Texte intégral
INTERVENANTE
Huit heures seize, "L'interview politique" d'Europe 1, Sébastien KREBS, vous recevez à présent Alain GRISET, ministre délégué chargé des Petites et Moyennes Entreprises.
SEBASTIEN KREBS
Bonjour Alain GRISET.
ALAIN GRISET
Bonjour.
SEBASTIEN KREBS
Bienvenue sur Europe 1, merci d'être en direct avec nous ce matin. La situation de l'épidémie se grade, on a entendu le discours plus qu'alarmiste, hier après-midi, du Premier ministre, Jean CASTEX qui veut généraliser le port du masque, et notamment sur les lieux de travail, des discussions vont s'engager pour l'imposer à toutes les entreprises. Ça vous paraît faisable d'un point de vue de chef d'entreprise, ou c'est trop de contraintes ?
ALAIN GRISET
Tout d'abord, il y a deux objectifs qu'il faut continuer de poursuivre. D'abord, un, naturellement essayer de maintenir une qualité de protection sanitaire pour l'ensemble des Français, et deux, tout faire pour que l'activité économique reprenne. Pour les entreprises il y a déjà des guides de bonne pratique qui permettent de garantir cette sécurité sanitaire, bon, naturellement, s'il faut aller au-delà parce que le virus se développe, les entreprises devront s'adapter, mais le tout c'est de pouvoir continuer à développer l'économie.
SEBASTIEN KREBS
Si c'est trop contraignant, ce port du masque, il faudra à nouveau encourager le télétravail à la rentrée ?
ALAIN GRISET
Oui, ça c'est une solution, mais vous savez très bien qu'il y a beaucoup d'entreprises pour lesquelles le télétravail n'est pas possible, en particulier dans le bâtiment, dans l'artisanat du bâtiment, entre autres, donc il y a les protocoles, qu'il faudra peut-être revoir, et avec la concertation, dans le cadre du dialogue social, de façon à regarder de quelle manière on peut adapter ces protocoles en fonction de la situation sanitaire.
SEBASTIEN KREBS
Adapter ces protocoles en fonction des secteurs. Vous êtes vous-même, Alain GRISET, un ancien artisan, ancien artisan taxi, ancien dirigeant aussi d'une organisation patronale, vous aviez, avant même de prendre vos fonctions début juillet, une idée très précise des dégâts causés par le confinement et la crise sanitaire sur les PME. Où est-ce qu'on en est aujourd'hui, est-ce que vous voyez déjà un nombre de défaillances d'entreprises à la hausse ?
ALAIN GRISET
Tout d'abord, il y a eu depuis le début de la pandémie, dès le mois de mars, un dispositif extrêmement important de maintien de l'économie, de soutien à l'économie, les dispositifs d'activité partielle, ce qu'on appelle le PGE, le Prêt Garanti par l'Etat, tout ce qui concerne le fonds de solidarité, le report de cotisations, tous ces dispositifs sont des dispositifs qui ont permis, cahin-caha, de maintenir les entreprises. Ce qui ne veut pas dire que pour les entreprises c'est formidable, parce qu'il y a toujours, naturellement, des pertes de chiffre d'affaires importants, mais les entreprises sont maintenues, et les petites entreprises en particulier sont celles dans lesquelles les dirigeants vont tout faire pour maintenir leur entreprise. Là on est passé, depuis le déconfinement, à une autre période de ce virus, et la reprise, la reprise d'activité elle est quelquefois, dans certains secteurs, intéressante, dans d'autres encore trop faible, et on rentre dans la troisième partie qui va être la partie relance avec le plan qui va être adopté par le gouvernement le 25 août.
SEBASTIEN KREBS
Il y avait les aides d'urgence, maintenant c'est les aides de long terme qu'il faut mettre en place.
