Texte intégral
MARC FAUVELLE
Bonjour Didier GUILLAUME. Est-ce que vous nous entendez ?
DIDIER GUILLAUME
Bonjour.
MARC FAUVELLE
Bienvenue sur France Info. Avant d'évoquer toutes les questions liées à l'agriculture et à l'alimentaire, et elles sont particulièrement nombreuses en ce moment, quelques mots sur l'intervention d'Emmanuel MACRON hier soir. Des primes, des salaires revalorisés pour les soignants, un plan d'urgence également pour l'hôpital. Il aura fallu ce virus pour qu'on redécouvre la situation aujourd'hui dans nos hôpitaux ?
DIDIER GUILLAUME
Il n'aura pas fallu ce virus, puisqu'Agnès BUZYN et le gouvernement avaient déjà mis un plan d'urgence il y a de cela quelques semaines. Un plan d'envergure qui avait été salué. Ça ne suffit jamais évidemment, mais je veux dire que cette prise en compte de la situation de l'hôpital, des salariés, des médecins, du personnel soignant, du médico-social, est pris en compte. Mais là, compte tenu de cette situation, le président de la République hier, dans son intervention, a annoncé évidemment un nouveau plan, un plan massif a-t-il dit, un plan massif d'investissement, un plan massif de revalorisation des carrières. Et oui, si cette crise a permis d'aller encore plus loin, je crois que c'est bien. Le président de la République a pris conscience de cette situation depuis longtemps, et dans cette période-là il faut remercier ceux qui sont en première ligne, comme il l'a dit, ceux qui tous les jours se battent pour notre santé, qui parfois souffrent beaucoup, et il faut les aider, et je pense que le gouvernement, l'Etat, fera tout pour les aider.
MARC FAUVELLE
Ça signifie : moyens quasi illimités désormais pour les services de santé en France ?
DIDIER GUILLAUME
Je ne sais pas si c'est moyens quasi illimités. De toute façon, le président de la République l'a dit, et puis on voit ce qui se passe au niveau européen, j'étais moi-même hier dans un Conseil des ministres européens virtuel, bien sûr, par visioconférence, rien ne sera comme avant, demain ne sera pas comme aujourd'hui. Lorsque l'on voit l'argent qu'il faut mettre aujourd'hui pour lutter contre cette crise, le week-end dernier le Parlement a voté le projet de loi 45 milliards d'euros cash, pour mettre dans la machine France, je crois qu'évidemment il faut regarder les choses différemment, ce n'est pas « les vannes sont ouvertes », c'est « nous allons organiser les budgets en Europe, comme dans les Etats membres, et bien sûr en France, de façon différente encore plus sur les priorités », comme ce gouvernement d'ailleurs essaye de le faire depuis 2017, puisque l'orientation que nous avons faite sur le travail, sur le social, est quand même des choses qui sont, qui étaient en train de porter leurs fruits, avant que cette crise… Vous disiez à l'instant dans le journal que l'activité économique a baissé de 30%, que le PIB baisse évidemment, mais avant cette crise les emplois repartaient, le chômage baissait, l'activité économique était là. Ça montre bien qu'il y aura la possibilité de repartir derrière.
RENAUD DELY
Mais Didier GUILLAUME, vous disiez quand même à l'instant, qu'après cette crise, rien ne sera comme avant, c'est le l'expression que vous venez d'employer, ça veut dire que cette crise, son impact, ses conséquences, elle implique quand même un vrai changement de politique, une vraie inflexion pour tenir compte de ce monde d'après justement.
