Texte intégral
Q - Bonjour à tous, bienvenue dans "Le Grand Jury" ; bonjour Jean-Yves Le Drian.
R - Bonjour !
Q - Merci d'être avec nous aujourd'hui. (...) Jean-Yves Le Drian, votre parole est rare, ce qui, dans un monde où la parole politique utilise tous les canaux possibles pour se diffuser, la rend forcément plus attendue. Et cela ne date pas d'hier ; vous avez toujours pesé vos mots, mais aujourd'hui plus encore car le ministère que vous dirigez depuis 2017 est un domaine partagé avec le chef de l'Etat, et autant dire qu'Emmanuel Macron veut prendre toute sa part dans la diplomatie française et dans la gestion des affaires du monde, d'où aussi peut-être votre discrétion. (...) Nous en venons aux affaires internationales et à ce virus, le coronavirus, qui inquiète le monde entier, notamment la France.
Un deuxième avion rapatriant en France des ressortissants français est en train d'arriver. Où vont-ils être mis en quarantaine ?
R - Il y a un premier avion qui est arrivé il y a quelques jours et les Français qui étaient dans cet avion ont été mis dans un village de vacances pour assurer la période de quatorze jours ...
Q - À côté de Marseille...
R - ...tout près de Marseille. ...qui est la période maximum d'incubation de ce virus et les autres ressortissants qui sont de retour seront aussi amenés dans des lieux propices, permettant à cette incubation de se dérouler dans les meilleures conditions.
Mais ce que je fais remarquer, dans ce deuxième vol qui va arriver, c'est qu'il y a beaucoup d'Européens, vingt-neuf nationalités différentes, trente avec les Français. Nous avons assumé notre rôle de responsabilité, de partage et de solidarité à l'égard des Européens et ceux-là seront ramenés, pour la plus grande partie d'entre eux, dans leur pays d'origine immédiatement après l'arrivée.
Q - Comme vous ne répondez pas directement à la question de savoir où vont être confinés les Français, c'est parce qu'on n'a pas encore trouvé l'endroit ou pour des raisons de confidentialité ?
R - Si. Une partie sera dans le village indiqué ...
Q - De Carry-le-Rouet donc ...
R - À Carry-le-Rouet, ça se passe très bien.
Q - Et une autre partie à Aix, on nous parle d'Aix-en-Provence également.
R - Cela se passe très bien. Je crois que les nouvelles de nos compatriotes qui sont dans ce village sont très rassurantes ; je crois qu'ils jouent au volley-ball, ils sont au bord de la mer. Donc cela permet d'entretenir le moral.
Q - Y aura-t-il un troisième avion, Monsieur le Ministre, avec combien de Français encore sur place qui demandent à être rapatriés ?
R - Pour l'instant, tous les Français qui ont demandé à être rapatriés le sont de la province de la région de Wuhan. Si d'aventure il y avait d'autres cas, on peut envisager d'autres transports et si d'aventure, il y avait des cas difficiles, suspects de ce risque de virus, alors on affecterait des avions sanitaires. Donc le service et les opérations se sont bien déroulés.
Je dois dire à cet égard que la coopération avec les autorités chinoises a été remarquable ; je me suis entretenu à plusieurs reprises avec mon collègue Wang Yi sur le sujet, ce n'était pas facile parce qu'il y a des problèmes de papiers, il y a des problèmes de visas, il y a des problèmes de nationalité, il y a des problèmes de bi-nationalité pour certains. Tout cela s'est passé convenablement.
Q - En même temps, Monsieur le ministre, quand même, il y a des suspicions sur la Chine, sur le fait qu'elle ait influencé l'Organisation mondiale de la santé pour qu'elle ne décrète pas tout de suite l'état d'urgence internationale pandémique.
R - Moi, je respecte totalement les décisions de l'Organisation mondiale de la santé. C'est un organisme international composé d'experts, qui indique les risques, les menaces, les dangers et qui aujourd'hui a indiqué que cette épidémie devait être considérée comme une urgence mondiale avec les nécessités que cela impose, c'est-à-dire de la meilleure coordination, le travail de recherche ensemble sur les moyens de remédier à cette épidémie, à ce virus, le fait qu'il y ait une coordination internationale renforcée.
Tout cela n'a pas amené l'OMS pour l'instant à dire qu'il fallait fermer les frontières de la Chine. Donc il faut être très vigilant. Il faut aussi faire preuve de sang-froid dans une période où chacun a tendance à s'enflammer et faire en sorte que les règles sanitaires soient respectées ; c'est ce à quoi nous nous employons très précisément.
Q - Faut-il fermer l'espace aérien, comme le demande Marine Le Pen par exemple ?
R - Ce n'est pas demandé par l'OMS et je respecte beaucoup les experts et les compétences. Je dois dire aussi qu'à cet égard, les services du centre de crise du Quai d'Orsay, les services du consulat général à Wuhan ont été exemplaires et ont été tout à fait au service de nos compatriotes pour leur permettre d'être rassurés d'une part et d'être rapatriés d'autre part.
