Texte intégral
JEAN-JACQUES BOURDIN
Gérald DARMANIN, bonjour.
GERALD DARMANIN
Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous. J'ai écouté, vous avez écouté et regardé le président de la République hier soir. Donc l'économie avant la santé maintenant, il est temps de penser à l'économie, il est temps de relancer l'économie. C'est devenu une priorité ?
GERALD DARMANIN
L'économie, c'est la vie aussi. Au bout d'un certain temps, il faut effectivement reprendre le chemin du travail, reprendre le chemin de la production et puis retrouver une vie normale après avoir fait ce qu'a fait président de la République et qui est quand même extraordinaire. Comme beaucoup de pays occidentaux, il a arrêté l'économie pour le bien-être de nos concitoyens. Et désormais, nous devons reprendre l'économie également pour le bien-être de nos concitoyens.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc reconstruire une économie forte, écologique et solidaire a dit hier soir le président de la République. Toutes les mesures annoncées début juillet, c'est bien cela ?
GERALD DARMANIN
C'est ce qu'a dit le président de la République, oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Que va-t-il annoncer début juillet ? Je ne vais pas vous demander quelles mesures mais que va-t-il annoncer début juillet ?
GERALD DARMANIN
On voit bien qu'il y a des grandes orientations qui ont été dessinées par le président de la République.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.
GERALD DARMANIN
D'abord nous n'allons pas augmenter les impôts, c'est une chose très importante. Ç'a été dit, ç'a été redit, cette dette…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il n'y aura pas de contribution exceptionnelle sur les plus riches.
GERALD DARMANIN
Il n'y a pas d'augmentation de fiscalité parce que l'augmentation de fiscalité, elle décourage l'activité économique. L'idéologie fiscale, monsieur BOURDIN, ça fait des chômeurs en plus ; c'est ça la vérité de nos concitoyens. La stratégie fiscale et économique du président de la République depuis trois ans, elle fonctionnait. Avant le Covid-19, nous avions le chômage le plus bas depuis quinze, ans nous avions la croissance parmi les plus fortes des pays occidentaux. Nous avions des régions comme la mienne dans les Hauts-de-France où on recréait de l'emploi industriel parce qu'on a évité l'idéologie fiscale. L'augmentation d'impôts, elle tue la confiance des ménages dans la vie économique et la confiance des entreprises. Donc il n'y aura pas d'augmentation d'impôts. C'est une première grande orientation. Comment on va payer finalement cette dette alors ? Comment on va relancer l'économie ? Par la croissance. Par la croissance, par le travail.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Par le travail.
GERALD DARMANIN
Nous allons travailler et il faut que les Français, mais les Français le savent : c'est un peuple de travailleurs, nous allons travailler pour rembourser en partie notre dette et pour payer le sujet de demain qui est notre volonté de vivre dans un pays nouveau. Mais pas n'importe quelle croissance, pas la croissance du monde d'avant. Le président de la République l'a évoquée : la croissance verte. Il a évoqué beaucoup de choses extrêmement fortes hier. La rénovation thermique des logements qui est une source de croissance extrêmement forte…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça veut dire qu'il va appliquer certaines mesures recommandées par le fameux Conseil écologique mis en place par Emmanuel MACRON.
GERALD DARMANIN
Ça veut dire qu'il y a effectivement, via le Conseil citoyen qui avait été choisi par le président de la République par un tirage au sort…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, et qui va rendre son rapport fin juin.
GERALD DARMANIN
Exactement et il n'y a pas que ses propositions. Beaucoup de gens ont réfléchi à c'est quoi une économie décarbonée, une économie respectueuse de la nature.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce sera au coeur, ça, de la relance.