DIDIER GUILLAUME
Changement de politique, je ne sais pas, en tout cas inflexion évidemment. Vous savez, je ne sais pas l'issue de cette crise, quand elle se produira, d'ailleurs, combien il y aura de mort. Moi je veux penser quand même à tous nos concitoyens, aux familles de ceux qui sont décédés, aux familles des médecins, aux familles du gendarme, aux familles des citoyens simples qui sont décédés. Et puis on commence à voir par exemple Manu DIBANGO, le saxophoniste, bref, donc il va se passer des choses fortes. Nous sommes en confinement, est-ce que ce confinement va durer ? On a plutôt le sentiment que la réponse sera oui. Donc ce que nous vivons là, c'est une première depuis la deuxième Guerre mondiale, il ne faut pas se raconter d'histoires. Donc on ne peut pas en sortir de la même façon. On ne peut pas en sortir en se disant : bon ben voilà, c'est fait, nous passons à autre chose. Non. Parce que cette situation-là doit nous faire réfléchir encore plus sur la mondialisation, doit nous faire réfléchir encore plus sur les nouvelles solidarités, doit nous faire réfléchir encore plus sur l'art d'être Français, comme le disait le président de la République dans sa conférence de Presse de l'année dernière, l'art d'être Français eh bien c'est tout simplement comment notre pacte républicain tient, comment nous vivons ensemble dans la République, comment nous construisons les nouvelles solidarités, en tenant compte à la fois de ce qu'est l'origine du macronisme, protéger et libérer. Protéger nos concitoyens socialement, libérer l'économie parce que c'est l'économie qui crée de l'emploi et de la richesse, mais en mettant l'homme, la femme, l'individu, le citoyen, peut-être encore plus au coeur de cette situation. Mais vous savez, demain sera demain, pour l'instant aujourd'hui nous luttons, nous luttons contre cette épidémie au niveau mondial, au niveau européen, au niveau français, nous luttons pour faire en sorte que l'hôpital, les soignants, aient les moyens. Hier le président de la République était à Mulhouse avec cet hôpital de campagne. Tout est mis, tout est fait, pour donner les moyens à nos soignants de nous sauver le plus possible de vies.
MARC FAUVELLE
Didier GUILLAUME, vous avez lancé avant hier un appel aux Français qui n'ont pas de travail en ce moment, en leur demandant d'aller prêter main forte aux agriculteurs qui s'inquiètent pour leurs récoltes. Est-ce que ce n'est pas complètement contradictoire avec le confinement, et la demande générale qui est faite à tous les Français de rester chez eux ?
DIDIER GUILLAUME
Mais pas du tout. Je crois au contraire que c'est très complémentaire, parce que nous sommes dans une situation où nous devons à la fois rester chez soi, assumer le fait du confinement parce que c'est par le confinement que nous arriverons à lutter le plus vite possible contre la maladie, que nous n'engorgerons pas les hôpitaux. Mais je vais vous dire très clairement, si tous les Français restent chez eux, s'il n'y a plus d'activité économique, eh bien il n'y a plus d'alimentation.
MARC FAUVELLE
Mais, est-ce qu'on risque de propager encore davantage le virus si…
DIDIER GUILLAUME
… il n'y a plus de développement…
MARC FAUVELLE
Si des milliers ou des dizaines de milliers de personnes traversent toute la France ?
DIDIER GUILLAUME
Non, je ne crois pas. Non mais, alors évidemment que j'ai vu, j'ai lu les caricatures que ça a provoqué. Moi j'ai surtout lu et j'ai surtout entendu les centaines et les milliers de messages qui me sont revenus par les vrai gens, pas par les commentateurs. Je ne parle pas pour vous, mais pas pour les commentateurs habituels, en disant : mais de quoi il parle, on confine et puis on va travailler. Non, il ne s'agit pas d'aller à l'autre bout de la France. Il s'agit, lorsque je suis dans ma commune, lorsque je suis confiné, je ne parle pas des gens qui ne peuvent pas bouger, je parle des gens par exemple, je vais prendre l'exemple d'un coiffeur, je parle des serveurs dans les restaurants ou dans la restauration, dans l'hôtellerie, qui ne travaillent pas, qui sont des gens qui aiment bosser, eh bien ils font 3 km, ils sortent de leur village, ils sortent de leur commune, et ils vont ramasser des asperges, ramasser des fraises…
MARC FAUVELLE
Combien de réponses vous avez eu, déjà, Didier GUILLAUME ?
