Texte intégral
LEA SALAME
Bonjour à vous, Marlène SCHIAPPA !
MARLENE SCHIAPPA
Bonjour.
LEA SALAME
Merci d'être avec nous ce matin.
MARLENE SCHIAPPA
Merci à vous.
LEA SALAME
On va parler de vos nouvelles fonctions au ministère de l'Intérieur comme chargée de la Citoyenneté. Vous allez nous expliquer le projet de loi que vous préparez pour lutter contre les séparatismes. Mais d'abord, je ne peux pas commencer sans vous parler des violences faites aux femmes, tant vous avez incarné médiatiquement cette cause depuis l'arrivée au pouvoir d'Emmanuel MACRON. Alors, voilà, vous l'avez nommée grande cause nationale, vous avez organisé un Grenelle il y a un an, on n'a jamais autant parlé des violences faites aux femmes que ces derniers mois, ces dernières années, que voit-on, quel résultat, que 146 femmes ont été tuées en 2019 par leur conjoint ou leur compagnon, soit 25 de plus que l'année précédente, 25 de plus que l'année précédente, quand vous voyez ce chiffre en augmentation, Marlène SCHIAPPA, vous vous dites quoi, j'ai échoué ?
MARLENE SCHIAPPA
Plusieurs choses, d'abord, pour… d'abord, évidemment, chaque féminicide est un féminicide de trop, parce que, parfois, on lance des chiffres, mais même s'il y avait 10 femmes, ce serait 10 femmes de trop, ensuite, sur les chiffres, je crois qu'il convient d'être précis, il y a effectivement plus de féminicides dans 2019 qu'en 2018, mais en 2018, il y avait une baisse importante, et en fait, quand on regarde le nombre de féminicides sur les 15 dernières années, on voit que c'est toujours à 20, 30 féminicides près, si je peux le dire de cette manière grossièrement comptable, c'est toujours le même chiffre, et donc ce même chiffre n'a pas baissé effectivement en 2019, je rappelle que le Grenelle des violences conjugales, nous l'avons organisé de septembre à novembre 2019, donc moi, je veux bien toutes les interprétations, j'ai entendu les unes et les autres qui voulaient dire que c'était l'échec du Grenelle des violences conjugales, là, on a, justement, au contraire, l'augmentation qui nous a amené à créer le Grenelle des violences conjugales, fin 2019…
LEA SALAME
Donc vous pensez que ça va baisser, ce chiffre va baisser en 2020, en 2021 ?
MARLENE SCHIAPPA
Je souhaite que ça baisse, je vais faire tout ce qui est en mon pouvoir au ministère de l'intérieur, mon successeur le fera aussi, le ministre de la Justice, Eric DUPOND-MORETTI, est aussi très mobilisé, mais simplement, rappeler que le Grenelle de violences conjugales, il a eu lieu fin 2019, il y a eu des lois votées fin 2019 et mi-2020 et qui sont en ce moment promulguées, par exemple, les bracelets…
LEA SALAME
Alors justement, les bracelets…
LEA SALAME
Alors les bracelets, vous y allez toute seule, mais le service Web d'Inter publie ce matin le témoignage de 5 victimes de violences conjugales qui réclament toutes la mise en place de ce bracelet anti-rapprochement, il doit arriver en septembre, vous l'avez dit, c'est bien ça, en septembre, soit un an, un an après le vote de cette proposition de loi, Aurélien PRADIE, le député, auteur de cette proposition, vous dit : ça fait un an que notre pays est infoutu de mettre en place le bracelet, alors que les Espagnols l'ont fait en 2 mois, qu'est-ce qui pèche, pourquoi ça prend tellement de temps ?
