Interview de M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué chargé des transports, à LCI le 21 septembre 2020, sur les taxes dans le transport aérien, le Tour de France et l'écologie.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Média : La Chaîne Info

Texte intégral

ELIZABETH MARTICHOUX
Bonjour à vous et merci d'être ce matin sur LCI, Jean-Baptiste DJEBBARI.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Bonjour Madame MARTICHOUX.

ELIZABETH MARTICHOUX
Ministre des Transports. Il y a énormément de questions,  "ça tombe comme à Gravelotte" presque, sur le transport et notamment l'aérien. Tiens ! par exemple, est-ce que vous laisseriez AIR FRANCE commercialiser un vol à destination de nulle part, comme la compagnie australienne QANTAS l'a fait, avec un succès fou, ils sont partis de Sydney, ils ont fait des ronds dans l'air pendant 7 heures, ils sont revenus à Sydney. Est-ce que vous, État actionnaire dans AIR FRANCE, vous laisseriez faire ça ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je ne suis pas sûr qu'il y ait le même intérêt en France pour faire des ronds au-dessus d'un territoire qui est quand même bien moins grand que l'Australie, mais ça a montré, ce vol auquel vous faites référence, qu'il y a quand même un appétit, des Australiens en l'occurrence, pour voyager, pour reprendre l'avion, et je crois que c'est aussi une opération, un peu marketing de la part de QANTAS, pour, comment dirais-je, garder leur clientèle, en tout cas essayer de la reconditionner dans le monde du voyage.

ELIZABETH MARTICHOUX
Essayer de se réinventer en effet, et, comme vous le dites, ça traduit un appétit de voyage, mais enfin c'est quand même, pardon, très politiquement incorrect, au moment où il y a un mouvement anti-avions, non, ça ne vous frappe pas ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Oui, à un moment où il y a un mouvement anti-avions, vous avez la réponse d'AIRBUS qui invente l'avion à hydrogène. Le patron d'AIRBUS, Guillaume FAURY, ce matin dans Le Parisien, a expliqué qu'il se donnait 5 ans pour définir la meilleure technologie, il a proposé trois types d'avions à hydrogène, zéro carbone, et je crois que ça c'est la meilleure réponse à cet aviation-bashing, qu'on a observé depuis maintenant plusieurs mois, et qui d'ailleurs, à bien des égards, est assez irrationnel, j'ai écouté Manon AUBRY sur France Inter il y a quelques jours, avant-hier, sur le sujet…

ELIZABETH MARTICHOUX
L'eurodéputée France insoumise.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Absolument, c'est assez consternant d'incompétence sur le sujet.

ELIZABETH MARTICHOUX
Pourquoi ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Eh bien parce que, on accrédite l'idée qu'il n'y a pas de taxes sur l'aérien, ce qui est… effectivement, il y a une exonération du kérosène sur les vols internationaux, mais il y a beaucoup de taxes sur l'aérien. Quand vous prenez un avion…

ELIZABETH MARTICHOUX
L'essence, pour nous, est très taxée, pour nous qui prenons la voiture… et sur l'avion non, c'est vrai que c'est choquant.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Mais quand vous prenez un billet d'avion Paris-Nice, qui coûte en moyenne, chez AIR FRANCE, 90 euros, vous avez 47 euros de taxes et redevances, alors ce n'est pas une taxe sur le carburant, c'est les taxes solidarité, les taxes d'aéroport, vous payez de la TVA, etc., etc., mais il y a beaucoup de taxes. Donc l'idée, qu'on fait prospérer dans le débat public, que l'avion serait un mode de transport complètement détaxé, est totalement fausse, et c'est là-dessus que prospèrent certains thuriféraires de la décroissance, chose, évidemment, que je ne partage pas.

ELIZABETH MARTICHOUX
Alors juste, pour être sûre, je repose ma question, est-ce que vous laisseriez AIR FRANCE faire des vols, comme ça, pour aller nulle part ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Mais vous savez, AIR FRANCE a tellement de difficultés – d'abord, un, ils ne le feraient pas, et deux probablement pas…

ELIZABETH MARTICHOUX
D'accord, donc vous dites ils ne le feraient pas de la même façon…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
…Suffisamment d'enjeux et de défis devant eux pour s'amuser à ne pas faire des ronds dans le ciel.