DIDIER GUILLAUME
40 000.
MARC FAUVELLE
40 000 personnes qui sont prêtes à aller travailler.
DIDIER GUILLAUME
40 000 réponses en un jour, c'est énorme.
RENAUD DELY
Et quels sont les besoins, il en faut combien ?
DIDIER GUILLAUME
Nous lançons ce soir et demain avec Bruno LE MAIRE et Muriel PENICAUD, une plateforme. Nous avons mis ce plan de soutien à la filière agroalimentaire, à l'agriculture, une plateforme sur les sites de nos ministères et sur le site de Pôle emploi, pour justement se dire où je suis et qu'est-ce que je peux faire. Evidemment, on ne va pas prendre la voiture pour faire 100 km, mais on peut prendre son vélo ou sa voiture pour faire 5 km et aller travailler. Quels sont les besoins aujourd'hui ? Aujourd'hui, la main-d'oeuvre saisonnière n'est pas là. Elle n'est pas là, ça veut dire que les asperges pourrissent sur place, ça veut dire que les fraises vont pourrir sur place, ça veut dire qu'on ne va pas avoir les besoins essentiels alimentaires. Alors bien sûr qu'il n'y aura pas de pénurie alimentaire, nos entreprises agroalimentaires font un travail remarquable et on pourra continuer à manger des yaourts, on pourra continuer à manger des boîtes de conserve, évidemment, mais il faut une alimentation équilibrée. Et dans l'alimentation équilibrée, il faut des produits frais, et c'est pour ça que j'ai cité à plusieurs reprises le poisson, j'ai cité à plusieurs reprises les fruits et légumes. Maintenant la ferme France, l'agriculture française est en train de donner, le printemps arrive, il fait beau, eh bien il faut qu'il y ait des mains qui aillent ramasser les produits de l'agriculture aujourd'hui, et que parallèlement…
MARC FAUVELLE
On va aborder toutes ces questions Didier GUILLAUME, avec vous si vous le permettez, dans les minutes qui viennent. On s'interrompt juste un instant à 08h41 pour le fil info avec Lauriane DELANOE qui vient de nous rejoindre.
-Fil info-
MARC FAUVELLE
Toujours avec le ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation, Didier GUILLAUME, qui est avec nous jusqu'à 09h00 sur France Info. Didier GUILLAUME, ces 40 000 Français pour l'instant qui se sont portés volontaires pour aller aider les agriculteurs, évidemment seront payés.
DIDIER GUILLAUME
Bien sûr.
MARC FAUVELLE
Et évidemment pourront cumuler, par exemple s'ils touchent le chômage aujourd'hui ou s'ils bénéficient des aides de l'Etat ?
DIDIER GUILLAUME
Eh bien c'est justement le travail que nous avons mené avec Muriel PENICAUD et Bruno LE MAIRE, pour arriver à… L'objectif c'est d'avoir, de mettre en place des dispositions incitatives en matière de travail, et faciliter la rencontre entre les salariés volontaires et les employeurs. Evidemment, vous pouvez employer…
MARC FAUVELLE
Alors, je prends un exemple, si vous le permettez. Pardon Didier GUILLAUME, un exemple précis : il y a plus d'un million de Français aujourd'hui qui sont en chômage partiel, qui touchent une partie de leur ancien salaire tous les mois, qui leur est versé, est-ce que s'ils partent travailler, donner un coup de main à un producteur local, ils continueront à toucher ce chômage partiel ?