GERALD DARMANIN
Mais ce sera au coeur de la relance, bien sûr monsieur BOURDIN. Moi-même à la demande du président de la République et du Premier ministre, je vais présenter pour l'année 2021 pour la première fois un budget vert. Pas simplement un budget comptable, pas un budget des chiffres mais aussi un budget pour savoir si ce que nous allons faire comme dépenses fiscales, comme dépenses tout court, sont des dépenses qui sont utiles à l'environnement et c'est des questions très compliquées. Si je vous dis je fais du nucléaire et des dépenses pour le nucléaire, vous me dites c'est quelque chose de très négatif pour l'environnement à cause des déchets mais c'est aussi très positif pour l'environnement par exemple parce que c'est moins de gaz carbonique. Et donc nous allons présenter à la Nation les dépenses et les recettes de l'Etat pas simplement d'un point de vue comptable - pas simplement d'un point de vue comptable - mais d'un point de vue de l'utilité pour l'environnement. Et nous serons le premier pays au monde à le faire et ça fait deux ans qu'on y travaille à Bercy…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Nucléaire, on va construire d'autres EPR ?
GERALD DARMANIN
C'est une discussion qu'on doit avoir justement…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous y êtes favorable ou pas ?
GERALD DARMANIN
Moi je suis assez favorable au nucléaire. Je pense qu'il faut un mix énergétique.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc d'autres EPR.
GERALD DARMANIN
Je ne vais pas faire le débat avant le débat. Vous me posez la question à moi, je vous dis que je suis plutôt favorable à l'énergie nucléaire. Je suis dans une région qui en produit beaucoup, qui est très industrielle et qui baisse fortement le prix de l'électricité et de l'énergie pour les entreprises Mais en même temps, et c'est un sujet que nous devrions regarder en face, il faut qu'on règle la question des déchets. Elle n'est pas réglée cette question des déchets et elle handicape les générations futures. Donc les débats annoncés par le président de la République sur l'économie verte, ça vous donne une grande orientation du mois de juillet.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc grande orientation du mois de juillet parmi les mesures qui seront annoncées en juillet. Parce que le grand départ, c'est juillet finalement. Mais Gérald DARMANIN, donc je comprends bien, reconstruire une économie forte, écologique, solidaire, il va falloir travailler plus - j'y reviens - et produire davantage. C'est ce qu'a dit le président de la République hier. Ça veut dire quoi travailler plus ? Ça veut dire que les Français vont travailler plus qu'ils ne travaillent aujourd'hui ?
GERALD DARMANIN
Le président de la République, il a dit quelque chose de très important et je crois que c'est la phrase la plus importante personnellement. Il a dit : nous ne devons pas tout décider de Paris. Vous voyez, il faut qu'on arrête de décider tout de Paris et pas de votre micro ou d'un bureau à l'Elysée, à Matignon ou à Bercy. On ne va pas décider du temps de travail des Français comme ça, d'une loi…
JEAN-JACQUES BOURDIN
On ne changera pas les 35 heures.
GERALD DARMANIN
Comme madame AUBRY l'a décidé jadis. On peut moins travailler dans certaines entreprises quand il y a moins de commandes ou quand il y a plus de valeur ajoutée et on peut plus travailler dans certaines entreprises quand il y a plus de commandes.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc dépasser les 35 heures quand il y a plus de commandes.
GERALD DARMANIN
Mais c'est déjà fait. Le président SARKOZY l'a fait, les ordonnances Pénicaud ont réussi…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. On va renforcer cela ?
GERALD DARMANIN
Mais que chaque entreprise décide. Alors il faut que le patron ou la patronne décide évidemment avec ses salariés, il n'est pas question d'avoir une décision unilatérale. Le droit du travail doit être protecteur et les salariés doivent décider en même temps que leur patron. Ça, c'est un progrès important. Mais ce n'est pas de Paris qu'on va dire combien dans telle usine on doit travailler en horaires. Nous avons défiscalisé les heures supplémentaires, nous avons permis les heures supplémentaires pour tous les ouvriers et les salariés et les employés de France. On a permis la liberté dans l'entreprise. Eh bien il va falloir travailler davantage s'il y a plus de commandes et c'est ce qu'on faisait chaque année.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc dans une entreprise s'il y a plus de commandes, on travaillera plus. Comment on travaillera plus ? En faisant plus d'heures, peut-être en donnant, je ne sais pas, en abandonnant des RTT ? C'est possible ?
GERALD DARMANIN
Ça, c'est une négociation qu'il doit y avoir dans l'entreprise.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais c'est possible.
GERALD DARMANIN
Mais c'est déjà le cas. C'est une négociation qu'il doit y avoir dans l'entreprise.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ou en abandonnant ou en rognant ses congés aussi ?
