Déclaration de MM. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics, et Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics, sur le soutien de l'économie face à la crise due au covid-19, à l'Assemblée nationale le 9 juin 2020.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Gérald Darmanin - Ministre de l'action et des comptes publics ;
  • Olivier Dussopt - Secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics

Circonstance : Débat à l'Assemblée nationale sur le soutien à l'économie face à la crise due au covid-19

Texte intégral

M. le président. L'ordre du jour appelle le débat sur le thème : « Comment la sincérité et le rétablissement des finances publiques depuis 2017 favorisent-ils le soutien à l'économie dans la crise du covid-19 ? »

La conférence des présidents a décidé d'organiser ce débat en deux parties : dans un premier temps, nous entendrons les orateurs des groupes, puis le Gouvernement ; nous procéderons ensuite à un échange de questions et réponses.

(…)

M. le président. Nous en avons terminé avec les orateurs des groupes.

La parole est à M. le ministre de l'action et des comptes publics.

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics. J'ai l'impression que, pour beaucoup d'orateurs, le monde d'après, ce sont les discours d'avant : quels que soient les événements, ils reprennent des discours visant à montrer que le Gouvernement et la majorité se trompent. Je ne vous demande pas de lire le New York Times tous les jours et de constater, comme ce journal, que le Président de la République a été au rendez-vous des grands chefs d'État qui ont protégé leur nation…

M. Pierre Cordier. Grand chef d'État !

M. Gérald Darmanin, ministre. Bien sûr ! Nous pouvons nous réjouir qu'Emmanuel Macron occupe cette fonction, et que le second tour de l'élection présidentielle n'ait pas porté Mme Le Pen à la tête du pays.

M. Pierre Cordier. Ça, c'est sûr !

M. Gérald Darmanin, ministre. Heureusement car, confronté à la crise, il a pu accomplir un travail majeur de soutien à l'économie qui n'a été possible que parce que nous avions précédemment fait des efforts. Nous pourrions tous ensemble, nous accorder sur la nature de la crise. Elle n'est pas due à des décisions gouvernementales…

M. Jean-Paul Dufrègne. On n'a pas dit ça !

M. Éric Coquerel. Si, par son ampleur !

M. Gérald Darmanin, ministre. Franchement, monsieur Coquerel, vous poussez l'animosité envers la majorité et le Gouvernement jusqu'à prétendre qu'une décision de ce dernier a mené le 33 tonnes du covid-19 à percuter la totalité des pays occidentaux !

M. Éric Coquerel. Je parle du fait de n'avoir ni masques ni tests, et de laisser l'hôpital public dans cet état ! (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)

Mme Catherine Osson. Ridicule !

M. Gérald Darmanin, ministre. Je vous rappelle que l'épidémie a même touché les pays communistes, que vous soutenez avec vos amis, pays qui en viennent à nouer des accords avec des oppositions qu'ils rejettent par ailleurs – il faut dire que tout le monde ne peut pas se mettre à la mode vénézuélienne pour gérer cette crise.

M. Éric Coquerel. C'est caricatural !

M. Gérald Darmanin, ministre. À Dieu ne plaise, monsieur Coquerel, nous n'avons pas affaire à une décision du Gouvernement français !

M. le président. Monsieur Coquerel, vous avez eu l'occasion de vous exprimer. Peut-être pourriez-vous avoir l'élégance d'écouter la réponse du ministre avant de réagir ? Seul M. Darmanin a la parole.

M. Gérald Darmanin, ministre. Il faut accepter le débat contradictoire, monsieur Coquerel, et je suis fier que notre pays…

M. Éric Coquerel. Parler du Venezuela, c'est le débat contradictoire ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Je vous ai écouté religieusement, si je puis employer ce terme ; acceptez que je puisse parler à mon tour !

M. Éric Coquerel. Laissons la religion en dehors de ce débat !

M. Pierre Cordier. Monsieur le ministre, vous n'êtes pas un saint !

M. Gérald Darmanin, ministre. Si vous permettez que le débat démocratique se tienne, vous montrerez que vous ne considérez pas que votre opinion est toujours l'expression de la vérité.

Les décisions gouvernementales n'ont pas été à l'origine de la crise du covid-19 : c'est une tautologie qui mérite sans doute d'être répétée. Les pays ont réagi différemment. Pour ce qui concerne la France, je vois trois différences fondamentales avec les crises que nous avons traversées précédemment.

Premièrement, beaucoup d'entre vous l'ont dit, nous avons abordé la crise avec un niveau d'endettement plus élevé que lors des crises précédentes. Par exemple, en 2008-2009, le Président Sarkozy a dû affronter une crise alors que le taux d'endettement de notre pays était de 60 % ; il atteint désormais environ 100 %.

M. Jean-Pierre Vigier. Pas tout à fait !

M. Gérald Darmanin, ministre. Toutefois, le monde entier est davantage endetté qu'il ne l'était en 2008-2009, et cela vaut pour les entreprises comme pour les pays.

Deuxièmement, le multilatéralisme qui prévalait en 2008-2009 permettait une réponse plus coordonnée qu'aujourd'hui. À l'époque, les institutions internationales fonctionnaient, la guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis n'en était pas au stade actuelle – c'était encore une guerre larvée –, l'Europe était plus unie, le couple franco-allemand était plus fort, pour des raisons de politique intérieure évidentes, et le Royaume-Uni n'était pas en train de quitter l'Union européenne. En plus de la crise du covid-19, le Président de la République a dû gérer une crise du multilatéralisme. Or les réponses coordonnées face à une crise mondiale sont évidemment plus difficiles à apporter lorsqu'on est divisé que lorsqu'on est uni, comme lors de la crise de 2008-2009.

Troisièmement, la crise actuelle est une crise immédiate de l'économie réelle. En 2008-2009, les terrasses de café étaient restées bondées et l'économie avait fonctionné jusqu'au moment où la crise financière avait fait naître, des semaines et des mois plus tard, une crise extrêmement violente : nous avions vu arriver la météorite. Cette fois, nous avons une crise directe de l'économie réelle qui fera peut-être naître une crise sociale – nous pouvons le regretter, l'appréhender et voir que cela arrive – voire une crise financière – regardons la stabilité de nos amis italiens ou espagnols, rien n'est simple dans la situation actuelle. En tout cas, les crises, en quelque sorte, se sont inversées.

Je reviens sur le premier de ces trois aspects qui vous a manifestement beaucoup occupé. Madame Rabault, vous nous dites que nous abordons la crise avec une dette très importante. Merci ! Je vous remercie du cadeau. C'est vachement sympa !

Mme Valérie Rabault. J'ai parlé du déficit, pas de la dette !

M. Gérald Darmanin, ministre. Madame Rabault, vous êtes toujours extrêmement précise, et je n'attribue qu'à votre fatigue le fait que vous ayez énoncé des chiffres erronés devant la représentation nationale.

Vous venez d'affirmer que, quand vous avez quitté le pouvoir – vous étiez alors rapporteure générale du budget –, le déficit s'élevait à 2,9% : c'est une fable racontée aux enfants.

Mme Valérie Rabault. C'est le taux mesuré par l'Union européenne !

M. Gérald Darmanin, ministre. Je vous recommande la lecture du rapport annuel de la Cour des comptes : en 2017, le rapporteur général qui vous a succédé a constaté, en reprenant vos dossiers, qu'il y avait un déficit de 3,4%. Je sais l'affection et le respect que nous partageons pour ce rapporteur général.

Madame Rabault, vous nous dites ensuite que nous avons amené le déficit au-dessus de 3%, alors que nous étions autour de 2%, ce que vous savez très bien. Autrement dit, nous avons réduit le déficit d'1,4 point en trois ans, grâce à des efforts extrêmement importants, parfois impopulaires. À ce sujet, je me tourne vers les députés de la droite de l'hémicycle, d'où j'ai entendu des propos très intéressants : je viens en effet d'apprendre, en écoutant de leur côté, qu'il aurait fallu que nous fassions davantage d'économies que celles que nous avons proposées, et en faveur desquelles ils n'ont pourtant pas voté…

M. Jean-Pierre Vigier. Il faut faire de bonnes économies !

M. Pierre Cordier. On a pris modèle sur vous quand vous étiez dans l'opposition !

M. Gérald Darmanin, ministre. Je vous rappelle que vous n'avez été favorables à aucunes des économies que nous avons mises en oeuvre, qu'il s'agisse des contrats aidés, de la réforme du logement, du travail mené à la direction générale des finances publiques. Plusieurs courriers de parlementaires, sur vos bancs, en attestent : vous demandez que l'on fasse des économies en général, mais il ne faut jamais agir en particulier lorsque cela vous concerne. Vous n'avez jamais accepté l'idée d'une réforme des retraites, telle que nous vous la proposons. Vous vous êtes opposés à toutes les économies que nous vous avons proposées, mais, de façon extrêmement étonnante, vous avez voté, dans le même temps, pour toutes les baisses d'impôts – à l'exception du président de la commission des finances, Éric Woerth, qui est absent mais dont je salue la cohérence, puisqu'il a considéré, isolé dans son groupe, qu'on ne pouvait pas abaisser les impôts sans réduire davantage les dépenses.