ALAIN GRISET
Voilà, c'est surtout le fait de cibler ces aides sur les secteurs le plus en difficulté, et, le plan de relance, à côté de ce dispositif-là, a pour objectif d'accompagner la transformation de l'activité économique pour qu'elle soit plus verte et qu'au bout du compte nous puissions, à long terme, tirer profit de cette crise pour avoir un pays qui soit tout à fait en situation d'être très compétitif.
SEBASTIEN KREBS
Combien de PME sont en danger aujourd'hui ?
ALAIN GRISET
C'est un chiffre sur lequel on ne peut pas comme ça se prononcer, vous savez, il y a trois millions d'entreprises, il y a tous les ans à peu près bon an, mal an 50.000 entreprises qui changent de main ou qui ferment dans une année normale. Il y aura donc comme d'habitude des entreprises qui vont disparaître mais notre objectif c'est qu'elles soient les moins nombreuses possibles. Le président l'a dit dès le début, nous avons un objectif c'est de tout faire pour que le tissu économique soit maintenu de façon à ce que dès le moment où le virus aura totalement disparu ou on pourra le soigner nous soyons un pays qui soit en capacité de tout de suite rebondir plus fort et retrouver une situation antérieure au virus. Au mois de février on avait un pays dans lequel l'activité économique était relativement bonne, une bonne croissance, un taux de chômage qui diminuait, c'est ça l'objectif, c'est de passer ce moment-là, maintenir le tissu économique et ensuite repartir encore mieux qu'avant.
SEBASTIEN KREBS
Il y a un secteur auquel vous vous êtes intéressé assez vite lors de votre prise de fonction c'est le monde de la nuit, les discothèques, on comprend bien sûr qu'elles ne pourront pas rouvrir de sitôt, est-ce qu'on parviendra à les sauver ?
ALAIN GRISET
Ecoutez, je les ai vus dès la première semaine, dès ma nomination, nous avons bien travaillé avec leurs représentants, le Premier ministre a accepté d'avoir un dispositif tout à fait particulier sur le fonds de solidarité puisque le fonds de solidarité c'est 1.500 euros au premier niveau, 5.000 pour l'ensemble des entreprises, on est passé à 10.000 pour tout ce qui est tourisme et là on a un dispositif qui va jusqu'à 45.000. Nous avons convenu avec les représentants de se voir fin août, naturellement il y a derrière ça toujours une décision du Conseil de défense qui nous dira si oui ou non il y a un espoir d'ouverture. En fonction de cette décision nous verrons avec les professionnels de quelle manière nous pouvons continuer de les accompagner parce qu'effectivement aujourd'hui c'est un secteur qui est en grande détresse, en grande difficulté.
SEBASTIEN KREBS
Le tourisme, l'hôtellerie-restauration, tout le monde ne profite pas de la même façon de la saison estivale, on lit que 30 % des hôtels de France serait menacé de fermeture, là aussi il va falloir que la perfusion continue sur le long terme ?
ALAIN GRISET
Oui, nous avons un plan Tourisme qui est un plan de plus long terme et puis on voit bien que les situations sont extrêmement variées sur le territoire, Paris est très touché parce qu'il y a très peu de touristes, il n'y a plus d'affaires. On était avec Bruno LE MAIRE avant-hier à Lourdes où à Lourdes il y a plus de 80, 85 % de chiffre d'affaires perdus et donc là on met en place des opérations ciblées, il y a une opération spécifique sur Lourdes de façon à accompagner vraiment ceux qui en ont besoin. L'objectif qui m'a été demandé d'atteindre c'est d'être à l'écoute, d'être disponible et de pouvoir faire des propositions qui permettent d'accompagner tous ceux qui sont dans la plus grande difficulté, c'est ce que j''essaye de faire au quotidien.
SEBASTIEN KREBS
Il y a une inquiétude aussi qui porte sur le secteur du prêt-à-porter, de l'habillement, les soldes n'ont pas fonctionné cette année ou en tout cas mal fonctionné dans beaucoup de régions, il faut revoir cette formule des soldes selon vous ?