GERALD DARMANIN
Non. De manière générale monsieur BOURDIN, moi je ne suis pas pour les décisions unilatérales.
JEAN-JACQUES BOURDIN
D'accord, mais j'ai compris. Venues de Paris, j'ai compris.
GERALD DARMANIN
Non, non, mais même, venues du patron sur les ouvriers. J'ai eu l'occasion de dire à quel point j'étais attaché à la participation, c'est-à-dire à cette idée que le capital et le travail doivent être respectés en même temps. Je suis très dubitatif quand on demande à des employés d'être payés moins alors qu'ils travaillent plus. Moi j'ai toujours été favorable à travailler plus pour gagner plus. Il se peut que dans des circonstances exceptionnelles le patron ou la patronne se retourne vers ses salariés pour dire : on a un problème pendant quelques mois, il faut que chacun fasse un effort. Je peux le comprendre, c'est régi par le code du travail, je peux le comprendre. Mais ça ne doit pas être du tout la règle générale. Et la contrepartie de produire plus, c'est que les ouvriers et les employés de France gagnent plus.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce n'est pas la règle générale, mais enfin c'est ce qu'a dit Emmanuel MACRON hier : il faut travailler plus et produire plus.
GERALD DARMANIN
Oui, et donc il faut accepter l'idée de payer plus ses salariés.
JEAN-JACQUES BOURDIN
De payer plus. On travaille plus, on est payé plus.
GERALD DARMANIN
Parce que qu'est-ce qui se passe ? Si nous n'augmentons pas les impôts et qu'en France on produit plus, qu'on travaille plus, qu'on gagne plus, on peut plus rembourser. On peut plus rembourser monsieur BOURDIN. On peut payer davantage d'avenir à ses enfants, on peut plus facilement consommer français dont les produits parfois sont un petit peu plus chers que lorsqu'ils sont importés.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a des freins quand même, il y a des freins. Le chômage partiel par exemple, n'est-ce pas devenu un frein ? Ç'a été formidable le chômage partiel mais n'est-il pas aujourd'hui devenu un frein ?
GERALD DARMANIN
Bon d'abord, c'est quelque chose d'extraordinaire mis en place par le gouvernement. 31 milliards d'euros d'argent public. Qu'est-ce qu'on a fait ? On a nationalisé les salaires plutôt que de licencier. Regardez ce qui se passe autour de nous. Plutôt que de licencier par centaines de milliers de personnes, on a pris en charge le salaire des Français. Maintenant nous avons déconfiné, nous retournons au travail tous collectivement. Il y a beaucoup de gens qui ont beaucoup travaillé pendant cette crise, on va dire de façon générale. Ce qui est certain monsieur BOURDIN, c'est que là encore on ne peut pas tout décider de Paris. Il y a des secteurs où ça ne va pas bien, c'est le cas de l'hôtellerie, c'est le cas de la restauration encore, c'est le cas du tourisme.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien sûr.
GERALD DARMANIN
C'est le cas de la culture, c'est le cas du sport. Il y a des secteurs où ça ne va bien. Ça va être plusieurs mois, peut-être un peu plus encore, pour retrouver une activité normale. Là il faut que l'Etat soit au rendez-vous donc il faut qu'il y ait du chômage partiel. Il y a des secteurs où ce n'est plus le cas, où désormais les gens retravaillent correctement, où les gens produisent correctement, où les gens consomment correctement. L'Etat ne va pas se substituer au patronat et donc effectivement, là il faudra sans doute éteindre le chômage partiel.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous allez éteindre le chômage partiel dans certains secteurs.
GERALD DARMANIN
C'est la négociation que porte aujourd'hui la ministre du Travail avec les partenaires sociaux, le président de la République l'a évoqué hier et moi je suis certain du bon sens qui va l'emporter. L'Etat sera là dans les secteurs où il faut être là, l'Etat retirera le chômage partiel dans les secteurs où il n'y a pas besoin d'être là.
JEAN-JACQUES BOURDIN
A partir du 1er juillet, quel chômage partiel toucheront les salariés ?
GERALD DARMANIN
On ne le sait pas encore tout à fait. Ce qu'on sait, c'est qu'il vaut mieux… On va baisser un tout petit peu.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. On va se retrouver à quoi ? 60% ?