Mme Valentin a prononcé une phrase que j'ai notée parce qu'elle témoigne de la « cheguévarisation » du groupe LR (Rires sur quelques bancs du groupe LaREM) : « le protectionnisme est une solution utile, un moyen durable », que la France doit adopter. Et voilà !

Mme Isabelle Valentin. Pour vous, mieux vaut donc acheter des masques en Chine que de les produire en France !

M. Gérald Darmanin, ministre. C'est à croire que joue la proximité géographique, dans l'hémicycle, avec les députés siégeant tout en haut à droite…

Madame, le protectionnisme est à l'opposé de ce qui fonde, de façon générale, les valeurs de la famille politique dont nous tirons, je crois, une culture commune : le libre-échange, même tempéré par la souveraineté, ce que nous pouvons tout à fait comprendre,…

Mme Isabelle Valentin. Vous comprenez très bien de quoi nous parlons !

M. Gérald Darmanin, ministre. Non, madame, excusez-moi, affirmer que le protectionnisme est une solution durable me paraît constituer une révolution copernicienne qui finira par vous faire découvrir que la terre n'est pas plate.

M. Maxime Minot. Quelle condescendance !

M. Gérald Darmanin, ministre. Allez donc dire cela aux agriculteurs ! Allez les voir ! Expliquez-leur, en circonscription, qu'ils deviendront plus riches en n'exportant pas, alors que les exportations sont à la source de ce qui a fait de notre petit pays une grande économie ! À la fin des fins, vous serez non seulement en contradiction avec votre pensée politique originelle et vous vous heurterez à ce que pense une partie de votre électorat, mais vous ne disposerez pas des richesses qui permettraient de financer le protectionnisme, car vous ne pourrez plus payer les dépenses sociales correspondant à la disparition de richesses que vous aurez provoquée. Il ne faut pas être démagogue.

M. Jean-Pierre Vigier. Le coût du libre-échange, ce n'est guère mieux !

M. Éric Coquerel. C'est contradictoire avec les propos de Macron !

M. Gérald Darmanin, ministre. Nous devons faire des réformes structurelles : le Gouvernement ne les a pas abandonnées, nous continuons à les défendre.

M. Pierre Cordier. Celle des retraites par exemple ?

M. Gérald Darmanin, ministre. M. de Courson disait que nous avions mal géré le pays – il faut avouer qu'il est assez constant dans son propos car il le répète depuis trois ans, mais il y a du Nostradamus dans sa façon d'annoncer en permanence une catastrophe à venir, annoncée à chaque fois pour la fin de l'année mais ne se produisant jamais.

Premièrement, monsieur de Courson, la République m'a fait l'honneur de me porter au poste de ministre de l'action et des comptes publics, ce qui m'amène à constater chaque semaine notre position sur les marchés financiers. Comment un pays si mal géré, proche de la catastrophe, attaqué de toute part, dont la fin est commentée par tous, peut-il continuer à émettre des emprunts à taux négatif ? Les marchés financiers, qui sont, comme chacun sait, l'abbé Pierre réincarné, continuent de prêter à la France alors que d'autres pays de la même zone économique subissent des attaques. Nous parvenons à nos fins à l'euro près.

Deuxièmement, nous n'avons jamais eu à connaître un accident de financement, alors que certains de mes collègues de pays frontaliers ont dû expliquer à leurs populations qu'ils ne pouvaient pas verser les pensions de retraite ou la paie des fonctionnaires, ou encore qu'ils devaient retarder le versement des prestations sociales. En France, nous avons même pu verser plus tôt les prestations sociales durant la crise ! Indépendamment des décisions prises par le Parlement, nous avons pu avancer de trois jours les versements de prestations doublées sans aucun incident de marché !

M. Jean-Pierre Vigier. C'est vrai, mais c'est fragile !

M. Gérald Darmanin, ministre. Troisièmement, monsieur de Courson, vous nous dites que nous ne savons pas où nous allons en constatant que nous avons dû présenter trois PLFR. Au contraire, c'est la preuve que nous nous adaptons à la situation. Aucun pays au monde n'a fait autant pour aider ses acteurs économiques. Nous avons répondu à tous, qu'il s'agisse des salariés avec l'activité partielle ou des indépendants. Nous avons aidé les entreprises en les recapitalisant et en les soutenant. Une compagnie aérienne a-t-elle été mieux soutenue qu'Air France ? Un producteur automobile a-t-il été mieux soutenu que Renault ? Je crois que l'intégralité du tissu économique salue ce qu'a fait le Gouvernement.

Monsieur de Courson, je ne crois pas que vous ayez les facultés d'un Nostradamus ; vous rêvez seulement de l'être,…

M. Charles de Courson. Pas du tout !

M. Gérald Darmanin, ministre. …ce qui est assez différent… La République a été solide grâce à ses institutions – on peut remercier le général de Gaulle –, mais aussi parce que la majorité a fait des efforts très importants et parfois impopulaires qui ont permis d'aborder la crise dans une situation économique très positive.

Cette situation aurait-elle pu être encore meilleure ? Si nous n'avions pas hérité d'une dette à 98 %, évidemment, le point de départ aurait été plus sympathique : le ministre allemand du budget qui distribuait les excédents a abordé la crise avec une équation un peu plus simple, c'est certain – même s'il est vrai que l'on se dispute autant pour distribuer les excédents que pour combler les déficits.

Les étrangers nous jugent positivement : sur certains bancs de cet hémicycle, on devrait avoir l'honnêteté de reconnaître qu'il est heureux que le Président de la République ait tenu la barre et que le Gouvernement ait été au rendez-vous. Ils n'ont laissé tomber ni les indépendants, ni les grandes entreprises, ni les agriculteurs, ni les retraités, ni ceux qui touchent des prestations sociales. La France est par ailleurs, à l'exception de l'Allemagne, c'est vrai, le pays qui a enregistré l'un des taux de mortalité dans les hôpitaux les moins élevés.

Nous devrions arrêter de nous flageller et dire que nous avons la chance d'être dans un grand pays et que nous avons eu un grand président durant cette période.

M. Pierre Cordier. On verra dans six mois !

M. Gérald Darmanin, ministre. Affirmons que notre économie est solide et que nous devons aborder les mois ténébreux à venir avec le courage dont nous avons fait preuve depuis trois ans.

M. Jean-Pierre Vigier. Eh oui ! Le plus dur est malheureusement devant nous !

M. Gérald Darmanin, ministre. Nous y parviendrons, j'en suis sûr, grâce au plan de relance que proposera le Président de la République.

Je remercie plusieurs orateurs de l'avoir dit : les efforts ont payé. Ces résultats sont peut-être un peu oubliés, ce qui est bien normal puisque le monde a changé en quelques jours. Les commentaires de l'INSEE comme ceux relatifs aux comptes sociaux ne pouvaient que constater que la sécurité sociale était revenue à l'équilibre.

M. Jean-Paul Dufrègne. À quel prix !

M. Gérald Darmanin, ministre. Madame Rabault, vous vous demandiez pourquoi les rentrées de la CSG ou de la CRDS augmentaient : c'est parce que, quand il y a plus de croissance et plus d'emplois, il y a davantage de gens qui paient des cotisations et des impôts ! Quand les gens s'enrichissent, les rentrées fiscales sont plus fortes. Évidemment, si, par idéologie fiscale, vous augmentez fortement les taux alors que peu de gens paient, cela décourage l'activité et vous faites fuir ceux qui ont de l'argent. On peut condamner cette attitude moralement – je le comprends tout à fait – mais, une fois la chose faite, il ne vous reste plus qu'à vous asseoir et à regarder le chômage grimper.

M. David Habib. N'insistez pas, vous allez gêner M. Dussopt !

M. Gérald Darmanin, ministre. Ce gouvernement a permis d'atteindre le taux de chômage le plus bas depuis 2008. Le nombre d'emplois industriels augmentait dans toutes les régions en difficulté. La France était le pays d'Europe qui attirait le plus de capitaux étrangers. Ses finances publiques se caractérisaient en outre par une baisse continuelle des impôts, continuelle, pour les ménages comme pour les entreprises ! À la différence d'un certain nombre d'autres députés, Mme Rabault a eu l'honnêteté de préciser que nous n'avions pas fait payer cela par des baisses de dotations des collectivités locales ou en revenant sur des baisses d'impôts déjà consenties, qu'il s'agisse de la taxe d'habitation, de l'impôt sur le revenu ou des cotisations sociales. Au contraire, nous avons su tenir le cap cohérent du Gouvernement.

Faut-il continuer comme auparavant ? Sans doute faut-il modifier certaines choses. Confrontés à une crise, nous devons bien évidemment nous adapter et ne pas faire d'idéologie. Faut-il aller encore plus rapidement que nous le faisons vers une économie décarbonée ? Sans doute, la question est extrêmement intéressante.

