Déclaration de M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances, sur le bilan de l'application des engagements de modération des tarifs d'incidents bancaires pris par les banques en 2018, à Paris le 21 février 2020.

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Circonstance : Présentation du bilan de l'application des engagements de modération des tarifs d'incidents bancaires pris par les b

Texte intégral

Bonjour à tous,


J'ai réuni ce matin, avec le rapporteur général du budget et les parlementaires qui sont ici présents - que je remercie de leur présence - les banques et seize grandes entreprises, en présence du gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, de la présidente du Comité consultatif du secteur financier, Corinne Dromer - que je veux également remercier de sa présence - pour tirer un premier bilan sur la mise en oeuvre des engagements qui avaient été pris auprès du président de la République sur la maîtrise des frais d'incidents bancaires, avant un bilan définitif qui sera tiré avec les associations en mai ou en juin sous l'égide de l'Observatoire de l'inclusion bancaire.

J'insiste sur le fait que les éléments que nous vous présentons aujourd'hui sont des éléments intermédiaires qui devront être confirmés au mois de mai/juin, en liaison étroite avec les associations qui jouent un rôle absolument central sur le sujet.

Je voudrais d'abord rappeler les engagements qui avaient été pris en septembre et en décembre 2018 par les établissements bancaires, à la fois auprès du président de la République et auprès du ministre des Finances :

- le premier engagement était de geler les tarifs bancaires pour tous les Français en 2019 ;
- le deuxième engagement était de plafonner à 25 euros par mois et 300 euros par an les frais d'incidents bancaires pour les publics fragiles et à 20 euros par mois et 200 euros par an les frais d'incidents bancaires pour les bénéficiaires de l'offre spécifique, c'est-à-dire les publics les plus fragiles.

J'insiste sur le fait que ce sont les frais d'incidents bancaires ; les frais bancaires, c'est un autre sujet.

Pourquoi avions-nous demandé ça avec le président de la République ? Tout simplement parce que nous avions constaté, sur la base des éléments transmis notamment par les associations, que ces frais d'incidents bancaires pouvaient atteindre 500 à 600 euros par an pour ces publics. 500 à 600 euros par an pour des personnes qui gagnent à peine 1 000-1 100 euros par mois, c'est évidemment insoutenable.

Donc, il fallait agir : geler les tarifs, plafonnés à 25 euros par mois ou 20 euros par mois pour les bénéficiaires de l'offre spécifique et, pour que ce soit efficace, augmenter aussi, c'était le troisième engagement, le nombre de bénéficiaires de l'offre spécifique.

Il y avait à la fois un cadre très clair et une méthode aussi à laquelle je crois, qui est celui de l'engagement réciproque : contrôler, vérifier et sanctionner des engagements pris par les banques.

Ces engagements ont été vérifiés de manière rigoureuse et impartiale par la Direction générale de la Consommation et de la Répression des Fraudes - et je remercie sa directrice générale d'être présente - et par l'Autorité de contrôle prudentiel, l'ACPR, qui est placée sous l'autorité du gouverneur de la Banque de France. Donc, nous avons une observation et un contrôle qui est fait de manière rigoureuse et indépendante.

Les éléments intermédiaires dont nous disposons montrent que les engagements des banques ont été tenus et je veux remercier les banques qui ont, à ce stade, respecté les engagements qu'elles avaient pris devant le président de la République sur ce plafonnement, ce gel et l'augmentation du nombre de bénéficiaires de l'offre spécifique.

Je vous donne les chiffres tels que nous en disposons aujourd'hui :

- le plafond mensuel de 25 euros de frais d'incidents bancaires est appliqué à 3,3 millions de clients et a permis la diminution des frais pour 1 million de clients. C'est un premier engagement qui a été tenu ;
- s'agissant du nombre de bénéficiaires de l'offre spécifique, il y avait 381 000 bénéficiaires de l'offre spécifique fin 2017. Nous sommes aujourd'hui à 490 000 personnes qui bénéficient de cette offre. Il y a donc bien eu une forte augmentation des bénéficiaires. Nous voulons évidemment, avec les parlementaires de la majorité, faire mieux, mais la direction est la bonne et l'engagement a bien été tenu puisque c'est 109 000 personnes en plus qui ont eu droit à cette offre en 2019 ;
- enfin, troisième engagement tenu, les tarifs bancaires ont effectivement été gelés en 2019. Ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas de points d'amélioration et nous avons travaillé avec les parlementaires - que je remercie pour leur engagement - sur ces points d'amélioration.

