Texte intégral
ALBA VENTURA
Bonjour Gérald DARMANIN.
GERALD DARMANIN
Bonjour.
ALBA VENTURA
Le Premier ministre a dit beaucoup de choses hier, mais nous avons besoin d'éclaircissements, on dit que l'on déconfine le 11 mai, mais avec des transports qui ne sont pas totalement assurés, on déconfine pour inciter à la reprise du travail tout en invitant à rester en télétravail. On déconfine, mais pour l'école primaire, ce sera sur la base du volontariat avec des classes de 15 élèves. Dites-moi, Gérald DARMANIN, ce n'est pas un déconfinement, c'est un confinement amélioré ?
GERALD DARMANIN
Il faut bien voir le moment incroyable, extraordinaire au sens le plus littéral du terme que nous vivons, pas simplement la France, l'humanité, jamais un gouvernement n'a eu à être confronté à des décisions aussi difficiles, d'abord de confinement, pour sauver des vies, et c'est la première fois que l'homme arrête volontairement une économie pour sauver des vies, et par ailleurs, de déconfiner, comme vous le dites, pardon pour utiliser ces mots qui sont désormais dans notre vocabulaire, de déconfiner une population qui a sans doute, en partie, peur bien sûr de ce virus, mais aussi des conséquences du confinement. Et on ne connaît pas tout de ce virus, il faut aussi avoir l'honnêteté de le dire, et il l'a dit le Premier ministre, on va apprendre à vivre avec le virus alors qu'aujourd'hui, nous n'avons pas de traitement, que nous n'avons pas de vaccin, nous ne savons pas quand ce traitement ou quand ce vaccin va arriver, et pourtant, le confinement, il a aussi des inconvénients. Alors, le Premier ministre, il fait au mieux avec les membres de son gouvernement pour être le plus pragmatique possible, vous savez, c'est un élu local, moi, je suis un élu local, et on essaie de faire les choses le plus pragmatiquement possible.
ALBA VENTURA
Et justement, je voudrais vous demander à vous, premier adjoint de Tourcoing, comment va s'organiser le retour à l'école élémentaire chez vous, qu'est-ce que vous allez dire, Gérald DARMANIN, à la moitié des parents, parce que les classes, ce n'est pas 15 élèves, c'est-à-dire que là, on parle seulement de la moitié des effectifs, qu'est-ce que vous dites à une partie des parents d'élèves ?
GERALD DARMANIN
Bon d'abord, il faut peut-être rappeler quelle est la règle proposée par le Premier ministre, parce que je ne suis pas tout à fait sûr que tout le monde suit les discours en direct à l'Assemblée nationale même si celui-ci a dû sans doute être très suivi. A du 11 mai, en fait, pour les enfants, le 12, la prérentrée des professeurs, si j'ose dire, sera le 11, à partir du 12 mai, sur la base du volontariat en faisant confiance aux maires, parce que c'est une grande compétence pour les maires de s'occuper des écoles, non pas de l'enseignement, mais des murs et de l'accueil, en faisant confiance aux maires, et selon les départements qui sont classés rouge : attention, c'est le virus qui circule beaucoup, vert : les choses vont mieux, les enfants, sur la base du volontariat donc, pourront rentrer dans les écoles maternelles…
ALBA VENTURA
15 enfants par classe ?
GERALD DARMANIN
Quelques instants, les enfants pourront rentrer dans les écoles en maternelle élémentaire, vous me posez la question de Tourcoing, Tourcoing n'est pas le 16ème ou le 8ème arrondissement de Paris, à Tourcoing, nous avons déjà bénéficié des mesures mises en place notamment par Jean-Michel BLANQUER de dédoublement des classes, donc pour la moitié des parents d'élèves que vous évoquez, pour la moitié des enfants qui rentrent dans les classes de Tourcoing, nous avons déjà pas plus de 15 élèves par classe. Donc les choses se font assez facilement si vous voyez ce que je veux dire, il y a des classes et il y a des villes où il n'y a pas ce dédoublement. Que vont faire les maires ? Eh bien, ils vont être le plus pragmatique encore possible, comme quand on leur a demandé de dédoubler les classes, ils vont essayer, je l'imagine, sans doute avec les moyens du bord, et puis, ils se tourneront vers l'Etat, c'est tout à fait normal, pour voir comment on peut aménager classes, comment on peut faire, de façon très pragmatique, cette rentrée…
ALBA VENTURA
Oui, mais on ne voit pas bien comment on va choisir les élèves, pardon…
GERALD DARMANIN
Eh bien, d'abord, sur la base du volontariat, d'abord, on ne peut pas dire tout et son contraire, on ne peut pas dire : les parents veulent mettre leurs enfants à l'école, et puis, en même temps dire : dès la rentrée du 12, 30 élèves par classe…
ALBA VENTURA
Vous pensez qu'il aurait fallu reprendre sereinement au mois de septembre ?