Ce sujet permet d'anticiper sur le projet de loi de règlement du budget 2020 et le projet de loi de finances pour 2021. À la demande de la majorité, nous présenterons un budget vert. Je salue au passage Bénédicte Peyrol et tous ceux qui ont travaillé sur ce sujet en commission des finances. C'est la première fois dans l'histoire budgétaire de la République – décidément, c'est l'année de tous les records ! – que nous allons présenter un budget non seulement comptable, mais posant également la question de l'opportunité des dépenses en fonction de leur conformité aux objectifs environnementaux que nous souhaitons tous atteindre. Les débats promettent d'être intéressants, car qu'est-ce qu'un budget écologique ?

Prenons le nucléaire : cette dépense peut être considérée comme très écologique dans la mesure où elle permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre.

M. David Habib. Exactement !

M. Gérald Darmanin, ministre. Ce point de vue peut très bien se comprendre. Mais si l'objectif principal, c'est d'éviter les déchets et de ne pas laisser ce legs aux générations futures, il s'agit d'une dépense négative pour l'environnement.

Prenons le chemin de fer. Vous êtes sans doute tous – moi le premier – très heureux de soutenir les petites lignes dans vos régions.

M. M'jid El Guerrab. Surtout à Aurillac !

M. Gérald Darmanin, ministre. Le chemin de fer apparaît positif pour l'environnement puisqu'il réduit les émissions de gaz carbonique par les véhicules et encourage le fret. Mais il est négatif si l'on prend en compte l'objectif de biodiversité.

Le canal Seine-Nord Europe est positif pour l'environnement puisqu'il permet de transporter 400 camions sur une barge – une péniche Freycinet –, tout en coûtant moins cher. Mais il est négatif si l'on compte les dommages causés à la biodiversité et aux nappes phréatiques.

Lorsque l'on parle d'une économie décarbonée, indépendamment des autres objectifs, cela donne déjà une discussion politique intéressante puisqu'il faut déterminer quelle économie décarbonée on souhaite. Mais ensuite, il faut concilier cet impératif avec tous les autres objectifs publics qui nous intéressent tous – par exemple, l'accès au logement. Depuis trois ans que je passe des nuits avec vous dans l'hémicycle, je trouve qu'un moment est particulièrement intéressant pour le ministre de l'action et des comptes publics : le débat sur les dépenses fiscales. Tout le monde est contre les niches fiscales, sauf pour son territoire ! On peut tout à fait le comprendre : je suis moi-même un fervent défenseur de la fiscalité basse sur la bière ; mais comme la bière est en général moins représentée ici que d'autres alcools, il faut parfois se battre un peu plus.

Prenons la loi Pinel, le prêt à taux zéro ou d'autres dispositifs pour le logement, que chacun connaît. Tout le monde est d'accord pour dire que l'artificialisation des sols est très mauvaise pour l'environnement : sommes-nous assez cohérents pour supprimer les 75% de dépenses fiscales qui vont à l'encontre de la politique environnementale ? On sait que, dès qu'on les vote, elles portent atteinte aux objectifs environnementaux ; mais personne ici ne peut dire qu'il se moque des gens qui ont du mal à se trouver un logement.

M. Éric Coquerel. On peut trouver d'autres compromis !

M. Gérald Darmanin, ministre. Bien sûr qu'on peut trouver d'autres compromis, monsieur Coquerel ! On peut poursuivre la densification, mais la vérité, c'est que les objectifs sont parfois contradictoires. Chacun peut l'entendre et la tâche de la politique est de résoudre ces contradictions.

Je suis donc d'accord avec vous, monsieur le député, comme avec la plupart de vos collègues qui se sont exprimés, sur la nécessité d'aller vers un monde nouveau et une économie décarbonée, et de programmer des dépenses et des recettes fiscales qui nous permettent d'y arriver ; mais les choses sont un peu plus compliquées que des slogans et à la fin, choisir, c'est toujours renoncer à quelque chose. Si l'objectif premier est l'environnement, et qu'on a défini ce qu'il était, le Gouvernement est prêt à ce débat : c'est pour cela qu'il conçoit pour la première fois un budget qui permettra, je l'espère, une discussion autre que comptable. Mais à la fin, il faut quand même choisir – parfois, choisir un autre monde – et expliquer aux gens les raisons de ce choix. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)

M. le président. Nous en venons aux questions. Je vous rappelle – notamment à vous, monsieur le ministre ! – que leur durée, ainsi que celle des réponses, est limitée à deux minutes, sans droit de réplique.

La parole est à M. Joël Giraud.

M. Joël Giraud. Justement, nous allons parler de niches fiscales !

Comme mes collègues Dominique Da Silva, Dominique David et Patricia Lemoine l'ont souligné, la maîtrise des dépenses publiques était ce préalable qui nous a permis de mettre en oeuvre une réponse à la crise économique et sociale provoquée par la crise sanitaire du covid-19. Cette maîtrise passe aussi par la rationalisation des dépenses fiscales, notamment celles dont on ne connaît rien – ni le montant ni le nombre de bénéficiaires, et encore moins l'efficacité. Il s'agit de ces fameux trous noirs fiscaux dont j'ai identifié une quarantaine dans le rapport d'application de la loi fiscale – RALF – 2019, et que j'ai tenté de borner dans le temps avec un succès que l'on appellera mitigé.

Comme je l'ai rappelé en commission la semaine dernière, le soutien à la rationalisation des dépenses fiscales est souvent total jusqu'à ce qu'une proposition concrète soit faite ; les partisans de la dépense en question se signalent alors, ce qui peut conduire les parlementaires – qui retrouvent les vertus de l'oecuménisme –, voire l'exécutif, à combattre la mesure proposée.

Au-delà des trous noirs, vous vous souvenez certainement des débats suscités par la rationalisation – somme toute marginale –, à mon initiative, du crédit d'impôt recherche, le CIR, dans le dernier PLF, et plus encore par la modification apportée au mécénat d'entreprise. Plus généralement, sur les niches fiscales et leur évaluation, il y avait la proposition de résolution de notre collègue François Jolivet, adoptée à l'unanimité en juin 2019, ainsi que mes travaux. Dans le cadre du PLF 2020, le Gouvernement, suivant les recommandations de l'inspection générale des finances – IGF –, supprime les niches qui avaient été jugées inefficientes et dresse un échéancier d'évaluation d'environ soixante-dix autres, avec remise des évaluations de chaque niche arrivant à échéance en temps utile, pour que le Parlement puisse se prononcer sur les évolutions à apporter – modification, disparition ou reconduction. J'ai également fait adopter des amendements pour renforcer l'information du Parlement et l'évaluation de certaines niches, singulièrement le CIR, mais également le dispositif pour les jeunes entreprises innovantes – JEI.

En résumé, les efforts de rationalisation des niches se poursuivent malgré les aboiements de certains canidés. Le dernier PLF, malgré l'épisode des trous noirs, prévoit de nombreuses mesures de nature à renforcer significativement l'évaluation et le pilotage des niches.

Plutôt que de poser une question, je veux simplement appeler le Gouvernement à produire dans les délais convenus – septembre ou octobre 2020, c'est-à-dire avant exploitation pour le PLF – le fameux rapport au Parlement. Il y va de notre capacité à relancer l'économie dans le cadre d'un pacte fiscal consenti, mais éventuellement aussi à faire face à d'autres crises, liées au covid ou à un autre aléa. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics. Votre question n'est pas une surprise, tant vous nous avez habitués à travailler sur ce sujet et à passer au crible les 486 dépenses fiscales, qui représentent un peu plus de 90 milliards d'euros par an. Comme vous l'avez rappelé, des travaux ont été menés pour borner les niches dans le temps, non pas pour prévoir de manière automatique leur extinction, mais pour rendre obligatoire leur évaluation et s'interroger à intervalles réguliers sur la pertinence de les maintenir ou de les modifier. On a également travaillé sur la possibilité de financer autrement une série de dispositifs nourris par ces niches : je pense notamment à tout ce que nous avons fait avec vous, en tant que rapporteur général, pour budgétiser et clarifier certaines dépenses plutôt que de passer par des financements fiscaux, souvent assortis de niches, qui nuisaient à l'intelligibilité et à la lisibilité de nos documents budgétaires.

Il y a quelques mois, nous nous sommes engagés devant vous à travailler sur le rapport que vous avez évoqué. Disons-le clairement : la période de confinement nous a mis quelque peu en retard sur sa production. Deux très gros chantiers sont en cours : un sur les niches fiscales en matière de logement et un autre sur les niches fiscales relatives au dispositif zoné. Si nous traitons ces deux chantiers, nous traiterons des niches très importantes et nous pourrons répondre de manière assez large aux questions que vous posiez.

Il n'empêche que le reste du travail doit être poursuivi et que ce travail, au moins sur ces deux aspects, doit être mis à la disposition du Parlement dans des délais qui permettront, comme vous l'avez appelé de vos voeux, d'éclairer la représentation nationale, au moment du débat budgétaire, sur le chemin qui reste à faire en matière de normalisation et d'optimisation des recettes de l'État et donc de rationalisation des niches fiscales. Dans cette entreprise, nous savons que nous pourrons compter sur votre concours au sein de la commission des finances. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Osson.