D'abord, je le redis, c'est un point d'étape intermédiaire, donc, il n'est pas question de relâcher la pression. Nous voulons continuer à vérifier, de manière très rigoureuse et très régulière, les engagements qui ont été pris par les banques. Le rapport définitif - le Gouverneur vous le confirmera - sera disponible au mois de mai ou au mois de juin.

Il apparaît nécessaire de clarifier ce qu'est ce public fragile, chaque banque ayant ses propres critères de définition du public fragile. Nous allons y travailler avec l'Observatoire de l'inclusion bancaire qui va approfondir ses travaux sur ce point.

Nous avons obtenu ce matin des banques un point très important à mes yeux : les banques feront la transparence totale sur les critères qu'elles retiennent pour la définition du public fragile dans leur rapport annuel. Ça, je pense que c'est une avancée majeure parce que nous avons besoin de cette transparence. Qu'est-ce que le public fragile ? Quels sont les critères ? Quelles sont les règles ? Comment les banques les définissent-elles ? Elles se sont engagées, ce matin, à faire la transparence totale sur la définition du public fragile dans leur rapport annuel.

Enfin, nous sommes bien obligés de constater, avec l'ACPR et avec la DGCCRF, qu'il y a quelques établissements individuels qui n'ont pas respecté les engagements. J'ai donc pris la décision de demander à l'ACPR, avec le gouverneur de la Banque de France, de rendre public les noms de ces établissements qui n'ont pas respecté les engagements pris par la Fédération bancaire française, parce que je ne veux pas que le respect des engagements par l'immense majorité des banques soit discrédité par le comportement inacceptable de certains établissements.

Des engagements ont été pris, ils doivent être tenus, ils seront tenus. Il y a quelques établissements individuels qui ne respectent pas ces engagements, leur nom sera rendu public à ma demande, sur la base des éléments que le gouverneur de la Banque de France et l'ACPR ont à leur disposition.

Enfin, nous avons aussi voulu mobiliser, ce matin, seize très grandes entreprises qui font partie de la vie quotidienne des Français et qui vous adressent des factures régulièrement chaque mois, à vous comme à moi, et qui prélèvent sur vos comptes bancaires le montant de ces factures.

Vous savez qu'il y a beaucoup de frais d'incidents bancaires liés à ces prélèvements et à ces factures, qui sont dus parfois tout simplement à des allers et retours : on envoie la facture, le compte n'est pas approvisionné, puis ensuite le compte est approvisionné, mais entre-temps, vous avez une nouvelle facture qui est tombée, et donc un incident bancaire et des frais qui y sont associés.

Depuis 2009, vous avez la possibilité d'obtenir le remboursement de ces frais d'incidents, mais évidemment, quasiment personne ne demande ce remboursement, c'est trop compliqué. Nous voulons donc simplifier cela.

Ces grandes entreprises, parmi lesquelles vous trouvez ENGIE, SFR, Orange, Free, EDF, pour n'en citer que quelques-unes, ont pris deux engagements très importants :

- le premier, qui sera à mettre en oeuvre d'ici à novembre 2021 – je sais que c'est un peu long, mais c'est techniquement très compliqué – est un dispositif de marquage de tous les prélèvements sur les comptes bancaires des Français pour éviter qu'un prélèvement impayé soit représenté à nouveau, et permettre ainsi aux clients d'exercer leur droit au remboursement des frais d'incidents multiples qui y sont associés. Cela permettra à chacun d'obtenir le remboursement immédiat de ce frais d'incident ;
- le deuxième engagement, c'est d'ouvrir la possibilité à leurs clients de choisir, de manière individuelle, la date de leur prélèvement sur leur compte bancaire. Là aussi, c'est un élément de simplification. Cela évitera qu'il y ait des impayés ; vous aurez le prélèvement au moment où, tout simplement, votre revenu, votre salaire, votre traitement arrive sur votre compte bancaire.

Je pense que c'est une vraie amélioration de la vie quotidienne des Français.

Ces engagements sont ouverts à toutes les entreprises qui souhaiteraient s'y associer et pas uniquement de très grandes entreprises. Je pense que cela doit devenir la règle pour l'ensemble des entreprises françaises le plus rapidement possible.

Voilà le point d'étape que je voulais faire avec vous.

Je retiens, une fois encore, que la méthode que nous avons voulu mettre en place avec le président de la République est une bonne méthode, celle de l'engagement réciproque : contrôler, vérifier, sanctionner le cas échéant.

Nous avons estimé qu'il était désormais nécessaire de rendre public le nom des établissements qui ne respectaient pas les engagements ; c'est une manière de sanctionner. Mais je veux redire à quel point aujourd'hui, cette méthode donne des résultats et que les engagements pris par les établissements bancaires sont à ce stade respectés.


Source https://www.economie.gouv.fr, le 26 février 2020