GERALD DARMANIN
C'est ça, c'est 60% au lieu de 70 mais cette option…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Voilà, 60 % le 1er juillet.
GERALD DARMANIN
Mais les salariés, monsieur BOURDIN, ne verront sans doute pas la différence puisqu'il appartient au chef d'entreprise de compenser les 10 ou 15% que l'Etat ne mettra plus.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc l'Etat fait beaucoup d'efforts, beaucoup d'efforts pour l'automobile, le secteur automobile, beaucoup d'efforts pour l'aéronautique, on l'a vu : 15 milliards d'euros pour l'aéronautique. Et pour la SNCF ? Est-ce que l'Etat va faire un nouvel effort ?
GERALD DARMANIN
L'Etat, il en fait déjà…
JEAN-JACQUES BOURDIN
5 milliards d'euros de pertes depuis décembre.
GERALD DARMANIN
Monsieur FARANDOU a dit 4 milliards, vous exagérez un petit peu.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais non, je n'exagère pas. Je parle depuis décembre.
GERALD DARMANIN
Monsieur le président-directeur général de la SNCF m'a demandé rendez-vous, je le reçois dans les prochains jours. L'Etat a toujours été au rendez-vous de cette grande entreprise. D'abord on a repris la dette monsieur BOURDIN, ce qu'aucun gouvernement n'avait fait.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez repris un tiers de la dette.
GERALD DARMANIN
35 milliards d'euros.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Un tiers de la dette.
GERALD DARMANIN
Ce n'est pas mal déjà.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais je dis que c'est pas mal, mais c'est un tiers.
GERALD DARMANIN
35 milliards d'euros, c'est l'argent des Français. Deuxièmement, nous sommes aujourd'hui le premier partenaire de la SNCF. Nous dépensons 15 milliards d'euros par an dans le chiffre d'affaires de la SNCF. C'est bien l'Etat qui paye pour que les billets de train soient moins chers. Troisièmement, si - et il y en a - des pertes de recettes qui sont nées alors des grèves de décembre ou du Covid de cette période-ci, nous serons au rendez-vous de cette grande entreprise nationale. On va d'abord retourner…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Geste financier de l'Etat ?
GERALD DARMANIN
On va d'abord retourner à la normale pour voir comment fonctionnent les choses avec la SNCF et l'Etat sera au rendez-vous.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire geste financier de l'Etat ?
GERALD DARMANIN
Forcément monsieur BOURDIN, il y aura un geste financier de l'Etat qu'il soit directement auprès de la SNCF ou qu'il soit auprès des institutions qui travaillent avec la SNCF. Je pense aux régions qui, vous savez, ont des conventions avec les TER, les trains du quotidien. C'est le cas en Ile-de-France : madame PECRESSE fait des demandes au gouvernement que nous étudions en ce moment même, et c'est le cas bien sûr dans les régions, les autres régions. Donc que ce soit d'une manière ou d'une autre, l'Etat sera au rendez-vous.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, les retraites. 30 milliards d'euros de déficit, ça fait beaucoup là, ça commence à s'accumuler. Est-ce que vous allez suspendre la réforme ou pas ?
GERALD DARMANIN
Le président de la République prendra sans doute dans le mois de juillet des décisions qui concernent l'assurance chômage, la réforme de l'assurance chômage et des retraites. Il n'a pas voulu l'évoquer hier…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Parce que la réforme de l'assurance chômage, ça permet peut-être de travailler plus, non ? D'inciter, non ?
GERALD DARMANIN
Attendez, je suis très favorable à la réforme de l'assurance chômage que nous avons portée et à la réforme des retraites. Maintenant on voit bien que l'assurance chômage modifiée lorsqu'on a quasiment le plein emploi ou quand on était dans un chômage assez bas il y a trois mois n'est pas tout à fait pareille qu'une assurance chômage où on a 500 000 chômeurs de plus. Donc il faut sans doute modifier un certain nombre de choses. Mais le président de la République aura l'occasion en juillet, ce sera au lendemain des élections municipales – nous sommes en campagne municipale - donc aura l'occasion au lendemain des élections municipales de dire ce qu'il fait sur ces deux grandes réformes sociales.