Mme Catherine Osson. La période de déconfinement a plus que jamais mis en avant le rôle émancipateur de l'éducation nationale et la nécessité de ne pas relâcher les efforts faits en sa faveur. Ainsi, pouvez-vous nous rappeler les moyens mobilisés depuis le début du quinquennat pour financer cette politique publique prioritaire ? En effet, avoir adopté une trajectoire de maîtrise de la dépense publique ne doit pas empêcher de financer ce domaine déterminant. Cela était vrai depuis le début du quinquennat et cela doit le demeurer dans le monde d'après.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Vous me demandez de décrire les efforts que le Gouvernement a consentis pour le secteur de l'éducation nationale. Depuis 2017, le budget de l'éducation nationale est en hausse de 6 %. Si nous regardons le dernier exercice connu et l'exercice en cours, le budget a augmenté de 860 millions d'euros, soit 1,7 %, en 2019, et il doit augmenter de 1 milliard d'euros en 2020, pour dépasser largement les 52 milliards.

Les moyens que nous allouons au ministère de l'éducation nationale servent à assurer le dédoublement des classes – depuis la dernière rentrée, ce sont 300 000 enfants scolarisés en CP et en CE1 dans les réseaux d'éducation prioritaire, les REP, et les réseaux d'éducation prioritaire renforcés, les REP +, qui peuvent en bénéficier – et l'accompagnement des élèves en situation de handicap – en 2020, plus de 6 000 postes pourront être financés. Mais nous voulons également accompagner l'éducation nationale dans son ensemble au travers d'autres dispositifs. Ainsi, nous avons veillé à inclure les locaux scolaires dans les priorités d'emploi de la dotation de soutien à l'investissement local. Avec Gérald Darmanin, nous présenterons demain devant votre commission et jeudi au Sénat un projet de loi de finances rectificative qui affecte, au titre des mesures de soutien à l'investissement, 1 milliard d'euros supplémentaires à l'investissement local, cette somme devant être employée à des projets de nature sanitaire ou environnementale – c'est normal eu égard à la crise –, mais pouvant également permettre aux collectivités d'investir dans l'aménagement des locaux scolaires.

Nous souhaitons aussi continuer à travailler, comme nous l'avons fait au cours des dernières années et de manière plus importante encore, sur la revalorisation des carrières dans le secteur de l'éducation nationale. Nous avons tenu l'intégralité des engagements pris dans le cadre du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » – PPCR. Actuellement, comme vous le savez, notre collègue ministre de l'éducation travaille sur un nouveau cycle de revalorisation des carrières et des salaires des enseignants.

M. le président. La parole est à M. Rémi Delatte.

M. Rémi Delatte. Si la crise actuelle démontre une nouvelle fois combien le levier fiscal est un outil essentiel dans le soutien aux entreprises, les programmes d'accompagnement sont tout aussi importants.

M. Jean-Pierre Vigier. C'est vrai !

M. Rémi Delatte. Pourtant, ils ont fait les frais de votre redressement des comptes publics. On le sait, le meilleur moyen de faire face à une crise, c'est d'avoir une assise solide pour résister. Or, en 2019, vous avez supprimé la dotation budgétaire pour l'activité de garantie de Bpifrance et placé en gestion extinctive le Fonds d'intervention pour la sauvegarde de l'artisanat et du commerce – FISAC.

M. Jean-Pierre Vigier et M. Pierre Cordier. Ce n'est pas normal !

M. Rémi Delatte. En 2020, l'effort budgétaire consenti en faveur de l'aide aux entreprises en matière de soutien à l'export a diminué également, tandis que l'aide apportée aux pôles de compétitivité demeure toujours et largement incertaine. En outre, l'État s'est retiré du soutien qu'il apportait aux métiers d'art. Au fond, derrière votre redressement des comptes se cache, depuis 2017, une logique de rabot budgétaire sans véritable stratégie de dépense et d'efficacité de l'action publique. Je pense particulièrement aux artisans et aux petits entrepreneurs de nos territoires ruraux, dans lesquels de nombreux dispositifs, pourtant salués par tous les acteurs territoriaux, sont aujourd'hui menacés, voire tout bonnement supprimés. J'ai déjà évoqué la disparition du FISAC, mais je pense aussi à la baisse des moyens alloués aux chambres de commerce et d'industrie – CCI – ou encore à l'incertitude concernant le devenir des zones de revitalisation rurale – ZRR.

M. Pierre Cordier. N'oublions pas les chambres de métiers et de l'artisanat !

M. Rémi Delatte. Monsieur le ministre, quelle est donc votre ambition pour les entreprises de nos territoires et comment comptez-vous la concrétiser dans les débats budgétaires à venir ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Vous imaginez bien que je ne partage pas le regard négatif que vous portez sur nombre de dispositions et de mesures que nous avons prises. Je reviendrai sur un certain nombre d'entre elles, qui fonctionnent et qui permettent d'accompagner les territoires et leur système productif. Vous auriez par exemple pu citer le programme « Territoires d'industrie » que nous avons créé sous l'égide de Bruno Le Maire et d'Agnès Pannier-Runacher, qui permet de mobiliser des crédits pour accompagner la structuration de filières et du territoire.

Pour ce qui est du soutien à l'activité locale, vous savez que le programme « Action coeur de ville » sera bientôt complété de manière opérationnelle par un nouveau programme appelé « Petites villes de demain » et consacré à une strate de collectivités de taille inférieure, qui permet également d'accompagner la requalification des centres-villes dans leur globalité.

Nous travaillons aussi sur une série de dispositifs dont vous avez évoqué certains. Je pense notamment aux zones de revitalisation rurale. Vous avez certainement noté qu'à l'occasion des derniers débats sur la loi de finances, nous avons prorogé l'éligibilité des territoires au dispositif des ZRR, pour prendre le temps de mener une évaluation complète et en tirer le meilleur pour les territoires.

Je voudrais terminer en évoquant deux points. D'abord, au-delà des dispositifs totalement territorialisés, nous avons pris des mesures pour soutenir l'industrie et les systèmes productifs comme cela n'a jamais été fait auparavant. Nous avons agi à la fois en matière de fiscalité des investissements et du travail, mais aussi en matière d'allégement pérenne de charges. Ainsi, pour plus de simplicité, le CICE a été transformé en réduction de charges pour les entreprises.

À partir de demain, je l'ai dit il y a un instant, vous aurez à examiner un projet de loi de finances rectificative où vous retrouverez des actions très précises en faveur de nombreux secteurs. En effet, ce texte renferme la traduction budgétaire de l'ensemble des plans sectoriels qui ont été annoncés pour faire face à la crise.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Vigier.

M. Jean-Pierre Vigier. Comme vous le savez, monsieur le secrétaire d'État, la pandémie de covid-19 a frappé la France tant sur le plan sanitaire que sur le plan économique. Après deux mois de forts ralentissements, de nombreuses entreprises sont aujourd'hui en très grande difficulté. Alors que l'activité reprend doucement, plusieurs mesures ont été décidées pour soutenir les secteurs concernés, premières victimes économiques du virus. Si ces mesures étaient bien évidemment indispensables – je le reconnais volontiers – pour soutenir notre économie, il convient de reconnaître que nous avons abordé cette crise avec une grande faiblesse. En effet, alors que nous étions en situation de croissance depuis 2017, les dépenses et les déficits ont continué d'augmenter. La dette publique a même dépassé pour la première fois le niveau de 100% du PIB.

Si l'ensemble des aides mises en place pour faire face à la crise sans précédent que nous vivons sont nécessaires pour pallier les difficultés de nombreux secteurs économiques, elles n'en demeurent pas moins financées par une hausse de la dette publique que les générations futures devront payer au prix fort. Si le Gouvernement avait maîtrisé les comptes publics au cours des deux dernières années, nous aurions pu aborder cette crise plus sereinement, à l'image de l'Allemagne qui, ayant su réduire ses dépenses et ses déficits, a pu soutenir encore plus massivement son économie. Monsieur le secrétaire d'État, face à cette situation, comment comptez-vous rétablir une trajectoire positive de nos finances publiques afin de réduire notre dette et ainsi d'aborder plus sereinement l'avenir ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Monsieur le député, si la situation n'était pas aussi compliquée pour les entreprises de notre pays, une partie de la question pourrait prêter à sourire. Je ne reprendrai pas les éléments évoqués par Gérald Darmanin tout à l'heure, mais je vous invite à vous souvenir qu'à la fin de l'année 2019, à l'aube de la confrontation avec le covid-19, la France a pris la première place des pays d'Europe pour l'accueil des investissements étrangers, retrouvant une attractivité qu'elle ne connaissait pas. Elle réussissait aussi, pour la troisième année consécutive, à maintenir un niveau de déficit public inférieur à 3% ; celui-ci avait même été ramené de 2,9% à 2,1%, hors CICE, ce qui n'avait jamais été le cas.

M. Pierre Cordier. Mais ça, c'était avant !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. La France avait réussi à diminuer le ratio des dépenses publiques de 55,1 % à 54 % du PIB, et nous avions également réduit les prélèvements obligatoires. Je rappelle ces chiffres car ils soulignent les efforts importants réalisés tant pour tenir les engagements pris par la France sur la scène européenne que pour assainir les comptes publics.

