Texte intégral
MATTHIEU BELLIARD
Votre invité, Sonia MABROUK, c'est Gabriel ATTAL, Secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Education nationale et de la Jeunesse.
SONIA MABROUK
Merci d'être avec nous ce matin sur Europe 1, Gabriel ATTAL. Les établissements scolaires fermés jusqu'au 14 mars dans neuf communes de l'Oise, c'est aussi le cas en Bretagne. Quelle est la règle ? A partir de combien de cas sur un territoire cette décision de fermeture d'établissements est prise
GABRIEL ATTAL
Cette règle est prise, cette décision est prise dès lors que les autorités sanitaires considèrent qu'on est face à un cluster comme ils appellent ça, c'est-à-dire une circulation du virus sur un territoire donné. Je ne crois pas qu'il y ait de nombre de cas minimum ou maximum mais en tout cas, quand un cluster est identifié, on prend ces décisions dans un cadre scolaire. Je rappelle qu'il y en a trois à ce stade dans l'Oise, en Haute-Savoie et dans le Morbihan.
SONIA MABROUK
Alors les alors les élèves domiciliés dans ces communes justement, ces clusters fortement touchés par le coronavirus, s'ils sont scolarisés dans une autre commune, ils pourront très bien se rendre à l'école. Où est la cohérence de ces mesures ?
GABRIEL ATTAL
Ecoutez, vous savez, quand on est dans une situation comme celle-ci qui est une situation où on fait face à une épidémie qui arrive sur notre territoire, forcément on s'adapte. On s'adapte en fonction des données dont on dispose et on prend des décisions en conséquence. Moi j'ai travaillé au ministère de la Santé pendant cinq ans avant d'être élu, et j'ai vu comment fonctionne ce système, j'ai vu les autorités sanitaires, les experts qu'on a qui savent capter les signaux faibles, qui savent recommander au gouvernement et à l'autorité politique les mesures à prendre. Et moi le message que je veux passer, c'est qu'on peut comprendre que certains Français se posent des questions, et c'est vrai que parfois on peut considérer, certains peuvent considérer que des mesures peuvent être paradoxales ou contradictoires. Mais ce qu'il faut que les Français sachent, c'est qu'on a un système de sécurité sanitaire et un système de santé qui est d'une excellence remarquable et qu'on fait tout ce qui est en notre possible. On fait au mieux pour contenir la propagation de cette épidémie.
SONIA MABROUK
Oui. Mais il y a le système de santé, il y a aussi les décisions politiques ; c'est votre responsabilité. Vendredi Jean-Michel BLANQUER nous indiquait à ce micro qu'un total de deux mille élèves n'avaient pas repris l'école car rentrés d'une zone touchée. Ils devaient rester chez eux. Cette recommandation ne vaut plus désormais, ça veut dire que sur les deux mille élèves beaucoup sont revenus en cours ?
GABRIEL ATTAL
Oui, beaucoup sont revenus est en cours à l'exception…
SONIA MABROUK
Quasiment la totalité ?
GABRIEL ATTAL
Oui, quasiment, à l'exception de quelques cas où il y a des symptômes qui peuvent poser une suspicion et donc dans ces cas-là, évidemment, ils restent chez eux. Mais ce qui s'est passé entre vendredi et aujourd'hui, c'est qu'on est passé du fameux stade 1 au stade 2. Le stade 1 consiste à faire tout pour empêcher une épidémie d'arriver sur le territoire. Et donc effectivement, il y avait des mesures de confinement pour tous les élèves dont la famille, ou qui se sont rendus en vacances dans des zones où le virus circulait. Dès ors qu'on est en stade 2, c'est-à-dire que le virus est présent en France et que l'objectif est d'empêcher sa propagation, on passe à d'autres mesures et notamment celles que j'évoquais tout à l'heure sur les clusters.
SONIA MABROUK
Donc ça veut dire plus de confinement pour les élèves, les enseignants rentrés d'une zone à risques, mis à part on met de côté la province d'Hubei. Ça veut dire un retour direct à l'école sans aucune autre précaution ?
GABRIEL ATTAL
Ca veut dire un retour à l'école sauf pour des cas suspects où la évidemment il y a des tests qui sont réalisés.
SONIA MABROUK
Donc écoles fermées dans un cluster en France mais retour possible en classe si vous revenez d'une zone à risque de l'étranger. Il faut qu'on comprenne cela quand même.
GABRIEL ATTAL
Oui. Si vous n'avez pas de symptômes, effectivement les élèves ont pu rentrer à l'école. Mais encore une fois, on est passé du stade 1 au stade 2, c'est les autorités sanitaires, les experts sanitaires…
SONIA MABROUK
En quelques heures. C'était vendredi que Jean-Michel BLANQUER nous disait et priait justement les parents d'élèves de ces enfants-là à rester chez eux.
GABRIEL ATTAL
Mais Sonia MABROUK, on s'adapte heure par heure. On a un système de sécurité sanitaire qui s'adapte heure par heure. Et moi je considère que c'est un élément rassurant pour les Français qu'on s'adapte à une situation qui, de fait, évolue. La situation, elle évolue.