MARLENE SCHIAPPA
D'abord, l'Espagne, effectivement, est un modèle, et on s'est beaucoup inspiré de l'Espagne pour les 150 mesures qui sont issues du Grenelle des violences conjugales, ensuite, sur la question des bracelets, c'est une annonce d'Edouard PHILIPPE en septembre 2019, donc il y a effectivement un an, cela a été transformé par une loi, la loi est passée l'Assemblée nationale, elle passe au Sénat, il y a une deuxième lecture, une commission mixte paritaire, et ensuite, il y a un appel d'offres, et ça, Nicole BELLOUBET a lancé l'appel d'offres, a dégagé l'argent nécessaire, il y a un marché public, il y a 2, 3 règles, en fait, administrative, dès lors qu'on sort de l'argent, ces bracelets, on ne va pas les acheter au CARREFOUR du coin, il y a un marché public nécessaire, un système à mettre en place, il y a un avis du Conseil d'Etat…
LEA SALAME
Et donc c'est prêt, là, demain, en septembre, on est en septembre, là ?
MARLENE SCHIAPPA
Ça relève d'Eric DUPONT-MORETTI, je ne veux pas m'engager à sa place, mais oui, en tout cas, à la rentrée, l'idée, c'est que ce soit prêt, mais nous avons simplement dû respecter la loi, si nous n'avions pas fait un marché public ou si nous étions passés de l'avis du Conseil d'Etat, ça nous aurait été reproché, et d'aucuns auraient pu attaquer le gouvernement sur ce sujet, nous voulons faire les choses vite, mais sérieusement, et de manière solide justement pour que ces bracelets qui soient mis en oeuvre, ils ne soient pas contestables.
LEA SALAME
Dernière question sur ce sujet, un rapport sénatorial, rédigé par un sénateur de LR et un sénateur communiste, critique très sévèrement votre action dans la lutte contre les violences faites aux femmes, vous reprochant en clair d'être plus dans la com' que dans les résultats, d'annoncer toute une série de mesures qui existaient déjà, et surtout, de faire un tour de passe-passe budgétaire en annonçant un milliard d'euros pour l'égalité hommes/femmes, alors qu'en fait, 834 millions sur ce milliard était destinés à des projets à l'étranger et pas à la lutte contre les violences faites aux femmes, qu'est-ce que vous répondez ?
MARLENE SCHIAPPA
Alors je vais essayer d'être rapide, mais il y a beaucoup de choses, d'abord, sur la communication, ce n'est pas fromage ou dessert, on peut travailler et communiquer, les 150 mesures du Grenelle des violences conjugales, elles ne sont pas tombées du ciel, c'est le fruit d'un travail collectif que j'ai animé jour et nuit, cordonné à l'époque par Edouard PHILIPPE, et qui seront mises en oeuvre par mes successeurs sous l'autorité de Jean CASTEX. Ensuite, sur les questions de budget, ce n'est pas une découverte, je l'ai annoncé moi-même, et là, encore, ça ne se soustrait pas, ça s'additionne, moi, je suis très fière, de quoi on parle pour le budget international, on parle de l'engagement de Jean-Yves LE DRIAN et du président de la République de faire de l'égalité femmes/hommes une grande cause mondiale, cet argent, moi, je vais vous dire à quoi il sert, il sert à financer les ONG féministes dans des pays du monde où elles risquent leur vie pour leur engagement, et il sert par exemple à financer le fonds Mukwege du nom de Denis MUKWEGE, prix Nobel de la Paix, connu sous le nom de l'homme qui répare les femmes ; c'est l'honneur de la France que de mettre de l'argent à l'étranger pour soutenir les femmes partout dans le monde ; on l'assume, et ce n'est pas du tout une découverte, ce rapport fait comme si, oh, scandale, mon Dieu, il y a plein d'argent à l'étranger, ce n'est pas une découverte je l'ai annoncé le 19 octobre 2019…
LEA SALAME
Non, ils disent que l'enveloppe consacrée aux violences faites… pour lutter contre les violences faites aux femmes n'a pas augmenté. Elle est de 360 millions…
MARLENE SCHIAPPA
Ce n'est pas vrai…
LEA SALAME
Et elle n'a pas augmenté part rapport à l'année précédente, c'est ce qu'ils disent.