Depuis, nous avons mis en oeuvre, c'est vrai, des dispositions coûteuses, financées par la dette et par le recours à l'emprunt : fonds de solidarité de 7 milliards d'euros pour aider les petites entreprises ; prêt garanti par l'État – non pas de la dette, mais de la garantie –, à hauteur de plus de 80 milliards d'euros ; reports d'échéances fiscales et sociales, dont certains pourront se transformer, d'ici quelques jours, en exonérations pures et simples ; enfin chômage partiel. Je rappelle ces dispositions car vous soulignez à raison les avoir votées mais, comme nombre de parlementaires, vous avez aussi souhaité leur élargissement, la modification des critères, une éligibilité plus large et donc une dépense plus importante. Nous aurons à faire face à cette dépense et à cette dette. Nous faisons le pari – qui n'en est pas un, car il s'agit plutôt d'une hypothèse – que la meilleure façon de rembourser cette dette et de retrouver l'équilibre de nos finances publiques consiste à travailler évidemment au niveau européen mais aussi à favoriser le retour de la croissance. C'est en effet la production de richesses qui nous permettra de relever ce défi.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Petit.

M. Frédéric Petit. Nous venons de le rappeler : la France est engagée depuis 2011 dans une stratégie de réduction des déficits publics. Toutefois, de 2011 à 2017, cette réduction a surtout été recherchée par une augmentation à due concurrence des prélèvements obligatoires. En d'autres termes, au lieu d'avoir le courage d'agir sur l'efficacité des dépenses, les gouvernements successifs ont préféré faire payer aux Français l'immobilisme. Cette politique a eu des conséquences sur la croissance française, comme cela vient d'être rappelé. La stratégie que nous avons soutenue consiste au contraire à réduire le déficit tout en réalisant des réformes structurelles courageuses, profondes, et en baissant les impôts afin de rendre du pouvoir d'achat.

Pour la suite, monsieur le secrétaire d'État, la crise du covid-19 fait vivre à nos finances publiques un choc important ; nous en convenons tous. Pourtant, les avis diffèrent sur la façon de gérer ce choc à partir de maintenant : certains entendent faire payer aujourd'hui la hausse des dépenses aux ménages et aux entreprises. Pensez-vous qu'il faille abandonner la politique qui porte ses fruits depuis 2017 ? Une augmentation des impôts des ménages et des entreprises ne risquerait-elle pas, au contraire, de tuer dans l'oeuf une éventuelle reprise ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Monsieur le député, votre question m'offre l'occasion de prolonger mon propos sur les sujets que j'évoquais il y a quelques instants. J'ai cité un certain nombre de ratios et d'agrégats financiers. Il en est un qui est important aussi et que je n'ai peut-être pas suffisamment souligné : de 2017 à 2019, nous avons diminué le poids des prélèvements obligatoires sur la richesse nationale et sur la production de celle-ci. Nous avons ainsi réduit la pression, en matière de prélèvements obligatoires, de 45,4 % à 44 %, tenant les engagements du Président de la République au-delà de ce qui était prévu. Nous avons souhaité cette baisse et l'avons recherchée au travers de mesures nous paraissant utiles et importantes : l'amélioration de l'attractivité économique, la baisse de l'impôt sur les sociétés ou le fait de favoriser les investissements sur le territoire national. C'est ce qui explique que nous soyons devenus la première destination européenne pour les investissements étrangers.

Nous avons aussi eu la volonté de diminuer les prélèvements obligatoires pesant sur les ménages, ce qui vous a conduits dans un premier temps à voter la baisse de la taxe d'habitation, laquelle représentera à terme une diminution importante des prélèvements obligatoires sur les ménages de 18 milliards d'euros.

M. Pierre Cordier. Par dotation !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Nous avons aussi décidé une compensation à l'euro pour les collectivités et non pas par dotation. Monsieur Cordier, je vous renvoie à la discussion relative au projet de loi de finances pour 2020 ; vous y retrouverez l'intégralité des débats sur l'affectation dynamique d'une fraction de la TVA ou sur l'affectation de la TFPB – taxe foncière sur les propriétés bâties. L'avis du Conseil constitutionnel indique bien que nous préservons l'autonomie.

M. Pierre Cordier. Vous avez raison, monsieur le secrétaire d'État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Enfin, nous avons également décidé en 2019 de baisser l'impôt sur le revenu de 5% – une mesure qui, grâce à l'instauration du prélèvement à la source, a pu entrer en vigueur dès le mois de janvier 2020.

Nous avons une conviction : nous ne répondrons pas à la crise par une augmentation des impôts, ni sur les ménages ni sur les entreprises. La seule réponse que nous envisageons pour faire face à la crise et tendre vers le rétablissement de l'équilibre des comptes publics réside, comme je l'indiquais à l'instant, dans le soutien à la croissance, à l'activité et à l'emploi. Nous sommes convaincus que lorsque nous aurons retrouvé, aussi vite que possible, le niveau de PIB que nous avions prévu initialement pour l'année 2020, le plus dur sera derrière nous et nous aurons retrouvé une trajectoire de rétablissement sans alourdir la pression fiscale.

M. le président. La parole est à M. David Habib.

M. David Habib. Je ne savais pas, monsieur le secrétaire d'État, que c'est vous qui seriez au banc pour participer à ce débat. Lorsque les orateurs de La République en marche ont détaillé le thème qu'ils avaient choisi –« Comment la sincérité et le rétablissement des finances publiques depuis 2017 favorisent le soutien à l'économie dans la crise du covid-19 », j'ai trouvé qu'il ressemblait aux mauvais tracts que nos concurrents de ce parti distribuaient lors des dernières élections législatives dans nos circonscriptions respectives. Ils le faisaient en oubliant que l'on construit le destin d'un pays en s'appuyant sur le travail, toujours honnête, des majorités précédentes. Poser une telle question, c'est oublier, comme l'a dit Madame Rabault tout à l'heure, qu'un effort avait été réalisé auparavant sur le déficit public et sur les comptes sociaux, en dépit de circonstances économiques très difficiles, et qu'il avait permis à notre pays de retrouver une trajectoire positive.

Ils oublient aussi de dire qu'avant l'élection de juin 2017 plusieurs responsables de la majorité actuelle occupaient des responsabilités éminentes dans la gestion de notre économie. Il m'a semblé que celui qui est aujourd'hui à l'Élysée a été ministre à Bercy, ce qui n'a été ni le cas de Madame Rabault, ni le mien,…

M. Charles de Courson. Ni le mien !

M. David Habib. …ni le vôtre monsieur de Courson. Ils oublient aussi de dire que, face à un enjeu sanitaire aussi important que le covid-19, l'important est peut-être d'unir les Français et non pas de chercher l'autosatisfaction en pointant la responsabilité de ses prédécesseurs, car ce n'est ni grand, ni vrai.

Monsieur le secrétaire d'État, les efforts réels que vous affichez – je pense que vous avez davantage réussi la gestion économique que le confinement et le déconfinement du pays – vous obligeront un jour à vous acquitter des dettes, notamment au travers de l'impôt. Quelle sera la stratégie du Gouvernement en matière de prélèvements obligatoires, notamment quant à l'ISF ? Vous et moi sommes tous deux attachés à la justice sociale et fiscale.

Mme Caroline Fiat. Il y était attaché, vous l'êtes encore !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Monsieur Habib, je ne doute pas que si vous aviez su que j'étais au banc, votre question aurait été encore plus agréable ! Je voudrais apporter quelques éléments de réponse pour confirmer vos propos tout en les nuançant sur certains points.

Le quinquennat précédent s'est-il traduit par des efforts en matière de dépenses publiques ? Oui, au moins au cours des quatre premières années. Je me souviens notamment des dix-huit mois pendant lesquels nous avons gelé le niveau des retraites, et du fait que la revalorisation moyenne des retraites s'est établie à 0,1 % par an. Je me souviens aussi que le plus faible niveau de l'ONDAM pour les dépenses hospitalières a été atteint en 2015-2016. Nous avons également réduit les dépenses dans tous les domaines, y compris dans la sphère sociale, et diminué les dotations. Cela démontre qu'un effort a été réalisé, dont vous et moi avons parfois payé le prix politique.

Des efforts ont aussi été consentis dans le domaine de l'attractivité, avec la création du CICE ; nous avons dû attendre 2019 pour qu'il soit transformé en allégement pérenne mais il avait été créé. Nous nous souvenons de ces débats.

Sans doute pouvons-nous nourrir les regrets que l'on retrouve dans le rapport de la Cour des comptes : celle-ci a souligné qu'en dépit de ces efforts, l'année 2017 n'était pas une bonne année budgétaire, que des sous-budgétisations étaient intervenues et que l'écart entre les prévisions et la réalité était très important.

M. David Habib. En 2022, ce sera la même chose !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Nous pouvons aussi regretter l'augmentation de certains prélèvements obligatoires. Sans doute l'une des causes d'une situation que nous avons connue par la suite réside-t-elle dans l'erreur commise avec la refiscalisation des heures supplémentaires.