JEAN-JACQUES BOURDIN
La réforme des retraites, vous êtes favorable à une poursuite de la réforme ?
GERALD DARMANIN
Je ne vais pas préempter ce qu'a dit le président de la République mais moi, j'y crois à cette réforme des retraites
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous y croyez donc vous la défendez.
GERALD DARMANIN
Que des agriculteurs de ma circonscription de Tourcoing aient 1 000 euros par mois, je pense que c'est une grande justice sociale. Qu'on mette fin à un certain nombre d'inéquités entre les Français dans la retraite, je pense que c'est une grande réforme sociale.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Le Ségur de la santé, est-ce que l'Etat a les moyens d'augmenter les infirmières et infirmiers de 300 euros par mois ?
GERALD DARMANIN
L'Etat s'y est engagé.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc 300 euros par mois, l'Etat s'est engagé. Aujourd'hui, il y a une négociation, monsieur BOURDIN. Madame NOTAT…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, je vous pose une question précise. Est-ce que l'Etat a les moyens d'augmenter les infirmières et infirmiers de 300 euros par mois ?
GERALD DARMANIN
Mais c'est un investissement pour l'avenir que de le faire. On voit bien que lorsque l'on rogne un peu sur les crédits de la santé, même si on peut faire ici ou là encore des réformes notamment dans la bureaucratie du système de santé, mais pour les soignants directement on voit bien qu'ils ont d'énormes investissements pour le capital humain et pour le capital tout court pour le fait d'aider…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc l'Etat répondra aux demandes.
GERALD DARMANIN
Il y a une négociation.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, sur plusieurs points.
GERALD DARMANIN
Monsieur BOURDIN, depuis 3 ans que je suis membre du gouvernement, vous me dites : vous décidez trop vite, trop de Paris, trop rapidement sans discuter. Et puis quand je vous dis : il y a une négociation, c'est décentralisé, vous me dites : mais alors répondez.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais moi, je ne veux pas le résultat de la négociation avant la fin, Gérald DARMANIN. Je dis simplement est-ce que l'Etat a les moyens d'augmenter les infirmières et infirmiers de 300 euros ? Vous m'avez dit oui.
GERALD DARMANIN
Il faut faire des choix. Et le choix qui a été…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Heureux pour eux.
GERALD DARMANIN
Heureux pour nous. Le choix qui a été fait par le président de la République, c'est un choix courageux. Il consiste à dire que nous allons revaloriser le personnel soignant, les infirmières, les infirmiers, les aides-soignantes qui font un travail considérable et puis nous allons faire d'autres choix politiques. Ça veut dire que nous dépenserons moins ailleurs.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, la question sur les statistiques ethniques, le débat a été relancé par Sibeth NDIAYE. Est-ce que vous êtes favorable à des statistiques ethniques, Gérald DARMANIN ?
GERALD DARMANIN
Ça veut dire quoi derrière l'intervention de Sibeth NDIAYE ? Ça veut dire qu'on se pose la question de savoir si l'ascenseur social républicain fonctionne encore. Moi je pense qu'il fonctionne encore mais il est beaucoup plus lent pour aller dans les étages supérieurs qu'avant donc il faut faire quelque chose. C'est sûr qu'il faut faire quelque chose. Sibeth a évoqué les statistiques ethniques. Moi je serais plutôt favorable à la proposition de Julien DENORMANDIE qui évoquait des statistiques par géographie. Moi je ne suis pas tout à fait certain que ce soit la couleur de peau qui handicape. Il peut y avoir de la discrimination, il y a sans doute du racisme dans la société évidemment mais je ne suis pas sûr que ce soit aujourd'hui ce qui handicape le plus les petits Français de sang mêlé, comme le disait l'ancien président, de réussir. J'en suis un exemple. En revanche quand vous êtes issu d'un quartier difficile de Roubaix ou Tourcoing, par votre adresse, quelle que soit votre couleur de peau, c'est plus difficile de trouver un stage que quand vous êtes quelqu'un d'une couleur de peau différente des Blancs comme on dit aujourd'hui dans le VIIème arrondissement de Paris. Vous voyez, ce n'est pas la même chose. La classe sociale compte aussi, la géographie compte. Voilà. Donc moi je serais plus favorable à des statistiques par géographie. C'est pour ça que l'Etat essaie de faire le CV anonyme, c'est pour ça que l'Etat essaie de faire l'ANRU. C'est pour ça que l'Etat essaie de faire les emplois francs dans les quartiers en difficulté. Il n'a manifestement pas trouvé la martingale, l'Etat, et c'est une grande, grande difficulté républicaine que de ne pas promouvoir l'ascenseur social.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Gérald DARMANIN, la cour d'appel de Paris a ordonné la reprise des investigations concernant une accusation de viol, harcèlement sexuel, abus de confiance, accusations portées contre vous pour des faits remontant à 2009. Quelques mois plus tard, un non-lieu avait été prononcé il y a deux ans, à peu près deux ans, non-lieu prononcé mais la cour d'appel estime que le juge d'instruction ne pouvait se fonder uniquement sur les résultats de l'enquête préliminaire pour refuser la relance des investigations. Donc reprise des investigations. Est-ce que vous souhaitez aujourd'hui une confrontation avec votre accusatrice ?