MARLENE SCHIAPPA
Ce n'est pas vrai, il y a plus de 150% de budget sur les droits des femmes entre 2017 et 2020, et si on parle de 2012, il a été multiplié par 5, donc c'est un budget en constante augmentation, si ce qu'on veut dire, c'est qu'il n'est pas suffisant, il n'est jamais suffisant, il a augmenté de manière exponentielle, et il continuera à augmenter
LEA SALAME
Alors, aujourd'hui vous avez changé de portefeuille, vous avez été nommée ministre déléguée auprès du ministre de l'Intérieur, chargée de la Citoyenneté, terme flou s'il en est, vous faites quoi précisément, Marlène SCHIAPPA ?
MARLENE SCHIAPPA
Alors, la citoyenneté, moi, je ne trouve pas que ce soit un terme flou, mais c'est très intéressant que vous le disiez comme ça, parce que justement, la citoyenneté, je crois que dans les dernières années, elle s'est incarnée principalement en négatif, c'est-à-dire par ce qu'elle n'est pas, ce qu'on pourrait appeler des atteintes à la citoyenneté, le sexisme, on en parlait à l'instant, la délinquance, le racisme, l'antisémitisme, etc, donc moi, je veux défendre et promouvoir la citoyenneté et défendre et promouvoir les valeurs de la République, notamment, par exemple, la laïcité, qui est un sujet important que je veux remettre sur le devant de la scène.
LEA SALAME
Alors justement, vous préparez un projet de loi contre le séparatisme, je vais vous en parler dans un instant, il faut stopper l'ensauvagement d'une partie de la société a dit Gérald DARMANIN, vous reprenez ses mots ?
MARLENE SCHIAPPA
Moi, j'entends qu'il y a un débat de mots entre ensauvagement, généralisation ou banalisation de la violence, je crois que c'est le rôle du ministre de l'Intérieur d'avoir des mots forts et d'être offensif, s'il y a bien une personne en France dont on attend qu'elle regarde la situation avec lucidité et qu'elle soit combative, c'est le ministre de l'Intérieur, donc je crois qu'il a tout à fait raison de l'utiliser et ça ne me dérangerait pas de l'utiliser non plus.
MARLENE SCHIAPPA
Alors il y a les mots forts, ça vous dérange pas de l'utiliser, il y a les mots forts et il y a les actes, et justement, la droite attaque avec virulence le gouvernement sur la sécurité, la sécurité restera l'immense faillite du quinquennat a dit Xavier BERTRAND, c'est le trou noir du mandat de MACRON a dit Bruno RETAILLEAU, même Nicolas SARKOZY déplore une vraie crise de l'autorité, reconnaissez-vous qu'il y a, là, un angle mort ?
MARLENE SCHIAPPA
Je ne crois pas qu'il y ait un angle mort, puisque justement, on voit que le récent, je ne peux plus dire nouveau maintenant, mais récent ministre de l'Intérieur, Gérald DARMANIN, est extrêmement actif, et tout le monde lui reconnaît cela, et il est justement sur le terrain pour faire en sorte que les paroles et les actions se concrétisent ; on met davantage de moyens sur la sécurité ; qui est clairement une priorité de la rentrée ; le président de la République et le Premier ministre l'ont dit, d'ailleurs, il sera un des points principaux, si ce n'est le point principal, du séminaire gouvernemental du 9, donc notre volonté, c'est d'avoir des résultats, et pour cela, on passe par davantage de moyens, c'est un milliard en plus par exemple, ce sont davantage de recrutements et c'est 2.300 véhicules neufs pour les commissariats et gendarmeries, ça peut paraître anecdotique, mais quand vous êtes policier ou gendarme et que vous avez une voiture qui ne démarre pas, c'est problématique, ça, Gérald DARMANIN y remédie…
LEA SALAME
Vous allez donc déposer d'ici la fin de l'année un projet de loi contre le séparatisme, c'est quand, ça, c'était le serpent de mer d'Emmanuel MACRON, il est annoncé depuis 3 ans, là, c'est vraiment septembre, vous allez le déposer ?