Se tourner vers le passé, c'est établir un bilan. Je n'ai aucune difficulté à le dresser, qu'il s'agisse de ses aspects positifs ou négatifs. Je suis persuadé que, sur de nombreux points, nous pourrions partager ce constat. Vous me demandez comment nous paierons ces mesures. Je l'ai dit à l'instant : notre objectif c'est l'attractivité, l'emploi et la croissance, ce n'est pas d'augmenter les impôts.

M. le président. La parole est à M. Christophe Naegelen.

M. Christophe Naegelen. En dépit de l'opposition des parlementaires, l'article 3 du PLFSS pour 2020 a institué, lors de son adoption, le principe de non-compensation des mesures issues de la loi portant mesures d'urgence économiques et sociales. Ainsi, l'État a décidé de ne pas compenser les mesures prises à la suite du mouvement des gilets jaunes et liées au forfait social – les pertes consécutives, l'annulation de la hausse de la CSG pour près de 4 millions de foyers de retraités et la progression de l'exonération de cotisations sociales des heures supplémentaires. En conséquence, le budget de la sécurité sociale pour 2020 subit une nette dégradation, alors qu'avait été voté en 2018 un retour au quasi-équilibre. L'équilibre tant attendu nous paraît donc désormais hors d'atteinte.

En outre, la transformation du CICE en diminution pérenne de cotisations a été compensée en totalité pour 2019 mais, chaque année, la compensation sera amoindrie. L'État a ainsi compensé sa transformation, pour la première année, à hauteur de 22 milliards d'euros, mais le taux de compensation sera dégressif les années suivantes. Pourtant, lorsqu'il s'agit de comptabilité publique, le code de la sécurité sociale prévoit que toute mesure d'exonération de cotisations de sécurité sociale doit être compensée intégralement par l'État.

L'addition de l'ensemble des mesures non compensées ou partiellement compensées conduit au constat suivant : la crise du covid-19 aggravera une situation budgétaire déjà fragile. Nous partageons la même inquiétude : celle d'un déficit record qui pourrait atteindre 52,2 milliards d'euros cette année. Comment la nouvelle branche dédiée au grand âge et à la dépendance, dont nous sommes à l'aube de la création, sera-t-elle financée ? Comment rattraperons-nous les pertes non compensées, ainsi que celles liées à la crise sanitaire ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Vous avez raison, monsieur le député, de rappeler le long débat qui s'est tenu ici, ainsi qu'au Sénat, sur l'article 3. Nous avions indiqué, Gérald Darmanin et moi, que nous demandions effectivement à la sécurité sociale un certain nombre de non-compensations par le budget de l'État de dépenses liées aux mesures prises à la suite du grand débat. Nous avions aussi ajouté, lors de l'examen du PLFSS pour l'année 2020, qu'il n'y aurait pas de nouvelles mesures non compensés jusqu'à la fin du quinquennat. Or cet engagement que nous avions pris n'est pas remis en cause. Depuis, nous avons connu une situation totalement différente de celle que nous imaginions. La prévision budgétaire était déjà difficile pour la sécurité sociale et Gérald Darmanin a eu l'occasion, la semaine dernière, d'indiquer à la commission des affaires sociales que le déficit atteindrait un record, dépassant très certainement 50 milliards d'euros. Nous devons trouver des réponses à cette crise et à cette situation.

Une des réponses réside dans le projet de loi organique et le projet de loi relatifs au financement de la dette sociale et à l'autonomie, qui est actuellement examiné par votre assemblée, et qui prévoit le transfert de l'ACOSS – Agence centrale des organismes de sécurité sociale – vers la CADES des déficits accumulés et, pour schématiser, voire caricaturer, des déficits prévisionnels crées en 2020, 2021 et 2022, avec pour conséquence la prolongation de la CRDS – contribution pour le remboursement de la dette sociale – pour en assurer le remboursement.

Les députés de la majorité souhaitent – je crois que cet objectif est partagé par beaucoup – la création d'une cinquième branche de la sécurité sociale pour assurer la prise en charge du risque de dépendance. Ce projet, évoqué en 2007 puis en 2012, trouverait là son aboutissement. Un projet de loi organique et un projet de loi sont d'ores et déjà examinés dans le cadre d'une commission spéciale – nous verrons le sort que leur réservera le débat en séance – et les financements nécessaires devront être trouvés à compter de 2024 ou de 2025, ce qui nous laisse un peu de temps. L'examen en séance des projet de loi organique et projet de loi comme de celui du PLFSS pour 2021 nous donneront l'occasion d'apporter les solutions techniques susceptibles de garantir le financement effectif de cette prise en charge de l'autonomie

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Depuis deux mois les critères maastrichtiens ont été suspendus en raison de l'ampleur de la crise actuelle et de la contraction inédite de nos économies. Face à cette situation, monsieur le secrétaire d'État, vous avez fait le choix de recourir massivement à la dépense publique pour éviter un effondrement économique et social. Le groupe Libertés et territoires ne conteste pas le principe de ce choix. Cependant, nous sommes passés de 83 milliards de déficit prévisionnel en loi de finances initiale pour 2020 à 185 milliards en deuxième loi de finances rectificative et le projet de loi de finances rectificative que vous nous présenterez demain prévoit un déficit de 220 milliards. Quo non descendemus ? dirait-on en latin !

Notre groupe vous appelle à la raison :…

M. Ugo Bernalicis. Ah !

M. Charles de Courson. …les dettes doivent toujours être remboursées. Même s'il nous faut répondre à des urgences pressantes, ce troisième projet de loi de finances rectificative ne doit pas poursuivre la stratégie d'open bar !

M. Ugo Bernalicis. Ah !

M. Charles de Courson. Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2020, le Gouvernement nous avait indiqué qu'un nouveau projet de loi de programmation des finances publiques serait présenté au printemps – avant la fin du mois d'avril nous avait-on même précisé. Aujourd'hui que la situation a changé, il est urgent de présenter un nouveau projet de loi de programmation. Quand un tel projet nous sera-t-il présenté ?

Deuxièmement, pourquoi refusez-vous de nous soumettre un projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificatif, alors que, d'après M. Darmanin, les déficits des régimes de base de la sécurité sociale devraient passer des 5 milliards prévus par le PLFSS à 52 milliards, ce qui représente quand même une dérive considérable ? Nous devons engager une relance tout en assurant le sérieux budgétaire qui en garantira la viabilité sur le long terme.

Vous refusez d'augmenter les impôts : c'est un choix que nous soutenons globalement, mais vous pariez que la croissance et le retour d'activité permettront de rembourser notre dette. D'où ma dernière question, très simple : que ferez-vous si la croissance ne revient pas immédiatement ? N'est-il pas temps de lancer un plan d'économies pour éviter de faire payer à nos enfants le coût de notre mauvaise gestion ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Je répondrai en quelques mots, à vos trois questions, monsieur le député.

Nous avions effectivement indiqué que nous souhaitions présenter au printemps 2020 un projet de loi de programmation pluriannuelle tenant compte des évolutions de la situation depuis la fin de l'année 2017 et adapté à la réalité des comptes. Vous comprenez aisément que la situation de crise que nous connaissons, au-delà du confinement, et la mobilisation des administrations qui a été nécessaire pour y faire face nous ont contraints à reporter ce chantier. Nous aurons à le mener, mais nous souhaitons le faire dans un moment où la situation sera suffisamment stabilisée pour pouvoir arrêter des hypothèses budgétaires crédibles. Sera-ce en septembre ou en octobre ? Je l'ignore, puisque cela dépendra étroitement du niveau d'activité que nous aurons retrouvé et des contraintes qui pèseront alors sur nous. Nous tenons en tout état de cause à respecter les engagements pris afin de pouvoir documenter les autorités communautaires et à permettre un débat public sur la réalité des comptes.

Si nous ne saisissons pas le Parlement du projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificative que, si je vous ai bien compris, vous appelez de vos voeux, c'est pour deux raisons. La première est celle que je viens d'évoquer : le caractère extrêmement instable de la situation financière de la sécurité sociale. Le PLFSSR que nous aurions présenté il y a quelques semaines aurait prévu un déficit prévisionnel de 41 milliards d'euros, et nous en sommes aujourd'hui à 52 milliards d'euros, soit une différence très significative. La seconde raison est d'ordre plus pratique : l'ONDAM, n'est pas un objectif normatif ; on constate simplement en fin d'exercice son respect ou son dépassement. Or il sera de toute évidence dépassé puisque nous avons annoncé, notamment à l'occasion de l'examen du deuxième PLFR, une augmentation des crédits à hauteur de 8 milliards d'euros.

J'en viens enfin à votre troisième question, si M. le président me le permet. La croissance sera là.

M. Ugo Bernalicis. Ah ! La croissance !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Nous ferons tout pour qu'elle soit là, et si nous devions faire face à une situation plus difficile, il faudra alors prévoir des économies. Je ne doute pas que le challenge sera plus compliqué que d'en évoquer simplement la possibilité !