Q - Et plus globalement, quand on voit le nombre de morts actuel en Chine qui est, on peut dire, presque insignifiant par rapport à la population de ce pays, est-ce qu'on n'en fait pas trop ? Est-ce qu'on n'applique pas le principe de précaution de façon excessive ?
R - Non. C'est la raison pour laquelle je pense qu'il faut faire preuve de sang-froid, de responsabilité, de vigilance en permanence et en même temps ne pas exagérer les dimensions de cette menace. Donc nous sommes dans un esprit de responsabilité et de vigilance.
Q - Est-ce qu'il y aura un rapatriement, Jean-Yves Le Drian, du personnel diplomatique français ? Certains pays l'ont déjà fait.
R - Pour l'instant, ce n'est pas à l'ordre du jour, même si nous avons allégé un peu notre dispositif parce que, dans les recommandations, les préconisations de l'OMS qui est l'organisme composé d'experts qui valide ou non telle ou telle situation, cette demande n'est pas formulée. Si c'était le cas, on le ferait, mais il ne faut pas non plus...
Q - Il n'y a pas trop de frilosité non plus de la part de l'OMS ? L'OMS n'est pas en retrait par rapport à l'importance de cette épidémie selon vous ?
R - Je considère que l'OMS est au rendez-vous de ses responsabilités, elle est faite pour cela et elle prend des avis qui nous paraissent devoir être respectés à la lettre.
Q - Juste une chose, vous nous disiez qu'il y avait donc vingt-neuf nationalités à bord de cet avion, à bord de cet avion, donc cet avion français après la France ira en Belgique et dans d'autres pays, dans tous ces pays, ces vingt-neuf pays ?
R - Dans cet avion, il y a plusieurs nationalités et les pays concernés, pour une bonne partie d'entre eux, vont permettre d'assurer un bord à bord permettant le retour de ces personnes dans leur pays d'origine. La France fait preuve d'une solidarité et d'une coordination, je crois, assez exemplaires.
Q - Ces gens qui reviennent de Chine donc qui vont être mis en quarantaine y compris dans leur pays, certains pays comme les Etats-Unis ou Israël ont fermé leur espace aérien aux étrangers qui se sont rendus en Chine depuis moins de quatorze jours. Est-ce que ce ne serait pas la prudence de faire la même chose ?
R - Si l'Organisation mondiale de la santé estime que c'est une nécessité, nous le ferons mais aujourd'hui, ce n'est pas pour nous une nécessité. L'OMS a bien indiqué qu'il n'y avait pas de fermeture de frontières à l'égard de la Chine, donc nous respectons cette situation. Nous ne recommandons pas à nos concitoyens de se rendre en Chine. Nous considérons, par ailleurs, que la région de Wuhan doit être absolument évitée, mais pour le reste, nous respectons les normes. Je pense que c'est ainsi qu'il faut agir quand il y a une situation de ce type.
Q - Et sur l'impact économique, est-ce que vous vous avez déjà relevé, Monsieur le Ministre, une baisse du nombre de touristes chinois en France ?
R - Pour l'instant non. On voit bien que l'impact économique risque d'être fort, néanmoins, si l'épidémie se poursuit - mais il n'est pas dit que l'épidémie se poursuivra -, les mesures drastiques qui ont été prises par la Chine, mesures assez fortes, devraient, je l'espère, permettre d'éradiquer cette épidémie.
Q - Vous pensez que le taux de mortalité, qui a déjà baissé, de cette épidémie pourrait encore baisser ?
R - C'est ce que je souhaite, je ne suis pas un expert, mais je le souhaite. En tout cas, les mesures qui ont été prises par les autorités chinoises sont des mesures extrêmement fortes, responsables, difficiles à prendre mais j'espère qu'elles porteront leurs fruits.
Q - Alors autre sujet d'actualité cette semaine bien sûr, le Brexit, la sortie de la Grande-Bretagne de l'Union européenne. Que répondez-vous, Monsieur le Ministre, à ceux qui comme Marine Le Pen disent, je cite, qu'elle salue le retour à la liberté du Royaume-Uni voyant dans le Brexit un échec terrifiant pour l'Union européenne qui doit, selon elle, se transformer vers une alliance européenne des nations ? Est-ce un échec "terrifiant" pour l'Union européenne, pour nous, pour vous, Monsieur le Ministre ?
R - C'est d'abord une grande tristesse de constater le départ des Britanniques de cette Union ; ils y étaient rentrés avec enthousiasme et ils ressortent, je pense aussi pour une partie d'entre eux, avec aussi une tristesse. Je ne suis pas sûr que les expressions de joie qu'on a pu sentir ici ou là étaient tout à fait justes parce que l'avenir pour demain pour le Royaume-Uni va être un peu plus compliqué. On ne pourra pas avoir les mêmes avantages à l'extérieur de l'Union européenne qu'à l'intérieur et maintenant va s'ouvrir une période difficile qui est la période de préparation et des relations futures que nous aurons avec le Royaume-Uni. D'ici là presque pas grand-chose va changer, parce que les règles ont été établies comme quoi en cours de l'année 2020, les dispositifs existants resteront les mêmes sauf que la Grande-Bretagne n'aura plus droit au chapitre. Donc c'est une espèce de rupture, d'abord juridique ; ensuite, il faudra préparer la manière de vivre ensemble et là, beaucoup de questions vont se poser et il faudra que nous soyons très vigilants pour défendre nos propres intérêts.
