Texte intégral
CAROLINE ROUX
Bonjour Gabriel ATTAL.
GABRIEL ATTAL
Bonjour.
CAROLINE ROUX
Nous allons évoquer naturellement l'actualité sociale, mais d'abord, un mot sur votre mission. Quand on vous a confié ce poste, quand le Premier ministre et le président vous ont confié ce poste, qu'est-ce qu'ils vous ont dit : pas de vague, pas de buzz, pas de bourde ?
GABRIEL ATTAL
Ils m'ont demandé d'être clair dans mes propos, d'avoir une humilité, une modestie, parce que c'est important aussi, et puis, essayer d'être le plus clair possible sur ce que fait le gouvernement, d'expliquer, de donner des perspectives, ce n'est pas toujours simple parce que, aujourd'hui, l'information, elle est partout, elle circule beaucoup, elle circule sur les réseaux sociaux, sur les chaînes d'information en continu, sur les chaînes plus généralistes, et donc c'est important aussi de redonner un cap et un cadre à tout ça.
CAROLINE ROUX
Vous le savez bien, c'est un poste difficile, Sibeth NDIAYE en a fait les frais, c'est un poste où vos prédécesseurs sortent souvent essorés. La seule solution, c'est la langue de bois, Gabriel ATTAL ?
GABRIEL ATTAL
Je n'espère pas, je ne crois pas, en tout cas, moi, je vais tout faire pour ne pas être langue de bois, y compris avec vous ce matin, mais c'est vrai que c'est une responsabilité difficile, mais c'est aussi une belle responsabilité, moi, je veux le dire, et je suis très heureux d'être porte-parole du gouvernement, parce que je crois à ce qu'on fait, parce que j'ai rejoint Emmanuel MACRON autour de son projet, qu'on le met en œuvre dans des conditions qui sont extraordinairement difficiles, on va peut-être y revenir, et parce que j'y crois, et je suis heureux de pouvoir en parler et de le défendre.
CAROLINE ROUX
Heureux et pas de langue de bois. Alors, on y va, si Gérald DARMANIN avait été mis en cause dans une affaire d'emplois fictifs comme l'a souligné Ségolène ROYAL, aurait-il pu intégrer cette équipe gouvernementale ?
GABRIEL ATTAL
Moi, je vais vous dire, je crois, et j'espère, on croit tous à la présomption d'innocence dans notre pays, et quand il y a des affaires, des accusations qui touchent des individus, des simples citoyens, des responsables d'entreprises, des responsables syndicaux, des responsables politiques, on s'attache toujours à respecter la présomption d'innocence parce que, sinon, ça veut dire qu'on ouvre une brèche, et que des citoyens qui peuvent être mis en cause pourraient se voir empêchés d'accéder à certaines responsabilités, y compris dans le privé, et donc, on peut pas, d'un, côté sacraliser ce principe, et considérer que des personnes ne pourraient pas en bénéficier en raison de la mission qu'elles occupent…
CAROLINE ROUX
Alors jusqu'où va la présomption d'innocence ?
GABRIEL ATTAL
Donc il y a des investigations qui sont menées par aujourd'hui des enquêteurs, et c'est normal, on est dans un État de droit, mais il n'y a pas aujourd'hui ni de mise en examen ni de condamnation, il y a même…
CAROLINE ROUX
C'est important ce que vous dites, s'il y avait une mise en examen, il quitterait le gouvernement ?
GABRIEL ATTAL
Eh bien, le président de la République a toujours été très clair sur le fait qu'il reprenait ce principe, qui existe, je crois, depuis plusieurs gouvernements.
CAROLINE ROUX
Donc, il y a une réassurance de la part du chef de l'État…
GABRIEL ATTAL
Non, il n'en a pas reparlé du tout, encore une fois, le président de la République et le Premier ministre, ils ont témoigné de leur confiance à Gérald DARMANIN en le nommant ministre de l'Intérieur ; il y a ces investigations, parce qu'on est dans un État de droit, il y a une procédure qui suit son cours, et je crois d'ailleurs qu'elle a déjà donné lieu à deux classements sans suite, moi, je ne rentre pas dans le fond de la procédure, et voilà, ça avance…
CAROLINE ROUX
C'est à lui de s'en expliquer, Gérald DARMANIN ? C'est à lui de s'en expliquer ?
GABRIEL ATTAL
Je crois qu'il a déjà été interrogé sur le sujet, et je n'ai pas le sentiment qu'il cherche à éviter de répondre à la moindre question.
CAROLINE ROUX
On s'est trompé quand on a pensé que plus rien ne serait comme avant, quand on a pensé, quand on a écouté le président de la République, il nous a parlé de nouveau chemin, on n'entend plus parler aujourd'hui et ces derniers temps de continuité, notamment sur les réformes qui ont été entreprises, notamment sur la réforme des retraites, ça veut dire quoi le nouveau chemin, en fait ?