M. le président. La parole est à M. Alexis Corbière.

M. Alexis Corbière. Monsieur le secrétaire d'État, une délégation de l'Assemblée nationale a récemment publié un rapport évaluant l'impact de la crise sanitaire sur les finances des collectivités locales. Le constat est sans appel : rien que cette année, près de 7 milliards d'euros devraient manquer dans les caisses des villes et des départements. Bon nombre de collectivités étaient déjà en difficulté avant la crise, malmenées par des années d'austérité budgétaire et de baisse des dotations que l'État leur accorde. Or nous l'avons vu, les municipalités et les départements sont en première ligne de nos institutions pour aider la population à faire face aux difficultés qu'elle rencontre depuis le mois de mars. Des dépenses sont venues s'ajouter au financement des services publics de proximité, grevant les budgets locaux : achats de masques à destination de la population, mise en place de dispositifs d'entraide ou encore versement d'aides exceptionnelles aux familles. Ainsi, dans ma circonscription, la ville de Montreuil a distribué 100 euros sous forme de chèques alimentaires à plus de 3 000 ménages en difficulté.

Le Gouvernement a annoncé fin mai une première série de mesures pour aider les collectivités : or, alors que celles-ci s'apprêtent à perdre 7 milliards d'euros, seulement 4,5 milliards devraient être débloqués par l'État. C'est peu, d'autant qu'une part importante de cette somme consiste en réalité en avances de trésorerie et non en financements directs.

Je veux vous donner des exemples concrets. Bagnolet, autre commune de ma circonscription et ville la plus endettée de France, a perdu 10 millions depuis 2013 et la situation s'est encore dégradée pour les raisons que je viens d'évoquer. Plus de 5 millions d'euros manqueront au budget de Montreuil cette année. Pour le département de Seine-Saint-Denis, la perte se chiffrera en dizaines de millions d'euros, du fait notamment de l'explosion attendue du nombre des bénéficiaires du RSA.

Monsieur le secrétaire d'État, le Gouvernement a annoncé une aide de 7 milliards pour Air France et 5 milliards de prêts garantis pour Renault malgré 4 600 suppressions d'emploi. Nos collectivités locales, qui emploient 2 millions de personnes, sont souvent le dernier rempart social à protéger nos concitoyens les plus fragiles. Elles sont aussi les premiers investisseurs de notre pays : elles ont besoin d'être aidées avec au moins autant de détermination que les grands groupes du CAC40. (Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Monsieur le député, il me faudrait plus de deux minutes pour répondre à toutes vos questions ! Je vais essayer d'être synthétique. Nous travaillons actuellement à évaluer de la façon la plus précise les conséquences de la crise sanitaire liée au covid sur les finances des collectivités locales. Nous savons que, si beaucoup d'entre elles ne se feront pas sentir avant 2021 du fait du décalage de la fiscalité, notamment de la CVAE – cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises – ou de la CFE – cotisation foncière des entreprises –, beaucoup d'autres se feront sentir dès cette année.

Pour le bloc local – communes et intercommunalités –, ces effets peuvent être de nature fiscale, même si cette part n'est pas prépondérante en raison, là aussi, du décalage à 2021. C'est la raison pour laquelle nous avons annoncé la mise en oeuvre de la garantie de ressources, un mécanisme inédit. Nous avons pris l'engagement, concrétisé dans le PLFR que j'ai évoqué, de garantir aux communes et aux intercommunalités un niveau de recettes fiscales et de recettes domaniales, au sens de l'article 703 du code général des impôts dans ce dernier cas, égal au minimum à la moyenne des recettes perçues en 2017, 2018 et 2019. Nous nous engageons en outre à maintenir le niveau des dotations de l'État, qui représentent l'essentiel des ressources des collectivités – recettes fiscales et domaniales et dotations de fonctionnement incluses.

En ce qui concerne les départements, l'Association des départements de France nous a demandé de travailler à un système d'avances sur la perception des droits de mutation à titre onéreux, les DMTO. À ce stade de nos évaluations, elles s'élèveraient à 2,7 milliards, mais ce montant est par définition hypothétique, puisque nous devrons attendre la fin de l'année pour mesurer de manière concrète l'évolution des DMTO au cours de l'année 2020. Je rappelle pour mémoire et illustration qu'en 2008 les DMTO, qui n'avaient baissé que de 10%, avaient chuté de 31% en 2009, avant d'augmenter de 26% dès 2010, puis de plus de 20% en 2011 : on mesure, en raison d'une telle volatilité, l'ampleur du travail que nous devrons mener avec les départements.

Les seules pertes de recettes que nous ne souhaitons pas compenser sont celles qui sont liées aux décisions des collectivités. Lorsqu'une collectivité décide d'exonérer les usagers ou les redevables du versement de tel ou tel forfait ou tarif, ou lorsqu'elles réduisent leur fiscalité de leur propre initiative sans que le Gouvernement le leur ait demandé ou imposé, il ne peut pas y avoir de compensation. Pour le reste, le maintien du niveau de recettes fiscales et domaniales leur sera garanti sur la base de 2017-2019 ; il en est du même des dotations, comme c'est le cas depuis 2017.

M. le président. La parole est à M. M'jid El Guerrab.

M. M'jid El Guerrab. Rousseau disait : « Quand je paye une dette, c'est un devoir que je remplis ; quand je fais un don, c'est un plaisir que je me donne. » Le remboursement d'une dette est un devoir qui engage l'ensemble de notre société, non seulement les contribuables actuels, mais aussi nos enfants, à qui nous transmettons cette charge. Nous, décideurs politiques, avons donc une responsabilité qui dépasse le cadre de notre mandat et la question de l'assainissement des comptes publics est fondamental.

La crise aura pour les finances publiques des conséquences inédites depuis 1929. Le déficit sera bien supérieur à celui de 2008, puisqu'il devrait s'élever à 11,44% du PIB : 250 milliards pour le budget de l'État et 22 milliards pour celui de la sécurité sociale. Les prévisions de croissance sont revues à la baisse chaque semaine. La récession devrait atteindre 11% du PIB. La dette française frôlera 120 % du PIB, voire davantage – le ministre Bruno Le Maire vient d'annoncer un déficit de 121 %.

De nombreuses incertitudes pèsent sur la relance économique. Nous attendons la présentation, demain, d'un troisième PLFR, pour connaître les mesures concrètes qui permettront de restaurer la croissance. Toutes ces mesures sont fondamentales pour soutenir les entreprises qui souffrent le plus de la crise. Elles permettront de limiter ses effets sur l'emploi, le pouvoir d'achat et la consommation des ménages.

Néanmoins, la question de leur financement se pose. Une part importante du budget de l'État aura été consacrée à des mesures de court terme – 20% de notre richesse nationale. On peut dès lors s'interroger sur la capacité de l'État de procéder aux investissements qui s'imposent pour l'avenir. La crise a montré les carences de l'État en la matière. Le monde de demain nous expose à de nombreux défis environnementaux : seul un investissement massif de l'État permettra de proposer un horizon.

Churchill disait : « Un pessimiste voit la difficulté dans chaque opportunité ; un optimiste voit l'opportunité dans chaque difficulté. » Pour reprendre une idée de l'ancienne secrétaire d'État Axelle Lemaire, il faut voir dans cette crise l'opportunité de repenser notre modèle et de prendre des initiatives inédites.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Votre question me permet, monsieur le député, de revenir sur la manière dont nous avons répondu à la crise et dont nous allons continuer de le faire.

Le troisième PLFR, qui vous sera présenté à partir de demain en commission par Gérald Darmanin et Bruno Le Maire et que j'aurai l'honneur de présenter au Sénat jeudi matin, viendra compléter le financement des dispositifs mis en place par les deux premiers. Il s'agit de recalibrer les crédits consacrés au financement du chômage partiel, de confirmer l'augmentation très forte, engagée par le deuxième PLRF, des crédits consacrés au fonds de solidarité et de pérenniser les divers outils que nous avons créés – je pense notamment à ceux qui permettent à l'État de prendre des participations dans le capital d'entreprises stratégiques.

Ce troisième PLFR présente la particularité d'ajouter aux mesures visant à répondre en urgence à la crise, que nous avons proposé au Parlement d'adopter au travers des deux premiers, de premières mesures de relance, ou de résilience. Le projet qui sera présenté demain en conseil des ministres consacre plus de 40 milliards d'euros au financement des dispositifs sectoriels visant à accompagner l'industrie automobile, la restauration ou l'hôtellerie ou encore l'aéronautique, entre autres dispositifs déjà annoncés.

Il traduira aussi notre volonté de commencer à travailler sur les moyens de garantir les ressources des collectivités, comme je l'ai indiqué en réponse à l'orateur précédent. J'aurais pu ajouter en réponse à M. Corbière qu'au-delà des dépenses de fonctionnement, ce troisième PLFR prévoit aussi 1 milliard d'euros supplémentaires pour soutenir l'investissement des collectivités. Vous qui appelez de vos voeux une relance structurelle, vous pourrez constater demain que ce troisième PLFR accroît les moyens que l'État consacre à l'investissement général à hauteur de plus de 10% sur l'année, soit une augmentation très significative.

Tout cela sera financé par les fruits de ce que nous créerons, c'est-à-dire la croissance. Je le répète, notre ligne n'est pas d'augmenter les impôts, ni des entreprises ni des ménages, mais de créer de la richesse, encore et toujours, pour tenir nos engagements et rembourser notre dette.