DIDIER GUILLAUME
Justement oui. La réponse est oui. Ce que nous avons voulu faire, c'est de mettre des dispositifs efficaces et incitatifs. Evidemment ce n'est pas du bénévolat. J'ai eu des appels, enfin j'ai eu, mon cabinet, le ministère a eu des appels de gens qui disaient : on veut bien donner un coup de main bénévole. Mais ça n'existe pas le travail dissimulé, le travail au noir, comme ça, il faut des contrats de travail, donc ces gens qui iront en agriculture, auront des contrats de travail, et ils pourront cumuler les dispositifs. C'est totalement... bien sûr c'est purement temporaire, mais c'est totalement une première fois, c'est totalement une première, ça ne durera pas après, évidemment, le droit du travail pour nous il est important, mais on pourra cumuler du chômage partiel avec aider, on pourra cumuler des minima sociaux avec le travail de l'agriculture. L'essentiel, l'essentiel c'est de nourrir nos concitoyens. L'essentiel c'est que les femmes et les hommes, les Françaises et les Français puissent arriver dans leurs magasins, dans les grandes surfaces, et puis se dire : je vais pouvoir acheter des produits frais, je vais pouvoir acheter les produits de l'agriculture. C'est ça qui est important, donc oui, nous mettons en place un dispositif exceptionnel, pour que des Françaises et des Français qui aujourd'hui ne travaillent pas, sont en chômage partiel, puissent en toute légalité, juridiquement, aller travailler dans les champs, aller travailler à l'agriculture.
RENAUD DELY
Didier GUILLAUME, est-ce qu'il n'y a pas un autre paradoxe, qui est celui d'inciter donc les agriculteurs à continuer à travailler, à continuer à produire, comme vous venez de l'expliquer à l'instant, et en même temps à leur fermer des débouchés aussi essentiels, par exemple, que les marchés. On a vu des agriculteurs réagir de façon extrêmement hostile à cette décision de fermeture des marchés. On les incite à produire davantage, à continuer de produire, en tout cas, mais on ne leur permet plus de vendre leur production.
DIDIER GUILLAUME
Alors, je vais vous répondre très précisément. Les marchés en gros c'est 15 %, peut-être 20 % de la production qui est passé sur les marchés. Et moi j'avais annoncé dès la semaine dernière que j'étais pour le maintien des marchés, je suis très à l'aise. Mais le Premier ministre a pris la bonne décision. Nous ne pouvions…
MARC FAUVELLE
Ah, ce n'était pas la vôtre, mais c'est quand même la bonne.
DIDIER GUILLAUME
Comment ?
MARC FAUVELLE
Ce n'était pas votre décision, c'est ce que vous venez de nous dire, mais vous l'acceptez tout de même.
DIDIER GUILLAUME
Non, moi je suis pour l'ouverture des marchés, je vais vous le dire. Ce n'est pas que je l'accepte, je partage la position du Premier ministre, on ne pouvait pas faire autrement. Quand on voit à la télévision les images des gens qui s'agglutinaient, quand on voit la télévision des images des marchés de Paris, où d'ailleurs c'était inacceptable, les marchés ne peuvent restés ouverts que dans le cadre des barrières sanitaires mises en place, de la distanciation sociale, c'est pour ça que nous avons travaillé avec la Fédération des marchés, nous avons travaillé avec les producteurs de fruits et légumes, avec INTERFEL, avec la Fédération nationale, pour mettre en place un guide de bonnes pratiques pour les marchés. Et à partir d'aujourd'hui, les maires qui souhaitent maintenir leurs marchés ouverts, le font sur la base de ce guide, les préfets les autoriseront, si et seulement si…
RENAUD DELY
Le Premier ministre a indiqué qu'il pouvait y avoir des dérogations, que les préfets pouvaient demander aux maires, enfin plutôt, que les maires pouvaient demander aux préfets des dérogations. A ce jour, Didier GUILLAUME, y-a-t-il déjà des dérogations, et combien qui ont été sollicitées ?