Q - Est-ce qu'il est né d'un mensonge, ce Brexit ?
R - En partie, quand je vois tout ce qui a été dit en 2016 dans la campagne pour favoriser le Brexit en Grande-Bretagne, je pense en particulier à des informations qui étaient diffusées sur le fait qu'il y aurait plus d'argent pour le système de santé, qu'il y aurait des chèques qui seraient distribués, tout cela était des mauvaises nouvelles...
Q - Notamment de la part de Boris Johnson, l'actuel Premier ministre. Notamment de la part de Boris Johnson, Jean-Yves Le Drian !
R - Et qui n'ont pas aujourd'hui .... Certains aujourd'hui se réveillent sur ces orientations, constatent que ce n'est pas le cas, constatent que la situation ne va pas être commode pour le Royaume-Uni, constatent que les avantages que pouvait avoir le Royaume-Uni par l'accès au marché unique vont être érodés. Tout cela n'amène pas automatiquement à un dynamisme porteur pour le Royaume-Uni.
Q - Mais Boris Johnson lui-même qui est aujourd'hui Premier ministre s'était-il rendu coupable d'approximations et de fake news comme on dit ?
R - Je pense qu'il y a eu beaucoup d'approximations dont certains sont revenus mais il y a eu un vote, il s'impose. C'est une forme de gâchis, cette affaire, mais maintenant reconnaissons, ce vote a eu lieu, reconnaissons que la rupture est consommée et préparons-nous, avec les Européens, au dispositif que nous mettrons en place pour assurer nos relations futures. Nos relations futures doivent être les plus positives possible parce que même si, je disais il y a un instant que le Royaume-Uni n'aura pas les mêmes avantages en étant à l'extérieur qu'à l'intérieur, il n'empêche que les îles britanniques seront toujours au même endroit et donc nous avons une histoire et une géographie communes et nous avons, en particulier, des enjeux communs qui sont des enjeux sécuritaires, qui sont les enjeux du réchauffement climatique, la préparation de la conférence de Glasgow à la fin de l'année, tout cela doit entraîner de notre part une relation forte. Le président de la République l'a dit d'ailleurs très clairement dans la lettre qu'il a adressée aux Britanniques au moment de la rupture.
Q - Vous dites gâchis, tromperie, parce que c'est difficile à admettre pour un pro-européen comme vous qu'un peuple puisse majoritairement ne plus avoir envie d'Europe ?
R - Non, je pense que chacun, chaque peuple est libre de son destin, mais à condition qu'il appréhende son destin dans les meilleures conditions et avec les vrais paramètres. Au moment de la campagne de juin 2016, il y a eu pas mal de fausses informations qui ont été développées.
Q - Depuis, il y a eu des législatives.
R - Depuis, il y a eu des législatives parce qu'il fallait s'en sortir, parce qu'il fallait en finir et les législatives n'ont pas été sur les mêmes thèmes que l'acte de rupture prononcé par référendum en juin 2016. Les législatives ont permis d'avoir un gouvernement qui peut négocier, qui peut discuter maintenant avec l'Union européenne qui, je l'espère, se maintiendra unie dans cette discussion. À un moment donné, on a pensé que les Européens allaient pouvoir se diviser sur cette affaire. Certains même ont essayé de cultiver cette division. Or, les Européens sont restés unis du début jusqu'à la fin et je suis convaincu qu'ils le resteront encore maintenant sous réserve que les négociations permettent le maintien de leurs propres intérêts, c'est-à-dire de nos propres intérêts.
Q - Les intérêts, les intérêts français. Prenons un exemple concret, les pêcheurs, qu'allez-vous faire pour les pêcheurs français ?
R - Alors, il y a un vrai problème sur la pêche, c'est l'enjeu crucial des discussions qui vont s'ouvrir. La Grande-Bretagne est un pays qui a une grande production de pêche, elle a des eaux qui sont aussi extrêmement poissonneuses dans lesquelles beaucoup d'Européens vont pêcher, à commencer par les Français de Bretagne, de Normandie et des Hauts-de-France. Mais le Royaume-Uni a aussi cette caractéristique d'exporter 75% de sa production halieutique vers l'Union européenne. Donc il va falloir se mettre autour de la table pour discuter d'abord de la manière de gérer les eaux.
Est-ce que le retour des eaux européennes vers les eaux britanniques entraîne obligatoirement le rejet des pêcheurs européens ? Premier sujet.