GERALD DARMANIN
Moi je n'ai pas de commentaires à faire monsieur BOURDIN. Je n'en faisais pas avant, je n'en fais pas maintenant, je n'en ferai pas demain parce que j'ai confiance dans l'institution judiciaire. J'ai confiance et respect. Permettez-moi juste de dire - vous l'avez fait avec honnêteté – qu'il y a eu deux classements sans suite par deux fois par le procureur de la République de Paris. Il y a eu un non-lieu émis par deux juges d'instruction. Ça fait trois ans, avec ces trois décisions de justice que l'on me calomnie. Voilà, je répondrai une nouvelle fois s'il le faut à l'institution judiciaire comme n'importe quel citoyen.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais vous accepteriez une confrontation avec votre accusatrice ?
GERALD DARMANIN
Mais moi je suis monsieur BOURDIN à la disposition de l'institution judiciaire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc si l'institution judiciaire.
GERALD DARMANIN
Monsieur BOURDIN, il doit y avoir aussi des limites à la calomnie. Vous savez, la calomnie ça blesse, ça renforce aussi. C'est 3 décisions de justice rendues en 3 ans. Qu'est-ce que je peux dire d'autre que je suis à disposition de la justice ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Moi je me souviens le 19 février 2018, vous étiez ici, ici même après les révélations de ces accusations et vous disiez je suis tranquille comme Baptiste. Vous êtes toujours aussi tranquille ?
GERALD DARMANIN
Oui, je suis tranquille comme Baptiste. Bien sûr je suis tranquille comme Baptiste monsieur BOURDIN.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous me disiez aussi, les yeux dans les yeux, formule célèbre d'ailleurs d'un ministre du budget, je n'ai jamais abusé d'aucune femme et je n'ai jamais abusé de mon pouvoir.
GERALD DARMANIN
Mais vous savez monsieur BOURDIN, encore une fois je ne vais pas faire de commentaires particuliers, la politique, c'est quelque chose de formidable parce que vous aidez vos concitoyens. J'ai été réélu maire dans ma commune au premier tour dans une ville qui n'est pas très favorable à ma famille politique, on va dire ça comme ça, je pense que mes concitoyens, ils ne voient dans mes yeux que je les aide tous les jours, que j'essaie de les aider tous les jours. Je suis fier d'être parmi eux. Et parfois il a des côtés plus difficiles dans la politique, c'est les attaques, je ne suis pas le premier, je suis pas le dernier, c'est toujours difficile de se faire attaquer, de se faire calomnier, il y a vos parents qui vous regardent, il y a vos amis qui vous regardent, il y a votre famille, ce que vous êtes et puis vous ne faites pas de la politique pour être calomnié tous les matins. Donc il faut savoir rester tranquille comme Baptiste quand on n'a rien à se reprocher, ce qui est mon cas et en même temps faut être à la disposition de l'institution judiciaire. Trois décisions de justice en trois ans pour des choses qui remonterait à plus de 10 ans, voilà est-ce qu'on ne se dit pas, 11 ans, est-ce qu'on ne se dit pas qu'au bout d'un moment il faut savoir s'arrêter ? Voilà moi je n'ai pas de commentaire d'autre à faire que de redire ça aux Français et aux Françaises.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien maire et ministre jusqu'à quand ?