M. le président. La parole est à M. Alain Bruneel.

M. Alain Bruneel. Le groupe La République en marche nous demande aujourd'hui comment sa politique budgétaire aiderait l'économie dans la crise du covid-19 : en d'autres termes, quelles sont les conséquences d'une politique au service des plus riches en temps de crise ? Quand on offre 197 milliards d'euros de cadeaux fiscaux aux grands groupes et aux grosses fortunes, cela laisse forcément quelques trous ! Alors que vous avez supprimé l'impôt de solidarité sur la fortune, instauré le prélèvement forfaitaire unique – ou flat tax –, et baissé l'impôt sur les sociétés ainsi que les cotisations patronales, à l'autre bout de la chaîne, les soignants ont dû utiliser des sacs poubelles pour se fabriquer eux-mêmes les surblouses que l'État était incapable de leur fournir !

Depuis 2017, pour vous, tout doit être dicté par le marché : il faut laisser faire, flexibiliser, libérer, même si cela se traduit par la casse de l'emploi national. Vous aidez les entreprises, c'est vrai, mais, pour les grands groupes, c'est « fromage et dessert » sans aucune contrepartie ! Résultat : le président-directeur général d'Air France se voit accorder un revenu supplémentaire de 765 000 euros, alors que l'État garantit un prêt de 7 milliards à cette entreprise qui s'apprête à se restructurer. C'est insupportable ! On pourrait aussi parler de Nokia, de Renault, de Michelin ou du groupe gestionnaire d'EHPAD Korian, autant d'entreprises qui tentent d'utiliser l'argent public pour verser des dividendes ou casser l'emploi. Ma question est la suivante : l'heure n'est-elle pas au changement de cap, à la taxation des énormes profits financiers et dividendes – qui doivent servir les besoins humains – et au conditionnement des aides publiques à des critères sociaux et environnementaux ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Vous avez fait la liste de quelques-unes des mesures prises par la majorité pour restaurer l'attractivité de l'économie, en oubliant d'évoquer celles qui s'adressent à d'autres pans de la population et du pays. Peut-être auriez-vous pu citer une politique qui n'avait jamais été appliquée jusqu'alors, le reste à charge zéro pour les prothèses dentaires – avec quatorze modèles – depuis le 1er janvier, comme pour les prothèses auditives – avec dix-sept modèles –, diminuant de 300 euros le coût résiduel par oreille supporté par les patients. Vous auriez également pu citer le relèvement des minima sociaux – augmentation de 100 euros de l'allocation de solidarité pour les personnes âgées et de l'allocation aux adultes handicapés –…

M. Gilles Lurton. Il y aurait beaucoup à dire sur l'allocation aux adultes handicapés !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. …ou encore la hausse de la prime d'activité de 90 euros mensuels, soit un engagement annuel de 3,2 milliards d'euros, au bénéfice de ceux dont le salaire avoisine le SMIC. Vous auriez encore pu citer la baisse de l'impôt sur le revenu de plus de 5 milliards d'euros survenue en 2019, bénéficiant prioritairement aux contribuables des premiers déciles, ceux qui gagnent juste assez pour payer des impôts mais pas assez pour bien vivre, et que nous avons voulu accompagner. Vous auriez pu citer, enfin, la baisse de la taxe d'habitation – taxe dont nous nous accordions tous, je crois, à considérer qu'elle est inégale et injuste. Nous avons voulu réserver la diminution ou la suppression de cette taxe aux 80 % de Français les moins favorisés, le seuil des 80% se situant à 2 500 euros de revenus imposables par mois pour un célibataire. Je ne crois pas qu'avec ce revenu, on fasse partie des plus favorisés !

Vous avez par ailleurs évoqué les dépenses liées à l'assurance maladie et au financement de l'hôpital. Nous avons un retard considérable à rattraper en la matière, c'est pourquoi la majorité a voté un ONDAM inégalé depuis dix ans.

Mme Caroline Fiat. Et les soignants revêtus de sacs poubelle ? Tout va bien !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Il reste certes beaucoup à faire, et les mesures que nous annonçons depuis plusieurs mois visent aussi à rattraper ce retard.

Mme Caroline Fiat. Vous allez donc être favorable à la proposition de loi du groupe GDR !

M. le président. S'il vous plaît, madame Fiat, vous n'avez pas la parole. Je vous invite à écouter M. Sébastien Chenu, qui posera la dernière question de ce débat.

M. Sébastien Chenu. Le meilleur pour la fin !

M. le président. Il paraît…

M. Sébastien Chenu. Je vous l'enlève de la bouche !

M. le président. Vous avez la parole, monsieur Chenu.

M. Sébastien Chenu. L'intitulé de ce débat est particulièrement biaisé : comment donc peut-on parler de « rétablissement des finances publiques depuis 2017 » pour illustrer nos échanges ? Dans son dernier rapport annuel, la Cour des comptes évoque un redressement des finances publiques « quasiment à l'arrêt » et une situation des finances publiques de la France « qui a continué à se dégrader relativement à celle de ses partenaires européens ». Je vous accorde que le mauvais bilan de ce gouvernement ne fait que prolonger les échecs des précédents – c'est normal, ce sont les mêmes personnes qui font les mêmes politiques ! Depuis 2001, la dette publique a augmenté de trente points. En février dernier, alors que le choc du covid-19 n'était pas encore survenu, M. Bruno Le Maire admettait que la dette était le point noir des finances publiques de la France.

La vérité est que nous dansons sur un volcan depuis des décennies, et que, désormais, nous n'avons plus aucune marge de manoeuvre. Vous êtes obnubilés par le respect des critères budgétaires de Maastricht et du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance. Les gouvernements successifs ont appliqué avec docilité les politiques d'austérité proposées par l'Allemagne et imposées par les commissaires de Bruxelles. À la poursuite de ces fétiches, nos dirigeants ont procédé à des coupes budgétaires draconiennes qui apparaissent aujourd'hui au grand jour. Police, justice, hôpitaux, services publics de proximité… : tout y passe ! La crise sanitaire a révélé la casse de l'hôpital public, conséquence de recherches aveugles d'économies budgétaires. Parallèlement, les mauvaises dépenses publiques se sont envolées : explosion du coût de l'aide médicale d'État, immigration de masse, fraude sociale, fraude fiscale… Les politiques d'austérité, couplées au gaspillage de l'argent public, ont donc annihilé toute croissance économique, sans améliorer la situation des finances du pays.

Il est temps d'abandonner ces totems qui aggravent la spirale de l'endettement. Ainsi, c'est bien le zéro pointé du rétablissement des finances publiques qui risque de pénaliser les futurs plans de relance économique. Pour favoriser cette relance sans faire subir aux Français une énième augmentation de la fiscalité, allez-vous enfin renforcer la souveraineté budgétaire de la France ? Allez-vous enfin enclencher le patriotisme économique que nous proposons, au moment où nous assistons chaque jour au triste spectacle de plans sociaux, qui s'annoncent nombreux ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Sachant que vous êtes le dernier orateur de ce débat, la réponse que je vous ferai me permettra de rappeler quelques chiffres. Vous portez un regard sévère sur les efforts de redressement menés par le Gouvernement. Or, depuis trois ans consécutifs, nous avons tenu l'engagement, pris souverainement devant les autorités européennes, de maintenir le déficit en deçà de 3% – hors crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi, le déficit est ainsi passé de 2,9% à 2,1% du PIB. Par ailleurs, nous avons tenu l'engagement, pris par le Président de la République, de diminuer le poids de la dépense publique par rapport au PIB – il est passé de 55,1% à 54%. Surtout, élément capital pour nos concitoyens, nous avons diminué la pression fiscale en portant le taux des prélèvements obligatoires de 45,3% à 44%. Dernier chiffre, qui est probablement la conséquence des trois premiers : le taux de chômage est passé de 9,5% à un peu plus de 8%. Des emplois ont été créés dans des proportions importantes, tandis que le nombre de chômeurs baissait de façon inédite.

J'ajoute que la France est devenue la première destination des investissements internationaux en Europe. Peut-être cette attractivité de la France et cette ouverture aux investissements internationaux interrogent-elles certains membres de votre famille politique et de vos cadres, qui martèlent leur volonté de fermer les frontières et d'empêcher ce type d'échanges. Telle est néanmoins la réalité.

M. Sébastien Chenu. C'est un peu ringard, ça !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Nous sommes désormais confrontés à l'enjeu du financement de la dette et des mesures que nous venons de prendre. La croissance y contribuera – je ne reviens pas sur ce débat. Pour vous rassurer, et comme vient de l'expliquer M. Gérald Darmanin, je vous dirai enfin que nous avons une chance : les efforts que nous avons consentis, la situation que nous connaissons et l'attractivité de la France nous permettent de nous financer auprès des marchés financiers dans des conditions très avantageuses – bien plus que nombre de nos voisins européens. Voilà ce à quoi nous veillons et travaillons.

Mme Caroline Fiat. En laissant nos soignants travailler dans des sacs poubelles !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Préservons cette attractivité, pour continuer à bénéficier de ces conditions favorables.

M. le président. Le débat est clos.


Source http://www.assemblee-nationale.fr, le 12 juin 2020