SONIA MABROUK
Adaptation mais, attention, risque de confusion également. Je vous prends un exemple : les voyages scolaires à l'étranger quant à eux sont suspendus, et on peut le comprendre, jusqu'à nouvel ordre. Mais l'annonce, Gabriel ATTAL, a été faite ce dimanche soir alors que certains élèves partaient lundi. Lundi, hier. Pourquoi un tel manque d'anticipation ?
GABRIEL ATTAL
Mais encore une fois, on s'adapte. C'est une situation qui évolue par définition quand vous avez une épidémie.
SONIA MABROUK
On ne pouvait pas anticiper que ces voyages scolaires pouvaient être suspendus ?
GABRIEL ATTAL
Et sur les voyages scolaires, on applique un principe de précaution absolu puisqu'aujourd'hui le Quai d'Orsay recommande de retarder ou décaler des déplacements à l'étranger qui ne sont pas nécessaires. Nous on a pris la décision, Jean-Michel BLANQUER a pris la décision spécifiquement d'annuler tous les voyages scolaires.
SONIA MABROUK
Dimanche soir, à la veille du départ.
GABRIEL ATTAL
Oui. Ecoutez, on s'adapte encore une fois au fur et à mesure. Mais c'est un principe de précaution important parce qu'il y avait aussi des inquiétudes des familles qui posaient des questions et donc évidemment on a…
SONIA MABROUK
Questions de parents d'élèves : les voyages scolaires en cours, est-ce qu'il faut les interrompre ? Est-ce qu'il faut rapatrier les enfants ?
GABRIEL ATTAL
Les voyages scolaires en cours iront jusqu'à leur terme et les enfants rentreront à l'issue, sauf s'il y avait des situations qui nécessitaient un rapatriement. Evidemment on regarde au cas par cas et tout ça est suivi de manière très fine par la cellule de crise du ministère de l'Education nationale et de la Jeunesse.
SONIA MABROUK
C'est important ce que vous dites, Gabriel ATTAL, au cas par cas. Les chefs d'établissement déplorent justement d'avoir été laissés trop seuls dans la décision de maintenir ou d'annuler ces voyages scolaires. Quelle est la règle ? Il n'y en a pas vous leur dites ?
GABRIEL ATTAL
Aujourd'hui la règle, c'est qu'il n'y a pas de nouveau voyage scolaire qui a été organisé depuis que Jean-Michel BLANQUER en a fait l'annonce. C'est une règle assez claire. Vous savez justement, il y a beaucoup de questions qui se posaient avant. Jean-Michel BLANQUER a pris cette décision qui une mesure de précaution. C'est aussi pour entendre l'inquiétude de certaines familles, et donc cette décision a été prise.
SONIA MABROUK
Il y a évidemment les conséquences sanitaires qui sont les plus importantes mais également financière. Parlons-en très concrètement. Pour les annulations de voyages, les voyagistes vont garder je suppose 50 à 75 % des sommes engagées. Qui paye la note ? Les parents, les établissements, les assurances ? J'imagine qu'il y a des parents d'élèves qui se posent la question.
GABRIEL ATTAL
Oui, alors je ne crois pas que ce soient les parents. C'est un sujet qui est regardé en ce moment avec évidemment les tours opérateurs, les organisateurs de voyage. Il y a un sujet plus large sur la question du tourisme. Elisabeth BORNE avait des réunions importantes hier, les différents ministres ont des réunions en ce moment avec leurs secteurs, Bruno LE MAIRE s'agissant du secteur économique évidemment. Donc tout ça est en train d'être regardé mais, encore une fois, on est face à une situation…
SONIA MABROUK
Mais il y a aura des solutions par rapport à ces annulations de voyages scolaires. Ça concerne quand même beaucoup, beaucoup d'enfants.
GABRIEL ATTAL
De toute façon, vous le savez, Bruno LE MAIRE a dit que s'agissant des conséquences économiques, des mesures seraient prises pour en limiter l'effet sur les entreprises françaises, sur l'économie française. Donc à ce titre-là, il faut aussi être rassuré.
SONIA MABROUK
Avec les écoles fermées, Gabriel ATTAL, des solutions d'enseignement à distance sont mises en place d'ores et déjà pour assurer ce qu'on appelle une continuité pédagogique. Mais si le nombre d'écoles fermées se multiplie, est ce que de nombreux justement cours à distance pourraient être mis en place ? Est-ce que cette continuité pourrait être maintenue ? Certains enseignants en doutent.
GABRIEL ATTAL
Oui, ça pourrait être maintenu à la demande de Jean-Michel BLANQUER. On a beaucoup travaillé avec le CNED depuis maintenant plus d'un mois justement pour préparer cette continuité pédagogique dans un cas où des établissements seraient fermés.
SONIA MABROUK
Même pour des dizaines de milliers d'élèves, même pour plus ?