DIDIER GUILLAUME
Combien, je ne peux pas vous dire. La plus emblématique c'est le maire de Toulouse, qui dit : « Moi je vais laisser mon marché ouvert ». Chez moi, mon marché, à Biarritz, la Halle alimentaire est ouverte, ils ont bien organisé les choses. Le président des commerçants a mis de la rubalise, des barrières, on entre d'un côté, on sort de l'autre.
MARC FAUVELLE
Donc Toulouse va garder ses marchés, par exemple, Didier GUILLAUME, alors que certains villages où parfois il n'y a que ce moyens-là d'aller faire ses courses, ne les verront plus.
DIDIER GUILLAUME
Non, mais les villages dans lesquels c'est le seul moyen de faire ses courses, vraisemblablement les garderont. Le maire ne pourra pas faire ça. Vous savez, le marché se passe deux choses. C'est d'abord du circuit court, c'est l'agriculteur qui amène les bons produits bio ou pas bio, sa salade, ses carottes, ses poireaux, au marché. Et puis les marchés c'est aussi autre chose, c'est le seul endroit où les personnes âgées, les papis et les mamies, descendent de leur maison de ville, descendent de leur appartement, pour acheter quoi ? Une salade, deux pommes de terre, un poireau, pour faire leur nourriture. S'ils n'ont pas ça, ils ne pourront pas faire 5 ou 10 km pour aller dans les grandes surfaces, ce qui est à l'extérieur de la ville ou en zone rurale, qui est à 15 km dans la ville d'à côté. Donc l'objectif c'est bien clair, c'est la sécurité des Français. Ce n'est pas antinomique la sécurité des Français. Le Premier ministre a eu raison de dire : on interdit tous les marchés, parce que la sécurité sanitaire n'est pas là. Mais parallèlement, là où l'organisation est faite, là où il y a du barriérage, là où on respecte les distances de sécurité, la distanciation sociale, là où on met les barrières sanitaires en place, les gestes barrières, alors oui les marchés peuvent exister. Vous savez, là il ne faut pas être manichéen.
MARC FAUVELLE
Quelles consignes vous donnez aux Français quand ils vont faire leurs courses aujourd'hui dans une petite enseigne alimentaire ou dans un supermarché ?
DIDIER GUILLAUME
Mais les consignes sont très claires. Evidemment on ne se dit pas bonjour, on ne s'embrasse pas, mais ça je crois que tout le monde l'a bien compris. On ne s'approche pas à 1 m des gens, on est à plus de 1 m, on s'approche pas à moins de 1 m, on essaie de toucher le moins de choses possible, si on s'alimente, on prend des boîtes de conserve autre chose dans la grande surface, on met dans son dans son caddie. Si on prend des légumes, on ne touche pas tous les légumes, tous les fruits, on prend, on se sert, on rentre chez soi et c'est lorsque l'on arrive chez soi, qu'il faut prendre toutes ces mesures : on se lave les mains, on enlève tous les emballages s'il le faut et on les jette, et après on rince ce qui doit être rincé, et le reste on le met au frigo. Le virus, moi je ne suis pas du tout scientifique, mais reste sur les boîtes, peut rester sur les emballages, donc il faut tout nettoyer. A partir de là, si chacun fait bien ces gestes qui nous ont été dits 1 000 fois et que vous ayez sans cesse vous sur vos antennes, eh bien les choses doivent se passer. Il faut aller faire ses courses parce qu'il faut manger, et il faut manger de façon diversifiée, pas que des pâtes et du riz.
MARC FAUVELLE
Comment est-ce qu'on garde ses distances, Didier GUILLAUME, à la caisse du supermarché, avec le caissier ou la caissière, comment est-ce qu'on reste à 1 m ?
DIDIER GUILLAUME
Eh bien c'est fait, justement ça a été fait, puisque dans tous les supermarchés il y a des traces, des traits qui sont mis par terre du scotch…
MARC FAUVELLE
Ah, je ne parle pas entre les clients, je parle entre la personne qui paie et le caissier ou la caissière.
