Déclaration de M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé, sur la question du matériel (masques, gel hydro alcooliques...) mis à disposition pour lutter contre l'épidémie du coronavirus, à Paris le 6 mars 2020.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Conseil des ministres européens de la santé, à Bruxelles le 6 mars 2020

Texte intégral

Bonjour,


Le conseil des ministres européens de la santé vient de se terminer. Les 27 membres réunis sont intervenus à leur tour. J'ai porté pour ma part la parole de la France. Nous avons émis, tous, le souhait de renforcer la coopération entre Etats membres, de travailler dans la continuité du partage des informations, de partager toutes les informations en transparence ; qu'il s'agisse des informations factuelles, épidémiologiques, mais également des données scientifiques, mais également des données sur les stocks, les moyens dont nous disposons pour protéger les habitants de la zone euro et les professionnels de santé.

La question du matériel a été abordée. Nous avons rappelé que la France avait procédé à une réquisition de l'ensemble des stocks et du matériel en production sur le territoire national, de manière à pouvoir avoir une visibilité très forte, de permettre de faire en sorte qu'il n'y ait pas de perte en ligne de matériel qui est indispensable pour protéger les soignants, les médecins et également protéger les Français. Et nous avons souhaité que puisse être amorcé avec le même état d'esprit un monitoring de l'ensemble des stocks et des capacités de production, mais également de l'évaluation des besoins, en masques, en respirateurs, en gels hydro alcooliques, dont pourront avoir besoin dans les jours, les semaines, voire les mois qui viennent l'ensemble des habitants de la zone euro, de manière à ce qu'on puisse renforcer là-aussi la coopération, peut-être en protégeant dans un premier temps davantage les zones qui sont les plus touchées aujourd'hui par le virus.

Nous avons dit également que le coronavirus aujourd'hui n'épargne pas de pays européens ou quasiment plus aucun pays européen et qu'un certain nombre de pays frontaliers de la France notamment, je cite l'Allemagne ou encore l'Espagne, enregistrent une évolution parallèle du nombre de cas à celle que nous enregistrons en France.

Dans les autres enjeux que nous avons rappelés, il y a évidemment l'enjeu de la recherche, la recherche d'un vaccin, la recherche de traitement, mais aussi la recherche fonctionnelle qui permet de déterminer des signes cliniques d'alerte, qui permet de graduer la réponse médicale. Le partage de ces données de recherche est absolument fondamental. Nous avons également rappelé que les Etats sont à même de prendre des mesures qui leur semblent importantes pour protéger les populations, comme par exemple inviter les habitants de leur pays à ne pas circuler dans des zones à risque, mais évidemment sans, et personne ne l'a souhaité, aller vers une fermeture des frontières, car cela n'aurait pas de sens d'un point de vue épidémiologique et médical.

Nous avons souhaité adapter le message de prévention, notamment à destination des publics les plus fragiles, à commencer par les personnes âgées, les personnes porteuses de fragilité, de ce qu'on appelle des comorbidités et nous avons également rappelé que les Etats membres peuvent être fondés à prendre des mesures de confinement dans les territoires de circulation la plus active du virus, qui peuvent aller jusqu'à des fermetures des écoles et tout en disant cela, nous avons aussi rappelé un objectif qui nous semble être un objectif européen de poursuite de la vie économique, de poursuite de la vie sociale et de poursuite de la vie démocratique.

C'est donc une réunion extrêmement intéressante, beaucoup d'échanges, beaucoup de discussions, beaucoup de partage, beaucoup de points de convergence et une volonté exprimée par tous de renforcer encore nos coopérations, de renforcer nos coordinations face à la menace épidémique.


Q - Quand vous parlez de renforcer votre coopération, votre collègue belge est sortie tout à l'heure en disant que certains pays, elle n'a pas cité la France, mais on a compris que la France était visée, avaient interdit les exportations au-delà de leurs frontières et que c'était un manque flagrant de solidarité européenne. Qu'est-ce que vous lui répondez ?