ELIZABETH MARTICHOUX
Vous parlez de la taxe, parlons tout de suite de l'écotaxe, qui est prévue dans la Convention citoyenne pour le climat, "elle serait catastrophique pour AIR FRANCE" dit son patron, Ben SMITH, ce matin dans les colonnes de l'Opinion. Elle serait catastrophique ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
C'est la réalité. C'est une entreprise aujourd'hui, un groupe, AIR FRANCE-KLM, qui perd de l'argent, qui même a bénéficié de plan massif de soutien, 10 milliards d'euros cumulés avec les Néerlandais, 7 milliards pour la France, 3 milliards pour les Néerlandais, qui "brûle" plusieurs centaines de millions de cash par mois, donc c'est un groupe, effectivement, qui est en grande difficulté financière. Et il me semble que l'ambition collective, et celle-là je la partage, c'est de verdir l'aviation comme on dit, c'est de rendre les avions moins émissifs, moins polluants, et c'est typiquement ce que le gouvernement a choisi de faire en soutenant par exemple la filière hydrogène, qui est une vraie révolution, et à laquelle le patron d'AIRBUS a répondu ce matin, de la plus belle des façons, c'est-à-dire il ne faut pas moins voyager, il ne faut pas mettre des cartes carbone pour que les gens se voient contrôlés dans leurs déplacements, il faut faire en sorte que l'aviation soit moins émissive, moins polluante, et ça c'est une démarche de progrès.

ELIZABETH MARTICHOUX
Donc, à votre avis, dans 5 ans, prenons 5 ans, la demande de voyages par avion sera la même, on sera revenu à un niveau antérieur à la crise ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, je pense que ça va être très difficile, d'abord parce qu'aujourd'hui nous avons environ 40% du trafic, mais que 10% du trafic sur le long-courrier, par exemple au départ de la France vers la Chine, ou les États-Unis, que les voyageurs tardent à revenir, notamment les voyageurs d'affaires, ce qui est vrai, du reste, également dans le monde du ferroviaire, et notamment pour les TGV, donc il y a une incertitude assez majeure sur le retour des clients. Et puis peut-être une façon aussi…

ELIZABETH MARTICHOUX
Non, parce qu'il y en a, par exemple Ben SMITH le dit lui-même, on va retrouver le même volume de vols, vous, vous dites…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Moi je dis que la façon de se déplacer, le tourisme durable, le fait de ne plus vouloir aller dans des clubs à 10 000 kilomètres, qui ressemble aux clubs à 100 kilomètres de chez vous, je pense que c'est un changement de mentalité, de culture, de façon de se déplacer, qui me paraît être durable pour le coup, et donc je pense que l'aviation ne transportera pas tout à fait les mêmes personnes, dans les mêmes conditions, et qu'il y a une incertitude sur la façon dont les gens vont se déplacer, donc je suis lucide, j'essaie d'être clairvoyant sur ce qui…

ELIZABETH MARTICHOUX
Sur le fait qu'il y aura moins de volumes et qu'il va falloir s'adapter.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Sur le fait qu'il y aura peut-être un peu moins de volumes pendant un certain temps, peut-être moins d'opérateurs, parce que la crise elle est extrêmement profonde…

ELIZABETH MARTICHOUX
Oui, il va y avoir des faillites.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Extrêmement profonde pour les opérateurs, pour l'industrie, l'industrie est en recul de 40% environ sur sa production, c'est quand même assez majeur, et donc il y aura probablement aussi une hausse du prix des billets d'avion.