Deuxième sujet : est-ce que l'on harmonise ensemble les quotas, les taux maximum de capture, la répartition ? Tout cela doit faire l'objet d'une discussion, mais cette discussion, elle peut être assez équilibrée parce que certes, nous avons besoin, nous, des eaux britanniques mais les Britanniques ont aussi besoin du marché européen.
Donc c'est autour de cela que la discussion va avoir lieu. Nous serons extrêmement vigilants sur cette orientation et sur ces choix. Ces discussions vont commencer maintenant et nous voulons aussi surtout que la discussion soit globale parce que si on fait une discussion par silo, alors chacun essayera de mener son avantage de part et d'autre du silo mais si la décision est globale, on pourra trouver les meilleures harmonisations pour avoir une relation correcte d'avenir avec le Royaume-Uni. Il ne s'agit pas de repousser le Royaume-Uni loin puisqu'il est tout proche mais de faire en sorte qu'ensemble nous ayons des compromis qui soient respectés des uns et des autres.
Q - Jean-Yves Le Drian, dans la discussion, il y a aussi la dette de la Grande-Bretagne, on parle de quarante à quarante-cinq milliards d'euros que la Grande-Bretagne devrait aujourd'hui encore à l'Europe. Est-ce que l'Europe va réclamer cette somme, son dû à la Grande-Bretagne?
R - Il y a eu des arrangements financiers qui ont permis d'avancer dans l'accord de retrait. Il y aura maintenant une discussion sur l'ensemble des sujets. Nous, nous souhaitons que ces discussions soient globales et que l'on ne mette pas en cause les points les plus fondamentaux en raison d'un calendrier pressé de la part du Royaume-Uni. S'il faut plus de temps, il faudra plus de temps.
Q - Mais est-ce que vous voulez que cette somme soit remboursée à l'Union européenne ?
R - Nous, nous voulons que les intérêts de l'Union européenne soient respectés, tous autant qu'ils sont.
Q - Donc notamment cette somme.
R - Cela fait partie de ça mais vous avez d'autres sujets que la pêche, vous avez aussi l'accès au marché intérieur et si le Royaume-Uni veut établir à l'extérieur de l'Union européenne une espèce de "Singapour sur Tamise", nous ne serons pas d'accord parce qu'il faudra pour avoir accès au marché intérieur respecter nos règles. Si on veut jouer sur le terrain de l'Europe, il faudra en assumer toutes les contraintes mais aussi tous les avantages.
Q - Alors, autre sujet d'actualité, bien sûr la menace terroriste et on apprend ce matin, Jean-Yves Le Drian, que les forces françaises de Barkhane qui sont engagées au Sahel pour lutter contre les actions de plus en plus meurtrières des groupes djihadistes vont passer de quatre mille cinq cents à cinq mille cent hommes. C'est ce qu'a annoncé ce matin votre collègue, Florence Parly du ministère des armées, c'est six cents de plus.
Il y a quelque temps, Emmanuel Macron parlait même, effleurait l'idée d'un retrait parce qu'il y avait la montée d'un sentiment antifrançais sur place. À Pau, c'était deux cent-vingt hommes qui étaient envoyés ; maintenant, on passe à six cents. Est-ce à dire que la menace s'est accrue, accélérée ces derniers jours et qu'il faut y aller beaucoup plus fort ?
R - À Pau, il y a une étape importante qui a été franchie, c'est d'abord l'étape de l'unité. L'ensemble des acteurs étaient présents, que ce soit les pays du Sahel concernés mais aussi l'Union européenne, mais aussi l'Union africaine, mais aussi les Nations unies, pour faire en sorte qu'il y ait une vraie mobilisation sur un enjeu qui est déterminant pour tout le monde. Il est déterminant pour les pays du G5 Sahel parce que c'est leur propre survie, leur propre sécurité mais leur propre survie qui est en cause. Il est aussi déterminant pour l'Union européenne parce que le Sahel, c'est notre frontière Sud, c'est notre bouclier. Et donc, nos intérêts sont liés.
Et ce qui s'est passé depuis quelque temps, c'est le fait qu'à la première initiative terroriste qui avait eu lieu en 2013, a succédé une menace plus élargie et plus diffuse. Plus élargie parce que d'autres pays que le Mali sont concernés désormais, que ce soit le Burkina Faso, le Niger. Et plus diffuse parce que les actions menées par les groupes terroristes consistent maintenant à déstabiliser les Etats, à s'attaquer aux symboles même des Etats, que ce soit les écoles, que ce soit les garnisons. Donc, il y a là un mouvement de déstabilisation qui est dangereux et contre lequel il faut réagir.
Q - Mais justement, peut-on contrer une menace aussi importante, on parle d'un territoire grand comme l'Europe, avec cinq mille militaires ?
R - Il n'y a pas que les cinq mille militaires français. Nous sommes très, très soucieux du renforcement de ce qu'on appelle la force conjointe des Etats du Sahel, c'est-à-dire ces éléments armés qui travaillent ensemble, qui agissent ensemble, singulièrement...
Q - Ils ne sont pas très opérationnels, forcément ...