GABRIEL ATTAL
Le nouveau chemin, ça ne veut pas dire qu'on change destination, ça veut dire qu'on a des objectifs : l'émancipation des Français, leur permettre de se former, de s'éduquer, d'avoir accès à un emploi, la question de l'environnement et du projet écologique qu'on veut porter pour notre pays et pour le monde, la question de l'Europe, la question de la République et des institutions, et qu'on a connu de crise deux extraordinairement difficiles, le mouvement des gilets jaunes, la crise du coronavirus, qui sont deux mouvements évidemment, et deux situation évidemment très différentes mais qui nous ont dit beaucoup de, d'abord, la manière de gouverner le pays, et ensuite, de nos priorités, et donc, oui, on accélère sur certaines priorités, il y a certaines priorités qui deviennent encore plus prioritaires qu'elles ne l'étaient avant, et c'est ça le nouveau chemin…
CAROLINE ROUX
Lesquelles ?
GABRIEL ATTAL
En ce moment, vous voyez qu'il y a des discussions autour du Ségur de la santé pour revaloriser les métiers du soin…
CAROLINE ROUX
Alors, il y a eu un accord cette nuit, un projet d'accord cette nuit ?
GABRIEL ATTAL
On voudrait bien un accord avant la fin de la semaine, donc il y a des discussions, on arrive à la fin de ces discussions, aux décisions qui sont en cours. Je crois que les organisations consultent aussi leur base et leurs adhérents, mais on le voit bien, il y a une enveloppe de sept milliards et demi d'euros qui a été mise sur la table pour revaloriser les métiers du soin, c'est historique, ça n'avait jamais été proposé auparavant ; je crois que ça correspond, si je ne me trompe pas, à l'équivalent des augmentations qu'il y a eu ces 30 dernières années. Et c'est une nouvelle priorité qui est issue de la crise du coronavirus qu'on a connue, où les Français ont massivement applaudi leurs soignants, ont massivement considéré qu'il fallait revaloriser leurs salaires, voilà un exemple, la question écologique aussi…
CAROLINE ROUX
Aller vite, c'est la méthode CASTEX ?
GABRIEL ATTAL
Je crois que la méthode CASTEX, c'est à la fois d'aller vite, mais c'est aussi de concerter et de dialoguer, il reçoit aujourd'hui les partenaires sociaux individuellement, et la semaine prochaine, il les recevra collectivement, donc l'objectif, c'est avec cette nouvelle méthode, c'est un changement profond de méthode, pour le coup, il faut le dire, c'est de concerter l'ensemble de la société civile organisée, des corps intermédiaires, comme on dit, dans notre pays.
CAROLINE ROUX
Il ne concertait pas Edouard PHILIPPE ?
GABRIEL ATTAL
Sil il concertait.
CAROLINE ROUX
Alors, qu'est-ce qui change ?
GABRIEL ATTAL
Eh bien, on va plus massivement dans cette logique-là, et sur tous les sujets, on va organiser, je vous donne un exemple, une conférence des territoires pour échanger avec les élus, les associations, les associations d'élus, et puis, dans le changement de méthode, il faut quand même insister sur ce qui se passe avec la Convention citoyenne pour le climat, on a 150 citoyens tirés au sort, qui ne se connaissaient pas, qui n'étaient pas spécialement engagés sur les questions de l'environnement, qui se sont réunis pendant des mois, qui ont travaillé, qui représentent les Français, puisqu'ils sont tirés au sort avec évidemment des quotas pour représenter tous les territoires, les âges, les origines sociales, etc. Et on a présenté en Conseil des ministres mardi un projet de loi pour que le Conseil économique social et environnemental permette de faire des Conventions citoyennes sur tous les sujets, donc là, aussi, il y a un changement : associer davantage les citoyens, la parole citoyenne, parce que ça permet aussi d'être plus efficace, Caroline ROUX, quand vous associez les corps intermédiaires et les citoyens, eh bien, vous avez des réformes qui sont davantage efficaces…
CAROLINE ROUX
Justement, sur les corps intermédiaires, il y en avait un qui était à votre place hier, c'est Laurent BERGER, Laurent BERGER, il considère que ce n'est pas du tout urgent de rouvrir le dossier sur les retraites, et dit : ce n'est pas le moment de se foutre sur la gueule, ce sont les mots qu'il a utilisés, considérant qu'on prépare une rentrée sociale compliquée en rouvrant ce dossier-là. Pourtant, Jean CASTEX, qui veut concerter, considère que, lui, il faut aller vite sur ce dossier.