DIDIER GUILLAUME
Eh bien alors là, pour le coup, moi je veux saluer à la fois les patrons de toutes les grandes surfaces qui ont mis les mesures en place, qui ont mis du plexiglas ou des écrans absolument partout, et qui font qu'il n'y a plus de contact entre la caissière ou le caissier et le client. Le seul contact c'est lorsque je vais payer, c'est mieux de payer avec sa carte bancaire, parce que pour le coup, il n'y a aucun contact…
RENAUD DELY
Est-ce que le plus simple, Didier GUILLAUME, ce ne serait pas d'équiper les caissiers ou les caissières, de masques ?
DIDIER GUILLAUME
Mais c'est la question sur laquelle nous sommes. On sait très bien que les masques, l'autorisation a été donnée, on sait très bien que les caissières et les caissiers auront des masques, vraisemblablement certains peut-être en ont déjà…
RENAUD DELY
Quand ?
DIDIER GUILLAUME
Aujourd'hui on ouvre la possibilité de commandes de masques, et de les donner à des secteurs prioritaires. Aujourd'hui, l'alimentation après la santé, est le secteur prioritaire. L'agroalimentaire est un secteur prioritaire, et l'agriculture l'est aussi, parce que c'est toute la chaîne d'approvisionnement alimentaire. Et quand je vois les efforts qui ont été faits par l'ensemble des enseignes et l'ensemble des grandes surfaces, qui font un effort pour relocaliser leurs achats, qui font des publicités pour dire « achetez français », parce que nous, nous commandons français, parce que nous aurons des fruits et légumes français, et pas des Pays-Bas ou pas d'Espagne. Parce que nous allons ce week-end avoir du poisson français, parce que la filière pêche est en grande grande difficulté. Mais tout cela c'est important. Vous savez, les nouvelles solidarités sont là, aujourd'hui il faut que chacun prenne conscience que cette situation, elle est extraordinaire au sens de pas ordinaire. Nous n'avons jamais vécu cela. Il peut y avoir encore beaucoup de morts et beaucoup de gens en grande difficulté. Donc chacun doit être responsable. Et on ne va pas se balader dans les rues comme certains l'ont fait.
MARC FAUVELLE
On va continuer d'en parler si vous voulez bien, dans quelques instants. 08h51, c'est tout d'abord Lauriane DELANOE pour le Fil info.
-Fil info-
MARC FAUVELLE
Didier GUILLAUME, plusieurs grandes enseignes de la distribution comme LIDL et CARREFOUR, notamment, viennent d'annoncer qu'elles allaient réduire leurs horaires d'ouverture et fermer un peu plus tôt le soir. Est-ce que là encore ce n'est pas un peu paradoxal, est-ce que ça ne risque pas de mettre encore plus de monde dans les supermarchés et d'augmenter le risque de contamination ?
DIDIER GUILLAUME
Non, nous en avons beaucoup parlé, puisque nous sommes quotidiennement en contact téléphonique. Je pense qu'aujourd'hui, toutes les entreprises, les entreprises agroalimentaires, les coopératives agricoles, qui font tout l'amont et sans lesquelles il n'y aurait rien sur les rayons des supermarchés, s'aperçoivent qu'il y a un absentéisme qui est là, réel, qui est de 7, 10, 20% à certains endroits, et donc il faut absolument faire des réorganisations. Or ils s'aperçoivent, et on a vu les courbes, que nos concitoyens ne vont plus faire leurs courses en fin d'après-midi maintenant, puisqu'étant confiné, on ne va pas faire ses courses avant ou après le travail, on le fait dans la journée. Et donc l'idée c'est de réduire un petit peu les heures d'ouverture, afin de gagner du temps de travail des salariés, pour avoir plus de monde en journée, au coeur de la journée, là où il y a plus de monde. Mais justement tout cela en respectant les gestes barrières, il n'est pas question que qu'on déferle comme ça dans un grand magasin, comme on le voit parfois à la télévision lorsqu'il y a des soldes, c'est fini toute cette histoire. Chacun rentre avec la distance de sécurité, il y a des contrôles, les gens comptent, il y a des vigiles à l'entrée, et je crois vraiment que les choses se passent bien, et pourquoi elles se passent bien ? Parce que là, moi je ne fais pas un commentaire, comment dire à la radio, je vois ce que sont nos concitoyens, je vois ce que font nos concitoyens, et les Françaises et les Français sont des gens qui sont vraiment formidables, parce qu'ils savent s'en sortir, ils savent se réorganiser.