R - Cela progresse beaucoup, c'est déjà une grande avancée qu'il y ait ce concept, parce que, vous voyez, en Europe, nous n'avons pas réussi, nous, encore à faire en sorte qu'il y ait des éléments militaires joints de cette manière. Mais au G5 Sahel, ce concept est en train d'émerger avec la nécessité de les accompagner dans la mise en oeuvre de cette force qui a pour objectif d'abord de préserver les frontières. Et, en plus de cela, vous avez présentes sur le territoire la mission des Nations unies, la mission de formation de l'Union européenne qui doit s'élargir sur l'ensemble de la zone Sahel. Tout cela fait une coordination importante et maintenant, il s'agit de donner un coup supplémentaire, ce qui explique le renforcement des forces françaises.
Q - Jean-Yves Le Drian, la menace sur le territoire français, quand vous voyez ce qui se passe au Sahel, est-ce que cela veut dire aussi que la menace sur le territoire français est plus importante encore, depuis, aussi, que l'Etat islamique s'est doté d'un nouveau chef après l'assassinat, la mort d'Al-Baghdadi ?
R - La menace terroriste est permanente. Ce n'est malheureusement pas parce qu'il n'y a pas eu d'attentat récemment qu'il faut la dissoudre. Elle est permanente. Elle est permanente dans cette région, elle est aussi permanente dans la zone Syrie - Irak. La nécessité d'assurer notre propre sécurité suppose de mettre au niveau où elle doit être la menace terroriste. Et donc, le Sahel fait partie de ce dispositif de sécurisation.
Mais pour revenir au Sahel, la nouveauté par rapport à ce qui était fait auparavant, c'est qu'il y a maintenant une bonne coordination entre, à la fois, la nécessité de renforcer les efforts militaires de notre part mais aussi de la part des Européens puisque la force Takuba qui se met en place, qui réunit les forces spéciales de plusieurs Etats européens, va être bientôt opérationnelle.
Il faut renforcer ce pilier, renforcer aussi la formation de la force conjointe des pays du Sahel - c'est un long travail mais c'est un travail qui va porter ses fruits - et faire en sorte que l'action soit vraiment ciblée sur la partie la plus dangereuse qu'on appelle la partie des trois frontières, c'est-à-dire les frontières entre le Mali, le Burkina Faso et le Niger où on doit porter un effort supplémentaire.
Mais cela ne suffit pas. Il faut aussi que l'on aide les pays concernés à faire en sorte que l'Etat, l'autorité de l'Etat, que ce soit par les écoles, que ce soit par la présence administrative, soit vraiment renforcée dans toutes les parties du territoire et enfin, que l'on ait une action de développement très significative, très lisible et très immédiate. C'est la raison pour laquelle je me rendrai dans quelques jours à Nouakchott pour coordonner l'action de l'ensemble des acteurs qui interviennent dans le développement ...
Q - Il y a la question aussi qui se pose bien sûr des djihadistes, ceux qui ont été sur le terrain.
Nicole Belloubet a déclaré il y a quelques jours "on ne peut pas prendre le risque d'une dispersion dans la nature, on ne va pas avoir cinquante solutions : soit on va les rapatrier car on considère qu'il vaut mieux qu'ils soient sous contrôle français ; soit ils s'évaporeront avec les risques que cela suscite". Est-ce que vous jugez les propos de la ministre maladroits ?
On parle des djihadistes français donc qui ont opéré sur les territoires extérieurs, en Syrie notamment. Jean-Yves Le Drian ?
R - Non, on parle des djihadistes français qui sont aujourd'hui, soit en Irak, mais essentiellement en Syrie, à la suite de la défaite territoriale de Daech, dans cette zone. Je dis "défaite territoriale", parce que je considère pour ma part que Daech n'est pas défait sur le fond. Il y a des cellules clandestines qui existent en Irak, il y a des capacités qui ne demandent qu'à s'animer en Syrie. Et puis, vous avez des prisonniers, des prisonniers qui sont des prisonniers français, quelques dizaines, des prisonniers étrangers, quelques centaines, et puis des combattants de Daech, d'Irak ou de Syrie qui sont dans les mêmes prisons et dans les mêmes camps, pour les empêcher de nuire.
Q - Pourquoi ces prisonniers français ne peuvent-ils pas être jugés et emprisonnés sur place ?
R - Parce que nous sommes dans une situation de guerre, encore, et dans les camps et les lieux de rétention, ils sont protégés par les forces kurdes, d'une manière générale. Mais dans l'ensemble de l'environnement, il y a des situations conflictuelles. Vous avez à la fois des Turcs, des Russes, il y a la force de la Coalition, vous avez des Syriens, des Irakiens. Bref, il faut donc assurer, en premier lieu, la sécurité et la stabilité dans ces prisons et ensuite, il y aura un processus de jugement, lorsque les éléments seront réunis, en particulier lorsque le dispositif de paix sera achevé.
Q - La Commission nationale consultative des droits de l'Homme invite la France à rapatrier sur son sol les djihadistes de nationalité française présumés ou condamnés à mort qui se trouvent en Irak. Vous restez sourd à cette invitation ?