ALAIN GRISET
Tout d'abord c'est des résultats pour l'instant qui sont encore partiels mais démontrent que c'est mitigé, pour les indépendants globalement les choses ne se sont pas trop mal débrouillées, pour les grandes enseignes beaucoup moins, là aussi difficile sur Paris, donc naturellement il y a une réflexion qui doit être menée. Il y a un point positif c'est que tout le monde partage le fait d'avoir réduit de six semaines à quatre semaines était une bonne décision. Il y a toujours aujourd'hui des discussions sur la période, on voit bien qu'à côté des soldes il y a toutes les ventes privées, il y a le développement sur Internet et donc là dès le mois de septembre je réunirai l'ensemble des représentants de ces filières pour regarder dans l'avenir de quelle manière on peut gérer une période qui pour l'instant en tout cas reste pour les professionnels souvent un moment important auquel beaucoup tiennent mais on va remettre ça sur la table avec Bruno LE MAIRE.
SEBASTIEN KREBS
Beaucoup d'entreprises après le confinement ont fait appel aux aides d'Etat, ont souscrit notamment à ces prêts garantis par l'Etat mais des prêts par définition il faut ensuite les rembourser, qu'est-ce qui sera fait pour les entreprises qui n'auront peut-être pas les moyens de rembourser tout de suite ces prêts garantis par l'Etat, est-ce que là aussi il y aura des aides pour les maintenir à flots ?
ALAIN GRISET
Il y a un sujet que j'avais évoqué avant d'être ministre c'est ce que j'appelais le « mur de la dette » qui consistait à dire il y a des reports de cotisations, il y a le prêt garanti par l‘Etat, attention aux remboursements. Donc nous avons agi très vite puisque sur les reports de cotisations la décision a été prise de permettre de le faire sur 36 mois et sur le prêt garanti par l'Etat nous allons recevoir très vite les banquiers, là il y a un an à un taux garanti, 0,25, ensuite possibilité d'aller jusqu'à cinq ans, moi je pense qu'il faut qu'on regarde pour aller au minimum jusqu'à six ans. Et puis ce qui intéresse beaucoup et ce qui entre guillemets il y a aussi la crainte des entrepreneurs c'est quel taux va être applicable après la première année. Donc cette discussion nous allons l'avoir avec les banques de façon à donner une perspective d'avenir et d'éviter ce « mur de la dette » de façon à étaler et avoir de la sérénité pour l'avenir pour tous ceux qui ont emprunté.
SEBASTIEN KREBS
Quelle est votre feuille de route, Alain GRISET, pour les prochaines semaines, quels sont les autres secteurs prioritaires selon vous et avec lesquels vous aurez des discussions ?
ALAIN GRISET
Vous savez, tout est prioritaire, naturellement j'ai un secteur extrêmement vaste parce qu'il y a l'artisanat, les professions libérales, le commerce, les PME, donc il y a beaucoup d'entreprises, beaucoup d'organisations, nous allons travailler avec le plan de relance annoncé le 25 août par le Gouvernement. Dans ce plan de relance il y aura des soutiens à des secteurs spécifiques, il y aura surtout la perspective de transformation. Et puis on regardera au fur et à mesure des situations, des évolutions de quelle manière on doit adapter tel ou tel dispositif. Vous l'avez vu, on l'a fait il y a quelques jours avec le prêt garanti par l'Etat saison spécifique pour les entreprises de tourisme, de restauration, donc on regardera de quelle manière toujours être à l'écoute, disponible sur le terrain et réactif surtout, l'Etat doit être là comme un Etat qui accompagne, qui est sensible aux préoccupations des Français, des entrepreneurs, en tout cas c'set la mission qui est la mienne.
SEBASTIEN KREBS
Merci Alain GRISET, merci pour vos précisions ce matin.
ALAIN GRISET
Merci à vous, bonne journée.
SEBASTIEN KREBS
Bonne journée à vous, ministre délégué en charge des Petites et Moyennes Entreprises, merci d'être venu sur Europe 1.
source : Service d'information du Gouvernement, le 13 août 2020