ELIZABETH MARTICHOUX
Mais, dans ce contexte, est-ce que cette écotaxe est envisageable, Monsieur le ministre ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Dans ce contexte il me semble que la moindre des choses c'est de dire quelles sont les conséquences de l'écotaxe, c'est ce que moi j'ai porté au débat, il y aura…

ELIZABETH MARTICHOUX
Je ne comprends pas la réponse. Est-ce que cette écotaxe est envisageable dans le contexte que vous avez décrit ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je vous réponds très concrètement. Nous avons fait une étude pour savoir les conséquences, notamment sociales, de l'écotaxe à 4 milliards telle qu'elle est proposée par la Convention. Les conséquences, notamment sociales, c'est la destruction, à terme, d'environ 120 000 à 150 000 emplois, ce qui paraît quand même un peu baroque dans la situation que nous connaissons. Deuxièmement, il y aura un débat démocratique sur le sujet, puisque vous savez que la Convention citoyenne va continuer, il y a des groupes de travail qui se réunissent, et il y aura un projet de loi, débattu démocratiquement…

ELIZABETH MARTICHOUX
Quand ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Début d'année prochaine a priori, ou fin d'année, en tout cas dans quelques mois.

ELIZABETH MARTICHOUX
2021.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Absolument. Donc, début 2021, au plus tard, il y aura un débat démocratique au Parlement, et puis par ailleurs vous savez que les "conventionnels" comme on les appelle, ont maintenant une parole dans le débat public, et donc il y aura un débat démocratique. Moi je vous dis juste qu'en tant que responsable politique il faut dire toutes les conséquences, et les conséquences en termes d'emploi, dans un moment où la France vit une crise majeure, elles seraient massives si cette taxe était imposée de façon autoritaire.

ELIZABETH MARTICHOUX
Donc vous n'y êtes pas favorable.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Donc je dis qu'elle a des conséquences absolument délétères, vous avez compris à peu près ce que ça veut dire dans ma bouche.

ELIZABETH MARTICHOUX
Vous en avez parlé avec Emmanuel MACRON directement ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Pas de ce sujet-là en particulier.

ELIZABETH MARTICHOUX
Pas de ce sujet. Avec Barbara POMPILI, votre consoeur, collègue au gouvernement, qui est à l'Environnement…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Oui, bien sûr…

ELIZABETH MARTICHOUX
Qu'est-ce qu'ils vont dire les écolos ? Ils vont dire que, une fois de plus, gouverner c'est choisir et que vous choisissez au détriment des intérêts de l'environnement. Ils vont dire que vous êtes lâche, que vous n'avez pas de courage, qu'il faut du volontarisme.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Madame MARTICHOUX, être écolo c'est quoi, c'est de verdir l'aviation, de faire en sorte d'avoir des avions qui ne polluent pas, ou de mettre des taxes de façon un peu aveugle ? Être écolo c'est absolument faire ce que nous faisons sur l'hydrogène, c'est absolument la démarche d'AIRBUS, c'est ça être écolo, ce n'est pas de mettre des taxes pour dire aux gens… parce que ça c'est l'écologie décroissante, c'est l'écologie qui veut contrôler vos mouvements, qui considère que dans un monde idéal les gens sont locaux-local, se déplacent peu, voilà, ce n'est même pas la sobriété, c'est la décroissance, et moi cette frange-là, d'une philosophie politique écologiste décroissante, de même que la frange qui considère que les événements populaires, comme le Tour de France, sont des aberrations écologiques, je ne partage pas ça, je pense que le voyage…

ELIZABETH MARTICHOUX
Ça vous choque même, vous avez fait un tweet, d'ailleurs pour relever la déclaration de l'élu parisien qui à nouveau tapait sur le Tour de France et les cyclistes…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Mais enfin, moi je trouve ça absolument incroyable, je pense que cette personne n'a jamais regardé le Tour de France, qu'il n'a jamais pris un vélo, enfin, je ne sais pas, je trouve ça d'un élitisme et d'un mépris de classe absolument…

ELIZABETH MARTICHOUX
Mépris de classe.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Absolument flamboyant. Je trouve ça… moi je regardais le Tour de France petit, je viens d'une famille assez modeste, je vous garantis que quand j'étais avec mon frère dans le Limousin et qu'on regardait le Tour de France, on voyageait au travers le Tour de France. Je pense que c'est un événement populaire incroyable, y compris pour les personnes modestes, qui découvrent la France…

ELIZABETH MARTICHOUX
Mais, ils sont déconnectés ces élus-là ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je crois qu'ils sont…