R - Les prisonniers. Nous avons treize prisonniers français en Irak qui ont été condamnés. Nous avons fait part aux autorités irakiennes de nos engagements contre la peine de mort, elles le savent. Aujourd'hui, aucune de ces peines n'a été mise à exécution, mais nous considérons qu'à partir du moment où ces combattants ont agi en Irak, contre l'Irak, ils doivent être jugés en Irak.
Q - Est-ce que l'on comprend dans votre propos que tout doit être fait pour éviter que les djihadistes français ne reviennent en France ?
R - La logique de base, c'est que lorsque des actions terroristes ont été commises en Syrie et en Irak, les combattants qui ont commis ces actes doivent être jugés là où ils ont commis leurs actes. C'est vrai pour les combattants, c'est vrai aussi pour les combattantes. Lorsqu'une femme se rend en Irak ou à Raqqa en Syrie en 2015, elle n'y va pas pour faire du tourisme, on sait quelle est la situation. Donc, les jugements doivent avoir lieu là, dans un processus sans doute sous la forme d'une juridiction spécifique qu'il faudra mettre en place à un moment donné. Mais cela ne concerne pas que les Français, cela concerne d'autres pays européens, cela concerne d'autres pays du monde qui ont des combattants étrangers qui sont aujourd'hui retenus, cela concerne aussi les Irakiens et les Syriens. Donc, il sera nécessaire, dans le processus de paix qui, je l'espère, viendra un jour, qu'il y ait un dispositif juridique compétent. Ceci étant, je ne réponds pas sur les enfants parce que nous considérons que les enfants sont innocents de tout cela.
Q - Certains vont être rapatriés à nouveau ?
R - On en a rapatrié déjà dix-sept.
Q - Est-ce que vous allez en rapatrier d'autres ?
R - Si on a l'occasion de le faire, oui. La volonté de la France est de faire en sorte que ces enfants qui sont innocents puissent être rapatriés, sous réserve de l'accord de leur mère.
Q - Pour les mineurs, jusqu'à quel âge ?
R - Pour l'instant, nous sommes limités à moins de six ans, mais nous continuerons dans cette logique-là.
Q - Cela correspond à combien d'enfants ? Est-ce que les dossiers qui sont en cours, cela va arriver vite ?
R - Nous avons rapatrié dix-sept enfants, déjà.
Q - Et vous allez en rapatrier combien ?
R - Mais nous sommes en situation de guerre, c'est-à-dire que, contrairement à ce que je peux lire ici ou là, lorsqu'on prend des initiatives pour aller rapatrier ces enfants, on prend des risques. Donc, il faut les limiter au maximum et nous agissons de cette manière avec les autres pays européens.
Q - Jean-Yves Le Drian, trois de nos compatriotes sont portés disparus en Irak. On ne sait s'ils ont été enlevés ou s'ils ont disparu. Est-ce que vous pouvez nous donner des informations concernant leur sort ?
R - Nous connaissons évidemment cette affaire dramatique, mais nous avons pour habitude dans ce genre de situation de rester très discrets.
Q - Est-ce que vous êtes sûr qu'ils sont toujours en vie ? Est-ce que ça, vous pouvez nous le dire ?
R - Je vous ai répondu.
Q - Qu'en est-il des chercheurs qui sont français otages en Iran ? Ils n'ont pas été libérés, il s'agit de Fariba Adelkhah et de son compagnon, Roland Marchal. Est-ce que vous êtes optimiste sur leur libération prochaine ?
R - Nous, nous considérons que ces emprisonnements sont insupportables. Nous l'avons fait savoir aux plus hautes autorités, y compris au président Rohani. Nous savons qu'ils ne sont pas en de très bonnes conditions et nous savons qu'ils ne sont pas toujours bien traités. Notre consulat a fait ce qu'il faut pour les accompagner, mais nous pensons que l'Iran ferait un acte fort en les libérant parce qu'il n'y a aucune faute à soumettre contre eux.
Q - C'est l'heure de "la question en plus".
Cécile Coudriou, présidente d'Amnesty international France : Monsieur le Ministre, de nombreux rapports d'Amnesty International ont fait la preuve du sort réservé aux migrants et réfugiés détenus en Libye : tortures, viols et extorsions. Lorsqu'ils tentent de fuir, ils sont refoulés par les garde-côtes libyens vers cet enfer. L'Union européenne a versé près de quarante-six millions d'euros à la Libye pour renforcer ce travail. Monsieur Le Drian, pourquoi poursuivez-vous cette collaboration qui rend la France complice des exactions commises en Libye ?
