elle fait référence...
JEAN-JACQUES BOURDIN
1968, oui.
LAURENT NUNEZ
...là encore, soyons précis, elle fait référence et une lettre qu'avait fait le préfet GRIMAUD, qu'avait rédigé le préfet GRIMAUD à tous ses responsables, des policiers, en leur disant : on ne frappe pas à un homme à terre. Frapper un homme à terre c'est se frapper soi-même », en évoquant la police nationale. Croyez-vous que nous avons abandonné cette doctrine, ce principe fondateur qui est qu'effectivement on ne frappe pas un homme à terre ? Et quand c'est le cas, il y a des enquêtes qui sont ouvertes. Ce n'est pas une doctrine, c'était une lettre qui est tout à fait justifiée, qui a continué d'être appliquée. Par contre, la doctrine que nous appliquons, celle de la réactivité de l'interpellation, elle perdure, elle est actuellement en vigueur et elle perdurera, parce qu'il n'y a que comme ça qu'on peut mettre un terme aux exactions. Madame HIDALGO, vous savez, après le 1er décembre et le 8 décembre, et après certaines manifestations à Paris au mois de janvier, c'était la première à crier au loup et à accuser les forces de l'ordre de n'avoir pas été assez efficaces. Donc voilà, nous, le préfet de police, le ministre de l'Intérieur et moi-même sommes tout-à-fait consacrés à notre tâche qui est de maintenir l'ordre public dans le pays, et nous le faisons.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez dirigé la DGSI, la Direction Générale de Sécurité Intérieure. Laurent NUNEZ, la lutte contre le terrorisme, 16 agents des services de renseignements ont été écartés depuis 2014, c'est bien cela ? Dans la police, dans la gendarmerie aussi, la radicalisation, vous avez des cas récents de radicalisation ?
LAURENT NUNEZ
On a des cas…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez des chiffres ?
LAURENT NUNEZ
Les 16 personnes, se sont dans les services de renseignements, donc sur des personnes qui ont été écartées parce qu'elles étaient radicalisées, ou leur entourage. Vous savez, dans les services de renseignements on essaie d'éviter qu'il y ait des, ce qu'on appelle des vulnérabilités, des points de fragilité, donc voilà, donc d'ailleurs depuis l'attaque de la préfecture de police du 3 octobre il n'y a pas eu de membres d'un service de renseignements détectés comme étant radicalisés. Dans la police il y a des signalements, il y a des signalements de radicalisation.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Beaucoup ?
LAURENT NUNEZ
Je n'ai pas le chiffre en tête, c'est quelques dizaines, mais qui ne sont jamais au final, enfin, la plupart du temps ils ne sont pas confirmés. Ça peut ça peut conduire parfois à des mesures provisoires de suspension, le temps que les investigations soient réalisées. En tout cas, ce qui est important, c'est d'avoir une formation à la détection des signaux faibles, et de pouvoir avoir un système centralisé de suivi des individus radicalisés, et c'est ce qu'a décidé d'ailleurs le Premier ministre, pour les services de renseignements, où il y aura un suivi centralisé, on va renforcer l'habilitation, les conditions dans lesquelles est délivrée l'habilitation secret-défense. Le Premier ministre a annoncé des mesures importantes cette semaine.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que le risque terroriste est toujours élevé ?
LAURENT NUNEZ
Le risque terroriste est toujours très très élevé.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Très très très élevé.
LAURENT NUNEZ
Il est très élevé, on l'a vu avec l'attaque de la préfecture de police, avec l'attaque de Villejuif. Nous avons des personnes qui sont, comme on dit, auto-inspirées par la propagande de Daesh et qui vont passer à l'action avec des moyens certes rudimentaires, un couteau, ça peut être une voiture bélier, mais qui font des victimes, malheureusement qui font des victimes.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous n'êtes pas exaspérés en voyant que beaucoup de ces éléments sont déclarés très vite, de ces terroristes, sont déclarés trop vite irresponsables. Est-ce qu'il n'y a pas problème là autour de la responsabilité pénale en France ?
LAURENT NUNEZ
Non, enfin, il y a des règles très précises qui s'appliquent…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'il ne faudrait pas revoir la loi, je ne sais pas, moi…
LAURENT NUNEZ
... c'est le discernement au moment où on commet son action, la motivation. Bon, il se trouve que dans l'affaire de Villejuif il a été considéré que c'était un acte terroriste pour un certain nombre de raisons qu'a rappelées le procureur national anti-terroriste, mais voilà, la difficulté c'est qu'il y ait un droit pénal qui s'applique, qui s'est toujours appliqué, et qui est qu'il peut y avoir une irresponsabilité quand la personne…
JEAN-JACQUES BOURDIN
A fumer trop de joins, on devient irresponsable.
LAURENT NUNEZ
Oui, là vous faites référence à l'affaire de Sarah HALIMI, pour laquelle d'ailleurs vous savez qu'il y a un pourvoi en cassation, donc la Cour d'appel a rendu une décision qui ne m'appartient pas de commenter, mais qui rappelle quand même que cet acte a néanmoins un caractère antisémite, je le rappelle.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Des tentatives d'attentats terroristes déjouées ces derniers temps ?
LAURENT NUNEZ
Oui, bien évidemment. Ce sont, vous savez, ce sont 60 attentats qui ont été déjoués depuis la fin de l'année 2013.
JEAN-JACQUES BOURDIN
60 depuis la fin de l'année 2013.
LAURENT NUNEZ
Oui, 60 depuis la fin de l'année 2013. Il y a une action récente qui a été menée à Brest, une interpellation de... je crois ce sont sept personnes qui ont été interpellées. Donc là c'est sous l'autorité du procureur national anti-terroriste, il y a une information qui a qui a été ouverte, et on saura, à l'issue de ces investigations, si nous avons eu ou pas le 61ème attentat déjoué.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Laurent NUNEZ.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 27 janvier 2020