ELIZABETH MARTICHOUX
C'est à vous en général qu'on porte ce reproche.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Ils sont un peu aveugles sur ces questions, ils sont sectaires dans leur approche, et moi je pense que les fêtes de Noël c'est important, qu'on peut faire des arbres qui soient vivants, je ne crois pas par contre qu'on puisse construire des maisons en bois en arbres vivants, vous voyez…

ELIZABETH MARTICHOUX
Vous n'êtes pas loin des Amish, attention… et de la lampe à huile.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, mais je pense que ce sont des questions sérieuses, la vision qu'on a du progrès…

ELIZABETH MARTICHOUX
Il faut en parler sérieusement, oui.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Et donc il faut en parler sérieusement…

ELIZABETH MARTICHOUX
Sans caricature.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Et pas en disant vous avez des Français qui sont un peu des beaufs dans leur canapé, qui regardent des gens dopés, enfin c'est une vision aberrante de ce qu'est réellement ce grand événement sportif.

ELIZABETH MARTICHOUX
A propos, Barbara POMPILI prépare, selon le Journal du Dimanche, un projet de loi pour interdire ou encadrer la publicité sur les voitures thermiques et les vols vers la Guadeloupe, au nom du fait que c'est évidemment nuisible à l'environnement. Est-ce qu'elle a raison ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je pense qu'elle a raison de vouloir encadrer la pub, c'est d'ailleurs déjà ce qui est fait, puisque nous avons voté l'année dernière le fait de, à chaque fois qu'il y a une pub pour les voitures, d'avoir des messages d'informations sur, par exemple, les autres moyens disponibles, le covoiturage, donc ça c'est déjà quelque chose qui est en cours. Après, moi je vous ai donné ma position par rapport au monde des transports, en général, et je pense que la démarche de progrès ce n'est pas… d'abord les gens sont intelligents, ils comprennent parfaitement ce qui est polluant et pas polluant, et par ailleurs la vision progressiste de la France, qui est quand même le pays des Lumières, qui a tout inventé, qui a inventé la voiture, qui a inventé l'avion, la vision progressiste c'est d'inventer de nouvelles choses, ce n'est pas toujours de considérer…

ELIZABETH MARTICHOUX
Et pas d'interdire ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Eh bien que c'est une vision qui n'est pas la mienne. Je pense que les voyages, le tourisme, c'est essentiel, le tourisme ce n'est pas…

ELIZABETH MARTICHOUX
D'interdire la pub, pas les voyages…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Oui, non mais bien sûr, mais y compris le tourisme, parce qu'après effectivement, quand vous commencez, les voyages sont dangereux, sont polluants, le tourisme c'est mal, etc., moi je pense que les échanges ça participe, voyez, de la découverte des autres et de la pacification des peuples, donc je pense que philosophiquement c'est extrêmement important d'avoir une vision progressiste, entrer dans un avenir, plus écologiste, mais pas régressive.

ELIZABETH MARTICHOUX
D'accord, mais philosophiquement il y a donc deux lignes au gouvernement.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, je ne crois pas, je crois qu'il y a des débats politiques…

ELIZABETH MARTICHOUX
Ah ben…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, mais la politique c'est le débat. Moi je… on en parlera peut-être un peu, de politique, après, vous savez qu'il y a un hémisphère gauche qui se structure au gouvernement, mais c'est le débat la politique, ce n'est pas vision unique.

ELIZABETH MARTICHOUX
Très rapidement. La fermeture du site HOP ! de Morlaix est-elle irréversible ? AIR FRANCE, c'est un site d'AIR FRANCE.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
C'est la restructuration du réseau domestique d'AIR FRANCE, il y a un site effectivement qui va être fermé, il y a de la reconversion, puisque vous savez que HOP ! ne va plus exploiter un certain nombre d'avions, donc il y aura des propositions de mobilité notamment…

ELIZABETH MARTICHOUX
Voilà, ils faisaient de la maintenance pour un avion qui ne sera plus exploité.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Donc il y a des activités qui vont être préservées, notamment la formation en aéronautique, et puis il y a des activités sur lesquelles on discute avec le groupe AIR FRANCE, en lien avec notamment la ville de Nantes, pour voir ce qui peut être transféré d'un côté ou de l'autre, comment utiliser le télétravail, c'est compliqué, ça se fait au niveau territorial, et c'est négocié.