R - C'est une vraie préoccupation, c'est un vrai drame. Il y a, en Libye, dans des camps que j'ai visités moi-même, des Africains d'origines diverses qui, soit espéraient travailler en Libye, soit souhaitaient passer par la Libye pour rejoindre des pays européens. Nous avons pris des initiatives à la fois pour renforcer la qualité d'accueil de ces camps, pour alerter les autorités libyennes sur la nécessité d'être en situation de respect du droit humanitaire. Nous avons aussi pris des initiatives pour faire en sorte que ces migrants puissent être accueillis dans d'autres lieux. C'est le cas en particulier au Niger où nous accueillons, nous les traitons, nous respectons ceux qui demandent le droit d'asile et nous faisons en sorte que le droit au retour puisse être accompagné dans les meilleures conditions.
Cette situation est dramatique mais ce n'est pas automatiquement en aidant indirectement et les passeurs et les trafiquants qu'on pourra s'en sortir. Donc, il importe d'être très vigilant, d'être très rigoureux à l'égard des autorités libyennes et de faire en sorte qu'il y ait des chemins de retour possibles dans les meilleures conditions de sécurité. C'est pourquoi nous faisons en sorte qu'au Niger, il y ait ces capacités d'accueil.
Q - Concernant le plan de paix proposé donc par Donald Trump pour le règlement du conflit israélo-palestinien, pour certains, vous avez été jugé dans votre réaction au Quai d'Orsay trop timide, trop compréhensif. On a du mal en fait à comprendre la position de la France. Est-ce que vous seriez pour relancer les négociations comme le demandent Mahmoud Abbas à travers le Conseil de sécurité de l'ONU dans les prochains jours ?
R - Bon. D'abord, ce plan de paix arrive enfin. Il a été annoncé depuis de nombreux mois. J'ai souvenir que la première fois où je me suis rendu comme ministre des affaires étrangères aux Etats-Unis, c'était au milieu de l'année 2017, on m'avait annoncé le plan de paix imminent. Donc, c'était de l'imminence de longue durée, mais il arrive et ce que nous avons salué, ce sont les efforts. Nous n'avons pas salué les résultats des efforts ; nous avons salué les efforts parce que nous avons considéré que les Etats-Unis avaient essayé de prendre le dossier à bras-le-corps. Donc oui, les efforts, mais, sur le fond, nous considérons qu'aujourd'hui les principes sur lesquels nous nous reposons, nous, restent les mêmes. Je vous les rappelle : il y a un cadre qui est le droit international, les résolutions du Conseil de sécurité ; il y a un objectif, c'est l'existence de deux Etats en sécurité l'un par rapport à l'autre avec des frontières reconnues internationalement, de vrais Etats, avec l'ensemble des compétences liées à un Etat mais aussi l'ensemble de la réalité démographique et physique liée à un Etat ; et puis, une méthode, une méthode qui est la négociation.
Or, je considère que dans la situation actuelle, les initiatives unilatérales ne sont pas automatiquement performantes. Donc, nous avons des interrogations, des réserves par rapport à notre situation, mais nous pensons aussi qu'il faut en sortir et qu'il faut que la paix durable puisse revenir au Moyen-Orient.
Q - Mais pourquoi vous ne dites pas "c'est un mauvais plan", dès lors que les conditions que vous venez de dénoncer ne sont pas présentes ?
R - Maintenant, il faut discuter avec les uns et les autres, j'ai vu les réactions des pays arabes, je me suis entretenu avec plusieurs ministres des affaires étrangères des pays considérés comme modérés sur cette analyse. Je pense à l'Egypte, je pense à la Jordanie en particulier. Il faut aussi parler avec les Européens parce que les Européens ont joué un rôle très important antérieurement dans la tentative d'un processus de paix pour essayer de se positionner collectivement par rapport à cette nouvelle donne.
Q - Il faut relancer les négociations ou pas, comme le demande Mahmoud Abbas ? Il veut dans les prochains jours, le Conseil de sécurité, l'ONU et reparler de tout ça.
R - C'est vrai qu'il faut en parler au Conseil de sécurité, c'est vrai qu'il y a eu dans le passé des négociations qui ont abouti à des avancées, sans doute pas totales, mais le processus d'Oslo était un processus positif et c'est vrai qu'aujourd'hui tout cela est à l'arrêt.
Q - Donc vous dites "oui" à la demande de Mahmoud Abbas pour renégocier ?
R - Nous disons "oui" à la demande de débat au Conseil de sécurité.
Q - On sent que vous ne voulez pas vous fâcher avec Donald Trump même si vous êtes très réticent sur le plan. Est-ce que c'est parce que la France veut ménager les Etats-Unis, parce que nous avons besoin d'eux, par exemple militairement au Sahel ?
R - Tout cela n'est pas lié. Nous avions attendu longtemps le plan de paix des Etats-Unis, nous ne sommes pas d'ailleurs au bout de la réflexion sur ce document très important, il fait quatre-vingt-cinq pages.
Donc il y a à regarder très précisément ce que veut dire tel ou tel point et savoir aussi comment ils seront mis en oeuvre mais il faut aussi prendre l'attache des pays voisins et prendre attache des responsables palestiniens pour essayer de faire en sorte d'avoir un chemin vers la paix qui soit un chemin durable et non pas uniquement circonstancié par telle ou telle situation du moment. Donc nous sommes dans cette logique et nous essayerons de la pousser jusqu'au bout.