GABRIEL ATTAL
Mais c'est exactement ce dont Laurent BERGER et Jean CASTEX vont parler aujourd'hui, dans les jours qui viennent, et dans la grande réunion de la semaine prochaine. L'objectif, ce n'est évidemment pas de tendre les choses, et Laurent BERGER, vous vous souvenez qu'il soutenait le principe de la réforme des retraites, notamment le caractère universel de la réforme, et donc c'est ça qui va être discuté…
CAROLINE ROUX
Le sujet est financier ?
GABRIEL ATTAL
Mais évidemment qu'il y avait des irritants, on l'a vu dans le cadre du projet de loi sur les retraites au moment où il a été présenté avant la crise, mais l'objectif de la discussion, c'est justement d'avancer, ce n'est pas d'aller bille en tête, en se disant : tout est comme avant…
CAROLINE ROUX
Parce qu'il y a une urgence financière, Gabriel ATTAL ?
GABRIEL ATTAL
Il y a urgence financière et il y a une urgence sociale, il y a une urgence de justice, le constat que notre système aujourd'hui n'est pas juste, et aujourd'hui, quand vous avez les plus petits salaires, les travaux qui sont parfois les plus pénibles, eh bien, vous n'avez pas les mêmes droits à la retraite que les autres ; qui sont ces Français, c'est ceux de la première et de la deuxième ligne qu'on a vus pendant cette crise, c'est les aides-soignantes, c'est les caissières, c'est les éboueurs qui travaillent dur, qui ont beaucoup donné d'eux-mêmes pendant la crise et qui au moment de la retraite ont moins de droits que les autres, et donc, le sens de cette réforme et son objectif, évidemment qu'ils restent d'actualité.
CAROLINE ROUX
Vous parliez d'initiative citoyenne, je voudrais vous soumettre la question sur une initiative citoyenne – qui est portée par Hugo CLEMENT et des patrons français – qui pousse l'idée d'un référendum d'initiative partagée sur le bien-être animal, on sait que c'est une cause qui est souvent portée massivement par les Français, répondent à des questions, par exemple : pour ou contre l'interdiction des spectacles avec des animaux sauvages, la fin de l'expérimentation animale ou l'interdiction de l'élevage en cage pour les animaux, qu'est-ce que vous en pensez par exemple ?
GABRIEL ATTAL
Alors, moi, je vais vous dire, déjà, à titre personnel, la question de la condition animale, du bien-être animal, c'est une question qui me mobilise beaucoup depuis longtemps, déjà, quand j'étais parlementaire, j'avais eu l'occasion de faire des propositions, à l'époque, qui n'avaient pas été acceptées par… pas toutes acceptées par le gouvernement, mais bon, maintenant, je suis au gouvernement, donc je vais pouvoir aussi faire progresser la cause…
CAROLINE ROUX
Vous voulez poussez et défendre cette…
GABRIEL ATTAL
J'y crois profondément, mais je n'ai pas regardé toutes les propositions, mais je pense qu'il y en a qui sont extrêmement importantes vers lesquelles il faudrait aller, j'en ai parlé hier justement avec la nouvelle ministre de l'Ecologie, qui est une militante de la cause écologique depuis toujours, Barbara POMPILI, et je crois qu'elle va rencontrer les organisateurs et ceux qui ont lancé cette initiative pour échanger avec eux, et qu'on va avancer, on va continuer à avancer sur la question du bien-être animal…
CAROLINE ROUX
Donc ils ont votre soutien sur ce sujet-là. Le conseil scientifique, et le professeur DELFRAISSY, ce matin, invite les Français à ne pas abandonner le port du masque, il y a du relâchement, et visiblement, ça l'inquiète, est-ce qu'il n'est pas temps de repasser un message de mobilisation aux Français ?
GABRIEL ATTAL
C'est très important de le passer, de le repasser, et je le repasse devant vous aujourd'hui, il ne faut pas relâcher les efforts, l'épidémie, elle rôde autour de nous, et parmi nous, elle peut revenir, on a vu des pays, et que ce soit des pays voisins ou des pays plus lointains dans le monde, qui ont reconfiné massivement des villes ou des quartiers. La France n'en est pas à ce stade-là aujourd'hui, et donc c'est important de ne pas relâcher les efforts, ça vaut pour les jeunes, j'entendais que vous en parliez, mais aussi pour tous les Français, ça vaut pour les citoyens, pour les responsables politiques aussi, donc il faut qu'on donne l'exemple et qu'on montre qu'on respecte ces gestes…
CAROLINE ROUX
Vous mettez toujours votre masque, Gabriel ATTAL ?
GABRIEL ATTAL
Eh bien, je le mets dans les conditions qui sont recommandées par les autorités, et en l'occurrence, on a une bonne distanciation physique.
CAROLINE ROUX
Tout à fait. Merci à vous.
GABRIEL ATTAL
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 16 juillet 2020