ELIZABETH MARTICHOUX
Oui, parce que, donc du coup, si je comprends bien, il y aura une partie de reconversion, avec des propositions de mutation, et une partie d'activité qui pourrait rester à Morlaix.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Et probablement une partie, effectivement d'activité, qui pourrait être cédée à un repreneur, notamment sur la formation aéronautique, les simulateurs pour être très clair, moi je souhaite effectivement qu'il y ait le maximum…

ELIZABETH MARTICHOUX
D'accord, donc ce sera fermé, et il y aura une reprise, une reconversion.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
De toute façon ça marche comme ça, quand un site est reconfiguré, vous négociez localement, il y a ce qu'on appelle des contrats de revitalisation, qui permettent aussi aux élus de relancer d'autres activités, voyez, ce n'est pas franc et définitif, c'est un processus négocié avec les partenaires sociaux, et évidemment les élus locaux.

ELIZABETH MARTICHOUX
Mais vous avez rejoint, Jean-Baptiste DJEBBARI, le mouvement de Jean-Yves LE DRIAN, qui est le plus breton, d'ailleurs, des ministres, il a dû vous parler de Morlaix, qui s'appelle "Territoires et progrès." Quand on regarde ce qui se passe à Morlaix, ce qui se passe aussi à Lorient, où il peut y avoir une desserte d'AIR FRANCE qui est supprimée, ce n'est pas "Territoires et progrès", c'est "Territoires et récession."

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, mais là vous faites un raccourci un peu rapide. Les problèmes, en France, il y en a partout, on en a Béthune, qui, me semble-t-il, n'est pas en Bretagne, en ce moment…

ELIZABETH MARTICHOUX
BRIDGESTONE.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Et, malheureusement, dans les prochains mois vous verrez effectivement des entreprises en difficulté partout dans le territoire. Il se trouve qu'effectivement en Bretagne, en ce moment, vous avez un certain nombre de problèmes sectoriels, il y a ce que vous avez dit sur AIR FRANCE, il y a BRITTANY FERRIES, sur lequel nous avons posé un soutien exceptionnel…

ELIZABETH MARTICHOUX
Qui est à la fois breton et normand.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Mais là où je reviens sur la démarche "Territoires de progrès", ce qui moi m'intéresse…

ELIZABETH MARTICHOUX
Le mouvement, la jambe de MACRON on peut dire ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Oui, la jambe gauche, et que pour la première fois, je crois que c'est important, vous avez un mouvement politique, un parti politique, qui fait le bilan critique de la gauche du gouvernement, du "hollandisme" comme on l'appelle, qui pose une analyse lucide sur le présent, et qui propose des idées, et en tout cas d'associer des ministres à réfléchir en vue de 2022. Et moi je pense que le monde, de ce point de vue-là, a profondément changé, sur la République, sur les nouvelles formes de démocratie, sur le rôle des entreprises nationales, sur la concurrence et le droit européen, il y a plein plein de sujets sur lesquels nous pouvons apporter des idées en plus, pas des idées à la place de ce qui a été produit en 2017, mais des idées en plus, et moi cette réflexion, intellectuelle et politique, et donc le fait de commencer par les idées en politique, ça m'intéresse, et c'est la raison pour laquelle j'ai rejoint "Territoires de progrès."