GERALD DARMANIN
Alors, pardon de le dire, mais je ne pense pas que ce soit un raisonnement qui soit conforme à l'intérêt des enfants. Moi, je voudrais partager avec vous le fait que quand on vit dans un appartement, avec une grande bibliothèque, des parents qui sont cadres, qu'on a le temps de s'occuper d'eux parce qu'on n'est pas caissière chez AUCHAN, et que, par ailleurs, on a l'habitus culturel pour pouvoir s'occuper de ses enfants, il n'y a pas tellement de problèmes, même s'il peut y en avoir évidemment, ce n'est jamais facile, mais quand on est 4, 5 dans un appartement, qu'on ne parle peut-être pas très bien français, qu'on ne sait pas forcément très bien lire ou écrire, parce qu'on se lève tôt le matin, parce qu'on va faire le routier pour apporter les fruits et légumes dans les supermarchés des grandes villes, et qu'on a des enfants...
ALBA VENTURA
Oui, tout à fait, c'est une mesure sociale, oui…
GERALD DARMANIN
Dont le seul espoir, c'est la République et l'école de la République, je crois qu'on ne peut pas se dire que, indéfiniment, les enfants ne peuvent pas aller à l'école, la République, c'est que les enfants vont à l'école, ils apprennent à lire, à écrire et à compter, et que l'enfant de bourgeois comme l'enfant de pauvre, il a la possibilité d'avoir le même professeur.
ALBA VENTURA
Gérald DARMANIN, une question sur le travail, si vous devez résumer ce qu'a dit le Premier ministre hier, vous dites : retournez travailler ou vous dites : restez chez vous en télétravail ?
GERALD DARMANIN
Mais les deux, mon Capitaine ! Le Premier ministre a dit qu'il fallait continuer là où c'était possible le télétravail, et je pense que beaucoup de Français, beaucoup d'entreprises, beaucoup d'administrations, c'est le cas évidemment de Bercy également, doivent continuer à encourager ses agents qui peuvent télétravailler, mais tout le monde ne peut pas télétravailler. Tout le monde n'a pas le loisir d'avoir les outils informatiques, la connexion Internet, et même le métier qui permet de télétravailler. Donc tous ceux qui peuvent télétravailler et tous ceux qui peuvent éviter effectivement d'être dans les transports en commun ou d'être dans les locaux d'entreprises, eh bien, il faut qu'ils continuent à pouvoir télétravailler, que les employeurs les encouragent, et tous ceux qui ne peuvent pas télétravailler sont encouragés, si j'ose dire, quand les conditions sanitaires sont respectées, de pouvoir venir au travail.
ALBA VENTURA
Alors, le dispositif de chômage partiel restera en vigueur jusqu'au 1er juin, ça, c'est une autre annonce qu'a faite le Premier ministre. Combien de personnes vont être concernées ?
GERALD DARMANIN
Ecoutez, aujourd'hui, il y a 10 millions de personnes qui sont au chômage partiel, je ne sais pas si vous vous rendez compte de ce que c'est, ça n'est évidemment jamais arrivé, ça coûte 25 milliards d'euros, peut-être plus, et c'est quoi, c'est la nationalisation des salaires, c'est l'Etat qui a pris ses responsabilités. Le président de la République a demandé à son gouvernement que les salariés ne puissent pas être licenciés de façon massive, comme ça se passe dans d'autres Etats, et que lorsque les entreprises reprendront, elles pourront reprendre très rapidement leurs salariés, et on n'a ni plombé les entreprises par des salaires qu'elles ne pouvaient pas payer, ni plombé, si j'ose dire, les salariés parce qu'ils auraient dû être licenciés devant la crise économique qui s'ouvre. Par ailleurs, avec eux…
ALBA VENTURA
Et ça peut continuer jusqu'à quand, Gérald DARMANIN, le chômage partiel ?