Q - Jean-Yves Le Drian, le président de la République à son retour de Jérusalem justement la semaine dernière a surpris quand il a parlé de la nécessité d'un nouvel acte mémoriel pour reconnaître la guerre d'Algérie, en tout cas la responsabilité de la guerre d'Algérie en comparant cela en fait avec la reconnaissance qu'avait faite Jacques Chirac de la déportation des Juifs de France par l'Etat français. Est-ce que vous pensez, vous, qu'il faut un acte mémoriel fort à nouveau ?
R - Il y a eu une confusion au moment de ces échanges sur lesquels je pense qu'il faut qu'il n'y ait pas d'ambiguïté. La Shoah dont il a parlé, pour laquelle il s'est rendu d'ailleurs en Israël, sur laquelle il s'est exprimé est un crime insupportable, comparable à rien, nulle part ailleurs, il faut le reconnaître comme tel partout.
Ceci étant, la question qui se pose dans les relations entre la France et l'Algérie sur la mémoire, la manière dont les uns et les autres avons vécu ce conflit, reste là et il faudrait que nous ayons ensemble un travail de mémoire pour qu'on approfondisse...
Q - La signature d'un acte de paix par exemple ? Parce que c'est vrai que ça a toujours été en discussion ?
R - Je pense que ce travail doit être mené par les historiens. Peut-être qu'un jour, il y aura une initiative. Je pense que les autorités algériennes souhaitent aussi ce travail de mémoire. Donc il faut confronter nos mémoires. C'est un travail très difficile !
Q - Jean-Yves Le Drian, les Algériens veulent que la France reconnaisse qu'elle a tous les torts dans ce conflit. Pourquoi rouvrir ce dossier ? Parce que cela divise les Français.
R - Je pense que les Français ont besoin d'avoir sur ce sujet-là un moment de rappel historique, de vérification de ce qui s'est passé.
Q - Vous croyez vraiment qu'il y a une demande dans l'opinion ?
R - Et je pense que ce serait utile que l'on puisse avancer dans cette direction, mais de manière sereine, de manière positive, y compris avec des historiens algériens.
Q - Mais d'ici 2022 ? D'ici la fin du quinquennat ?
R - Cela, ça demande du temps, c'est le moment ...le moment opportun doit être choisi par le président mais aussi doit faire l'objet de discussions et d'interpellations et d'échanges avec des nouvelles autorités algériennes.
Q - Mais vous voulez lancer une mission par exemple là-dessus ?
R - Nous avons une situation en Algérie qui est totalement nouvelle et qui va sans doute engager des évolutions significatives de ce pays. Nous avons eu l'occasion de nous entretenir, le président avec le nouveau président algérien, moi-même avec mon interlocuteur et le président algérien. Nous sommes dans une phase où de nouvelles perspectives s'offrent pour la relation entre la France et l'Algérie. Donc si la mémoire partagée peut faire partie de cet ensemble nouveau, ce serait une très bonne nouvelle pour tout le monde.
Q - Et une mission de réflexion ou pas, est-ce que vous pensez faire ça ?
R - C'est peut-être une solution !
(...)
Q - Une question sur Ségolène Royal.
Il n'y a pas si longtemps, elle travaillait encore pour vous au Quai d'Orsay ; ce n'est donc plus le cas. Est-ce que vous estimez qu'elle a payé sa liberté de parole ? Mais est-ce que vous estimez aussi qu'elle peut représenter l'avenir de la gauche, Ségolène Royal ?
R - Ce n'est pas à moi de le dire. C'est d'abord à elle de savoir si elle veut le faire et ensuite à tous ceux qui se réclament de la gauche, de savoir si elle peut être la porte-parole. Ségolène Royal a été à l'ambassadrice des pôles ; elle a fait son travail ; elle m'a remis un rapport circonstancié. Elle a préféré choisir sa liberté plutôt que le devoir de réserve. C'est son choix le plus strict et je le respecte.
Q - Le Parquet national financier a ouvert une enquête sur l'utilisation des fonds qui lui étaient alloués. Encore une fois, comme patron de l'administration, vous avez vu ça... il y a des éléments dans le dossier ?
R - Ce n'est à pas moi de le dire mais elle avait une enveloppe de fonctionnement, comme tous les ambassadeurs et ambassadrices qui sont engagés sur des thèmes transversaux comme cela, on appelle cela les ambassadeurs thématiques ; elle n'était pas rémunérée. Elle avait des besoins de financement classique de déplacements ; je pense qu'il n'y a pas aujourd'hui de remarque particulière à faire à cet égard de mon côté.
Q - Vous vous parlez encore ? Vous étiez assez proches avec Ségolène Royal ?...
R - J'ai toujours eu des relations très convenables avec elle.
Q - Merci beaucoup Jean-Yves Le Drian. C'était votre "Grand Jury". Merci à tous de nous avoir suivis. Très belle semaine, à la semaine prochaine.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 6 février 2020