RENAUD DELY
Didier GUILLAUME, la question qui se pose c'est aussi celle évidemment du prix qui concerne directement les consommateurs, la baisse de certaines productions peut produire des inflations de certains produits frais, est-ce que vous allez prendre des mesures pour empêcher ces hausses de prix, est-ce que vous allez encadrer certains prix ?
DIDIER GUILLAUME
Alors pour l'instant, il n'en est pas question. D'abord, c'est très compliqué, et puis nous vivons dans une économie ouverte, mais là encore nous avons…
RENAUD DELY
Ce qu'on peut faire pour le gel hydro-alcoolique, on ne peut pas le faire pour les poireaux.
DIDIER GUILLAUME
Je crois qu'il faut absolument que chacun gagne sa vie, et l'engagement de la grande distribution c'était justement de ne pas augmenter les prix des produits frais, de ne pas augmenter…
RENAUD DELY
Mais il est respecté cet engagement, vous en êtes certain ?
DIDIER GUILLAUME
Nous regardons évidemment. Alors, en période de coronavirus il n'y a pas les contrôles de la Direction de la concurrence et répression des fraudes, évidemment, mais nous regardons, nous partons sur la bonne intelligence, et puis ils nous remontent des choses, il nous est remonté qu'à tel endroit, et je veux pas citer, dans un département du Sud-ouest, on avait vu des asperges beaucoup beaucoup trop chères, et ça a été signalé à celles et ceux qui…
MARC FAUVELLE
Donc ce sont les consommateurs désormais qu'ils peuvent le signaler ?
DIDIER GUILLAUME
Non, mais non, mais écoutez…
MARC FAUVELLE
Pardon je pose la question Didier GUILLAUME, vous venez de nous dire que la répression des fraudes ne pouvait plus, et on le comprend bien, faire des contrôles.
DIDIER GUILLAUME
Mais la répression fait son travail, mais enfin on ne fait pas autant de contrôles aujourd'hui avec le confinement. Aujourd'hui, j'en appelle à la responsabilité de tous, la responsabilité de la grande distribution, et elle est responsable, et elle ne fait pas n'importe quoi…
RENAUD DELY
Concrètement, ça veut dire quoi, Didier GUILLAUME ?
DIDIER GUILLAUME
Concrètement, ça veut dire…
RENAUD DELY
Et est-ce que vous en appelez au consommateur aussi, si jamais il remarque des inflations injustifiées de certains produits, effectivement de vous alerter, d'alerter les pouvoirs publics ?