GERALD DARMANIN
Le président de la République m'a autorisé pour un temps puisque je l'ai rencontré avant de prendre ma décision.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il est favorable au cumul alors.
GERALD DARMANIN
Monsieur BOURDIN, on n'a même pas terminé les élections municipales, le 2e tour, alors c'est un peu original peu parce que c'est à quelques semaines après le premier tour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Enfin vous êtes déjà élu vous.
GERALD DARMANIN
Oui mais enfin très bien, mais il y a encore plein de gens qui seront réélus le 28 juin, voilà. Après président de la République qui va sans doute dessiner un nouveau chemin, c'est ce qu'il a dit hier à la télévision.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Un nouveau chemin, c'est quoi, c'est un nouveau gouvernement ?
GERALD DARMANIN
Il a dessiné un nouveau chemin…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour vous c'est quoi ?
GERALD DARMANIN
Peut-être… Ce qui est le plus important, c'est le fond, c'est les idées.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais on est d'accord.
GERALD DARMANIN
Et peut-être y aura-t-il, peut-être y aura-t-il, c'est un secret de polichinelle de nouvelles personnes qui aideront le président de la République.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous vous attendez à un remaniement.
GERALD DARMANIN
Quand le président de la République le souhaitera…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui mais d'accord, mais à nouveau, Gérald DARMANIN, vous savez très bien que vous y pensez, vous n'allez pas me dire que vous n'y pensez pas.
GERALD DARMANIN
Chacun sait… Je pense que j'y pense moins que les journalistes.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, non, peut-être moins que les journalistes. Moi, je ne suis pas journée politique, mais je vous demande, je vous demande Gérald DARMANIN, un nouveau chemin ça veut dire probablement, probablement une nouvelle équipe. On ne s'engage pas sur un nouveau chemin avec une équipe ancienne, vous êtes d'accord avec moi.
GERALD DARMANIN
Pour un journaliste qui ne fait pas de politique, vous posez beaucoup de questions politiques quand même monsieur BOURDIN.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est mon rôle aussi.
GERALD DARMANIN
Peut-être y aura-t-il de nouvelles personnes autour du président de la République au moment où le président de la République le souhaitera, c'est principe même de la Constitution et moi je suis très lecteurs et admirateurs de la constitution de la Vème République, donc je la respecte. Lorsqu'il fera son choix, je ne présume pas du choix du président de la République, donc le président de la République m'a dit que pour un temps, je suis un des ministres qui a gagné les élections municipales, les électeurs de Tourcoing…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Jusqu'à quand ?
GERALD DARMANIN
… Ont montré que ça ne les dérangeait pas d'avoir un maire qui par ailleurs a mis une voix à Paris, je pense d'ailleurs monsieur BOURDIN, qu'il est pas mal d'entendre de temps en temps la voix de la province, moi je me sens, je me sens très provincial, de là où je suis, alors Tourcoing n'est pas à Arles, n'est pas n'est pas à Nîmes, n'est pas Brest, mais c'est une partie de la France qu'on écoute peut-être pas assez. Je suis très fier de porter sur votre plateau la parole des habitants de la ville de Tourcoing, mais par ailleurs je suis très honoré d'être ministre de la République.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et jusqu'à quand ?
GERALD DARMANIN
Jusqu'à ce que le président de la République en décide.
JEAN-JACQUES BOURDIN
En décide et est-il vrai que vous souhaitez être à la tête d'un grand ministère regroupant travail et affaires sociales, vous aimeriez ?
GERALD DARMANIN
Non ? Moi je suis très bien à la tête de mon ministère qui est tout à fait essentiel monsieur BOURDIN pour l'avenir du pays et cette semaine après vous avoir quitté, je vais commencer à recevoir mes collègues ministres pour préparer ce budget 2021, ce qui ne va pas être une mince affaire. Le président de la réplique m'a demandé de présenter ce budget, je le fais et j'espère le faire jusqu'au bout.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Gérald DARMANIN d'être venu nous voir.
GERALD DARMANIN
Merci à vous
source : Service d'information du Gouvernement, le 16 juin 2020