GABRIEL ATTAL
Oui. Aujourd'hui la plateforme qui a été mise en place, les plateformes qui ont été mises en place permettent, je crois, d'accueillir autour de six millions de connexions simultanées, ce qui est beaucoup. Vous avez douze millions d'élèves aujourd'hui dans l'enseignement scolaire.
SONIA MABROUK
Ça c'est sur le papier ou concrètement ça se passe ainsi ?
GABRIEL ATTAL
C'est concrètement que ça se passe ainsi, donc il y a cette continuité pédagogique qui peut passer soit par ce qu'on appelle l'environnement numérique de travail, et donc vous avez dans chaque établissement un espace qui permet de communiquer entre les enseignants, les élèves, les familles ; un autre dispositif porté par le CNED qui s'appelle « ma classe virtuelle » et qui permet aussi d'animer une classe y compris en allant jusqu'à une visioconférence. Tous ces dispositifs sont mis en place et les établissements…
SONIA MABROUK
Généralisables. Ils peuvent être étendus sans problème ni de connexion, ni…
GABRIEL ATTAL
Absolument, c'est tout le travail. C'est tout le travail qui a été fait ces dernières semaines avec le CNED, et moi je veux saluer le travail qui a été mené pour garantir que cette continuité pédagogique puisse se tenir.
SONIA MABROUK
Gabriel ATTAL, vous êtes ministre candidat. Comment vous faites campagne en ce moment ? Vous ne saluez personne ? Vous n'approchez personne ? Comment ça se passe une campagne des municipales aussi singulière ?
GABRIEL ATTAL
Je suis effectivement en campagne pour les élections municipales à Vanves, chez moi. C'est vrai que ce n'est pas évident parce qu'on n'a l'habitude. Moi ça fait six ans que je suis du local, je connais beaucoup de monde et dimanche dernier encore, j'étais sur le terrain, je croisais des personnes que je connaissais. Spontanément c'est vrai qu'on a envie de se faire la bise ou de se serrer la main. Mais on s'adapte, voilà. On ne se fait pas la bise, on ne se serre pas la main mais on se salue quand même.
SONIA MABROUK
Mais qu'est-ce que vous leur dites ? Vous leur dites : venez dans douze jours, allez voter, il n'y a pas de risque par rapport au coronavirus ; vous leur dites cela ? Vous rassurez les gens ?
GABRIEL ATTAL
Bien sûr. Moi aujourd'hui le message que je transmets, qui est le message qui est celui des autorités sanitaires et celui du gouvernement et du Premier ministre, c'est qu'il n'est pas question d'annuler les élections municipales encore une fois parce que…
SONIA MABROUK
A l'heure où vous parlez.
GABRIEL ATTAL
Oui, bien sûr.
SONIA MABROUK
Puisque depuis tout à l'heure, vous dites que votre discours évolue.
GABRIEL ATTAL
On s'adapte évidemment.
SONIA MABROUK
Attendez, vous dites « on s'adapte ». Ça veut dire peut-être dans les prochaines heures ou dans les prochains jours, vous ne seriez pas aussi affirmatif si je vous posais la question « pas de report des élections municipales ».
GABRIEL ATTAL
Par principe comme je vous l'ai dit, on s'adapte jour par jour, heure par heure.
SONIA MABROUK
Donc ce que vous me dites aujourd'hui n'est peut-être pas valable demain.
GABRIEL ATTAL
Aujourd'hui, il n'est vraiment pas question d'annuler les élections municipales. Evidemment des mesures seront prises pour garantir la sécurité sanitaire dans le cadre de ces élections.
SONIA MABROUK
Exemple ?
GABRIEL ATTAL
J'imagine que le ministère de l'Intérieur annoncera des mesures, peut-être la présence de gel hydro-alcoolique et les mesures barrières qui ont été annoncées…
SONIA MABROUK
Mais une question, et justement ça vous concerne, pour les écoles Gabriel ATTAL…
GABRIEL ATTAL
Les mesures barrières qui ont été annoncées, qui sont des mesures, et il faut les rappeler : le fait de se laver les mains régulièrement, de ne pas se serrer la main etc, évidemment qu'elles seront…
SONIA MABROUK
Est-ce que les bureaux de vote sont maintenus dans les cantines et les préaux des écoles et des collèges ?
GABRIEL ATTAL
Evidemment qu'elles seront appliquées, ces mesures.
SONIA MABROUK
Les bureaux de vote ?
GABRIEL ATTAL
A ce stade-là, il n'y a pas de changement sur les élections municipales.
SONIA MABROUK
Elles seront dans les cantines et les préaux des écoles ? Il y aura beaucoup de monde donc dans les écoles.
GABRIEL ATTAL
A ce stade, il n'y a pas de changement sur les élections municipales. Encore une fois, c'est dans une dizaine de jours, donc comme je vous l'ai dit les choses s'adaptent jour après jour et donc évidemment des annonces seront faites.
SONIA MABROUK
Merci Gabriel ATTAL, invité ce matin sur Europe 1. Merci d'avoir été notre invité.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 10 mars 2020