GERALD DARMANIN
Eh bien, écoutez, si j'ose dire, il va accompagner le déconfinement, ce chômage partiel. Les mesures que nous avons prises sans précédent, qui ont des coûts budgétaires extrêmement importants, mais qui sont beaucoup plus importants si jamais nous ne faisons rien, parce qu'il vaut mieux l'endettement, même si c'est préoccupant, que la faillite, évidemment, donc nous continuerons les dispositifs en lien avec le confinement. Donc le Premier ministre a eu raison de rappeler la date qu'il a évoquée du mois de juin, parce que ça va à peu près avec la date qu'il a évoquée, du déconfinement. Par ailleurs, on va continuer les activités de chômage partiel, on a fait des choses de protection sociale très importantes, on l'a fait pour les employés à domicile, tous les gens qui sont femmes ou hommes de ménage, qui jardinent, qui sont assistantes maternelles ou assistants maternels chez vous, il y a 361.000 salariés qui bénéficient de ce chômage partiel, qui n'existait pas avant la crise, nous l'avons créé de toutes pièces à la demande du président de la République, et ça va continuer. Et là, je vous annonce aussi ce matin qu'on va faire, à la suite des annonces du Premier ministre, la continuité de ce chômage partiel, oui, pour tous les gens qui sont salariés à domicile, il y en a aujourd'hui 55 % qui sont en CESU, je pense que des gens qui embauchent des salariés à domicile voient ce que je veux dire, pour pouvoir continuer à avoir des gens au chômage partiel, alors que la femme ou l'homme de ménage ne vient plus chez vous, et 32 %, des assistants maternels, dans le système qu'on appelle Paje, qui, eux, vont continuer aussi à toucher ce chômage partiel, et on le continuera effectivement jusqu'au mois de juin.
ALBA VENTURA
Combien ça coûte tout ça, le chômage partiel ?
GERALD DARMANIN
Alors, en tout, ça coûte, je vous le disais, dans le dernier budget que nous avons présenté, entre 24 et 25 milliards d'euros pour le confinement qui avait été évoqué…
ALBA VENTURA
Et là aussi, ça va monter…
GERALD DARMANIN
Ça dépend beaucoup du nombre de gens qui effectivement y sont, il y a quand même une reprise économique qui se constate, elle est lente, elle est progressive, mais il y a quand même aujourd'hui des entreprises qui réouvrent et qui réembauchent leurs salariés…
ALBA VENTURA
Alors, justement, Gérald DARMANIN le Premier ministre a parlé de risque d'écroulement de l'économie, c'est un mot très fort, qu'est-ce qu'il a voulu dire ?
GERALD DARMANIN
Eh bien, il a voulu dire que l'économie c'était sans doute aussi la vie, le confinement, il a été fait pour protéger des vies, il y a un coût du confinement, un coût démocratique, les élections sont reportées, un coût sanitaire, il y a des gens qui ne se font pas soigner en dehors du coronavirus, et c'est inquiétant, il y a des coûts sociaux, on en a parlé pour les enfants, mais il y a un coût économique. Il y a des dizaines de milliers, des centaines de milliers d'entrepreneurs qui ont mis l'énergie d'une vie, parfois beaucoup d'argent personnel, et qui aujourd'hui sont très inquiets évidemment de pouvoir reprendre leur vie normale, il y a des restaurateurs, j'entendais hier Bruno VERJUS sur votre antenne, qui sont évidemment très inquiets pour leur outil de travail, pour leur restaurant, l'amour de leur vie sans doute, pour leurs salariés…
ALBA VENTURA
Vous avez vu qu'ils réclament une TVA à 5,5 %, est-ce que vous leur répondez favorablement ?
GERALD DARMANIN
Eh bien, aujourd'hui, on n'est pas encore… en tout cas, moi, je ne suis pas encore le ministre qui s'occupe des relances, sans doute Bruno LE MAIRE et Muriel PENICAUD le font, moi, j'essaie d'être le ministre de l'urgence, le ministre de l'urgence, ce n'est pas de baisser un impôt quand il n'y a pas de chiffre d'affaires, parce que la TVA, vous la payez quand il y a de la consommation, là, il n'y a pas de consommation, les restaurateurs sont fermés. On fait par contre, nous, beaucoup d'aides en direct, des indépendants, de manière générale, ils savent qu'on aide, ils savent qu'on aide également leurs salariés, donc pour l'instant, il ne faut pas baisser des impôts alors qu'il n'y a pas de consommation, je pense qu'il faut surtout faire des aides directes, ensuite, viendra le moment de la relance, et le secteur de la restauration sera concerné par ce secteur de la relance, comme l'a dit le président, et notamment l'annulation totale des charges, pour les impôts, nous verrons dans quelques jours.
ALBA VENTURA
Dans quelques jours, c'est-à-dire ?