R - Ce que la France a fait, c'est qu'elle a prononcé une réquisition, je le rappelle, de tout ce qui est stock et capacité de production, de masques protecteurs, sur le territoire national, non pas en vue de faire du protectionnisme, mais déjà pour nous permettre d'abord d'avoir une vision la plus large possible, la plus exhaustive possible du matériel dont nous disposons. Nous avions commencé à constater une multiplication du prix de certains matériels, de la revente sur des marchés secondaires, voire de la perte en ligne avec de l'exportation, même hors de la zone euro. La réponse de la France, c'est que c'est dans l'intérêt de l'Europe que de réaliser ce monitoring, de réaliser cette cartographie de nos capacités européennes de production des masques, de nos capacités de stockage et des besoins qui doivent être des besoins fondés sur les données de la science et l'expertise.

Q - Vous allez ré-autoriser les exportations, par exemple, vers l'Italie qui a besoin de masques ?

R - Nous invitons, et j'ai souligné toute la solidarité de la France à l'égard de l'Italie, vous savez, je m'étais rendu à Rome dès mardi de la semaine dernière, après l'annonce des premiers cas, pour rencontrer et travailler avec le ministre italien avec lequel, nous sommes en parfaite convergence, comme nous l'étions déjà, il y a dix jours.

Q - Vous avez donné des masques ?

R - La question c'est de faire le point sur les besoins qui sont exprimés par tous les Etats membres, pays par pays, d'être capable de faire le point sur les besoins et sur les capacités de production et les capacités de stockage. Vous savez, on est capable aujourd'hui en France d'avoir cette vision sur ce que nous sommes capables de produire, sur ce que nous sommes capables de distribuer. Nous sommes en train de corréler nos capacités avec les besoins exprimés, fondés sur les données de la science et les recommandations scientifiques. Nous sommes en train de déterminer quelles sont par exemple les personnes qui sont porteuses de fragilité, de maladies chroniques, et qui devront être amenées, en période d'épidémie, à se protéger. Il faut que tout le monde fasse ce travail préparatoire pour que nous puissions ensuite avoir une vision concertée européenne mais croyez-moi, la France ne sera pas exempte de son devoir et de sa volonté de solidarité. La France l'a toujours fait.

Q - Une question concernant l'Assemblée nationale, où en est l'enquête épidémiologique concernant les cas déjà contaminés ? Et avez-vous connaissance d'autres cas qui se seraient déclarés ?

R - Il y a eu une communication par le président de l'Assemblée nationale, je crois, hier soir, confirmant qu'il y a un parlementaire français qui a été confirmé positif au coronavirus et qui est hospitalisé. D'abord, mes premières pensées pour ce collègue député et ses proches ainsi que son groupe politique. J'ai appelé hier Damien Abad pour lui signaler mon amitié et ma volonté de tout faire pour que nous puissions avancer très rapidement dans l'enquête épidémiologique qui s'est mise en place très vite à l'Assemblée nationale, comme partout ailleurs sur le territoire, de manière à repérer des cas contacts, c'est-à-dire des personnes qui ont été en contact rapproché avec la personne malade de manière à protéger les députés, protéger les collaborateurs au même titre que nous protégeons tous les Français lorsqu'il y a une personne malade dans leur entourage.

Q - Vous avez des nouvelles des cas déjà touchés ?

R - Je n'ai pas, à ce stade, de nouvelles. L'enquête suit son cours, vous savez c'est une enquête qui prend du temps, vous appelez les personnes, vous refaites le tracé de l'agenda, avec qui la personne malade a pu croiser, rencontrer, avec qui elle a passé du temps, et puis ensuite nous avons proposé, nous avons demandé aux personnes qui se considèrent comme cas contact de faire attention, de prendre leur température, de réduire leurs activités sociales et de composer le 15 évidemment en cas de symptômes grippaux comme de la fièvre, ou des douleurs, ou des gênes respiratoires.

Q - (Inaudible)

Il y a des appels d'offre européens, il y en a toujours eu, il y en aura toujours. La France n'a jamais dit qu'elle ne souhaitait pas participer aux appels d'offres. Ce que nous souhaitons, encore une fois, c'est faire l'état des lieux des besoins, des capacités de production, c'est extrêmement important pour répondre en période de crise sanitaire mais nous le faisons avec beaucoup de sérieux et l'esprit de solidarité. Je vous remercie.


Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 10 mars 2020