DIDIER GUILLAUME
Evidemment. Mais évidemment, si un consommateur remarqué un prix qui était multiplié par X, par 2, 3 ou 4, il faut immédiatement qu'il prévienne les services de Bercy, enfin localement, qu'il prévienne, qu'il appelle la préfecture, la sous-préfecture, qu'il prévienne les services de l'emploi, pour regarder cela. Vous savez, je ne crois pas que ce soit ça, que l'on constate, aujourd'hui nous nous battons, la grande distribution se bat pour une chose, pour approvisionner ses rayons. Moi qui suis en charge de la sécurisation de la chaîne alimentaire, mon problème aujourd'hui, c'est que tous les produits et notamment les produits frais, le poisson, les fruits, légumes, les yaourts, les produits lactés arrivent dans les rayons des grandes des grandes surfaces, c'est ça notre objectif aujourd'hui. Et les responsables des grandes surfaces, les patrons se sont engagés à ne pas augmenter leurs prix et en même temps il faut que les agriculteurs gagnent leur vie. Donc moi j'aimerai que les rayons traditionnels, ceux de la viande, du fromage et de la découpe puissent rouvrir. J'étais avec un patron de grande distribution hier au téléphone qui me disait on est obligé de fermer un peu ces rayons de découpe parce qu'il nous manque des salariés, mais on va faire différemment. On va découper préalablement la viande, le fromage, on va le mettre en barquette et on pourra le trouver dans les rayons. Aujourd'hui chacun s'adapte parce qu'il faut être agile, il faut être mobile, nous vivons une crise sans précédent et la priorité des priorités c'est que les Français puissent se nourrir et puissent se nourrir avec des produits de qualité. Et je vous assure, on retrouve là, les bienfaits de l'agriculture. Hier le président de la République évoquait les premières lignes, 2ème ligne, la 3ème ligne, la 1ère ligne est absolument exceptionnelle, c'est celle des soignants mais la 2ème ligne, celle que l'on ne voit jamais, celle de ceux qui mettent en rayon, celle des caissières, celle des agriculteurs qui produisent, celle de ceux qui travaillent dans les entreprises agroalimentaires en 3/8 ou dans les coopératives agricoles, elle est essentielle. Et cette 2ème ligne, elle tient et elle tient pour que nos concitoyens continuent à se nourrir sans avoir des augmentations, des inflations de prix, aujourd'hui l'heure n'est pas à faire des coups sur les prix, l'heure est à assurer l'alimentation de nos concitoyens et c'est ce qui est en train de se passer
MARC FAUVELLE
Un dernier mot si vous le permettez Didier GUILLAUME est-ce que vous déconseillez aujourd'hui aux Français qui nous écoutent d'aller faire leurs courses en famille.
DIDIER GUILLAUME
Oui, oui alors bon ce n'est pas de mon ressort de dire cela, mais je pense que, aller dans une grande surface, on a été interpellé, j'ai été interpellé à plusieurs reprises, en famille, à 4 ou 5, je pense que ce n'est pas bien. Ce n'est pas bien parce qu'on peut propager le virus, on peut aller faire ses courses seules, on descend de chez soi, de son immeuble, on va dans sa supérette ou dans son hyper, on fait ses courses et puis on rentre à la maison. Je vous assure aujourd'hui, quand on voit et ce qui m'a été cité parce que moi je ne suis pas sorti depuis 10 jours de ce ministère, mais quand on me dit que l'on voit des familles entières, on le voit à la télé qui sont à 3 ou 4 à pousser le chariot, ce n'est pas bien, on fait prendre des risques aux enfants qui pourraient être infectés, on fait prendre des risques à ses voisins, donc la solidarité, les nouvelles solidarités, respectons les gestes barrières, respectons le confinement et parallèlement allons s'approvisionner pour manger et si on peut, allons travailler, il faut que l'agriculture continue, que les services essentiels, que les services vitaux continuent, comme l'alimentation, comme l'énergie, comme les déchets, vous voyez bien qu'il y a un discours qui est compliqué à comprendre pour nos concitoyens, je le comprends très très bien, c'est restez chez vous et à la fois allez travailler et donc ce discours il est difficile à entendre, mais c'est ça la réalité, restez chez vous parce que le confinement est indispensable, c'est la première réponse à la lutte contre ce Covid.
MARC FAUVELLE
Et c'est un moyen collectif d'éradiquer cette épidémie.
DIDIER GUILLAUME
Oui, mais en même temps il faut aller travailler parce qu'il faut ramasser les poubelles, il faut qu'on continue à être éclairé ou chauffé, il faut se nourrir.
MARC FAUVELLE
Merci à vous Didier GUILLAUME, ministre de l'Agriculture et l'Alimentation.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 27 mars 2020