GERALD DARMANIN
Eh bien, les plans de relance évoqués par le Premier ministre, vous savez, chaque secteur économique va être aidé, il y avait le moment de l'urgence, comment les sauver, comment les sauver directement par l'annulation de charges, comment les sauver par le chômage partiel pour leurs salariés, comme on les sauver par ces avances, ces prêts garantis par l'Etat, enfin, bref, tout ce qu'a fait Bercy pour les aider à la demande du président de la République, il y a aujourd'hui la résilience, comment on reprend peu à peu l'activité, et d'ailleurs, les restaurateurs se posent sans doute la question : quand est-ce que je reprends mon activité, vous avez vu que la date sur laquelle on a un rendez-vous, c'est le 2 juin, c'est quand même assez long pour des gens qui évidemment ont envie de retravailler et ont envie de reprendre le chemin du fourneau ou de la table, et puis, après, il y aura le moment de la relance qui va venir évidemment extrêmement vite pour les secteurs économiques…
ALBA VENTURA
Mais donc avec de possibles baisses d'impôts, vous allez annoncer de possibles baisses d'impôts ?
GERALD DARMANIN
Je ne sais pas ce que choisira le président de la République, en tout cas, moi, j'ai déjà eu l'occasion de dire qu'il fallait parier, comme il l'a fait depuis 3 ans, sur la croissance, et que ce qui c'est à exclure, c'est des augmentations d'impôts, ça, je pense que c'est à exclure, mais après, la relance, elle peut se faire soit par des baisses d'impôts, soit par de l'aide directe, on verra ce que choisira le gouvernement.
ALBA VENTURA
Vous avez mis 110 milliards d'euros sur la table, ça fait un mois qu'il y a des rallonges de dizaines de milliards, vous avez aidé l'automobile, vous avez aidé AIR FRANCE, il va falloir un troisième budget rectificatif, une autre rallonge encore plus forte ?
GERALD DARMANIN
Je ne le sais pas, et le gouvernement sera pragmatique, s'il le faut, on le fera, vous savez, les crédits de l'Etat, ils doivent être votés par le Parlement, c'est pour ça qu'on fait des budgets rectificatifs pour l'Etat et pas pour la Sécurité sociale, et on verra bien…
ALBA VENTURA
Et il vous semble que ce sera nécessaire ?
GERALD DARMANIN
On le verra, pour l'instant, à l'heure où je vous parle, ça ne l'est pas, nous avons prévu beaucoup d'argent, il faut bien l'avouer, dans ce deuxième budget, par exemple, on est passé d'un milliard pour le fonds des indépendants à sept, comme ça, il y a vraiment, si j'ose dire, encore de l'argent, et on n'est pas obligé de retourner devant le Parlement, mais s'il le faut, dans 15 jours, dans 3 semaines, dans 1 mois, eh bien, nous le ferons.
ALBA VENTURA
Gérald DARMANIN, on attend les chiffres officiels de la croissance demain, le Gouverneur de la BANQUE DE FRANCE avait dit, avait indiqué une chute de 6% de notre richesse le 7 avril, 15 jours plus tard, il avait dit 8 %. A quoi il faut s'attendre demain matin, à votre avis, la tendance ?
GERALD DARMANIN
Je ne le sais pas, en tout cas, ces chiffres seront évidemment pas bons, mais pardon de le dire de façon aussi évidente à vos auditeurs, ce que je peux vous dire, c'est que, nous, on regarde aussi les chiffres de pertes de recettes, au dernier budget, on avait prévu 43 milliards d'impôts en moins, parce qu'on dit toujours, l'Etat, il dépense 110 milliards, c'est vrai, c'est beaucoup d'argent, ça n'est jamais arrivé, mais par ailleurs, il a des recettes en moins et il a des impôts qui ne rentrent pas, des impôts sur les sociétés, des impôts sur la consommation, et c'est 43 milliards, donc dès que la croissance est négative, évidemment, il y a moins d'impôts qui sont payés, et la différence entre des impôts que nous n'encaissons plus, des cotisations sociales, vous avez vu le trou de la Sécu, 41 milliards d'euros que nous n'encaissons plus, eh bien, il y a fort à parier que, avec cette croissance négative qui va continuer, il y aura moins d'impôts qui vont être encaissés, il y aura moins de cotisations pour la Sécurité sociale, et pourtant, vous aurez constaté que l'Etat est au rendez-vous de l'aide économique, que les pensions de retraite sont payées à l'heure dite, que les prestations sociales sont payées à l'heure dite, tout ça parce que nous avons un Etat et des institutions qui sont bien gérés, qui peuvent emprunter, et qui protègent les Français.
ALBA VENTURA
Merci. Merci beaucoup Gérald DARMANIN. Merci à Jonathan GRIVEAU, notre technicien, également.
YVES CALVI
10 millions de Français au chômage partiel, ça va coûter 25 milliards, vient de rappeler le ministre des Comptes publics, c'est la nationalisation des salaires assumée par le gouvernement, mais il y a aujourd'hui des entreprises qui embauchent nous a dit Gérald DARMANIN.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 30 avril 2020