MARLENE SCHIAPPA
D'ici la fin de l'année, donc, là, on est en train, avec Gérald DARMANIN, de terminer les discussions autour de ce projet de loi, qui est un projet de loi complexe, parce qu'on est sur une ligne de crête pour combler des zones grises qui actuellement n'existent pas juridiquement, mais qui nous permettraient d'aller plus loin, il y a déjà eu un travail qui a été engagé depuis 3 ans avec plus de 240 lieux qui ont été faits fermer par les services de l'Etat pour cause de séparatisme, mais on veut aller plus loin, et notamment remplir ce qu'on appelle cette zone grise juridique qui, actuellement, ne nous permet pas d'aller plus loin, et nous donner davantage de moyens juridiques d'agir.
LEA SALAME
Qui sont les séparatistes, Marlène SCHIAPPA, on connaît le séparatisme corse, basque…
MARLENE SCHIAPPA
Oh, comme vous y allez…
LEA SALAME
Breton…
MARLENE SCHIAPPA
Je ne reprends pas ça à mon compte…
LEA SALAME
C'est ça que vous visez ou c'est autre chose ?
MARLENE SCHIAPPA
J'aime beaucoup votre petite voix, c'est principalement le séparatisme islamiste, ce sont les groupes constitués qui s'organisent violemment contre la République et en marge de la République et qui veulent…
LEA SALAME
Donc c'est une loi contre l'islam politique ce que vous allez faire ?
MARLENE SCHIAPPA
C'est aussi une loi contre l'islam politique, mais pas uniquement, l'idée pour nous, c'est de viser l'ensemble des groupes qui s'organisent en marge de la République, et à partir du moment où ces groupes considèrent que leurs règles internes sont supérieures aux lois de la République et ne respectent pas les valeurs de la République, il y a un problème, et on doit pouvoir le régler, c'est le cas pour l'islamisme, pour l'islam politique, c'est le cas aussi pour les dérives sectaires dont j'ai la responsabilité…
LEA SALAME
Et qui seront dans ce projet de loi…
MARLENE SCHIAPPA
Exactement.
LEA SALAME
Comment avez-vous apprécié le dessin, et le récit, de Valeurs Actuelles, cette semaine, qui représente la députée insoumise Danièle OBONO, en esclave, une chaîne autour du cou ?
MARLENE SCHIAPPA
Je trouve que ce n'est pas correct, c'est un euphémisme, je pense que représenter, mais au-delà des indignations, je développe un peu, parce que je crois qu'on ne peut pas juste se jeter des anathèmes à la face les uns les autres : raciste, non, c'est vous qui est réac, etc… Je pense que représenter une femme noire avec une chaîne autour du cou, historiquement et symboliquement, ça a un sens, ça a un sens qui est violent, et ça a un sens qui est très fort, donc évidemment, je ne suis pas du tout en phase avec le dessin qui a été fait, de surcroît, quand c'est une élue de la République, ce n'est pas pour dire que c'est plus grave parce qu'elle est élue, mais elle représente aussi, elle représente aussi la République.
LEA SALAME
Regrettez-vous qu'Emmanuel MACRON ait donné une interview à Valeurs Actuelles ?
MARLENE SCHIAPPA
Pas du tout, j'ai donné moi-même une interview à Valeurs Actuelles, même peut-être plusieurs, je ne sais plus…
LEA SALAME
Donc il faut encourager et crédibiliser ce journal ?
MARLENE SCHIAPPA
Non, vous savez, quand on répond, ce n'est pas qu'on encourage ou qu'on crédibilise, je pense qu'il faut parler avec tout le monde, et moi, qui suis une fidèle auditrice de France-Inter, j'entends répondre aussi aux questions de Valeurs Actuelles, les gens qui lisent Valeurs Actuelles ont le droit de savoir ce que fait le gouvernement.
LEA SALAME
Marlène SCHIAPPA était notre invitée. Merci et belle journée à vous.
MARLENE SCHIAPPA
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 16 septembre 2020