ELIZABETH MARTICHOUX
A propos d'idées, il y a u coup de tonnerre dans la majorité ce matin, avec la démission du numéro 2 du parti la République en marche, Pierre PERSON, il donne une interview au Monde, dans laquelle il passe quand même le parti à la sulfateuse, si vous me permettez : Il n'est pas en mesure d'affronter la nouvelle étape du quinquennat. Organisation trop repliée sur elle-même. Ne tient pas comptes des "Marcheurs." Ne produit plus d'idées nouvelles. Il épingle la gestion du secrétaire général Stanislas GUERINI, enfin tout… désertion ou électrochoc nécessaire ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
D'abord, Pierre PERSON c'est mon ami, et c'est même celui avec qui j'ai commencé l'aventure "En Marche" en 2015, donc vous ne m'entendrez jamais, nulle part, parce que l'amitié c'est important et c'est très largement… de près, très largement le reste, vous ne m'entendrez jamais dire du mal de Pierre PERSON. Moi je comprends ce qu'il dit sur les idées, je viens de parler de l'hémisphère gauche qui va se muscler, on a un hémisphère droit, pour ainsi dire, qui est déjà très structuré dans la majorité…

ELIZABETH MARTICHOUX
Trop ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, mais qui est très bien porté par Gérald DARMANIN, qui fait ça très bien, bon ! Mais on a… voyez, la sécurité ne résume pas toute la philosophie politique, ou toute la politique en France, en 2020. Pierre PERSON il a fait valoir effectivement sa vision du mouvement, je ne doute pas qu'il continuera à contribuer en loyauté au président, il le dit d'ailleurs aussi…

ELIZABETH MARTICHOUX
Mais il a raison quand il fait le diagnostic de ce qui se passe à la République en marche ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Eh bien écoutez, le mouvement la République en marche…

ELIZABETH MARTICHOUX
Est-ce que le parti fonctionne bien ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
C'est un mouvement de soutien à la majorité présidentielle, au président, au gouvernement, et le mouvement fait ça très bien, très sincèrement, après que Pierre ne s'y retrouve pas et qu'il ait envie de contribuer d'une autre façon, et notamment davantage sur le plan des idées, à l'horizon des élections à venir, et notamment 2022, moi je le comprends.

ELIZABETH MARTICHOUX
Attendez, il n'y a pas de problème ? Vous, vous dites, il ne se sent pas bien, il s'en va, bon voilà, il n'y a pas de problème dans le parti ? C'est intéressant d'avoir votre avis.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Moi je vous dis, en politique, il y a beaucoup de gens qui restent à leur place parce que c'est confortable, il est numéro 2 du mouvement, qui est aujourd'hui majoritaire en France, il a 30 ans, il aurait très bien pu choisir d'avoir les pieds au chaud dans son canapé et d'attendre. Il a une démarche, qui est certes radicale, mais qui est, à mon avis qui doit être entendue comme telle. Il a envie de participer davantage, de proposer d'autres choses, et donc moi ce courage politique, pour le coup, de prendre ses responsabilités, qui n'est pas si fréquent en politique, moi je le salue, et je ne veux pas que, avec Pierre, nous nous retrouverons dans les combats à venir, et d'ailleurs il le dit.

ELIZABETH MARTICHOUX
Ah oui, ça ne va pas faire des dégâts ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non.

ELIZABETH MARTICHOUX
Ça ne fait pas des dégâts au passage ? C'est un problème plus personnel qu'un problème structurel, c'est ce que vous dites.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
La politique ce n'est pas le monde des Bisounours, c'est… le travail, la fonction…

ELIZABETH MARTICHOUX
Je ne comprends pas bien ce que vous dites ! C'est un problème personnel, ce n'est pas un problème structurel…

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Ce que je veux dire par là c'est que ce sont des fonctions qui sont dures, qui sont exigeantes, donc on ne doit pas tricher, Pierre n'a pas triché, il n'était pas bien là où il était, il démissionne, il fera autre chose, il reste fidèle et loyal à la majorité présidentielle, il le dit, je ne pense pas qu'on puisse en faire une affaire d'État, si vous voulez…

ELIZABETH MARTICHOUX
D'accord, le parti ne doit pas s'interroger du tout ?

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Mais le parti il s'interroge, il y a même… qui consistera effectivement à voir comment le mouvement va s'organiser à l'aune des…

ELIZABETH MARTICHOUX
Autrement, sans lui, sans le numéro 2. Merci beaucoup d'avoir été ce matin sur le plateau de LCI Jean-Baptiste DJEBBARI.

JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Merci à vous


source : Service d'information du Gouvernement, le 22 septembre 2020